LE SYNDROME FRONTAL I- RAPPEL ANATOMIQUE Le

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LE SYNDROME FRONTAL
I- RAPPEL ANATOMIQUE
Le lobe frontal désigne la partie du cerveau située en avant de la scissure de Rolando
(scissure centrale) et au dessus de la scissure de Sylvius (voir schéma). Il représente le
tiers de la surface des hémisphères cérébraux. Il comporte :
- le gyrus central (circonvolution frontale ascendante) constituant l’aire motrice
primaire (aire 4 de Brodmann)
- le cortex prémoteur ou aire d’association motrice situé en avant du précédent et
comprenant les aires 6, 8, 44, 45 et l’aire motrice supplémentaire
- le cortex préfrontal, en avant du précédent, dont les lésions entraînent les
manifestations désignées sous le terme de syndrome frontal et lui-même divisible en
3 parties :
. une portion dorso-latérale au niveau de la convexité cérébrale
. une portion orbitaire ou ventrale
. une portion basale ou mésiale
La vascularisation est assurée par le système carotidien. L’artère sylvienne vasularise la
face externe, l’artère cérébrale antérieure la face interne.
Les aires prémotrices concernent surtout l’organisation et le contrôle des mouvements
de finesse de la main et des doigts. Le cortex préfrontal représente une zone de haute
intégration du comportement moteur et des autres formes de conduite. Il a des
connexions importantes avec les autres structures corticales ainsi qu’avec les structures
sous corticales notamment le thalamus.
Nous allons décrire les 3 syndromes majeurs du lobe frontal : le syndrome rolandique
ou moteur, le syndrome prémoteur et le syndrome préfrontal appelé aussi syndrome
frontal.
II- LE SYNDROME ROLANDIQUE
A– Symptomatologie motrice paroxystique
L’épilepsie motrice partielle (bravais-jacksonienne) se caractérise par des mouvements
tonico-cloniques controlatéraux à la lésion.
B– Symptomatologie motrice déficitaire
Il s’agit de la classique hémiplégie corticale à prédominance brachio-faciale.
Cette hémiplégie s’associe à des signes sensitifs hémicorporels homolatéraux quand la
lésion déborde sur la circonvolution pariétale ascendante.
III- LE SYNDROME PREMOTEUR
-
Les lésions de l’aire 6 déterminent des troubles de la motricité complexe, ou perte
de la « mélodie cinétique », qui est l’incapacité d’exécuter des actions séquentielles
(par exemple la séquence paume-poing-côté). Elles peuvent aussi entraîner un
1
-
« grasping reflexe » ou réflexe de préhension : la stimulation tactile de la paume de
la main déclenche une flexion pathologique des doigts.
Les lésions de l’aire 8, aire associée au champ oculogyre frontal, provoquent une
déviation du regard
L’aire motrice supplémentaire, représentée par la portion interne de l’aire 6, a un
rôle majeur dans l’initiation du mouvement et de la parole ; une lésion de cette aire
entraîne des troubles du langage (manque du mot, palilalie, mutisme…)
IV- LE SYNDROME FRONTAL
On désigne par ce terme les troubles neurologiques, comportementaux et
neuropsychologiques observés lors des lésions du cortex préfrontal (voir plus haut).
A– Signes neurologiques
Ce sont des signes frustes déterminés essentiellement par la souffrance des aires
prémotrices et motrices (voir plus haut).
B– Personnalité frontale
-
Lors des lésions de la face latérale ou dorsolatérale, on note des changements de
type « dépressif » et akinétique, avec apathie et inertie motrice, humeur triste,
indifférence affective, réduction de la spontanéité verbale, et impossibilité de
programmer l’activité.
-
Lors des lésions de la face orbitaire, on note un comportement puéril, impulsif,
désinhibé, mégalomaniaque, appelé moria frontale. Les patients sont euphoriques,
avec tendance aux calembours et aux jeux de mots. Cet état d’agitation psychomotrice rend les sujets incapables de mener une activité productive. Ces troubles
peuvent s’accompagner d’une boulimie et d’une hypersexualité.
C– Troubles du comportement moteur
1– Les persévérations
Elles se définissent comme la répétition anormale d’un comportement spécifique.
Les persévérations motrices peuvent apparaître lorsqu’on demande au patient de se
laver les mains, de copier un cercle…. Le sujet continuera la même activité, sans être
capable de l’inhiber. L’utilisation de consignes contradictoires met aussi en évidence les
difficultés qu’a le sujet de passer d’une consigne à l’autre.
2– Les comportements d’utilisation et d’imitation
Le comportement d’utilisation désigne le fait que lorsqu’on présente au patient des
objets au contact de sa main ou dans son champ visuel, il s’en saisit et les utilise.
Le comportement d’imitation désigne le fait que le patient imite les gestes de
l’examinateur sans qu’on lui en donne l’ordre.
Ces deux types de comportement sont une expression de la perte de l’autonomie à
l’égard du monde extérieur.
2
D– Troubles de l’attention
La présence de troubles attentionnels entraîne une distractibilité qui nécessite de répéter
plusieurs fois une consigne pour qu’elle soit exécutée par le patient.
Les lésions bilatérales du gyrus cingulaire déterminent une perturbation sévère du
mécanisme primaire de l’attention dont l’expression clinique est le mutisme akinétique.
E– Troubles cognitifs
Les lobes frontaux ont pour rôle de coordonner l’ensemble des fonctions cognitives
(attention, mémoire, langage, perceptions). Ils jouent un rôle essentiel dans les
« fonctions exécutives » (jugement, raisonnement). Ils permettent d’anticiper des
événements, de choisir des solutions pour arriver à un but ou résoudre un problème, de
planifier, et d’évaluer l’effet d’une action. Ils ont aussi un rôle de sélection et de
contrôle du comportement social.
Ces patients présentent des troubles cognitifs importants qui sont décelables seulement
par des tests spécifiques, car les tests d’intelligence générale peuvent être normaux ou
presque.
F– Autres troubles
Il peut exister des troubles des conduites verbales (aspontanéité ou au contraire
logorrhée), des troubles de la mémoire et de l’apprentissage, des troubles du
comportement visuel, ainsi que des confabulations.
V- ETIOLOGIES DES SYNDROMES FRONTAUX
A– Les accidents vasculaires cérébraux (AVC)
Une hémiplégie à prédominance brachio-faciale sera observée en cas de thrombose de
l’artère cérébrale moyenne, qui irrigue la face convexe (partie dorso-latérale) du lobe
frontal.
En cas de thrombose de l’artère cérébrale antérieure, qui vascularise la partie médiane
(interne) du lobe frontal, on observe une hémiplégie à prédominance crurale avec
grasping réflexe et troubles cognitifs.
La rupture d’un anévrysme de l’artère communicante antérieure est responsable d’un
syndrome frontal grave avec perte de l’autonomie.
B– Les traumatismes crâniens
Ils peuvent être responsables de troubles variables en fonction de la localisation. Une
épilepsie post-traumatique est assez fréquente. Un traumatisme de la face basale ou
orbitaire du lobe frontal entraîne des troubles mentaux, une épilepsie, des troubles
visuels et de l’odorat.
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C– Les tumeurs
Elles peuvent être responsables d’un syndrome frontal, qu’il s’agisse de tumeurs extracérébrales comme les méningiomes, ou de tumeurs intra-cérébrales comme les gliomes
(en particulier dans leur localisation fronto-calleuse).
D– Les démences dégénératives
Les démences fronto-temporales sont une étiologie du syndrome frontal, avec comme
chef de file la maladie de Pick (voir chapitre sur les démences).
La maladie d’Alzheimer dans sa forme frontale peut aussi donner un syndrome frontal.
E– Syndromes frontaux secondaires à des lésions des structures souscorticales
Des signes de dysfonctionnement frontal s’observent dans des maladies lésant les
noyaux gris centraux comme la maladie de Parkinson, la chorée de Huntington, la
paralysie supranucléaire progressive, la maladie de Wilson. Il peut s’agir aussi de
lésions de la substance blanche comme dans la sclérose en plaques, dans la maladie de
Binswanger (voir chapitre sur les démences), dans le neurobehcet ou dans la démence
du VIH.
OBJECTIFS
-
Connaître la personnalité frontale
Connaître les troubles du comportement moteur
Préciser les troubles cognitifs
Citer les autres troubles
Connaître les étiologies du syndrome frontal
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LE SYNDROME TEMPORAL
I- RAPPEL ANATOMIQUE
Le lobe temporal est situé en dessous des lobes frontal et pariétal, en avant du lobe
occipital (voir schéma). Il est délimité en haut par la scissure de Sylvius. Il comprend 5
circonvolutions (T1 à T5).
Du point de vue fonctionnel, on peut le diviser comme suit :
- sur la face externe du lobe, on trouve les aires acoustiques primaires (aires 41 et 42
ou gyrus de Heschl) et l’aire acoustique secondaire (aire 22)
- sur la face inféro-latérale du lobe, on trouve les projections visuelles (aires 37, 20 et
21) ; elles assurent une intégration sensorielle polymodale en relation avec les aires
pariétales et occipitales
- dans la portion médio-basale du lobe temporal, le complexe amygdalien et
l’hippocampe constituent un système essentiel pour l’élaboration des expériences
affectives, la motivation, la mémoire
La vascularisation est assurée par les artères sylvienne et cérébrale postérieure.
II- LE SYNDROME TEMPORAL
Les aphasies et les syndromes amnésiques sont exclus de ce cadre (voir cours de
sémiologie).
A- Troubles auditifs
Les voies auditives ipsilatérales représentent un contingent grêle, alors que les voies
controlatérales représentent un contingent volumineux. L’hémisphère gauche est dévolu
au traitement des messages verbaux, l’hémisphère droit au traitement des messages
mélodiques (musique).
Les lésions unilatérales de l’aire auditive primaire ne déterminent pas de surdité. Les
lésions corticales bilatérales des aires primaires sont responsables d’une surdité
corticale ou d’une agnosie auditive.
Chez l’homme, la stimulation élective du gyrus de Heschl détermine des sons non
différenciés (bruits simples). La stimulation du cortex périsylvien déclenche des
hallucinations auditives (tintements, sifflets, bruits de tic-tac…) qui peuvent représenter
des crises épileptiques focales. Au niveau des aires 42 et 22 (aires secondaires), les
hallucinations sont mieux organisées (thèmes musicaux, mots, chansons, sons de
cloche…).
B- Troubles olfactifs
Les lésions de la portion médiale du lobe temporal qui incluent le gyrus hippocampique
peuvent causer des hallucinations olfactives ; il s’agit habituellement de mauvaises
odeurs (cacosmie).
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C- Troubles gustatifs
Les stimulations électives de l’insula par Penfield ont provoqué une sensation de goût
anormal chez des épileptiques. Les hallucinations gustatives sont assez rares en
clinique. Les crises « uncinées » sont constituées d’hallucinations gustatives et d’une
activité oro-alimentaire inconsciente.
D- Troubles de l’équilibration
Les vertiges rotatoires, les impressions angoissantes de chutes, ou au contraire de
lévitation, sont des manifestations fréquentes de l’épilepsie temporale.
E- Troubles de la vision
1– Hémianopsie
Après avoir quitté le corps genouillé externe, les radiations optiques ont un
cheminement dans la profondeur du lobe temporal. Leurs lésions causent une
hémianopsie en quadrant supérieur (homonyme).
2– Hallucinations et illusions visuelles
Les hallucinations visuelles à point de départ temporal sont différentes des
hallucinations à point de départ occipital : images et scènes colorées élaborées ; elles
peuvent être accompagnées par des expériences émotionnelles qui sont d’habitude
déplaisantes. Par ailleurs, elles sont souvent associées aux hallucinations vestibulaires
ou auditives.
Des hallucinations plus complexes, oniriques (« dreamy state » ou état de rêve), ont leur
origine dans les aires temporales, plus particulièrement à droite.
F- Troubles viscéro-végétatifs
Les stimulations de l’hippocampe et de l’amygdale entraînent des phénomènes
végétatifs : modification de la fréquence cardiaque, modification de la respiration,
besoin d’uriner ….
G- L’épilepsie temporale
Les crises d’origine temporale se caractérisent par des troubles paroxystiques dans
plusieurs sphères d’activité psychique :
- sphère intellectuelle et modification de la conscience du vécu : confusion avec ou sans
perte de conscience, impression de « déjà vu » et de « déjà vécu », impression
d’étrangeté et d’état de rêve
- sphère affective : peur, colère, panique, euphorie
- sphère perceptive : illusions et hallucinations sensorielles
- sphère végétative : striction thoracique, épigastrique, malaise abdominal, fuite d’urines
- sphère motrice : automatisme ambulatoire, gestuel et masticatoire, activité de
recherche, fugue, chute brutale
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III- ETIOLOGIES DES SYNDROMES TEMPORAUX
A- L’épilepsie temporale (voir cours sur les épilepsies)
Les étiologies de l’épilepsie temporale sont multiples. La plus fréquente est représentée
par la sclérose hippocampique. D’autres étiologies sont plus rares : traumatiques,
tumorales (astrocytomes, gliomes, gangliogliomes), malformations vasculaires, lésions
dysgénésiques.
B- Autres étiologies des syndromes temporaux
Les AVC, surtout dans le territoire de l’artère cérébrale postérieure, qui vascularise la
partie interne du lobe temporal, peuvent être responsables de troubles de la mémoire.
Les ramollissements de l’artère sylvienne intéressent surtout la face externe du lobe
temporal et entraînent des aphasies de type Wernicke.
Les encéphalites aiguës nécrosantes, en particulier l’encéphalite herpétique, peuvent
être responsables de séquelles graves à type de troubles mnésiques et de troubles du
comportement.
Dans la maladie d’Alzheimer, les troubles mnésiques sont dus à l’atteinte
hippocampique.
OBJECTIFS
-
Décrire les signes du syndrome temporal
Connaître l’épilepsie temporale
Préciser les étiologies
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LE SYNDROME PARIETAL
I- RAPPEL ANATOMIQUE
Sur la face externe du cerveau, le lobe pariétal est délimité en avant par la scissure de
Rolando et en arrière par le sillon pariéto-occipital (voir schéma). La limite inférieure
est constituée par la scissure sylvienne. Sur la face interne du cerveau, le lobe pariétal
comprend surtout le lobule quadrilatère.
Du point de vue anatomo-physiologique, on divise le lobe pariétal en 3 parties :
- les aires primitives (3, 2 ,1) constituant l’aire somato-sensitive (gyrus post-central)
qui reçoit des afférences du 3ème neurone de la voie sensitive en provenance du
thalamus. La destruction de cette région entraîne des troubles sensitifs
élémentaires.
- les aires sensitives secondaires (aires 5, 7 et 43) dont les lésions entraînent des
déficits de l’intégration des perceptions sensitivo-sensorielles (astéréognosie,
asymbolie à la douleur…)
- les aires associatives tertiaires constituées de l’aire 39 (gyrus angulaire ou pli
courbe) et de l’aire 40 (gyrus supra-marginalis) dont les lésions entraînent des
déficits complexes dans plusieurs modalités sensitivo-sensorielles ainsi que des
troubles des fonctions symboliques
La vascularisation est assurée par l’artère sylvienne.
II- LE SYNDROME PARIETAL
A- Troubles sensitifs élémentaires
1– Epilepsie somato-sensitive localisée
Les crises épileptiques d’origine pariétale vont comporter des fourmillements
(paresthésies) et des sensations de décharge électrique. L’irradiation de la crise sensitive
focale vers le cortex moteur va entraîner une crise bravais-jacksonienne motrice.
2– Hémianesthésie pariétale
C’est une hémianesthésie à prédominance facio-brachiale.
B- Troubles de la sensibilité discriminative
Les fonctions fondamentales du cortex pariétal consistent dans la discrimination
correcte de l’intensité et de la localisation des stimuli, dans l’appréciation de la
dimension, de la forme, de la grosseur et de la texture des objets.
1– Extinction sensitive ou inattention sensitive
Au cours d’une stimulation isolée du côté droit ou gauche du corps, le malade est
conscient de l’intensité et de la localisation de cette stimulation. Par contre, lorsque
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cette stimulation est bilatérale et simultanée, le patient ne ressent que la stimulation
intéressant l’hémicorps sain.
2– Astéréognosie
C’est l’incapacité d’identifier un objet par le toucher, sans l’aide de la vue, en l’absence
d’un déficit sensitif ou moteur élémentaire.
3– Syndrome pseudo-thalamique
Ce syndrome décrit par Foix se caractérise par une hyper-sensibilité douloureuse aux
stimulations tactiles et thermiques dans l’hémicorps controlatéral à la lésion, alors que
la sensibilité proprioceptive est respectée.
C- Troubles moteurs
On peut noter des troubles moteurs, comme une ataxie pariétale sous la forme d’une
main instable ataxique, avec troubles de la coordination lors de l’épreuve doigt sur le
nez, les yeux fermés.
D- Troubles du schéma corporel
1- L’hémiasomatognosie
Il s’agit de la perte de la conscience de l’existence de la moitié du corps, paralysé ou
non. Elle peut être non consciente, ou consciente. Dans ce dernier type, le sujet rapporte
spontanément qu’il a perdu la perception de son hémicorps ; ce trouble est généralement
paroxystique, d’origine épileptique ou migraineuse.
2- Le syndrome d’Anton-Babinski
Le signe de base est l’anosognosie de l’hémiplégie. C’est une forme majeure
d’hémiasomatognosie, au cours de laquelle le sujet ne peut être convaincu par
l’examinateur qu’il est hémiplégique. Il croit parfois que son hémicorps appartient à
l’examinateur ou à une autre personne dormant dans son lit.
Il s’agit toujours de lésions de l’hémisphère droit, l’hémiplégie et l’anosognosie
s’accompagnant d’une hémihypoesthésie.
3- Syndrome de Gertsmann
Ce syndrome se caractérise par une tétrade symptomatique : agnosie digitale
(impossibilité de reconnaître les différents doigts de la main), agraphie pure, acalculie,
désorientation droite-gauche (incapacité d’identifier le côté droit et le côté gauche). Ce
syndrome est retrouvé dans les atteintes du gyrus angulaire gauche.
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E - Troubles visuo-spatiaux
1- Négligence spatiale unilatérale (NSU)
Elle se caractérise par l’impossibilité de décrire et de s’orienter vers les stimulations du
côté controlatéral à la lésion. Les malades ignorent l’hémi-espace gauche, du fait d’un
trouble de l’attention par atteinte pariétale droite. La NSU peut être accompagnée par le
phénomène d’extinction tactile et auditive.
2- Syndrome de Balint
Il est retrouvé dans les atteintes pariétales bilatérales et comporte la triade
symptomatique suivante :
- la paralysie psychique du regard : incapacité du malade à orienter son regard
vers une cible se trouvant dans son champ visuel
- l’ataxie optique : impossibilité pour le patient d’effectuer avec précision une
saisie manuelle sous guidage visuel,
- la simultagnosie : trouble visuel attentionnel où le malade est incapable de
voir deux objets à la fois
F– Apraxies (voir cours de sémiologie)
G- Troubles gustatifs
La représentation du goût se situe au niveau de l’aire 43 au voisinage de l’aire sensitive
secondaire et de l’aire bucco-linguo-pharyngée. Au cours des lésions de l’opercule
rolandique, on peut avoir des hallucinations gustatives, associées à des paresthésies
localisées de la moitié inférieure de la face et de la langue.
IV- ETIOLOGIES DES SYNDROMES PARIETAUX
On retrouve les syndromes vasculaires, en particulier les AVC de l’artère sylvienne,
responsables d’une hémiplégie avec hémianesthésie à prédominance brachio-faciale.
Les processus tumoraux (surtout les tumeurs malignes comme les glioblastomes)
peuvent entraîner un syndrome pariétal, ainsi que les traumatismes crâniens par
contusion du parenchyme cérébral.
Enfin, un syndrome pariétal peut faire partie du tableau de certaines maladies
dégénératives comme la maladie d’Alzheimer et la dégénérescence cortico-basale (cf
chapitre sur les syndromes démentiels).
OBJECTIFS
-
Décrire les signes du syndrome pariétal
Connaître les troubles du schéma corporel
Préciser les troubles visuo-spatiaux
Connaître les étiologies du syndrome pariétal
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LE SYNDROME OCCIPITAL
I- RAPPEL ANATOMIQUE
Le lobe occipital occupe une zone triangulaire à la face postérieure du cerveau (voir
schéma). Il comprend 3 circonvolutions médianes qui sont de haut en bas : le cunéus, le
lobule lingual et le lobule fusiforme, ainsi que 3 circonvolutions occipitales inférolatérales. On dénombre 5 scissures dont seule la scissure calcarine est bien visible à
l’œil nu.
D’après la terminologie de Brodmann :
- l’aire 17 ou aire striée borde de part et d’autre la scissure calcarine (aire visuelle
primaire)
- l’aire 18 inclut la partie inférieure du cunéus, le lobule fusiforme et la surface
externe de O1, O2 et O3
- l’aire 19 correspond au reste du lobe occipital
L’artère cérébrale postérieure, issue du tronc basilaire, vascularise le lobe occipital par
ses 3 branches terminales : la pariéto-occipitale, la calcarine et la temporo-occipitale.
II- LE SYNDROME OCCIPITAL
A- Symptômes et signes sensoriels
1– Le scotome
Il s’agit d’une aire isolée du champ visuel (CV) au sein de laquelle la vision paraît
appauvrie (scotome négatif) ou enrichie (scotome positif).
2– Les illusions et hallucinations visuelles
Une hallucination est une perception anormale paroxystique et transitoire sans objet,
tandis que l’illusion est une perception anormale avec objet mais qui est perçu déformé.
Elles peuvent être secondaires à toute dysfonction cérébrale diffuse et sont
caractéristiques des états de confusion mentale.
On distingue :
- des hallucinations élémentaires : couleur, éclair, lumière, formes géométriques,
souvent animées de mouvements (décharges au niveau des aires 17, 18 et 19)
- des hallucinations figurées simples : associées à une décharge des aires visuelles
associatives droites ou gauches
Les illusions visuelles sont appelées métamorphopsies. Elles peuvent concerner la
forme de l’objet (dysmorphopsie), sa dimension (macropsie et micropsie), sa couleur
(dyschromatopsie), sa position par rapport au sujet.
3– Epilepsie et phénomènes visuels paroxystiques
L’épilepsie occipitale peut se manifester par des illusions et des hallucinations.
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La sémiologie de l’épilepsie occipitale inclut par ailleurs des modifications toniques ou
cloniques de la tête et des yeux, l’existence de fermeture ou de papillotement des
paupières. L’extension de la décharge vers la région temporale et limbique entraîne des
troubles végétatifs, thymiques et des automatismes, alors que l’extension vers la région
pariétale s’accompagne de troubles sensitivo-moteurs.
4– Déficits des champs visuels
La portion centrale du champ visuel est largement représentée au pôle occipital. La
portion périphérique du CV occupe au contraire le cortex occipital antérieur.
Dans le cas de lésions calcarines bilatérales, on peut retrouver différents types de
déficits campimétriques :
- des hémianopsies altitudinales inférieures ou supérieures
- des scotomes centraux
- des scotomes périphériques
B- Manifestations psycho-visuelles
1– Cécité occipitale
La cécité corticale ou cécité occipitale résulte d’un ramollissement strié bilatéral, en
l’absence de troubles visuels périphériques. Le déficit s’installe brutalement, le malade
nie le plus souvent son déficit, ou s’y montre indifférent (anosognosie de la cécité). A
l’examen, le comportement du malade est celui d’un aveugle. Le réflexe photomoteur,
la motricité oculaire et le fond d’œil sont normaux. Le clignement à la menace n’est pas
obtenu.
La cécité occipitale s’associe habituellement à une amnésie sévère et à des
hallucinations visuelles, réalisant le syndrome de Dide et Botcazo.
2– L’agnosie visuelle des objets et des images
Il s’agit d’un trouble de la reconnaissance et de l’identification, par le seul canal visuel,
des objets et des images, en l’absence de trouble visuel élémentaire ou de déficits des
fonctions cognitives et linguistiques.
3– La prosopagnosie
C’est un trouble de la reconnaissance des visages humains, sur entrée visuelle, non
explicable par une détérioration intellectuelle ou un trouble perceptif élémentaire.
4– Achromatopsie, agnosie et anomie des couleurs
Ce sont tous des troubles affectant la reconnaissance des couleurs, depuis les troubles
perceptifs jusqu’au trouble purement linguistique.
5– Alexie agnosique
Appelée encore cécité verbale ou alexie sans agraphie, elle désigne un trouble acquis du
langage écrit, secondaire à une lésion du cortex occipital de l'hémisphère dominant.
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III- ETIOLOGIES DU SYNDROME OCCIPITAL
L’étiologie principale des syndromes occipitaux est représentée par les accidents
vasculaires cérébraux ischémiques ou hémorragiques (territoire de l’artère cérébrale
postérieure).
D’autres étiologies sont possibles comme les traumatismes crâniens, l’intoxication par
le monoxyde de carbone, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, ou encore les affections avec
atteinte prédominante de la substance blanche comme la leucoencéphalopathie
multifocale progressive.
OBJECTIFS :
-
Connaître les symptômes sensoriels
Préciser les signes psycho-visuels
Connaître les étiologies du syndrome occipital
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LES ACCIDENTS VASULAIRES CEREBRAUX ISCHEMIQUES
I-INTRODUCTION :
L'accident vasculaire cérébral (AVC) est défini par l'installation brutale d'un déficit
neurologique focal soudain d'origine vasculaire ischémique ou hémorragique. Les A VC
représentent la troisième cause de mortalité après les affections cardiaques et les cancers, et
la première cause de handicap moteur et intellectuel permanent.
Les accidents ischémiques cérébraux (AIC) représentent 80% à 85% des AVC et le
premier motif d'hospitalisation en neurologie. Ces accidents doivent être considérés
comme une urgence médicale, nécessitant une hospitalisation en milieu neurologique.
Des progrès importants dans la prise en charge ont été réalisés au cours de ces dernières
années, aussi bien sur le plan:
- diagnostique grâce à l'avènement du scanner et surtout de la résonance magnétique
nucléaire, mais également l'amélioration des techniques d'échographie et doppler des
vaisseaux du cou.
- que thérapeutique avec l'utilisation de la thrombolyse, et le développement des unités
spécialisées dans la prise en charge des AVC (Stroke units)
Le traitement reste essentiellement un traitement préventif, basé sur la prise en charge des
facteurs de risque cardiovasculaires. En effet, la prévalence des AVC a diminué ces
dernières années en raison d'une meilleure prise en charge des facteurs de risque, et en
particulier de l'hypertension artérielle.
II- EPIDEMIOLOGIE
A- Fréquence
Responsables de 10 à 12% de l'ensemble des décès après 65 ans dans les pays
industrialisés, les AVC représentent la troisième cause de mortalité après les affections
cardiaques et les cancers. Leur incidence augmente avec l'âge: 10 fois plus fréquents à 65
ans qu'à 45 ans. Ils sont 2 à 3 fois plus fréquents chez l’homme.
L’incidence est évaluée à 145 pour 100000 habitants par an dans les pays occidentaux.
B- Facteurs de risque des AIC
Sont représentés par l’hypertension artérielle, les cardiopathies emboligènes, le diabète, le
tabagisme chronique, l’hypercholestérolémie, l’éthylisme, et la prise de contraceptifs
oraux.
L'association de plusieurs facteurs de risque a, non seulement un effet additif, mais
potentialisateur, nécessitant donc une prise en charge multifactorielle
C- Etiologies
Les étiologies des AIC restent dominés par l'athérosclérose et les cardiopathies
emboligènes. Les cardiopathies valvulaires restent dans notre contexte une des principales
étiologies de l'AIC du sujet jeune (avant 45 ans).
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III- RAPPEL ANATOMIQUE
La vascularisation cérébrale est assurée par deux systèmes vasculaires (figure 1):
-
Carotidien: formé par les deux carotides internes et leurs branches terminales, l'artère
cérébrale moyenne ou sylvienne, l'artère cérébrale antérieure, et l'artère choroïdienne
antérieure. Il assure la vascularisation de plus de 2/3 des hémisphères.
-
Vertébro-basilaire est formé par les artères vertébrales, le tronc basilaire et les artères
cérébrales postérieures
Entre ces deux systèmes s'établissent des anastomoses. Le polygone de Willis représente le
plus important système anastomotique fonctionnel qui permet l'union des circulations
carotidiennes et vertébrales. L'artère communicante antérieure relie les deux artères
cérébrales antérieures. L'artère communicante postérieure relie la carotide interne à l'artère
cérébrale postérieure. Les autres anastomoses sont représentées par les anastomoses extracrâniennes via l'artère ophtalmique, et les anastomoses corticales et leptoméningées (figure
2).
IV- PHYSIOPATHOLOGIE
L'ischémie cérébrale focale résulte d'une réduction de l'apport sanguin à une partie du
cerveau. Elle peut être purement fonctionnelle, c'est à dire entraîner une perturbation du
métabolisme des neurones sans aller jusqu' à leur destruction, comme dans les accidents
ischémiques transitoires, mais plus souvent elle aboutit à une destruction tissulaire.
L'étendue de l'ischémie dépend de l'état des suppléances vasculaires, et en particulier du
polygone de Willis. La zone d'ischémie est formée par une zone centrale de nécrose (mort
cellulaire) et une autre zone autour, où il existe une hypoperfusion, mais où l'activité
cellulaire est toujours respectée. Cette zone est appelée « zone de pénombre ». Elle a une
grande importance en clinique, car elle correspond au tissu qui peut réagir à l'intervention
thérapeutique.
Deux mécanismes physiopathologiques de base sont à l'origine de l'ischémie cérébrale
focale: un phénomène thromboembolique et plus rarement un phénomène
hémodynamique.
A- Phénomène thromboembolique
Le processus embolique est le mécanisme le plus souvent impliqué dans la pathogénie de
l'AIC. Ces embolies proviennent d'un thrombus, soit d'origine cardiaque, en rapport avec
des troubles du rythme, soit d'origine artérielle à partir d'une plaque d'athérome.
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B- Phénomène hémodynamique
Il s'agit d'une diminution de la perfusion cérébrale qui peut survenir soit dans le cadre:
- d'une sténose serrée ou d'une occlusion artérielle entraînant une hypoperfusion focale.
- ou d'une altération de la circulation systémique responsable d'une hypoperfusion globale
(arrêt cardiaque par exemple)
C - On différencie deux types d'AIC : AIC transitoire, AIC constitué
V- SEMIOLOGIE CLINIQUE DE L’ACCIDENT ISCHEMIQUE TRANSITOIRE
(AIT)
L'AIT se définit comme une perte focale de la fonction cérébrale ou visuelle brusque
durant moins de 24 heures et régressant sans séquelles. Il s'agit d'un marqueur de
l'athérosclérose, et signe un haut risque vasculaire général (à la fois cardiaque et cérébral).
Il s'agit d'un signal d'alarme, constituant le meilleur signe avant-coureur d'infarctus
cérébral. Son dépistage est un temps essentiel de la consultation de neurologie, imposant la
pratique d'un bilan étiologique poussé afin de mettre en œuvre le plus rapidement possible
un traitement adapté.
A- Sémiologie des AIT
La sémiologie dépend de la localisation de l'accident au niveau du territoire carotidien ou
vértebro-basilaire.
1-AIT carotidiens
-La cécité monoculaire transitoire: est caractérisée par la perte complète ou partielle de la
vision d'un œil, décrite comme une sensation de voile ou de rideau qui s'abaisse. Il peut
être parfois difficile d'exclure une hémianopsie latérale homonyme si le patient n'a pas
pensé à masquer alternativement un œil puis l'autre.
-L'hémiparésie: peut être d'intensité variable, allant d'une simple assymétrie faciale à un
déficit moteur lourd hémicorporel.
-Les troubles sensitifs unilatéraux
-Les troubles du langage: en cas d'atteinte de l'hémisphère dominant, pouvant aller d'un
simple manque du mot à une suspension totale du langage.
2-AIT vertébro-basilaires
Les AIT vertébro-basilaires sont caractérisés par le polymorphisme de la sémiologie
clinique et l'absence de spécificité de la plupart des symptômes. C'est pourquoi
actuellement ne sont retenus comme AIT vertébro-basilaires que les manifestations
suivantes:
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- Les troubles moteurs d'un ou plusieurs membres, très évocateurs lorsqu'ils changent de
côté d'un accès à l'autre, ils réalisent au maximum une tétraplégie.
- Les troubles sensitifs d'un ou plusieurs membres et/ou la face, aussi très évocateurs
lorsqu'ils changent de côté.
- Les troubles visuels bilatéraux: flou visuel bilatéral, hémianopsie latérale homonyme ou
cécité corticale.
- L'ataxie et les troubles de l'équilibre.
- La combinaison de ces différents symptômes entre eux.
3-AIT lacunaires
Il s'agit de syndromes lacunaires d'évolution transitoire (voir syndromes lacunaires plus
loin).
B- Diagnostic différentiel de l'AIT
- L'épilepsie focale: les crises motrices et sensitives posent peu de problèmes
diagnostiques. L’anamnèse et le contexte clinique ainsi que les données de L'EEG
permettent de faire la différence.
- L’aura migraineuse : l'extension progressive des phénomènes sensoriels dans le temps et
dans l'espace dans l’aura migraineuse, se différencie de l’installation brutale des
symptômes dans les AIT.
- L'hypoglycémie : elle peut être la cause de symptômes focaux, notamment une
hémiplégie. La présence d’une confusion et de sueurs doit attirer l’attention et le diagnostic
peut facilement être posé par une glycémie au doigt.
VI- LES ACCIDENTS ISCHEMIQUES CEREBRAUX CONSTITUES
Ils sont caractérisés par des déficits neurologiques permanents d’installation brutale. Leur
sémiologie dépend également du territoire vasculaire atteint.
A- AIC du territoire carotidien
1-Le syndrome optico-pyramidal
Il est caractéristique d’une sténose de la carotide. Il associe une cécité unilatérale
du même côté que l’atteinte carotidienne et une hémiplégie controlatérale.
2-L'infarctus de l'artère cérébrale moyenne (ACM) ou sylvienne
Il représente 70% des AIC carotidiens, il peut intéresser le tronc de l'ACM ou ses
branches de division. Il se manifeste sur le plan clinique par :
- Une hémiplégie totale ou à prédominance brachiale
- une hémianesthésie.
- une hémianopsie latérale homonyme
- une déviation de la tête et des yeux vers la lésion.
- une aphasie (si atteinte de l'hémisphère dominant)
17
- des troubles du schéma corporel: hémiasomatognosie, anosognosie, négligence de
l'hémi-espace gauche (si atteinte de l'hémisphère mineur)
- des troubles de la vigilance en cas d'infarctus étendu.
3-L'infarctus de l'artère cérébral antérieure (ACA)
Il se caractérise par
- une hémiplégie à prédominance crurale
- des troubles sensitifs de même topographie
- un syndrome frontal : grasping reflexe, troubles de l'humeur à type d'apathie, ou de
moria
- une incontinence urinaire.
B- AIC du territoire vertébro-basilaire
Ils sont caractérisés par une sémiologie très riche dépendant du siège de la lésion: au
niveau du tronc cérébral, du cervelet ou du cortex temporo-occipital.
1- Les infarctus du tronc cérébral
Ils réalisent les classiques syndromes alternes, dont nous n'allons décrire que les
syndromes de Wallemberg et de Weber:
- Syndrome de Wallenberg ou infarctus latéro-bulbaire : est caractérisé par un grand
vertige rotatoire, une atteinte du IX, X et XI (avec troubles de la déglutition et de la parole)
du côté de la lésion, et une hypoesthésie thermoalgique de l'hémicorps opposé à la lésion.
- Syndrome de Weber: avec une paralysie du III du côté de la lésion, et un déficit
sensitivo-moteur hémicorporel controlatéral.
- «Locked in syndrome» ou syndrome de déafférentation : est du à un infarctus
protubérantiel secondaire à une occlusion du tronc basilaire. Il se manifeste par une
tétraplégie flasque, une diplégie facio-glosso-pharyngo-masticatrice et une paralysie
bilatérale de l'horizontalité du regard. Seuls les mouvements de verticalité du regard sont
possibles.
2-Les infarctus du cervelet
Ils se manifestent par des vertiges, des nausées, des vomissements, et un syndrome
cérébelleux. Ils sont généralement d'évolution favorable. Les formes graves se manifestent
par des signes de compression du tronc cérébral, avec troubles de la vigilance, un
engagement amygdalien et une hydrocéphalie obstructive.
3-Les infarctus temporo-occipitaux
Ils sont caractérisés par la prédominance des troubles visuels: hémianopsie latérale
homonyme, et hallucinations visuelles; et des troubles neuropsychologiques à type d'alexie
sans agraphie, une agnosie des objets et des couleurs. En cas d'atteinte bilatérale, le tableau
associe une cécité corticale et un syndrome de Korsakoff.
18
C- Infarctus lacunaires
Il s'agit d'infarctus profonds de petite taille, en rapport avec l'atteinte des petites artères
perforantes. Ils sont la conséquence d'une lipohyalinose due habituellement à
l’hypertension artérielle.
Ils réalisent sur le plan clinique des syndromes neurologiques bien définis caractéristiques
de l’infarctus lacunaire:
- une hémiplégie motrice pure (sans troubles sensitifs ni visuels ni du langage associés),
- un déficit sensitif pur,
- une hémiataxie-hémiparésie (avec du même côté un déficit moteur et un trouble du
mouvement d'allure cérébelleux), ou
- une dysarthrie-main malhabile (associant une dysarthrie à une maladresse d'un membre
supérieur).
VII- EXPLORATlONS PARA-CLINIQUES
Elles sont de deux types: celles à visée diagnostique, qui permettent de confirmer l'AIC et
de déterminer son territoire, et celles à visée étiologique.
A- Le scanner cérébral
Il représente l'examen clé devant toute suspicion d'un AIC. Il permet de confirmer le
diagnostic d'infarctus cérébral, de préciser sa localisation, et d'éliminer les autres
étiologies, en particulier les hémorragies cérébrales.
Il doit être fait en urgence, sans injection de produit de contraste. Il peut être normal durant
les 48 premières heures.
L’aspect caractéristique est celui d’une hypodensité parenchymateuse dans un territoire
artériel. Il peut montrer parfois des signes précoces d’ischémie tels qu’un effacement des
sillons ou du noyau lenticulaire.
B- L'imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM)
Elle a une sensibilité supérieure au scanner, permettant de montrer des anomalies aux
stades très précoces de l'AIC (dans la demi heure) ainsi que les infarctus lacunaires et
lésions ischémiques du tronc cérébral et du cervelet.
L'IRM de diffusion-perfusion constitue un grand progrès dans le diagnostic des AIC, c’est
une analyse fonctionnelle qui permet d'identifier la zone de pénombre, et donc de mieux
cerner les indications thérapeutiques, en particulier de la thrombolyse. L’angio-IRM
permet l’étude des gros axes artériels du cou.
C- Echographie et doppler des vaisseaux du cou, et doppler transcrânien
Il s'agit d'examens non invasifs, qui permettent d'étudier la morphologie de la paroi
artérielle et les vitesses circulatoires des vaisseaux. Le doppler trans-crânien permet l’étude
des vaisseaux intracrâniens, et le retentissement d'une sténose vasculaire extra-crânienne.
Elles représentent un outil précieux pour l'enquête étiologique des AIC, ce qui justifie leur
indication en première intention dans la recherche de leur cause.
19
D- Echographie trans-thoracique et trans-oesophagienne
Le bilan cardiaque doit comporter tout d'abord, une radiographie pulmonaire et un
électrocardiogramme, qui peuvent nous montrer, pour le premier, des anomalies de la
silhouette cardiaque, et pour le deuxième l'existence de troubles du rythme.
Bien que les examens cardiaques de routine permettent un diagnostic dans un grand
nombre de cas, l'échographie est très souvent utilisée pour visualiser la source embolique.
L'échographie trans-thoracique permet une bonne visualisation de la paroi ventriculaire.
L'échographie trans-oesophagienne est un examen plus performant pour explorer
l'oreillette et l'auricule gauches, le septum inter-auriculaire et l'aorte ascendante.
E- Artériographie
Elle n'est pas faite de façon systématique. Elle est surtout indiquée dans les AIC du sujet
jeune, quand les autres explorations restent négatives et pour préciser le degré d’une
sténose carotidienne en cas d’indication opératoire.
F- Examens biologiques
Ils sont fonction de l'orientation étiologique. Mais un bilan minimal est indispensable dans
tous las cas: un ionogramme, une glycémie, un bilan lipidique comprenant le dosage du
cholestérol total, des fractions LDL et HDL, et des triglycérides. Dans les AIC du sujet
jeune (avant 45 ans), un bilan de thrombophilie, immunologique, des sérologies
syphilitiques et VIH de même qu'une analyse du LCR seront pratiqués.
VIII- CONDUITE DIAGNOSTIQUE
A- Interrogatoire
L'interrogatoire doit préciser: l'âge, le sexe, les facteurs de risque en particulier l'HTA, le
diabète, le tabagisme, une cardiopathie connue, la prise de contraception orale…
Il doit rechercher également des signes fonctionnels d'atteinte cardiaque: dyspnée d'effort,
antécédents d'angor…
L'analyse des symptômes neurologiques, en insistant sur leur mode d'installation (brutal en
faveur d'un mécanisme embolique, progressif en faveur d'un mécanisme hémodynarnique)
et sur l'existence de signes accompagnateurs: douleurs cervicales ou hémi-crâniennes,
acouphènes…etc
B- Examen clinique
- L'examen neurologique permet d'apprécier l'état de conscience, de préciser l'importance
et la distribution du déficit neurologique
- L'examen cardio-vasculaire doit comporter en plus de l'auscultation cardiaque,
l'auscultation des carotides à la recherche d'un souffle carotidien, et la palpation de tous les
pouls périphériques.
20
- L'examen général doit rechercher des signes généraux (oedèmes des membres
inférieurs, turgescence des jugulaires, un livédo...) et les complications du décubitus, en
particulier les thromboses veineuses des membres inférieurs et les escarres.
C- Orientations étiologiques
Les orientations diagnostiques seront fonction de l'âge, du contexte clinique et des données
paracliniques. Les étiologies des AIC du sujet âgé sont dominées par l’athérosclérose et la
fibrillation auriculaire. Chez les sujets de moins de 45 ans un bilan étiologique exhaustif
est nécessaire.
IX- ETIOLOGIES
A- L'athérosclérose
Première étiologie des AIC du sujet âgé, l'athérosclérose est une lésion focale de la paroi
artérielle, qui consiste en un épaississement localisé de l'intima formant une plaque. Les
lésions athéromateuses siègent sur les artères de gros et de moyen calibre en des sites
privilégiés que sont les bifurcations artérielles et les coudures (bulbe et siphon carotidien,
origine et terminaison des artères vertébrales).
Parmi les facteurs de risque associés aux AIC de nature athéromateuse, on retient
essentiellement l'hypertension artérielle, le tabac, le diabète et les dyslépidémies.
B- Les causes cardiaques
La fibrillation auriculaire et la deuxième cause d’AIC du sujet âgé après l’athérosclérose
alors que les cardiopathies valvulaires représentent la première cause d'AIC du sujet jeune
dans notre pays.
Les atteintes cardiaques sont classées en deux groupes:
1. un groupe avec risque élevé d'embolies: on retrouve dans ce cadre la fibrillation
auriculaire, le rétrécissement mitral, les prothèses valvulaires, l'infarctus du myocarde, et
les endocardites infectieuses.
2. un groupe avec risque faible ou mal connu: qui comprend le prolapsus de la valve
mitral, le foramen ovale perméable, et l'anévrysme du septum inter-auriculaire.
C- Les dissections des artères cervicales
Elles représentent la première étiologie des AIC du sujet jeune dans les pays occidentaux.
L'artère carotide interne, et à moindre degré, l'artère vertébrale extra-crânienne sont le plus
souvent concernées.
Il s'agit d'un clivage de la paroi artérielle par un hématome, qui va entraîner
progressivement un rétrécissement de la lumière artérielle pouvant aboutir à une occlusion.
(Figure 3)
Il faut distinguer les dissections post-traumatiques qui surviennent au décours immédiat
d'un accident de la voie publique, où le rôle du traumatisme artériel est déterminant, et les
21
dissections spontanées, qui surviennent à la suite d’un traumatisme mineur du rachis
cervical qui passe souvent inaperçu.
La présence de signes locaux ipsilatéraux à la dissection, tels que des cervicalgies, des
céphalées, des acouphènes pulsatiles ou un signe de Claude Bernard Horner doivent attirer
l’attention, car ils sont très évocateurs de ce diagnostic.
Le diagnostic de certitude est basé sur l'échodoppler des vaisseaux du cou, et surtout sur
l'imagerie par résonance magnétique nucléaire (en coupes cervicales axiales) qui permet de
mettre en évidence directement l'hématome de la paroi artérielle.
L’artériographie peut aider au diagnostic, mais montre des images non spécifiques.
Le traitement fait appel aux anticoagulants.
E- Les angéites inflammatoires du SNC
- L'artérite de Horton : affection du sujet âgé, qui peut se compliquer d'une ischémie du
nerf optique avec cécité, et d'un AIC. Son diagnostic est basé sur la biopsie de l'artère
temporale, et son traitement sur la corticothérapie.
- La maladie de Takayashu : affection de la femme jeune, qui atteint les gros vaisseaux
supra- aortiques.
- Le lupus érythémateux disséminé et surtout le syndrome des anticorps antiphospholipides caractérisé par l'association, chez une femme jeune, d'avortements à
répétition, d'AVC ischémiques et d'une thrombopénie.
- L'angéite primitive du SNC est très rare
F- Les causes infectieuses
Sont rares, dominées dans notre pays par l’artérite syphilitique. Les autres étiologies sont
représentées par la tuberculose, le VIH et les méningites bactériennes.
G- Les autres étiologies
- Angéite post-radique
- Dysplasie fibromusculaire
- Hémopathies et troubles de l'hémostase (polyglobulie, drépanocytose, thrombocytémies,
leucémies, homocystinurie)
- Causes toxiques: héroïne++
- Certaines affections familiales: CADASIL (Cerebral Autosomal Dominant Arteriopathy
with Subcortical Infarcts and Leucoencephalopathy) et MELAS (Myopathy,
Encephalopathy, Lactic acidosis and Stroke epidodes).
H- 25% des AIC reste sans cause déterminée malgré une recherche étiologique
exaustive.
22
X- PRISE EN CHARGE DES AIC
On distingue deux étapes: la prise en charge à la phase aiguë, et la prise en charge à long
terme ou prévention secondaire, Le meilleur traitement reste bien sûr le traitement
préventif. C’est la prévention primaire basée sur le traitement des facteurs de risque
vasculaire (HTA, diabète, tabagisme, hypercholestérolémie…)
A- Prise en charge en phase aiguë
1- Les mesures générales
Des complications générales surviennent chez environ la moitié des patients hospitalisés
pour infarctus cérébral. Elles peuvent grever le pronostic vital et aggraver les lésions
ischémiques, d'où la nécessité de leur traitement et leur prévention.
- Le maintien des paramètres hémodynamiques pour assurer une perfusion cérébrale
suffisante en particulier pour la zone de pénombre. Toute élévation de la pression artérielle
(fréquente durant les premiers jours) doit être respectée (< 220/120 mm Hg), afin d'assurer
un débit sanguin cérébral suffisant.
- Le maintien d'une fonction respiratoire efficace et d'une oxygénation adéquate est
indispensable. Il passe par la prévention et le traitement de l'encombrement bronchique et
des troubles de la déglutition.
- La lutte contre les infections et la fièvre: les complications infectieuses,
principalement pulmonaires et urinaires, doivent être traitées rapidement. Toute fièvre doit
faire l'objet d'une enquête étiologique et doit être traitée par des antipyrétiques, car elle
pourrait aggraver les lésions ischémiques.
- Le maintien d'un bon équilibre hydro-électrolytique. Lorsqu'une perfusion est
nécessaire, il faut éviter les solutés glucosés, car ils peuvent avoir un effet délétère sur les
lésions ischémiques, et perfuser plutôt par des solutés sodés isotoniques.
- L'hyperglycémie est fréquente à la phase aiguë et constitue un facteur de pronostic
défavorable. Il faut la contrôler par l'utilisation de l'insuline, mais avec une surveillance
rigoureuse, afin d'éviter toute hypoglycémie, qui peut être aussi néfaste pour les lésions
ischémiques.
- La prévention des thromboses veineuses des membres: repose sur la mobilisation
passive précoce et l'héparinothérapie à doses prophylactiques, dès qu'il existe un déficit
moteur.
- Le monitoring cardiaque: car des complications cardiaques peuvent survenir à la
phase aiguë des AIC (infarctus du myocarde, arythmies ventriculaires et surtout supraventriculaires).
- La kinésithérapie: ces mesures doivent être débutées précocement pour prévenir les
complications du décubitus (encombrement trachéobronchique, thrombose veineuse,
escarres, rétractions tendineuses...) et faciliter la récupération.
- La prévention des hémorragies digestives: une prévention médicamenteuse des
ulcères de stress peut être utilisée en cas d'accident sévère.
Un des grands progrès réalisés dans le domaine des AVC est la création d'unités
hospitalières spécialisées dans la prise en charge des AIC : «unités de soins intensifs
vasculaires» ou «stroke units». L'amélioration du pronostic vital et fonctionnel des patients
23
admis dans ces unités résulte probablement en grande partie d'une meilleure prise en
charge des complications secondaires.
2- Traitements antithrombotiques
- Aspirine :à raison de 300mg/j. Son efficacité est modeste en phase aiguë. Son intérêt
est par contre évident dans la prévention secondaire.
- Les anticoagulants: Le but de ce traitement est de faciliter la lyse du thrombus, et de
limiter l'extension de la thrombose. Son risque essentiel est la possibilité de transformation
hémorragique. L'efficacité de ce traitement reste cependant très controversée. Mais, il est
admis actuellement que les anticoagulants n'ont aucune indication dans les AIC d'origine
athéromateuse, sauf quelques cas particuliers:
* AIT en salves ou répétitifs
* AIC en évolution ou progressif
*Sténose serrée ou occlusion récente de la carotide en attente d'une intervention
chirurgicale.
Par contre, ils restent indiqués dans les infarctus cardioemboliques, et dans les dissections
carotidiennes.
Mais leur utilisation à la phase aiguë de l’AIC doit tenir compte des contre-indications:
*Existence de troubles de la vigilance
*L'infarctus étendu
*HTA sévère, et chez le sujet âgé.
*Les anticoagulants sont contre-indiqués en cas d'AIC lacunaires.
- La thrombolyse : il s’agit d’un grand progrès dans le traitement des AIC, puisqu’il
s’agit d’un traitement physiopathologique qui permet la lyse directe du thrombus.
Plusieurs études ont démontré le bénéfice de l’urokinase, la streptokinase et surtout du
rtPA (recombinant tissue plasminogen activator ) qui reste le produit le plus utilisé.
Mais la thrombolyse nécessite des précautions particulières : elle ne peut être faite que
dans des unités spécialisées, par des neurologues vasculaires, et ces indications restent
limitées aux AIC très précoces (avant la troisième heure).
Le risque essentiel de ce traitement est la transformation hémorragique.
Des contre-indications doivent être respectées telles que l’existence d’un déficit sévère ou
de troubles de la vigilance ; l’existence de signes précoces d’ischémie sur le scanner ;
l’existence d’une hémorragie cérébrale ou méningée ; des ATCD d’un traumatisme
crânien, d’une chirurgie majeure, d’une hémorragie digestive ou d’un infarctus du
myocarde dans les semaines ou mois précédents ; ou d’une HTA> 185 de systolique et à
110 de diastolique.
3- Neuroprotection
Les progrès récents concernant la physiopathologie des désordres ischémiques cellulaires
ont conduit à développer des molécules susceptibles de diminuer les conséquences
cellulaires de l'ischémie (inhibiteurs des canaux calciques, piégeurs de radicaux libres,
24
antioxydants...). Plusieurs molécules sont toujours en cours d'évaluation. Aucune n'a, à ce
jour, fait la preuve de son efficacité.
B- Traitement à long terme = prévention secondaire
- Les antiagrégants plaquettaires ont clairement fait la preuve de leur efficacité avec
une diminution de l'incidence des AIC de 22% et des infarctus du myocarde de 30%.
L'antiagrégant plaquettaire de choix est représenté par l'aspirine à raison de 250 à 300 mg/j.
Les autres sont:
* Ticlopidine (Ticlid*), mais il peut donner une neutropénie sévère.
* Clopidogrèle (Plavix*) est une molécule nouvelle, qui ressemble à la ticlopidine, mais
qui donne moins de risque de neutropénie.
Ces deux molécules doivent être réservées aux échecs et aux contre-indications de
l'aspirine.
- Le traitement chirurgical des sténoses carotidiennes: La technique la plus utilisée est
l'endartériectomie, qui consiste à enlever la plaque d'athérome. Cette chirurgie ne peut
s'envisager qu'en présence d'une équipe spécialisée et entraînée qui a un risque chirurgical
faible. Le bénéfice de la chirurgie carotidienne n'a été démontré de façon évidente que pour
les sténoses carotidiennes symptomatiques supérieures à 70%. Elle n'a aucune indication
dans les sténoses asymptomatiques (sauf quelques cas particuliers)
- La prévention secondaire des embolies d'origine cardiaque (fibrillation
auriculaire, valvulopathie) repose sur le traitement anticoagulant au long cours
(antivitamine K) avec surveillance de l’INR.
C- Prévention primaire
Elle est basée essentiellement sur:
- la prise en charge des facteurs de risque vasculaire: le traitement de l'HTA, du diabète,
des dyslipidémies et des cardiopathies emboligènes, et l'arrêt de l'intoxication tabagique.
- L'utilisation de l'aspirine chez les sujets porteurs de plusieurs facteurs de risque
vasculaire ou chez lesquels a été décrite une localisation athéromateuse asymptomatique
telle qu'une sténose carotidienne.
LES OBJECTIFS
- Préciser les principaux mécanismes physiopathologiques des accidents ischémiques
cérébraux.
- Citer les différents facteurs de risque des accidents ischémiques cérébraux.
- Décrire les manifestations cliniques des AIC transitoires, et préciser leurs principaux
diagnostics différentiels.
- Décrire la clinique des AIC constitués des territoires carotidien et vértebro-basilaire.
25
- Citer les différents examens complémentaires nécessaires au diagnostic positif et
étiologique des AIC, et préciser leur apport.
- Préciser les différentes étiologies des AIC.
- Décrire les différentes étapes de la prise en charge des AIC : en phase aiguë, et à long
terme.
26
LES EPILEPSIES
I- INTRODUCTION
L’épilepsie, définie comme une maladie permanente avec tendance à la répétition des
crises est une maladie:
- pour laquelle les conséquences psychosociales peuvent être plus graves que les
conséquences médicales
- qui reste dans le vécu des patients quelque chose de honteux, dont on ne parle pas,
qu’on ne veut pas nommer.
- qui se heurte chez nous a des préjugés culturels à l’origine de pratiques fréquentes
de maraboutage et de charlatanisme.
Si beaucoup d’épilepsies sont bien contrôlées par le traitement et permettent une vie
quasi normale aux patients, les épilepsies graves représentent au contraire un handicap
majeur pour la vie familiale et socio-professionnelle.
II- DEFINITIONS :
Les épilepsies sont des affections chroniques, d’étiologies diverses, caractérisées par la
répétition de crises épileptiques.
La crise épileptique est l’ensemble des manifestations cliniques de l’hyperactivité
paroxystique d’un groupe de neurones cérébraux.
La crise épileptique peut se manifester par:
– Une modification abrupte de l’état de conscience
– Des phénomènes moteurs et/ou sensitivo-sensoriels inappropriés
– Une altération de la réponse de l’individu à son environnement
La crise épileptique est un symptôme, alors que l’épilepsie est une maladie.
Une crise épileptique unique et les crises accidentelles ne constituent donc pas une
épilepsie maladie, pas plus que la répétition de crises épileptiques au cours d’une
affection neurologique aiguë.
III- EPIDEMIOLOGIE
L’épilepsie est l’affection neurologique invalidante la plus fréquente.
L’incidence dans la population générale est de 20 à 70 / 100.000 habitants par an.
La prévalence est de 4 à 10 / 1000 habitants.
Les taux d’incidence sont plus élevés aux âges extrêmes de la vie (incidence >
100/100.000 habitants).
Environ 50 % des épilepsies débutent avant l’âge de 10 ans.
On considère ainsi :
- qu’une personne sur 20 fera une crise épileptique
- et qu’une personne sur 200 aura une épilepsie maladie
27
IV- PHYSIOPATHOLOGIE
Le foyer épileptique est caractérisé par deux phénomènes :
- des décharges anormales
- et une synchronisation excessive de l’activité de groupes neuronaux
Schématiquement, deux facteurs sont impliqués dans ces phénomènes :
- des facteurs membranaires : il existe des modifications des propriétés membranaires
intrinsèques des neurones, mettant en jeu les canaux ioniques voltage-dépendants
- et des facteurs synaptiques : il y a des modifications des propriétés des réseaux
neuronaux avec un excès d’acides aminés excitateurs (Glutamate), un défaut
d’acides aminés inhibiteurs (GABA) et une réorganisation synaptique par
bourgeonnement des branches axonales
V– ETIOPATHOGENIE
Les causes des épilepsies sont très variées et résultent de la conjonction de facteurs
génétiques et de facteurs acquis.
Sur une base étiopathogénique on distingue :
- les épilepsies idiopathiques dont le facteur étiologique essentiel est représenté
par une prédisposition génétique réelle ou présumée
- les épilepsies symptomatiques qui résultent d’une affection définie (lésion
structurelle, maladie métabolique, etc…)
- les épilepsies probablement symptomatiques (appelées auparavant
cryptogéniques) dont l’étiologie n’est pas clairement démontrée
A – Facteurs génétiques
La prédisposition génétique à faire des crises est représentée par la diminution
constitutionnelle du seuil épileptogène. C’est une caractéristique familiale dont le mode
de transmission est variable.
Les facteurs génétiques interviennent dans environ 40 % des épilepsies et cette
intervention peut se faire selon diverses modalités.
On distingue plusieurs groupes d’épilepsies génétiques :
- les épilepsies associées à des syndromes cliniques avec anomalies
chromosomiques (syndrome du chromosome 20 en anneau)
- les épilepsies entrant dans le cadre de maladies dont l’anomalie génétique est
connue (épilepsies myocloniques juvéniles, phacomatoses, …)
- et les épilepsies idiopathiques variées d’hérédité polygénique
B – Facteurs acquis
Toute agression cérébrale peut contribuer au développement d’une épilepsie. Elle peut
être directe, micro ou macroscopique, ou indirecte par l’intermédiaire d’un trouble
systémique.
1 – Facteurs périnataux
Ils sont très variés : accidents vasculaires cérébraux, infections du système nerveux
central, intoxications médicamenteuses materno-fœtales, encéphalopathies ischémiques
28
et hypoxiques (souffrances néonatales), contusions cérébrales, troubles métaboliques,
etc…
2 – Anomalies du développement cortical
Elles constituent une cause importante d’épilepsie pharmacorésistante. Plusieurs formes
anatomiques sont décrites: hétérotopies, agyrie, pachygyrie, polymicrogyrie,
lissencéphalie, dysplasie corticale focale, etc…
3 – Lésions cicatricielles
Elles sont dominées par la sclérose hippocampique (SH), substratum neuropathologique
essentiel du syndrome de la face mésiale temporale, dont l’épilepsie est
pharmacorésistante.
La SH traduit une déperdition neuronale avec gliose des structures hippocampiques.
Elle se voit fréquemment chez les sujets qui ont eu des convulsions fébriles au cours de
la petite enfance. La SH peut désormais être directement objectivée par l’IRM cérébrale.
4 – Maladies infectieuses
Une épilepsie peut être secondaire à une ménigoencéphalite infectieuse (tuberculose,
syphilis) ou à un abcès cérébral…etc
Certaines infections avec convulsions dans l’enfance peuvent déterminer des lésions
spécifiques, telles qu’une sclérose hippocampique ou un syndrome hémiconvulsionhémiplégie-épilepsie (HHE). Le syndrome HHE comporte la survenue d’une
hémiplégie compliquée d’une épilepsie séquellaire, faisant suite à un état de mal
convulsif unilatéral fébrile.
5 – Tumeurs cérébrales
Rares chez l’enfant et l’adolescent, les épilepsies tumorales rendent compte de 10 à
15% des épilepsies de l’adulte. Des crises épileptiques émaillent l’évolution des
tumeurs cérébrales supratentorielles dans 20 à 70 % des cas.
6 – Traumatismes crâniens (TC)
Le critère essentiel qui détermine l’apparition d’une épilepsie après un traumatisme
crânien est représenté par la sévérité du traumatisme causal, l’existence d’un coma de
plusieurs jours, de lésions parenchymateuses et d’embarrures .
L’épilepsie post-traumatique est rare, puisque deux tiers des patients qui ont une plaie
crânio-cérébrale ne deviendront pas épileptiques.
Dans environ 70 % des cas, l’épilepsie s’installe moins de deux ans après le
traumatisme crânien.
7 – Maladies cérébro-vasculaires
Les cicatrices corticales séquellaires des accidents vasculaires cérébraux constituent une
des étiologies les plus fréquentes des épilepsies du sujet âgé.
Par ailleurs, une malformation vasculaire cérébrale peut être révélée par des crises
épileptiques.
29
VI – LES CRISES EPILEPTIQUES
A– Classification
En fonction de la topographie et du type de neurones participant à la décharge, de
multiples formes de crises épileptiques sont décrites : partielles ou généralisées,
certaines crises restent néanmoins inclassables.
La classification internationale des crises épileptiques (1981) distingue, sur la
concordance des critères cliniques et EEG, trois groupes principaux : les crises
généralisées, les crises partielles et les crises inclassables (voir cours de sémiologie).
1 –Les crises généralisées
La décharge paroxystique est d’emblée propagée au cortex des 2 hémisphères. On
distingue selon la sémiologie critique:
- les crises tonico-cloniques (crises grand mal)
- les absences (typiques et atypiques)
- les crises myocloniques
- les crises cloniques
- les crises toniques
- les crises atoniques
2 – Les crises partielles
La décharge paroxystique intéresse initialement un secteur limité des structures
corticales appelé zone épileptogène. On distingue selon la sémiologie critique :
- les crises partielles simples (conscience intacte)
- avec signes moteurs
- avec signes somatosensitifs ou sensoriels
- avec signes végétatifs
- avec signes psychiques
- les crises partielles complexes (altération de la conscience)
- les crises partielles secondairement généralisées
Les crises partielles sont plus fréquentes que les crises généralisées, elles se rencontrent
dans 60% des cas lors des études d’incidence et de prévalence.
3 – Les crises non classées (crises au cours du sommeil et crises du nouveauné)
B– Diagnostic positif
1- Circonstances du diagnostic
- Trois situations pratiques très différentes orientent la démarche clinique :
la crise survient chez un épileptique connu
la crise est contemporaine d’une agression cérébrale aiguë (infection, TC, AVC,
hémorragie,…)
une première crise
30
- La stratégie de réalisation des examens complémentaires et les incidences
thérapeutiques sont particulières à chacune des 3 situations
2- Bilan clinique
Il repose sur :
- L’interrogatoire rétrospectif du patient et des témoins, qui doit préciser les
circonstances exactes de survenue, le caractère brutal du début, les premiers symptômes
et la description détaillée du déroulement de la crise.
- La recherche de facteurs étiologiques :
Génétiques : antécédents familiaux de crises
Antécédent de lésion cérébrale acquise : TC grave, méningo-encéphalite,
antécédents obstétricaux,…
- Circonstances déclenchantes : toxiques, fièvre, dette de sommeil…
- L’examen neurologique apprécie l’existence d’une confusion, d’un déficit postcritique régressif (paralysie de Todd) moteur, sensitif ou sensoriel (intérêt localisateur)
- EEG : anomalies critiques ou inter-critiques généralisées ou partielles
C– Diagnostic différentiel
Le diagnostic de crise épileptique est souvent porté par excès, et d’autres perturbations
paroxystiques du fonctionnement cérébral doivent être systématiquement évoquées,
dominées par les causes hémodynamiques et comportementales :
- lipothymies et syncopes
- troubles comportementaux : crises pseudo-épileptiques (hystériques), attaque de
panique, simulation.
- hypoglycémie
- accidents ischémiques transitoires
- ictus amnésiques
- migraine avec aura
- parasomnies
- mouvements anormaux
VII – EXAMENS PARACLINIQUES
Diverses explorations sont nécessaires dans le bilan étiologique d’une épilepsie.
A – L’électroencéphalogramme (EEG)
L’EEG ou enregistrement des potentiels cérébraux recueillis sur le scalp, demeure un
examen irremplaçable dans l’exploration des épilepsies.
Différentes modalités peuvent être pratiquées en fonction des indications :
- EEG de veille et de sommeil
- Enregistrement ambulatoire de l’EEG pendant 24 à 48 heures
- Polygraphie avec enregistrement d’autres paramètres : musculaires, oculaires,
cardio-respiratoires
- Enregistrement vidéo couplé à l’enregistrement EEG (vidéo-EEG)
L’enregistrement vidéo-EEG permet de documenter au mieux les crises épileptiques.
Les manifestations critiques sont précisément corrélées aux événements EEG critiques.
31
Il est surtout utilisé dans le bilan préchirurgical des épilepsies pharmaco-résistantes et
pour le diagnostic des crises morphéiques (au cours du sommeil).
L’EEG permet de mettre en évidence des anomalies paroxystiques critiques ou
intercritiques, généralisées ou partielles à type de pointe, polypointe, pointe–onde rapide
à 3 Hz, pointe-onde lente à 2 Hz, polypointes-onde, pointe lente (figure 1)
NB : bien que les données EEG soient d’importance capitale dans le diagnostic des
crises épileptiques, en aucun cas le diagnostic ne sera porté sur les seules données
neurophysiologiques (EEG) : il n’y a pas d’épilepsie sans crise clinique.
B– Les explorations morphologiques :
1– Tomodensitométrie (TDM) encéphalique
Chez les patients épileptiques, la TDM est normale ou montre :
- une atrophie cérébrale focale ou une porencéphalie dans 4 à 6 % des cas
- une tumeur ou un infarctus cérébral dans moins de 5 % des cas
- une malformation vasculaire dans moins de 2 % des cas
Mais la TDM n’est pas sensible pour l’exploration des fosses temporales, des petites
lésions atrophiques ou dysplasiques et méconnaît certaines malformations artérioveineuses (cavernomes). C’est pourquoi il est préférable de réaliser d’emblée une IRM
encéphalique.
2 – Imagerie par résonance magnétique (IRM) encéphalique
Initialement réservée à l’exploration préchirurgicale des épilepsies, elle a vu ses
indications s’étendre à l’exploration de l’ensemble des syndromes épileptiques non
idiopathiques. Sa sensibilité avoisine 95 % dans des conditions optimisées d’examen.
C– Les explorations isotopiques
Elles sont utiles dans le bilan préchirurgical des épilepsies partielles. Elles permettent de
mesurer les modifications de l’activité métabolique cérébrale locale pendant les
périodes critiques et intercritiques, aidant ainsi à la délimitation du foyer épileptogène.
1 – Tomographie à émission de positons (TEP)
2 – Tomographie à émission monophotonique (SPECT des anglosaxons : single photon emission computerized tomography)
VIII- CLASSIFICATION DES EPILEPSIES :
Elle est basée sur 2 axes : la sémiologie des crises (épilepsies partielles, épilepsies
généralisées) et l’étiologie de l’épilepsie (épilepsies idiopathiques, épilepsies
symptomatiques, épilepsies cryptogéniques ou probablement symptomatiques)
32
On distingue ainsi :
Les épilepsies et syndromes épileptiques partiels :
- Idiopathiques (âge-dépendants)
- Cryptogéniques
- Symptomatiques
Les épilepsies et syndromes épileptiques généralisés
- Idiopathiques (âge-dépendants)
- Cryptogéniques
- Symptomatiques
A coté de ces deux grands cadres d’épilepsies, il existe :
- des épilepsies et syndromes épileptiques dont le caractère focal ou généralisé n’est pas
déterminé (crises néonatales, épilepsie myoclonique sévère de l’enfant, épilepsie avec
état de mal pendant le sommeil) ;
- des syndromes spéciaux : convulsions fébriles, crises et états de mal isolés.
La démarche diagnostique est ainsi centrée sur la définition du syndrome épileptique
précis qui oriente le choix du traitement et les considérations pronostiques.
Le diagnostic repose sur l’analyse critique:
– Du caractère partiel ou généralisé des crises
– Des données de l’examen clinique et neuropsychologique
– De l’EEG
– Des antécédents personnels et familiaux
– Des examens neuroradiologiques
IX- LES ÉPILEPSIES GÉNÉRALISÉES
Seules les épilepsies généralisées les plus fréquentes seront traitées.
A– Epilepsies généralisées idiopathiques
1– Caractères généraux
-
Le développement intellectuel et l’examen neurologique sont normaux
Les crises sont généralisées sur le plan clinique et électrique
Le début des crises se fait à un âge précis
Le pronostic est généralement favorable
2– Epilepsie absence de l’enfant
-
Elle débute entre l’âge de 2 et 10 ans.
Il existe une forte prédisposition génétique.
Absences typiques, pluriquotidiennes, favorisées par l’hyperpnée : suspension brève
de la conscience pendant 10 à 20 secondes accompagnée d’une fixité du regard et
d’un arrêt de l’activité en cours (« enfant dans la lune »). L’enfant reprend
immédiatement après son activité initiale.
33
-
L’EEG montre des décharges de pointes-ondes à 3Hz, généralisées, bilatérales et
synchrones caractéristiques (figure 2).
Les crises sont contrôlées par le valproate de sodium (Dépakine*) ou l’éthosuximide
(Zarontin*) dans 80 % des cas
Des crises généralisées tonico-cloniques peuvent apparaître à l’adolescence dans
40% des cas
3 – Epilepsie myoclonique juvénile (maladie de Janz)
-
-
Les crises débutent entre 12 et18 ans
Il s’agit principalement de myoclonies en salves (secousses musculaires brèves et
intenses des membres supérieurs responsables de lâchage d’objets), survenant le
matin au réveil, associées à des crises généralisées tonico-cloniques, parfois à des
absences
Plusieurs formes génétiques sont actuellement identifiées (Chromosome 6 …etc)
La Dépakine* est habituellement efficace, par contre la carbamazépine (Tégrétol*)
aggrave souvent les crises.
C’est une épilepsie pharmaco-dépendante nécessitant un traitement au long cours
car il y a un risque de rechutes à l’arrêt du traitement.
4– Epilepsie avec crises généralisées tonico-cloniques du réveil
Elle débute après l’âge de 10 ans. Les crises généralisées tonico-cloniques surviennent
électivement au réveil ou à la fin de la journée et sont favorisées par la dette de sommeil
et la fatigue. Parfois des absences ou des myoclonies peuvent être associées.
B– Epilepsies généralisées cryptogéniques
Elles sont représentées essentiellement par deux encéphalopathies épileptogènes
infantiles.
1– Le syndrome de West
Il débute entre 4 et 7 mois et s’individualise par une triade caractéristique :
- spasmes surtout en flexion, survenant en salves
- arrêt du développement psychomoteur
- hypsarythmie à l’EEG (ondes lentes et pointes-ondes lentes de grande amplitude
distribuées de façon continue sur l’ensemble du scalp) (figure 3)
Le pronostic dépend de l’étiologie et de la réponse au traitement (vigabatrin (Sabril*) et
ACTH) et peut évoluer vers un syndrome de Lennox-Gastaut.
2– Le syndrome de Lennox-Gastaut
Il débute entre 1 et 8 ans et se caractérise par :
- des crises très variées : toniques, atoniques, absences atypiques et états de mal
fréquents.
- un arrêt du développement psychomoteur
- L’existence à l’EEG de pointes ondes lentes bilatérales avec décharges de rythmes
rapides à 10 Hz au cours du sommeil.
- Pronostic réservé : encéphalopathie et épilepsie sévères
34
C– Epilepsies généralisées symptomatiques
1– D’étiologie non spécifique (rares et de mauvais pronostic)
2– D’étiologie spécifique
Ce sont des affections neurologiques dont le symptôme initial ou dominant est
représenté par des crises épileptiques :
- épilepsies myocloniques progressives (maladie de Lafora, maladie d’UnverrichtLundborg,…) ; elles sont caractérisées cliniquement par des myoclonies, des crises
tonico-cloniques, une détérioration intellectuelle progressive et des signes
neurologiques cérébelleux et extrapyramidaux.
- phacomatoses (sclérose tubéreuse de Bourneville, angiomatose encéphalotrigéminée)
X– LES EPILEPSIES PARTIELLES
A– Epilepsies partielles idiopathiques
1– Caractères généraux
-
Le développement psycho-moteur et l’examen neurologique sont normaux
Il y a une évolution spontanée vers la rémission
l’EEG montre une activité de fond normale avec des paroxysmes focalisés
2– Epilepsie partielle bénigne à paroxysmes centro-temporaux (épilepsie à
paroxysmes rolandiques ou EPR)
Elle débute entre 3 et 13 ans. Les crises sont faciales et oropharyngées, survenant
principalement au cours du sommeil où elles peuvent se généraliser. L’EEG montre des
pointes biphasiques ou pointes-ondes de localisation centro-temporale
La prédisposition génétique est importante. La guérison est quasi-constante à l’âge de
16 ans
3 – Epilepsie partielle bénigne de l’enfant à paroxysmes occipitaux
Elle est moins fréquente et moins bénigne que l’EPR. Les crises débutent par des signes
visuels qui peuvent se compléter par des clonies de l’hémicorps ou des automatismes ou
des céphalées d’allure migraineuse. L’EEG intercritique est normal ou montre des
pointes-ondes rythmiques occipitales.
4- Les épilepsies frontales autosomiques dominantes
Les crises ont une sémiologie essentiellement motrice survenant au cours du sommeil.
Les anomalies électriques sont mises en évidence sur les enregistrements EEG du
sommeil. C’est une épilepsie très sensible à la carbamazépine (Tegretol*). Les crises
posent un problème de diagnostic différentiel avec les parasomnies.
35
B– Epilepsies partielles symptomatiques
1 – Epilepsie partielle continue ou syndrome de Kojewnikow (SK)
Elle est caractérisée par des clonies itératives d’un hémicorps ou brachio-faciales et est :
- Soit secondaire à une lésion du cortex rolandique moteur (vasculaire, tumorale,
infectieuse…),
- Soit en rapport avec une encéphalite de Rasmussen : c’est une encéphalite chronique
auto-immune rebelle au traitement médical. L’hémisphérectomie fonctionnelle
stoppe la progression de la maladie au prix de séquelles neurologiques.
2 – Epilepsies lobaires
Selon la localisation anatomique du foyer épileptogène, on distingue :
- Les épilepsies partielles du lobe temporal (les plus fréquentes) :
Les crises sont soit partielles élémentaires (signes végétatifs et/ou psychiques et/ou
sensoriels), soit partielles complexes (pseudo-absence : réaction d’arrêt moteur,
fixité du regard, automatismes oro-alimentaires suivis d’une amnésie de la crise). La
durée des crises est supérieure à 1 minute et il existe souvent une confusion postcritique.
Parmi les étiologies des épilepsies du lobe temporal, le syndrome d’épilepsie mésiotemporale en rapport avec une sclérose hippocampique est à l’origine de la plupart
des épilepsies partielles réfractaires au traitement médical. Ce syndrome est
étroitement associé à l’existence de crises fébriles ou à d’autres agressions pendant
la petite enfance. Son diagnostic a été rendu possible grâce à l’IRM cérébrale et le
traitement est souvent chirurgical.
-
Les épilepsies partielles du lobe frontal
Les crises sont partielles élémentaires ou complexes avec manifestations motrices
prédominantes, souvent pluriquotidiennes. Les crises partielles complexes sont
brèves, sans confusion post-critique. La généralisation secondaire est rapide et
fréquente.
-
Les épilepsies partielles du lobe pariétal
Les crises partielles élémentaires sont à type de paresthésies, engourdissements,
rarement à type de douleurs controlatérales brachiofaciales . Des troubles du
langage se voient en cas de décharges de l’hémisphère majeur, celles de
l’hémisphère mineur entrainent une asomatognosie avec hallucinations visuelles.
-
les épilepsies partielles du lobe occipital
Les crises partielles simples sont marquées par des signes visuels négatifs ou
positifs.
Des signes moteurs à type de déviation tonique des yeux et de la tête, myoclonies
palpébrales et occlusion forcée des yeux peuvent se voir.
36
XI- LES EPILEPSIES DONT L’ORIGINE FOCALE OU GENERALISEE NE
PEUT ETRE AFFIRMEE :
A- Epilepsie myoclonique sévère de la première enfance :
Les crises sont variables : généralisées, partielles, unilatérales.
Les paroxysmes EEG sont focaux et généralisées avec photosensibilité.
Le traitement est difficile, le pronostic est mauvais.
B- Epilepsie avec pointes-ondes continues pendant le sommeil lent ( POCS )
Les crises sont rares et le diagnostic est souvent posé à l’occasion de difficultés
scolaires.
C- Epilepsie aphasie acquise de l’enfant (syndrome de Landau-Kleffner)
Aphasie acquise associée à des crises variables avec troubles du comportement et de la
psychomotricité.
EEG : pointes et pointes-ondes plurifocaux.
XII- LES SYNDROMES SPECIAUX
Ils sont dominés par les convulsions fébriles de l’enfant :
C’est une entité clinique autonome marquée par l’apparition exclusive des phénomènes
épileptiques à l’occasion d’un accès hyperthermique entre l’âge de 6 mois et 5 ans.
Le risque à long terme est le développement d’un foyer épileptique, particulièrement si
les convulsions ont été prolongées (> 10 mn), ont eu un caractère focal et un début avant
1 an ou après 5 ans. Le diagnostic se pose avec une méningite et une encéphalite,
nécessitant le recours à la ponction lombaire au moindre doute. L’administration orale
de Valium en cas de fièvre n’a qu’une valeur préventive modérée.
XIII– TRAITEMENTS
A– Buts du traitement
-
Contrôler les crises avec le moins d’effets indésirables
Le traitement symptomatique de la maladie épileptique ne peut être abordé qu’une
fois réalisé le traitement étiologique éventuel
Le choix du traitement repose sur :
- le diagnostic précis du type de crises et si possible du syndrome épileptique
- une bonne connaissance de la pharmacologie des médicaments antiépileptiques
- la prise en considération du contexte social et psychologique du patient
épileptique
37
B– Moyens
1– Traitement médical
a– Les antiépileptiques majeurs
Quatre molécules classiques sont considérées comme des antiépileptiques majeurs, du
fait de leur large spectre d’activité et de leur large diffusion :
- Le valproate de sodium (Dépakine*)
Indications : Traitement de référence en première ligne de l’épilepsie généralisée
A prescrire en première intention, en particulier pour les absences
Aucune épilepsie n’est aggravée par la Dépakine*.
Posologie : 20 à 40 mg/kg chez l’adulte, 30 à 40 mg/kg chez l’enfant, 1 à 3 prises
par jour.
Effets secondaires : prise de poids, tremblements, aggravation d’un tremblement
essentiel, chutes de cheveux, toxicité hépatique ou hématologique.
-
La Carbamazépine (Tégrétol*)
Indications: Traitement de référence des crises partielles ou secondairement
généralisées
Posologie: 10 à 15 mg/kg chez l’adulte, 15 à 20 mg/kg chez l’enfant, 2 à 3 prises par
jour. Effets secondaires : toxicité hématologique, états de somnolence, ébriété au
début du traitement ou si surdosage, effet inducteur enzymatique.
Elle peut aggraver certaines formes d’épilepsie généralisée: absences petit mal,
épilepsies myocloniques.
-
Le Phénobarbital (Gardenal*)
Il est actif sur toutes les crises à l’exception des absences. Sa demi-vie est très
longue.
Effets secondaires : sédation chez l’adulte, excitation chez l’enfant, algodystrophie,
induction enzymatique
Posologie : 2 à 3 mg/kg/j chez l’adulte, 3 à 4 mg/kg/j chez l’enfant.
-
La Phénytoïne (Di-Hydan*)
Elle est active sur toutes les crises à l’exception des absences.
Inconvénients: pharmacocinétique non linéaire, marge thérapeutique étroite, effets
cosmétologiques, effet inducteur enzymatique, effets délétères sur le cervelet et la
cognition.
Posologie: 3 à 5 mg/kg/j chez l’adulte, 5 à 8 mg/kg/j chez l’enfant.
b – Les nouveaux médicaments antiépileptiques
Utilisés souvent en association avec un autre médicament et sont dans l’ensemble
mieux tolérés que les anciens médicaments mais ils coûtent très chers.
-
Lamotrigine (Lamictal*)
Indications : crise partielle ou généralisée chez l’adulte et l’enfant de plus de 2 ans
soit en monothérapie ou en association.
Posologie:100 à 200 mg/jour en une ou deux prises à atteindre de façon très
progressive.
38
Effets indésirables : allergie cutanée ; syndrome de Lyell ou de Stevens Johnson,
rares mais graves, qui semblent diminués par une posologie très lentement
progressive ; ataxie, sensations vertigineuses, tremblements, nausées
-
Oxcarbazépine (Trileptal*)
Il a moins d’interactions médicamenteuses que la carbamazépine mais expose à un
risque d’hyponatrémie qui justifie une surveillance biologique
-
Vigabatrin (Sabril*)
A cause du risque d’altération du champ visuel, il est utilisé presque exclusivement
dans le traitement du syndrome de West.
-
Gabapentine (Neurontin*)
Pas d’effet inducteur enzymatique
Traitement de l’épilepsie partielle chez la femme sous contraception orale ou chez
un patient sous antivitamine K. Il est utile chez le sujet âgé polymédiqué (absence
d’interactions médicamenteuses).
-
Autres :
Topiramate (Epitomax*)
Fosphénytoïne (Prodilantin*)
Levetiracetam (Keppra*)
D’autres sont en cours de développement
c – Les benzodiazépines
En raison de limitations pharmacologiques à leur utilisation chronique, elles ont des
indications plus restreintes :
- Diazépam (Valium*)
- Clonazépam (Rivotril*, Klonopin*)
- Clobazam (Urbanyl*)
d – Antiépileptiques ayant un spectre d’activité plus étroit :
- Primidone (Mysoline*)
- Ethosuximide (Zarontin*) : traitement des absences
e – Autres médicaments d’appoint (non antiépileptiques)
- les corticoïdes : utilisés dans certaines encéphalopathies épileptogènes (le syndrome
de West)
- les gamma-globulines humaines : utilisées dans certaines encéphalopathies
épileptogènes (le syndrome de Rasmussen)
- l’acétazolamide (Diamox*) : utilisé dans les épilepsies rebelles, et dans les
épilepsies cataméniales
2 – Traitement chirurgical
Le traitement médical permet le contrôle de 70 à 80 % des épilepsies.
La chirurgie de l’épilepsie s’adresse à des patients porteurs :
- d’une épilepsie partielle pharmacorésistante avec une zone épileptogène de
localisation anatomique abordable (résection corticale limitée)
39
-
d’une épilepsie généralisée grave, rebelle au traitement (callosotomie pour limiter
l’extension des crises)
3 – Thérapeutiques non médicamenteuses
a – Diète cétogène
Elle consiste en un régime alimentaire strict et contraignant, apportant une grande
quantité de matières grasses et une faible quantité d’hydrates de carbone, de protéines et
d’eau. Il en résulte une cétose qui exercerait un effet antiépileptique dont le mécanisme
reste inconnu.
Les enfants présentant une épilepsie généralisée symptomatique ou cryptogénique
constitueraient l’indication de choix de la diète cétogène.
.
b – Stimulation vagale chronique intermittente
Elle consiste en la stimulation électrique du vague gauche au moyen d’une électrode
implantée et connectée à un stimulateur sous-cutané de type pace-maker.
Les indications concernent essentiellement les épilepsies partielles pharmacorésistantes
non justiciables d’un traitement chirurgical, ou après échec de celui-ci.
C– Principes du traitement
- Le premier principe du traitement est l’information du malade qui doit être adaptée,
sans cesse renouvelée pour une bonne compréhension et pour assurer une bonne
compliance au traitement.
- Le deuxième principe est la monothérapie en utilisant un seul antiépileptique :
les deux antiépileptiques de première ligne sont le Valproate de Na (Dépakine*)
et la Carbamazépine (Tégrétol*), qui sont efficaces et bien tolérés.
Le phénobarbital (Gardenal*) a des effets sédatifs et cognitifs qui limitent son
usage
La Dépakine* est efficace sur toutes les formes de crises, mais plus
particulièrement sur les absences et les myoclonies
Le Tégrétol* est efficace sur toutes les formes de crises sauf les absences et les
épilepsies myocloniques (où il est contre-indiqué) .
- La dose optimale théorique doit être atteinte progressivement.
- Le traitement est symptomatique et non étiologique, et doit être pris régulièrement.
- Un traitement efficace et bien supporté ne nécessite qu’un contrôle des paramètres
biologiques régulier (par exemple tous les 6 mois) selon la molécule utilisée.
- Le dosage des taux sanguins d’antiépileptiques n’est utile que dans deux
circonstances :
lors d’une récidive des crises pour ajuster la posologie et vérifier la compliance
en cas d’effets indésirables pour réduire la posologie
- L’échec d’un antiépileptique conduit à son remplacement par un autre en
monothérapie, après une période transitoire de chevauchement des 2 molécules pour
éviter un arrêt brutal.
- Des règles d’hygiène de vie doivent toujours être préconisées : Sommeil de qualité et
de quantité suffisantes, absence de prise d’alcool…
- Lorsque le patient a eu une crise unique le traitement n’est pas systématique étant
donné que la probabilité de récidive est < 50%. Les facteurs de risque de récidive sont :
40
une lésion neurologique causale, une anomalie à l’EEG, et une crise nocturne ou
partielle. La récidive survient en règle dans les 6 mois.
- Devant une crise isolée, les gestes à faire sont :
– Protéger du choc
– Mise en position latérale de sécurité jusqu'à la fin de la phase résolutive
– Une injection de Valium n’est pas justifiée
– Ne rien mettre dans la bouche ou entre les dents
– Si une deuxième crise survient, c’est peut être le début d’un état de mal,
et le traitement s’impose
0,5 mg/kg de diazepam (Valium) en intrarectal
10 à 15 mg/kg de fosphénytoïne (Prodilantin) IM
E- Mode de vie des épileptiques :
Surtout pour les jeunes, se pose souvent la question de : que faire et ne pas faire ?
Il faut s’efforcer de mener la vie la plus normale possible.
La conduite automobile est interdite par les textes : mais il faut moduler en fonction du
syndrome épileptique : elle est moralement acceptable chez les épileptiques qui n’ont eu
aucune manifestation critique depuis 2 ans, sous réserve de la poursuite du traitement.
La prudence est de mise pour certains sports (natation, sports nautiques, cyclisme…)
tant que les crises ne sont pas contrôlées.
F- Conseils à une jeune femme épileptique :
- Certains antiépileptiques sont inducteurs enzymatiques et abaissent entre autres le taux
des oestro-progestatifs dans le sang (Phénobarbital, Valproate de sodium,
Carbamazépine) :
Un autre mode de contraception doit être prescrit,
ou bien il faut augmenter les doses.
- La procréation n’est vraiment à déconseiller que dans les formes graves d’épilepsie et
si le conjoint est lui même épileptique.
- Tous les antiépileptiques sont suspects d’être tératogènes. Les malformations sont
essentiellement cardiaques et de la fente palatine. Il existe une association entre le spina
bifida et le valproate de sodium, d’où l’intérêt de la prescription d’acide folique dans les
3 mois précédant la conception, jusqu'à la fermeture du tube neural.
- Si l’épilepsie est stable et bien contrôlée et que la femme a un désir de grossesse, on
peut baisser la posologie du traitement, mais pas l’arrêter car le risque de crise
généralisée pour un fœtus est considéré comme plus grave que le risque malformatif.
- Chez la femme en fin de grossesse et le nouveau né, certains médicaments provoquent
une tendance hémorragique et de la vitamine K doit être utilisée.
- La Lamotrigine semble être un médicament intéressant pendant la grossesse,
n’entraînant pas d’augmentation du risque tératogène.
L’allaitement au sein n’est pas contre-indiqué quelque soit l’anti-épileptique utilisé.
41
XIV – EVOLUTION ET PRONOSTIC
A– Evolution
Il existe 3 sous-groupes différents d’épilepsies :
- Le premier : c’est une maladie bénigne pharmaco-sensible qui guérit sous
traitement.
- Le second : c’est une maladie bénigne mais pharmacodépendante qui nécessite un
traitement au long court.
- Le troisième : c’est une maladie grave pharmaco-résistante.
La bonne connaissance du syndrome épileptique du patient permet de prédire le
pronostic et de guider la prescription du traitement comme la possibilité et le délai de
son arrêt.
B– Facteurs pronostiques
Le pronostic peut être déterminé selon le syndrome épileptique.
Dans les épilepsies partielles idiopathiques :
- la guérison est la règle dans 99 % des cas au cours de l’adolescence
- le traitement doit être arrêté après 16 ans
Dans les épilepsies partielles symptomatiques :
- le pronostic est lié à l’étiologie
- un arrêt du traitement peut être envisagé après deux ans sans crise sous traitement
Dans les épilepsies généralisées idiopathiques :
- le traitement des épilepsies absences de l’enfant, sans crise tonico-clonique associée,
ayant bien répondu au Valproate de Sodium ou à l’Ethosuximide, peut être arrêté 2
ans après la disparition des crises et des paroxysmes EEG
- dans l’épilepsie myoclonique juvénile et l’épilepsie avec crises généralisées tonicocloniques du réveil, le risque de rechute à l’arrêt du traitement est évalué entre 80 et
90 %. Le traitement doit être pris pendant plusieurs années, sinon à vie
- les épilepsies généralisées idiopathiques avec crises tonico-cloniques rares peuvent
faire envisager un arrêt thérapeutique 5 ans après la dernière crise.
Dans les épilepsies généralisées symptomatiques ou cryptogéniques :
- le traitement est difficile à arrêter
- elles sont souvent graves
C- Complications :
La répétition des crises peut provoquer :
– Une mort subite
– Des lésions cérébrales
– Une dégradation progressive sur le plan intellectuel et moteur
– Des états de mal épileptiques +++
42
L’état de mal épileptique (EME) est caractérisé par une crise épileptique qui persiste
suffisamment longtemps (crise prolongée comprise entre 10 et 30 minutes) ou se répète
à des intervalles suffisamment brefs pour créer une condition épileptique fixe et durable.
Schématiquement, on distingue :
- les EME convulsifs :
- EM tonico-clonique généralisé
- EM partiel somato-moteur
Leur diagnostic clinique est facile. Ils mettent en jeu le pronostic vital,
constituant ainsi une urgence thérapeutique pour arrêter les crises et traiter la
cause éventuelle. Il faut : intuber le patient, placer une canule de Guedel et une
oxygénothérapie nasale, contrôler les crises par des médicaments injectés en IV
à doses suffisantes :
Soit Valium 10 mg par IV lente,
Soit Rivotril 1 mg en IV lente ,
Soit Gardénal en IV
Soit Prodilantin, 20 mg/kg chez l’adulte, 15 mg/kg chez l’enfant, d’action
plus lente mais plus prolongée ;
-
les EME non convulsifs ou états d’absence réalisent un syndrome confusionnel
prolongé (avec altération de la conscience) et sont l’apanage du sujet âgé. Le
diagnostic est basé sur l’aspect EEG (pointes-ondes continues) et la réponse rapide
au Valium* intraveineux.
OBJECTIFS
-
Connaître l’étiopathogénie des épilepsies
Connaître la classification des crises épileptiques
Connaître la classification des épilepsies
Savoir décrire les différents types d’épilepsies généralisées
Savoir décrire les différents types d’épilepsies partielles
Préciser les buts du traitement antiépileptique, les moyens thérapeutiques et les
effets secondaires des antiépileptiques
Connaître les principes du traitement et les conseils à donner aux patients
Connaître l’évolution et le pronostic des épilepsies
43
LES SYNDROMES DEMENTIELS
I- INTRODUCTION.
Le syndrome démentiel (SD) est un état d’affaiblissement intellectuel acquis,
progressif, réversible ou non, entraînant un retentissement sur les relations sociales du
patient et sur son autonomie
Cette définition permet de le distinguer des débilités mentales et du syndrome
confusionnel.
L’incidence des démences augmente avec l’âge, donc avec le vieillissement de la
population.
Les étiologies sont nombreuses, mais restent dominées par la maladie d’Alzheimer
(MA), qui représente 65 % des démences après 75 ans.
Devant une situation évoquant un S.D, 3 objectifs : diagnostiquer l’état démentiel,
distinguer ce qui n’est pas un S.D, et enfin conduire une démarche étiologique, qui est
dominée par une question principale : s’agit-il d’une MA ?
II- DESCRIPTION DU SYNDROME DEMENTIEL
A- Le noyau démentiel
L’entrée dans un processus démentiel se fait habituellement de manière insidieuse. Les
symptômes d’appel peuvent être une plainte mnésique exprimée par le patient ou par
son entourage, un désinvestissement progressif des intérêts habituels, des actes
incongrus par rapport à la personnalité antérieure du sujet.
Le noyau démentiel comporte, de manière plus ou moins combinée des troubles de la
mémoire, des fonctions instrumentales, des perturbations de la pensée abstraite, des
troubles comportementaux et psychiques.
1– Les troubles de la mémoire
Ils sont obligatoires pour pouvoir parler de SD, même si certaines démences peuvent ne
pas comporter initialement de troubles de mémoire. Ils affectent la mémoire immédiate
(répétition immédiate de chiffres par exemple), mais surtout la mémoire des faits
récents. Ceci explique les difficultés rencontrées par le sujet pour « acquérir, stocker et
retrouver des informations nouvelles ».
Les oublis vont d’abord porter sur des faits banals, puis être de plus en plus invalidants
dans la vie quotidienne (rendez-vous, fermetures des portes et robinets, rangements des
clés, paiement des factures…).
A côté de cette incapacité d’acquisition des informations va s’ajouter une dissolution
progressive du stock mnésique, avec atteinte des faits anciens (mémoire
autobiographique, connaissances didactiques).
44
2– Les troubles des fonctions instrumentales comportent :
-
-
-
des troubles du langage avec un langage appauvri sur le plan quantitatif et qualitatif
(manque du mot avec réduction de la fluence verbale ; erreurs en dénomination avec
paraphasies, troubles de la compréhension)
des troubles des fonctions visuo-constructives, visuo-spatiales et visuo-gnosiques
(difficultés de dessiner des figures géométriques, perturbations de la mémoire
topographique)
des troubles praxiques avec une apraxie idéo-motrice, idéatoire, mais aussi de
l’habillage
des troubles gnosiques avec difficultés pour reconnaître les objets, mais aussi les
visages (prosopagnosie)
des troubles du calcul, qui rendent compte des difficultés de gestion de la vie
quotidienne
3- Les perturbations de la pensée abstraite, du jugement, du raisonnement
et des fonctions exécutives
Elles expliquent les troubles du comportement et l’inadaptation des actions du dément,
ainsi que son absence d’autocritique. Elles peuvent réaliser un syndrome frontal.
4– Les troubles psycho-comportementaux
Une modification de la personnalité est souvent rapportée par l’entourage du malade,
avec un changement ou une accentuation des traits antérieurs. Il peut exister une
irritabilité, une agressivité, ou au contraire une apathie avec désintérêt. Des troubles de
l’humeur à type de dépression sont souvent notés ; il s’agira au contraire dans certains
cas d’une euphorie.
Les comportements d’errance ou de fugues sont multifactoriels : il peut s’agir d’une
conséquence de la désorientation temporo-spatiale, de l’anxiété, ou d’un délire.
La démence peut s’accompagner d’idées délirantes de préjudice ou de persécution, de
bouffées confusionnelles avec onirisme, de troubles du comportement alimentaire avec
hyperphagie, de troubles du sommeil et de troubles des comportements sexuels.
B- Formes topographiques de syndrome démentiel
Il existe plusieurs formes de syndrome démentiel, en fonction de la topographie initiale
de l’atteinte encéphalique.
1– Le syndrome cortical temporo-pariétal
Les lésions affectent initialement le cortex temporal, et tout particulièrement
l’hippocampe. Les troubles mnésiques inaugurent le tableau clinique, avec constitution
progressive d’un syndrome aphaso-apraxo-agnosique. Il est essentiellement représenté
par la maladie d’Alzheimer.
45
2– Syndrome cortical fronto-temporal
Le cortex frontal est affecté en premier. Le début est souvent marqué par une négligence
personnelle avec incurie, puis par une perturbation des conduites sociales. La mémoire,
l’orientation temporo-spatiale, les praxies sont longtemps conservées.
3- Syndrome démentiel sous cortical
Il accompagne généralement l’évolution de pathologies neurologiques dégénératives
des noyaux gris centraux. Il est marqué par une apathie, une lenteur intellectuelle
(bradyphrénie), des troubles de la mémoire de rappel essentiellement, de nombreux
élément du syndrome dysexécutif frontal (troubles de la planification, de la
programmation, du raisonnement et du jugement), et des troubles de l’humeur et de la
personnalité (syndrome dépressif, désintérêt…).
III- DIAGNOSTIC POSITIF D’UN SYNDROME DEMENTIEL
A– Examen clinique
L’interrogatoire minutieux du patient et de son entourage représente un moment
essentiel du diagnostic positif d’un SD. Il va s’attacher à préciser les modalités
d’apparition des troubles, la durée et l’évolutivité de ces troubles, les antécédents
personnels et familiaux du sujet,…
L’examen clinique recherchera des signes neurologiques associés au SD, et des signes
d’atteinte somatique générale.
B– Exploration des fonctions supérieures
Cette exploration fait appel aux tests neuropsychologiques. Certains de ces tests sont
des outils de dépistage simples, et peuvent être utilisés par le médecin généraliste ; c’est
le cas du Mini Mental State Examination de Folstein (MMSE). D’autres tests, plus
complexes, sont du ressort du spécialiste (Figure de Rey, test de Grober et Buschke,
échelle clinique de mémoire de Wechsler, tests pour l’exploration des fonctions
exécutives). On explorera aussi de façon systématique la fluence verbale, le langage, les
praxies et les gnosies.
IV- DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Le syndrome démentiel doit être différencié des affections suivantes.
A- Le syndrome confusionnel
Il associe des troubles de la vigilance, une désorientation temporo-spatiale, un onirisme
vécu et agi, avec des moments de perplexité anxieuse. Il peut exister par ailleurs des
symptômes généraux (fièvre, céphalées, raideur de la nuque…).
Le syndrome confusionnel est le plus souvent d’installation rapide et réversible, alors
que le SD est généralement progressif.
46
Cependant, la distinction n’est pas toujours facile : le syndrome confusionnel peut
compliquer l’évolution d’une démence pré-existante, ou à l’inverse certaines états
confusionnels peuvent durer. C’est dire, encore une fois, toute l’importance de
l’interrogatoire.
B- La dépression pseudo-démentielle
Une dépression peut mimer une démence, surtout chez le sujet âgé, car elle peut
entraîner un ralentissement psycho-moteur important et des troubles mnésiques. Il faut
prescrire un traitement antidépresseur d’épreuve au moindre doute.
C- Les troubles isolées des fonctions symboliques
Il s’agit surtout de l’aphasie de Wernicke, qui, du fait de la jargonaphasie et des troubles
de la compréhension qu’elle entraîne, peut poser un problème de diagnostic avec une
démence.
V- EXAMENS COMPLEMENTAIRES
Certains examens complémentaires sont à réaliser devant un syndrome démentiel, à la
recherche d’anomalies en faveur d’une démence potentiellement curable.
- Imagerie cérébrale (scanner X cérébral ou IRM)
- Bilan biologique : NFS, urée, créatinine, bilan lipidique , glycémie, calcémie,
transaminases hépatiques, vitesse de sédimentation, hormones thyroïdiennes,
vitamine B12 et folates .
- Sérologies de la syphilis et du VIH
- Radiographie pulmonaire
- Electroencéphalogramme (EEG)
D’autres examens pourront être demandés en fonction de l’orientation étiologique.
Si cela est possible, on réalisera dans certains centres de recherche une imagerie
fonctionnelle : tomographie par émission monophotonique (TEMP) et par émission de
positons (TEP) qui permettent d’étudier les débits sanguins cérébraux et les
métabolismes locaux.
VI- DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
La maladie d’Alzheimer représente l’étiologie la plus fréquente des démences, surtout
après l’âge de 70 ans. Plusieurs autres étiologies peuvent réaliser un syndrome
démentiel, telles que des étiologies dégénératives, vasculaires, inflammatoires,
infectieuses, …
47
A-Les démences dégénératives
1– La maladie d’Alzheimer (Voir chapitre suivant)
2 – Les démences fronto-temporales (DFT)
Il s’agit d’un groupe d’affections dégénératives qui se caractérisent par une atrophie du
cortex fronto-temporal. Le début est souvent marqué par une négligence personnelle
avec incurie, puis par une perturbation des conduites sociales, avec désinhibition,
impulsivité et perte de la flexibilité mentale. Le sujet peut, par exemple, tenir des propos
déplacés, faire des dépenses inconsidérées, etc…Le comportement alimentaire devient
perturbé (boulimie ou au contraire anorexie), les conduites répétitives et stéréotypées.
Il s’associe à ces signes une indifférence, une perte de la spontanéité et de gros troubles
attentionnels, parfois une euphorie, l’ensemble de ces signes réalisant un syndrome
frontal.
La mémoire et l’orientation temporo-spatiale sont longtemps conservées. L’évolution
moyenne est de 7 ans.
L’EEG est normal, ce qui est un argument pour le diagnostic. Le scanner cérébral
montre une atrophie frontale. Le traitement symptomatique fait appel aux inhibiteurs de
la recapture de la Sérotonine (type Fluoxétine).
3- Les démences sous corticales
Elles sont représentées par la maladie de Parkinson, la paralysie supra-nucléaire
progressive (PSP ou maladie de Steele Richardson Olszewski), et la chorée de
Huntington (affection héréditaire de transmission autosomique dominante, responsable
de mouvements choréiques, de troubles cérébelleux, de troubles psychiatriques et d’une
démence).
4- Autres démences dégénératives
- La dégénérescence cortico-basale
- La démence à corps de Lewy diffus
B- Les démences vasculaires et les démences mixtes
Elles représentent la deuxième cause de démence après la MA. Elles surviennent chez
des sujets ayant des facteurs de risque cardio-vasculaire, tout particulièrement
l’hypertension artérielle (HTA), le diabète, les dyslipidémies, les cardiopathies
emboligènes, etc…Trois types principaux de lésions sont retrouvés, intriqués dans la
majorité des cas : infarctus de grande taille corticaux et sous corticaux, lacunes et
leucoencéphalopathie.
Chez certains patients âgés, on retrouve à l’examen anatomo-pathologique à la fois des
lésions de type MA et des lésions vasculaires. On parle alors de démence mixte.
C- Les démences de causes infectieuses
- La paralysie générale syphilitique, méningo-encéphalite de la phase tertiaire de la
syphilis, reste une cause fréquente de démence au Maroc (voir cours sur la
neurosyphilis).
48
- L’infection par le VIH peut être responsable d’une démence soit directement par une
encéphalite subaiguë à VIH (complexe démentiel du SIDA), soit indirectement par
l’intermédiaire d’une méningo-encéphalite à germes opportunistes ou d’une pathologie
tumorale (voir cours sur les manifestations neurologiques du VIH).
- La maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) est une encéphalopathie spongiforme
transmissible dont l’agent responsable est un prion. Elle réalise un tableau démentiel
d’installation rapide, survenant aux alentours de la cinquantaine associé à des
myoclonies, des éléments cérébelleux, pyramidaux et extra-pyramidaux. L’EEG est
caractéristique montrant des ondes lentes pseudo-périodiques. Son évolution est
mortelle en quelques mois. La nouvelle variante de la MCJ est due à la transmission à
l’homme de l’encéphalopathie spongiforme bovine (maladie de la vache folle). Elle se
caractérise par un âge de début souvent plus jeune, par un début psychiatrique fréquent,
par une plus longue durée d’évolution, et par l’absence d’anomalies périodiques sur
l’EEG.
D- Autres démences
1– L’hématome sous dural chronique
Il faut y penser devant un syndrome confusionnel ou démentiel avec céphalées, en
particulier chez le sujet âgé, à la suite d’un traumatisme, même minime, dans les
semaines précédentes, et en cas de terrain à risque (alcoolisme, traitement anticoagulant). Le diagnostic est confirmé par le scanner cérébral, obligatoire devant tout
syndrome démentiel, et débouche sur un traitement chirurgical urgent (évacuation de
l’hématome par trépanation).
2- L’hydrocéphalie à pression normale (HPN) ou hydrocéphalie chronique
de l’adulte
Elle se caractérise par la triade clinique d’Adams et Hakim qui associe une dégradation
des fonctions intellectuelles à une apraxie de la marche et à une incontinence urinaire.
Le scanner cérébral montre une dilatation ventriculaire. Les soustractions de LCR
peuvent améliorer le patient. Une dérivation ventriculo-péritonéale constitue le
traitement de l’HPN.
3-Les causes toxiques
L’alcoolisme chronique peut entraîner un syndrome démentiel appelé syndrome de
Korsakoff, dû à une carence en vitamine B 12, et qui se manifeste par une amnésie
antérograde avec fabulations et fausses reconnaissances.
L’intoxication au monoxyde de carbone peut provoquer, après un coma initial, un
syndrome démentiel qui n’est généralement pas évolutif.
4-Les troubles endocriniens et métaboliques
Le bilan thyroïdien est systématique devant tout syndrome démentiel, afin de
diagnostiquer une hypothyroïdie, qui peut se manifester par une apathie, une
indifférence, un ralentissement psychomoteur, une somnolence excessive, un état
dépressif atypique, parfois des idées délirantes et un onirisme.
49
D’autres étiologies sont à rechercher : hyperthyroïdie, carences en folates, en vitamines
B 12…
5-Les affections neurologiques et systémiques
Certaines affections neurologiques démyélinisantes comme la sclérose en plaques ou les
leucodystrophies peuvent se compliquer d’une détérioration des fonctions cognitives,
réalisant en règle un syndrome démentiel de type sous cortical.
C’est le cas aussi de certaines maladies systémiques inflammatoires, telle que la maladie
de Behçet avec atteinte neurologique (neurobehcet), le lupus érythémateux disséminé, le
syndrome de Gougerot Sjögren, ou de maladies granulomateuses telle que la sarcoïdose.
OBJECTIFS :
-
Connaître la sémiologie du syndrome démentiel
Différencier les formes topographiques de syndrome démentiel (SD cortical, SD
sous-cortical)
Connaître les principaux diagnostics différentiels
Savoir quels sont les examens complémentaires à réaliser devant un SD
Citer les différentes étiologies d’un syndrome démentiel
Décrire la DFT, les démences vasculaires, les démences infectieuses
50
LA MALADIE D’ALZHEIMER
C’est la plus fréquente des démences du sujet âgé. Elle concerne 5 à 10 % des sujets de
plus de 75 ans, et 25 % des plus de 85 ans. On parlait auparavant de « démence
présénile » quand la maladie commençait avant 65 ans et de « démence sénile » après
65 ans, mais on sait maintenant que ces deux groupes représentent la même affection,
d’après les données neuropathologiques. L’ensemble de ces démences est donc
actuellement regroupé sous le terme de « démence de type Alzheimer » ou DTA.
I- FACTEURS DE RISQUE DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
Les facteurs de risque établis de la MA sont l’âge et les antécédents familiaux de
démence. D’autres facteurs ont été associés à la possibilité de survenue de l’affection,
tel que l’allèle ε4 du gène de l’apolipoprotéine E, le bas niveau d’éducation.
Récemment, les facteurs vasculaires ont été incrimiés également dans la survenue de
l’affection (HTA, hypercholestérolémie, diabète). Certains facteurs semblent au
contraire être protecteurs comme les traitements hormonaux substitutifs de la
ménopause, les traitements anti-inflammatoires.
Sur l’ensemble des cas de MA, seuls 10 % sont des formes familiales transmissibles.
Ces formes génétiques, à transmission mendélienne autosomale dominante, ont
généralement un début plus précoce, et évoluent souvent plus rapidement que les formes
du sujet âgé. Parmi ces cas familiaux, 50 % sont dus à des mutations actuellement
connues. La mutation la plus impliquée touche le gène de l’APP (amyloïd precursor
protein) sur le chromosome 21.
II- NEUROPATHOLOGIE
Il s’agit d’une affection dégénérative du cortex cérébral, responsable d’un déficit en
acétylcholine. Les lésions débutent au niveau de l’hippocampe, qui joue un rôle
important dans la mémoire, puis s’étendent ensuite progressivement vers le cortex
pariétal puis à l’ensemble du cortex.
Les lésions neuropathologiques typiques de la maladie sont représentées par :
- les plaques séniles, constituées d’un dépôt de substance amyloïde
- la dégénérescence neurofibrillaire (DNF) : elle correspond à une accumulation de
filaments constitués de protéines microtubulaires tau
- une perte neuronale et synaptique
III- DESCRIPTION CLINIQUE
Le tableau clinique est représenté par un syndrome démentiel cortical temporo-pariétal,
chez un sujet âgé d’environ 70 ans, mais il existe des formes à début précoce (50 ans) et
des formes à début plus tardif (80 ans). L’enjeu principal est de pouvoir poser le
diagnostic à un stade précoce, prédémentiel, ce qui ne peut se faire que grâce aux tests
neuropsychologiques.
51
A-Phase initiale :
Le début est insidieux, et se fait par des troubles mnésiques, portant d’abord sur la
mémoire de fixation, avec des difficultés à se souvenir des faits récents (oublis assez
banaux).
Il peut exister une baisse du rendement intellectuel, une dépression traînante, un
changement de la personnalité, ou encore des difficultés à s’adapter à des situations
nouvelles.
A ce stade, le patient peut avoir conscience de ses difficultés et venir consulter de luimême , ou être amené par sa famille.
B-Phase d’état : 3 types de troubles
1- Troubles cognitifs :
-
-
-
la mémoire est plus touchée, avec des oublis de plus en plus importants, les
souvenirs les plus anciens étant les plus longuement respectés (loi de Ribot) ; le
patient commence à ne plus reconnaître certaines personnes de la famille, d’abord
éloignées puis de plus en plus proches (petits enfants, enfants, conjoint)
l’orientation temporo-spatiale est atteinte, entraînant des difficultés à se repérer dans
le temps et dans les lieux, d’abord non familiers, puis familiers
le jugement, le raisonnement et l’attention sont altérés, induisant des difficultés de
concentration, l’incapacité de toute critique avec réalisation d’actes absurdes ou
même inconvenants, et une anosognosie de la maladie
les troubles des fonctions instrumentales ou symboliques (langage, praxies, gnosies)
constituent le syndrome aphaso-apraxo-agnosique, typique de la MA : l’aphasie se
traduit au début par un simple manque du mot puis devient progressivement de plus
en plus invalidante ; l’apraxie peut être idéatoire, idéomotrice, mais également
apraxies constructive et de l’habillage ; l’agnosie traduit en général une démence
déjà avancée, elle peut toucher les visages (prosopagnosie)
2- Troubles affectifs et comportementaux :
Ils sont parfois révélateurs. Ils comprennent un désintérêt, une dépression, une anxiété,
une irritabilité, une labilité émotionnelle. Des symptômes psychotiques peuvent se voir
(hallucinations, idées délirantes de persécution ou de préjudice), ainsi que des troubles
des conduites alimentaires (anorexie, boulimie) et une inversion du rythme nycthéméral.
3- Troubles neurologiques :
Troubles de la marche, rigidité, myoclonies, crises d’épilepsie, signes pyramidaux sont
des signes tardifs.
C- Phase terminale
A ce stade, le patient est grabataire, incontinent, il ne reconnaît plus ses proches, ne peut
plus communiquer avec eux, ne s’alimente plus correctement. Le décès peut survenir du
fait de complications intercurrentes (dénutrition, pneumopathies, infections urinaires)
ou du fait d’autres pathologies fréquentes chez le sujet âgé (cardiopathies, diabète,
insuffisance rénale ou hépatique…).
52
IV- EXAMENS PARACLINIQUES
La neuroimagerie peut aider au diagnostic de la MA, en montrant une atrophie corticale
localisée initialement aux lobes temporaux. La TEP et la TEMP peuvent objectiver un
hypométabolisme pariéto-temporal et du cortex postérieur médian (voir chapitre sur les
démences).
IV- PRISE EN CHARGE DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
A– Traitement symptomatique
Il fait appel aux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase (IACE), seuls médicaments ayant
démontré une efficacité sur le court évolutif de la maladie. Leur effet est cependant
modeste. Seul le Donepezil (Aricept*) est commercialisé au Maroc.
Un traitement anti-dépresseur sera fréquemment prescrit, en préférant les inhibiteurs de
la recapture de la sérotonine (Fluoxétine).
Les neuroleptiques sont parfois prescrits pour les troubles du comportement, mais il faut
actuellement préférer d’autres produits tels que la Dépakine ou le Tégrétol.
Les benzodiazépines doivent être évitées. Ils peuvent aggraver le déficit mnésique, ou
déclencher un syndrome confusionnel.
Il faut également traiter les douleurs et les complications intercurentes telles que les
infections, et mettre en place des soins de nursing à la phase terminale de la maladie.
B– Prise en charge psycho-sociale
C’est avec la famille que le type de prise en charge doit être décidé. Il est indispensable
de maintenir un rôle social, si modeste soit-il, pour ces patients. Il faut aussi proposer
des actions de stimulation cognitive, la mise en place d’une psychothérapie, d’une
rééducation orthophonique et d’une kinésithérapie.
Dans les pays développés, il existe des institutions qui peuvent prendre en charge le
patient à temps partiel ou à temps plein. Néanmoins, le patient doit être maintenu à
domicile le plus longtemps possible.
La personne qui s’occupe à domicile du patient Alzheimer (aidant principal) a souvent
besoin d’une aide médicale à cause de l’épuisement physique et psychologique
engendré par la prise en charge de cette maladie.
OBJECTIFS
-
Connaître les facteurs de risque de la MA
Préciser les lésions neuropathologiques de la MA
Décrire les différentes phases évolutives de la MA
Connaître le traitement symptomatique de la MA
53
LA MALADIE DE PARKINSON
ET LES SYNDROMES PARKINSONIENS
I- INTRODUCTION
Le syndrome parkinsonien se définit cliniquement par des troubles moteurs : akinésie,
rigidité, tremblement de repos et altération des réflexes de posture. L’étiologie la plus
fréquente est la maladie de Parkinson idiopathique, l’une des affections
neurodégénératives les plus communes, caractérisée anatomiquement par une perte des
neurones dopaminergiques mésencéphaliques, particulièrement de la substance noire, et
la présence de corps de Lewy au sein des neurones restants. Les autres syndromes
parkinsoniens sont moins fréquents et peuvent avoir des causes diverses : toxiques,
métaboliques, dégénératives et iatrogènes.
On va traiter d’abord la maladie de Parkinson idiopathique (MPI) et ensuite les
syndromes parkinsoniens.
II- LA MALADIE DE PARKINSON IDIOPATHIQUE (MPI)
A- Epidémiologie
La prévalence moyenne de la MPI dans les pays occidentaux est de 100 à 200 / 100 000
habitants.
Son incidence annuelle moyenne est de 10 à 15 / 100 000 habitants.
Sa fréquence représente 80 % des syndromes parkinsoniens.
Le début de la maladie se situe entre les cinquième et sixième décennies (âge moyen: 55
ans) mais il y a des formes à début précoce avant 40 ans (10 %) et des formes juvéniles
avant 21 ans (très rares).
Les deux sexes de toutes classes sociales sont également atteints par la maladie avec
une légère prédominance masculine.
La maladie est répandue sur toute la surface du globe. La race noire semble moins
touchée.
B- Etiopathogénie
La cause de la MPI reste encore inconnue.
1- Facteurs environnementaux
Parmi les hypothèses étiopathogéniques, il y a la théorie environnementale soulevée
dans les années 1980 après la découverte de syndromes parkinsoniens secondaires à
l’intoxication par une substance toxique sélective des neurones dopaminergiques, le 1méthyl-4-phényl-1,2,4,6-tétrahydropyridine ou MPTP.
A la suite de la découverte du MPTP, plusieurs études épidémiologiques ont donné des
résultats concordants en faveur d’une plus grande prévalence de la MPI dans les pays
fortement industrialisés et plus précisément dans leurs zones rurales caractérisées par
l’importante utilisation de pesticides ou la consommation d’eaux de sources polluées.
54
2- Facteurs génétiques
Parallèlement aux recherches de causes neurotoxiques de la MPI, l’hypothèse génétique
a connu un essor considérable au cours de ces dix dernières années.
Il y a 10 à 25% de cas familiaux. En cas de transmission autosomique dominante (AD),
il y a une mutation du gène PARK 1 codant pour une protéine, l’α-synucléine qui est
trouvée dans les corps de Lewy. Cette mutation n’existe pas dans les formes
sporadiques.
Par contre, les formes à début précoce de MP familiales à transmission autosomique
récessive (AR) ou sporadique, sont fréquemment associées à une mutation d’un autre
gène PARK 2 codant pour une protéine appelée parkine.
En conclusion, la physiopathologie de la MPI n’est pas encore élucidée. Elle est
probablement d’origine multifactorielle à la fois génétique (notamment dans les cas de
début précoce) et environnementale (en particulier dans les formes de début tardif).
C- Anatomie pathologique
L'examen histologique montre la disparition d'un grand nombre de neurones pigmentés
du locus niger avec une atrophie des neurones restants et la présence de corps de Lewy:
il s'agit d'inclusions neuronales intra-cytoplasmiques, de forme arrondie, acidophiles,
comportant une zone centrale dense et un halo périphérique.
Les autres formations pigmentées du tronc cérébral (locus coeruléus, noyau dorsal du
vague) sont le siège de lésions analogues.
Les méthodes histochimiques ont montré que la teneur en dopamine du locus niger et du
striatum est effondrée chez les parkinsoniens alors que ces structures renferment 80 %
de la dopamine cérébrale.
D- Signes cliniques
Le début est progressif avec des signes peu évocateurs tels que ralentissement de
l'activité pouvant en imposer pour un syndrome dépressif, fatigabilité anormale,
douleurs mal systématisées, avant l’apparition toujours asymétrique des signes
cardinaux de la maladie.
Le tableau clinique constitué comporte une triade classique :
- Tremblement de repos : de faible amplitude et intéressant surtout les extrémités.
- Rigidité : C’est une hypertonie extrapyramidale de type plastique avec phénomène
de « roue dentée ».
- Akinésie : responsable de l’amimie du visage, de l’attitude penchée du corps et de
la marche à petits pas.
Ces signes peuvent rester longtemps unilatéraux et on parle d’hémiparkinson, comme
ils peuvent se bilatéraliser progressivement en gardant souvent un caractère
asymétrique.
Cette triade clinique peut être complète ou non, et en fonction de la prédominance de
l’un des signes, on distingue des formes cliniques tremblantes ou akinétohypertoniques.
55
Autres signes cliniques :
- Troubles de la marche : difficulté de démarrage (freezing).
- Troubles de la parole : dysarthrie extrapyramidale, palilalie, tachyphémie.
- Troubles de l’écriture : micrographie.
- Troubles végétatifs : hypotension orthostatique, hypersialorrhée, hypersudation,
hypersécrétion sébacée.
- Troubles sensitifs purement subjectifs (fourmillements), crampes, impatiences des
membres sans anomalies objectives.
- Troubles psychiques : tendance dépressive, démence sous-corticale chez les sujets
âgés ayant des formes évoluées.
- Troubles vésicaux : vessie paresseuse provoquant des mictions répétées en rapport
avec une hyperréflexie du détrusor.
E-Diagnostic
Le diagnostic positif de la MPI est purement clinique basé sur la triade symptomatique
(tremblement de repos, akinésie, hypertonie) et le caractère asymétrique au début, ainsi
que sur la bonne réponse à la L-dopa.
Les examens complémentaires sont normaux (PL, EEG, Scanner, IRM…) et ils ne sont
réalisés qu’en cas de doute diagnostique.
Le diagnostic différentiel se pose avec les autres syndromes parkinsoniens (voir chapitre
suivant).
F- Traitement
1- Moyens thérapeutiques
a- Traitement médical
- La L-dopa (lévodopa) habituellement associée à un inhibiteur de la décarboxylase :
Modopar® (lévodopa + bensérazide)
Sinemet® ( lévodopa + carbidopa )
Une bonne réponse à la L-dopa constitue un argument en faveur d’une MPI
Certaines contre-indications sont à respecter (infarctus du myocarde récent, troubles du
rythme cardiaque sévères, troubles psychiques aigus, ulcère gastroduodénal en
évolution, glaucome à angle fermé).
Certains effets secondaires ne sont pas rares (nausées, vomissements, hypotension
orthostatique, troubles psychiques sur terrain prédisposé).
A plus long terme, la dopathérapie est caractérisée par la diminution de son efficacité
avec fluctuations motrices (effet on-off) caractérisées par le passage très brusque d'un
état moteur satisfaisant à un état de blocage complet et par la possible apparition de
mouvements anormaux (dyskinésies de milieu de dose ou de début et de fin de dose)
touchant la face, les membres et le tronc.
56
- Les agonistes dopaminergiques
Bromocriptine (Parlodel®)
Piribédil (trivastal®)
Médicaments non encore commercialisés au Maroc comme par exemple: Lisuride
(Dopergine®), Ropinirole (Réquip®), Pergolide (Célance®), Apomorphine
(Apokinon® stylo, pour injections sous cutanées)
- Les autres traitements symptomatiques
L'amantadine (Mantadix ®), les inhibiteurs de la mono-amine-oxydase B (IMAO B)
(sélégiline), les inhibiteurs de la catéchol-o-métyl transférase (ICOMT) (entacapone).
-La kinésithérapie
A côté du traitement médical, elle doit s’inscrire dans un ensemble de mesures visant à
conserver au patient son autonomie. Aussi longtemps que possible, on s’efforcera de
maintenir l’activité professionnelle et la vie sociale. Lorsque l’invalidité est plus sévère,
l’exercice soigneusement contrôlé permet souvent le retour d’une autonomie
appréciable.
b-Traitement chirurgical
Il est indiqué dans certaines formes tremblantes handicapantes et dans les formes
évoluées avec des dyskinésies qui gardent une certaine réponse à la L-Dopa, sans
troubles de la marche ou posturaux, sans troubles cognitifs ou psychiatriques et un bon
état général (âge physiologique).
Il s’agit surtout de la stimulation des noyaux sous thalamiques qui améliore les
fonctions motrices "off " de L-Dopa et les dyskinésies sous L-Dopa dans la MPI
avancée, mais sans influence sur l’évolution naturelle de la maladie.
2-Recommandations pour le traitement médical
- Lorsque la gêne est minime : agonistes dopaminergiques et sélégiline, peuvent être
utilisés en fonction du symptôme prédominant et de l’âge. Une abstention thérapeutique
peut aussi être recommandée.
- Lorsqu’il existe un retentissement fonctionnel, l’âge du patient conditionne le
traitement :
Chez le sujet de moins de 60 ans, il convient de privilégier les agonistes
dopaminergiques, le plus longtemps possible. Le recours à la dopathérapie se
justifie en cas d’intolérance ou de réponse thérapeutique insuffisante. La dose de
L-Dopa devra rester la plus faible possible.
Chez le sujet de plus de 60 ans, la L-Dopa peut être utilisée en première
intention. L’apparition d’un déclin cognitif doit conduire à utiliser les doses
minimales efficaces.
57
III- LES AUTRES SYNDROMES PARKINSONIENS
Ils peuvent avoir une étiologie bien définie (toxique, iatrogène, métabolique…) ou
entrer dans le cadre d’une maladie dégénérative autre que la MPI.
A- Syndromes parkinsoniens secondaires à une étiologie définie
1-Origine iatrogène
Les neuroleptiques utilisés dans le traitement des psychoses (exemple : halopéridol) ou
ceux utilisés en pathologie digestive comme les antiémétiques (exemple
métoclopramide).
2-Origine toxique
Oxyde de carbone, manganèse, MPTP.
3-Origine tumorale
Les tumeurs de la base sont le plus souvent en cause ou des tumeurs de la convexité,
l’imagerie cérébrale permet facilement le diagnostic.
4-Origine post-encéphalitique
Séquelle très classique et tardive de l’encéphalite épidémique de Von Economo (19171926).
5-Origine post-traumatique
Surtout des syndromes parkinsoniens akinéto-hypertoniques survenant après des
traumatismes crâniens graves ou suite à des traumatismes crâniens répétés des boxeurs.
6-Maladie de Wilson
Diagnostic à évoquer devant tout syndrome parkinsonien survenant chez un enfant ou
un adulte jeune (avant 40 ans).
B-Syndromes parkinsoniens dégénératifs (autres que la MPI)
Ils sont caractérisés par l’absence de réponse à la L-dopa +++
1-Les atrophies multi-systématisées
Ce sont les syndromes parkinsoniens dégénératifs les plus fréquents après la MPI.
Le tableau clinique complet se traduit par la combinaison de signes parkinsoniens,
dysautonomiques (ou végétatifs tels que hypotension orthostatique et troubles génitosphinctériens), cérébelleux et pyramidaux.
Selon la prédominance de l’un des signes, il y a : l’atrophie olivo-ponto-cérébelleuse
(signes cérébélleux), l’atrophie striato-nigrique (signes extrapyramidaux), le syndrome
de Shy-Drager (signes végétatifs).
58
2-L’ophtalmoplégie supranucléaire progressive
Au syndrome akinéto-hypertonique à prédominance axiale s’associent une paralysie des
mouvements oculaires de verticalité, une instabilité posturale avec chutes précoces, une
démence sous-cortico- frontale, une dystonie du cou et des troubles de la déglutition
avec fausses routes.
3-La dégénérescence cortico-basale et la démence à corps de Lewy diffus
Aux signes extra pyramidaux est associé un syndrome démentiel (voir chapitre des
démences).
______________________________________________________________________
OBJECTIF
- Connaître l’étiopathogénie et les données anatomopathologiques de la MPI
- Décrire les signes cliniques de la MPI
- Préciser les éléments du diagnostic de la MPI
- Connaître les moyens thérapeutiques et les recommandations du traitement médical de
la MPI
- Citer les autres syndromes parkinsoniens
59
SCLEROSE EN PLAQUES
I - INTRODUCTION
La sclérose en plaques est une affection inflammatoire, chronique, démyélinisante du
système nerveux central. Elle touche habituellement le sujet jeune. Elle se caractérise
par un grand polymorphisme clinique.
Les données de l'imagerie cérébrale (IRM) et de la biologie permettent actuellement une
meilleure approche diagnostique.
Les progrès de l'immunologie ont permis d'une part d'approcher les mécanismes
physiopathologiques de la maladie et d'autre part de développer des thérapeutiques aussi
bien sur les poussées que sur l'évolution de la maladie.
II -EPIDEMIOLOGIE
La SEP est plus fréquente chez la femme (3F pour 2H).
L'âge de début se situe habituellement entre 20 et 40 ans. Mais un début avant 10 et
après 50 ans, bien qu'il soit rare, reste possible. La SEP est une affection ubiquitaire
dont la répartition géographique mondiale serait inégale. En effet, sa prévalence est >
30/100000 habitants dans les pays nordiques et diminue selon un gradient nord-sud.
L'analyse des sujets migrants montre que le risque de SEP, en cas d'immigration avant
15 ans est celui du pays d'accueil, alors qu'il est celui du pays d'origine en cas
d'immigration après 15 ans.
III -ANATOMIE PATHOLOGIQUE
A- Macroscopie:
On note l'existence de plaques de démyélinisation, bien limitées, de quelques mm à
quelques cm, disséminées dans la substance blanche du névraxe et prédominant au
niveau des régions péri ventriculaires, des formations optiques, du tronc cérébral, du
cervelet et de la moelle épinière.
B- Microscopie:
Les plaques sont des lésions inflammatoires périveinulaires constituées d’un infiltrat de
cellules mononucléées autour d'une zone démyélinisée, et d’une gliose astrocytaire.
Selon l'aspect des lésions, on distingue des plaques récentes caractérisées par un infiltrat
inflammatoire important et les plaques anciennes où la gliose est prédominante.
Par ailleurs et bien qu'il s'agisse essentiellement d'une atteinte démyélinisante, l'atteinte
axonale est précoce.
IV-ETIOPATHOGENIE
La SEP est une maladie multifactorielle, dont la cause reste actuellement inconnue.
60
A- Facteurs génétiques:
Plusieurs éléments semblent plaider pour une prédisposition génétique :
-
l'existence de formes familiales : 5 à 10 % des cas
l'association à certains groupes HLA : DR15 et DQW6…
Le risque plus élevé chez les jumeaux homozygotes
Les variations ethniques : la maladie est deux fois moins fréquente chez les
sujets de race noire et est exceptionnelle chez les sujets de race jaune.
B- Facteurs virologiques:
Aucun virus connu n'est formellement impliqué. Un facteur virologique a été suspecté
devant l’existence chez plusieurs sujets atteints de SEP d’un grand nombre d’anticorps
anti-virus divers (en particulier anti-rougeole) par rapport à la population générale sans
la mise en évidence d’un lien causal direct.
C- Facteurs immunologiques:
Au cours de la SEP, il existe un dérèglement immunitaire comme le suggèrent l'aspect
anatomique des lésions, la présence d'une sécrétion intrathécale d'IgG, les similitudes
avec l'encéphalomyélite allergique expérimentale et l'effet bénéfique des traitements
immunomodulateurs.
D- L’hypothèse auto-immune
C’est l’hypothèse la plus retenue actuellement dans l’étiopathogénie de la SEP. Elle
suppose la survenue d’un dérèglement immunitaire provoqué par un antigène (viral ou
autre) sur un terrain génétiquement prédisposé. Il y aurait alors une activation des
lymphocytes T1, qui traversent la barrière hématoencéphalique avec production de
cytokines (Interleukine 2, 3, Interféron gamma, TNF alpha). Il y aurait une lyse
cellulaire avec production de médiateurs pro-inflammatoires à l'origine d'une
démyélinisation. Il y a par ailleurs des mécanismes de contre régulation visant la
récupération ; il s'agit des agents immunosuppresseurs (Interféron bêta, Interleukine 4,
10) et des lymphocytes T activés.
V-ETUDE CLINIQUE
Les signes cliniques de la SEP traduisent une atteinte multifocale (dissémination dans
l’espace) de la substance blanche du SNC (voies sensitives, pyramidales, visuelles,
cérébelleuses), qui a la particularité d’évoluer souvent par poussées et rémissions
(dissémination dans le temps).
61
A- Description clinique analytique
1- Manifestations sensitives subjectives
Elles sont très fréquemment révélatrices (>20% des cas). La sémiologie subjective est
très riche et se caractérise par des sensations d’engourdissement, des paresthésies à type
de fourmillements, de sensation de peau épaisse, cartonnée, de ruissellement.
Elles peuvent intéresser l’hémiface, un membre, un hémicorps ou la face. Au niveau du
tronc, les patients décrivent parfois une sensation d’étau thoracique. Dans certains cas,
le patient se plaindra de décharges électriques parcourant le tronc et les quatre membres
de haut en bas lors de la flexion brusque de la tête : c'est le signe de Lhermitte.
Malgré la richesse des signes sensitifs subjectifs, l'examen de la sensibilité peut être
normal.
2- Manifestations visuelles
La neuropathie optique rétro bulbaire (NORB) est révélatrice dans 20% des cas. Elle se
traduit par une baisse rapide et unilatérale de l’acuité visuelle précédée ou accompagnée
d'une douleur rétro orbitaire surtout à la mobilisation du globe oculaire, avec
habituellement un scotome central à l'étude du champ visuel.
Au début, l'examen du fond d'œil est normal. L'évolution spontanée est souvent
favorable. Secondairement, l’examen du fond d'œil peut montrer une pâleur papillaire.
3- Manifestations motrices
Elles sont révélatrices dans 10 à 20% des cas.
Elles traduisent essentiellement l’atteinte médullaire et se manifestent par une
claudication intermittente, une paraplégie spastique, parfois une monoplégie, plus
rarement une hémiplégie. Elles sont présentes dans plus de 50% des cas après quelques
années d’évolution.
Le syndrome pyramidal est fréquemment retrouvé, même en l’absence de déficit
moteur.
4- Manifestations cérébelleuses
L’atteinte cérébelleuse se traduit par une ataxie, avec troubles de la marche et de
l’équilibre, une maladresse et un tremblement des membres supérieurs pouvant aller
jusqu’à la dyskinésie volitionnelle, particulièrement handicapante.
Dans les formes évoluées, le syndrome cérébelleux est sévère de type stato-kinétique
avec tremblement axial et céphalique invalidant.
5- Manifestations vestibulaires
Elles se traduisent par des sensations vertigineuses, des troubles de l’équilibre, avec à
l'examen un nystagmus.
62
6- Manifestations oculomotrices
La diplopie peut être révélatrice dans 10% des cas. Elle est transitoire régressant en
quelques jours ou en quelques semaines et traduit la paralysie d’un ou plusieurs nerfs
oculomoteurs. La survenue d'une paralysie de fonction est possible. Il s'agit en
particulier de l'ophtalmoplégie internucléaire antérieure (OIA) qui se traduit par une
paralysie de l'adduction d'un œil associée à un nystagmus de l'œil controlatéral en
abduction. L’OIA est très évocatrice de la SEP.
7- Troubles sphinctériens
Ils sont révélateurs dans 5% des cas et constants dans les formes évoluées. Ils sont
dominés par les troubles urinaires sous forme de mictions impérieuses, de rétention ou
d’incontinence. Ils sont souvent associés à des troubles génitaux.
8- Autres manifestations
- Les troubles cognitifs sont parfois précoces, ils traduisent une altération des fonctions
exécutives avec troubles de l’attention, de la concentration, de la mémoire et de
l’humeur (euphorie ou dépression).
- Les douleurs (névralgie faciale, douleurs cordonales) peuvent être intenses et
invalidantes dans les formes évoluées.
- La fatigue chronique est fréquemment observée dans la SEP pouvant gêner les
activités quotidiennes.
- Les crises épileptiques sont rares et exceptionnellement inaugurales.
B- Histoire naturelle
Il est nécessaire de définir 3 termes : poussée, rémission et progression
- La poussée correspond à l’apparition des symptômes et/ou des signes neurologiques
durant plus de 24h ou à l’aggravation ou la réapparition de symptômes ou de signes
ayant disparu ou s’étant améliorés ou stables depuis plus d 'un mois.
- La rémission est l’amélioration démontrée depuis plus d'un mois de symptômes ou de
signes ayant duré plus de 24h.
- La progression est la majoration des signes sans stabilisation ou rémission depuis au
moins 6mois.
On définit ainsi trois formes évolutives de SEP :
- La forme rémittente : caractérisée par des poussées espacées de rémissions
- La forme secondairement progressive : c’est l’apparition d’un handicap
neurologique d’aggravation progressive après une période d’évolution par
poussées rémissions
- La forme progressive primaire : c’est l’évolution d’emblée progressive, sans
rémission, des signes neurologiques et du handicap.
63
VI- EXAMENS COMPLEMENTAIRES
Ils ont pour objectif de démontrer l’atteinte de la substance blanche et le caractère
inflammatoire et multifocal des lésions. Ils permettent aussi d'éliminer un éventuel
diagnostic différentiel.
A- Neuro-imagerie
1- TDM cérébrale
Elle est peu sensible et peut montrer dans certains cas des hypodensités de la substance
blanche avec prise de contraste annulaire surtout en cas de lésions actives.
2- IRM cérébrale et médullaire
Elle permet une meilleure étude de la substance blanche du cerveau, du cervelet et de la
moelle épinière et la mise en évidence de la dissémination des lésions dans le temps et
dans l’espace.
En séquence T2 les lésions se présentent sous forme d’ hypersignaux disséminés dans la
substance blanche, mieux mis en évidence par les séquences Flair. En séquence T1, les
lésions sont hypointenses (trous noirs) et sont rehaussées par le Gadolinium lorsqu’elles
sont récentes. Des critères IRM bien définis ont été décrits par Barkoff. (Voir annexe,
critères Barkoff)
B- LCR
Il est habituellement inflammatoire. Il existe une hyperprotéinorachie modérée
inférieure à 1g/l avec une augmentation du taux des gammaglobulines et un profil
oligoclonal à l'immunoélectrophorèse traduisant une synthèse intrathécale. La réaction
cellulaire est modérée et ne dépasse pas 50 lymphocytes/mm3. Le LCR peut être normal
dans 10% des cas.
D- Potentiels évoqués
La réalisation des potentiels évoqués visuels (PEV), auditifs (PEA), somesthésiques
(PES) et moteurs (PEM) permet de détecter des lésions cliniquement muettes et
rechercher ainsi une dissémination dans l'espace. Les PEV sont anormaux dans 80% des
SEP définies.
VII - DIAGNOSTIC POSITIF
Il est basé sur les 4 arguments suivants :
- L’âge de survenue: adulte jeune (20 à 40 ans),
- La symptomatologie traduit l’atteinte de la substance blanche.
- La dissémination des lésions dans le temps (évolution par poussées et
rémissions) et dans l’espace (caractère multifocal des signes cliniques et
radiologiques) :
- L'exclusion des autres diagnostics possibles.
64
Ces différents éléments sont la base des critères diagnostiques établis par Poser (1983)
et Mac Donald (2001) et qui permettent de distinguer les SEP définie, probable ou
possible. (Annexe : tableaux 1 et 2)
VIII-DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Les diagnostics différentiels sont à discuter en fonction du tableau clinique :
A- Atteinte multifocale du SNC
Elle peut poser un problème de diagnostic différentiel avec d’autres affections
inflammatoires systémiques ou infectieuses telles que vascularite primitive du SNC,
neurolupus, neurobehcet, neurosyphilis, neuroborréliose…. La réalisation des examens
complémentaires appropriés permet d’éliminer ces diagnostics.
B- Forme ataxospasmodique
Elle peut faire discuter en cas d’évolution progressive une tumeur de la fosse cérébrale
postérieure, une malformation de la charnière cervico-occipitale, une dégénérescence
spinocérébelleuse.
C- Formes médullaires
Une paraplégie progressive doit faire discuter une compression médullaire, une
paraplégie spastique familiale, une infection à HTLV1 ou une adrénoleucodystrophie .
IX-TRAITEMENT
A- Traitement des poussées:
Il est basé sur les corticoïdes à fortes doses pendant une courte période. Une
corticothérapie au long cours n’a pas de place dans le traitement de la SEP.
Le plus utilisé est la Méthylprednisolone en bolus intra-veineux : 500 mg/j pendant 5
jours ou 1g/j pendant 3 jours.
Une corticothérapie per os ou des corticoïdes retard par voie intramusculaire peuvent
être proposés pendant 2 à 3 semaines.
B- Traitement de fond:
Ses objectifs sont de diminuer la fréquence des poussées et de ralentir la progression du
handicap.
65
1– Moyens
a– Les immunomodulateurs
- Les interférons bêta
Il existe 3 présentations : Avonex* administré par voie intramusculaire une fois par
semaine, Rebif* et Betaféron*, administrés par voie sous-cutanée 3 fois par semaine. Ils
ont démontré leur efficacité en réduisant de 30 % la fréquence des poussées.
Les principaux effets secondaires sont représentés par le syndrome pseudogrippal,
l'asthénie, le syndrome dépressif et les nécroses cutanées en cas d’injection souscutanée.
Les contre-indications sont la grossesse, l'allergie au produit, la dépression sévère et une
épilepsie non contrôlée.
- Le copolymer
Copaxone* : administré par voie sous-cutanée quotidiennement
b- Les immunosuppresseurs
– Azathioprine (Imurel*)
– Cyclophosphamide (Endoxan*)
– Methotrexate
– Mitoxantrone (Novantrone*)
2– Indications
-
SEP rémittente :
o les Interférons sont indiqués quand se sont produites deux poussées au
cours des deux dernières années;
o le Copolymer est indiqué en cas d’intolérance ou de contre-indication
aux interférons.
o L’Imurel* peut être proposé comme alternative aux Interférons
-
SEP rémittente secondairement progressive :
o Parmi les Interférons, seul le Bétaféron* est indiqué dans cette forme
o L’Endoxan* peut être utilisé sous la forme de bolus intraveineux
mensuels
-
SEP progressive primaire : aucun traitement n’a montré d’efficacité dans cette
forme
-
Formes très actives (plusieurs poussées rapprochées et handicap d’aggravation
rapide): la Novantrone* est indiquée dans ces formes.
66
C- Traitement symptomatique:
Il vise à améliorer la qualité de vie des patients.
1- Traitement de la spasticité
Il faut détecter et traiter les facteurs aggravants (infections urinaires, constipation).
Le traitement fait appel aux antispastiques à doses progressives (Baclofène ou
Liorésal*, Dantrium ou Dantrolène*).
2- Traitement des douleurs
Les douleurs cordonales sont généralement contrôlées par la
carbamazépine
(Tegretol*), la gabapentine (Neurontin*), le clonazepam (Klonopin*) ou l'amitriptyline
(Laroxyl*).
3- Traitement du tremblement cérébelleux
Le Propranolol (Avlocardyl*) ou le Valproate de sodium (Dépakine*) peuvent
partiellement améliorer le tremblement cérébelleux.
4- Traitement des troubles urinaires
L'instauration d'un traitement pour améliorer la dysurie ou l'impériosité mictionnelle
nécessite en général un bilan urodynamique qui permet d’orienter vers la prescription de
traitement par les alpha-bloqueurs, les anticholinergiques, la toxine botulique, les
autosondages intermittents ou en dernier recours la chirurgie, sans oublier la
surveillance de l’état du haut appareil urinaire et la rééducation.
5- Traitement de la fatigue:
La fatigue chronique peut être traitée par l'Amantadine (Mantadix*).
6- Rééducation fonctionnelle
Elle tient une place importante, d'autant plus qu'il existe des déficits permanents. Elle a
pour but de maintenir les capacités motrices et de prévenir en cas de déficit moteur
sévère les rétractions tendineuses.
7- Hygiène de vie
Eviction des facteurs aggravants (infections, chaleur,...)
D- Prise en charge sociale et psychologique
Elle concerne la prise en charge générale du handicap, la réinsertion sociale et
professionnelle.
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OBJECTIFS
- Connaître les données anatomopthologiques et étiopathogéniques de la SEP
- Décrire les signes cliniques de la SEP
- Connaître l’histoire naturelle et les différentes formes évolutives de la SEP
- Préciser les examens complémentaires nécessaires au diagnostic de la SEP
- Connaître le diagnostic positif et différentiel de la SEP
- Savoir les critères diagnostiques de Poser
- Préciser le traitement de la SEP : des poussées, de fond et symptomatique
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ANNEXE : CRITERES DIAGNOSTIQUES DE LA SEP
Tableau 3 : Critères diagnostiques IRM de la SEP (Barkoff)
Les critères IRM suivants sont considérés comme caractéristiques de la sclérose en
plaques (critères de Barkoff) :
• lésion prenant le contraste au gadolinium ou 9 lésions hyperintenses dans
l’image en T2,
• au moins une lésion infratentorielle,
• au moins une lésion proche du cortex,
• au moins 4 lésions périventriculaires.
Critères IRM pour la prolifération des lésions dans le temps:
• lésion prenant le contraste au gadolinium trois mois après une attaque clinique,
• nouvelle lésion hyperintense dans l’image en T2 trois mois après un premier
examen,
• si une première image a été réalisée plus de trois mois après l’attaque clinique,
toute nouvelle lésion hyperintense dans l’image en T2 est considérée comme
l’expression de la dissémination dans le temps.
69
Tableau 2 : critères de McDonald et al. (2001)
Présentation clinique
Examens complémentaires ou profil
évolutif requis pour le diagnostic de
SEP
≥ 2 poussées
Aucuna
≥ 2 lésions
≥ 2 poussées
Dissémination spatiale démontrée par :
1 lésion
- IRMb
ou
- ≥ 2 lésions IRM évocatrices et LCR +c
ou
- poussée suivante dans un site différent
1 poussée
Dissémination temporelle démontrée par :
≥ 2 lésions
- IRMd
ou
- deuxième poussée
1 poussée
Dissémination spatiale démontrée par :
1 lésion
- IRMb
ou
(présentation monosymptomatique,
- ≥ 2 lésions IRM évocatrices et LCR+c
syndrome clinique isolé)
et
Dissémination temporelle démontrée par :
- IRMd
ou
- deuxième poussée
Progression insidieuse évocatrice de SEP
LCR+c
et
Dissémination spatiale démontrée par :
- ≥ 9 lésions T2 à l’IRM cérébrale
ou ≥ 2 lésions à l’IRM médullaire
ou 4 à 8 lésions cérébrale et 1 médullaire
ou
- PEV anormaux associés à 4 à 8 lésions
cérébrales ou < 4 lésions cérébrales et 1
médullaire
et
Dissémination temporelle démontrée par :
- IRMd
ou
- progression continue pendant 1 an.
a : pas d’examen exigé, mais si l’IRM et le LCR sont normaux, le diagnostic doit être
posé avec précaution.
b : critères IRM : ceux de Barkhof et al. (1997), avec une lésion médullaire pouvant
remplacer une lésion encéphalique.
c : LCR + : soit présence de bandes oligoclonales d’IgG, soit élévation de l’index IgG.
d : Critères IRM de dissémination temporelle.
70
LES MANIFESTATIONS NEUROLOGIQUES DE
LA MALADIE DE BEHCET
I- INTRODUCTION
La maladie de Behçet (MB) est une affection multisystémique. Elle est d’étiologie
inconnue. Elle atteint essentiellement le sujet jeune, avec une nette prédominance
masculine. Elle est particulièrement fréquente au Japon et dans les pays du pourtour
méditerranéen.
Les atteintes neurologiques sont présentes dans 14 à 20 % des cas . Elles connaissent un
grand polymorphisme clinique, mais deux mécanismes physiopathologiques principaux
expliquent ces manifestations: la méningo-encéphalo-myélite et les thrombophlébites
cérébrales.
Les atteintes neurologiques représentent un élément de pronostic péjoratif car elles
peuvent engager aussi bien le pronostic fonctionnel que vital.
II- GENERALITES SUR LA MALADIE DE BEHCET
La maladie de Behçet fait partie des vascularites par ses multiples localisations
viscérales, notamment cutanées, oculaires, neurologiques, vasculaires, digestives et
rénales. C’est une affection du sujet jeune, elle survient généralement entre 18 et 40 ans,
avec une nette prédominance masculine (sexe ratio entre 7 et 10)
La pathogénie de la maladie de Behçet reste inconnue. Toutefois la maladie de Behcet
est fréquemment associée au groupe HLA B27.
Les principales manifestations sont représentées par les manifestations cutanéomuqueuses et oculaires, qui sont d’ailleurs utilisées comme des critères de diagnostic de
la maladie.
*L’atteinte cutanéo-muqueuse: dominée par les aphtes buccaux et génitaux, l’érythème
noueux, la pseudofolliculite, et l’hypersensibilité cutanée aux points d’injections.
*L’atteinte oculaire : conditionne le pronostic visuel. Elle se manifeste essentiellement
par une uvéite antérieure à hypopion, et une uvéite postérieure.
*Les manifestations vasculaires sont représentées par les thromboses veineuses qui sont
caractéristiques de la maladie, et qui peuvent toucher tous les axes veineux. Les
atteintes artérielles sont beaucoup plus rares.
*Les autres manifestations cliniques sont représentées par les atteintes articulaires,
digestives, pulmonaires, rénales, cardiaques et neurologiques.
Le diagnostic de la maladie de Behcet est un diagnostic clinique, basé sur des critères
qui ont été définis par le « groupe international d’étude de la maladie de Behçet »
(1990) :
* Aphtose buccale récidivante : plus de 3 poussées par an
* Au moins deux des manifestations suivantes :
Aphtose génitale récidivante
Autres lésions cutanées (pseudofolliculite, érythème noueux)
Lésions oculaires
Intradermoréaction positive à l’eau distillée (Test pathèrgique)
71
III- NEUROPATHOLOGIE
Les lésions peuvent siéger en n’importe quelle partie du système nerveux central, avec
une prédilection pour le tronc cérébral, les ganglions de la base, et les capsules internes.
Elles ne sont pas spécifiques et comportent le plus souvent trois ordres d’altération :
- Des lésions inflammatoires chroniques : disséminées au niveau des méninges, sous
forme d’infiltrats inflammatoires périvasculaires formés de lymphocytes et de
macrophages (méningo-encéphalite)
- Foyers de ramollissement avec nécrose tissulaire, généralement développés autour des
vaisseaux de moyen et de petit calibre.
- Altérations neuronales avec chromatolyse dans 1/3 des cas. La gliose est
habituellement discrète et la démyélinisation modérée.
Ainsi, à partir de ces aspects histologiques, deux principaux mécanismes
physiopathologiques se dégagent :
- la méningoencéphalomyélite
- les thromboses veineuses cérébrales.
IV- ASPECTS CLINIQUES
Les manifestations neurologiques de la maladie de Behçet sont fréquentes. Elles
apparaissent habituellement entre 30 et 40 ans. Elles sont exceptionnellement
révélatrices de la maladie. Dans l’immense majorité des cas, elles sont précédées par la
survenue d’aphtes buccaux et génitaux.
Le mode de début est très variable, le plus souvent brutal, aigu ou subaigu, plus
rarement progressif. Les manifestations neurologiques peuvent régresser spontanément
et évoluer, comme dans la SEP, par poussées et rémissions. Parfois, l’évolution est
d’emblée progressive.
Les manifestations neurologiques sont très polymorphes, car les lésions peuvent siéger
en n’importe quel point du système nerveux central, et souvent difficiles à systématiser.
Cependant, trois grands syndromes peuvent être distingués :
- La méningoencéphalomyélite = Neurobehçet
- Les thrombophlébites des sinus duraux
- Les thromboses veineuses profondes
L’atteinte du système nerveux périphérique et du muscle est exceptionnelle.
A- Méningo-encéphalo-myélite
Les manifestations neurologiques sont très polymorphes, et témoignent de l’atteinte
diffuse du système nerveux central.
1- L’atteinte méningée
Elle est le plus souvent asymptomatique, se traduisant biologiquement par l’existence
d’une méningite lymphocytaire lors de l’étude du LCR. Parfois, le tableau est celui
d’une méningite bactérienne, avec des céphalées intenses, des vomissements et une
raideur de la nuque. L’étude du LCR retrouve une méningite à polynucléaires
72
neutrophiles, mais l’examen bactériologique ne retrouve pas de germes. Ce tableau est
celui de la « méningite puriforme aseptique », caractéristique de la maladie de Behçet.
2- L’atteinte pyramidale
Elle est d’intensité variable. Le déficit moteur peut réaliser une hémiplégie
spontanément régressive et à bascule très évocatrice de la maladie ou bien une
paraplégie/tétraplégie.
3- L’atteinte du tronc cérébral
Elle est dominée par les signes d’atteinte bulbaire, avec troubles de la déglutition et des
troubles de la parole, témoignant d’une paralysie du carrefour aéro-digestif. Un
syndrome pseudobulbaire peut être associé, se manifestant par des rires et des pleurers
spasmodiques.
Les paralysies oculomotrices peuvent exister. Contrairement à la SEP, l’ophtalmoplégie
internucléaire est exceptionnelle.
4- L’atteinte cérébelleuse
Elle est également fréquente réalisant ataxie à la marche et troubles de la coordination.
5- Les troubles psychiatriques
Ils sont fréquents. Ils se manifestent par des troubles du comportement, de la
personnalité et de l’humeur, pouvant aller dans certains cas jusqu’à réaliser de véritables
états psychotiques. Ces manifestations sont le plus souvent associées à d’autres
manifestations neurologiques, ce qui permet de les rattacher facilement à une origine
organique. Rarement, elles peuvent être isolées, réalisant un véritable syndrome psychoorganique, parfois difficile à distinguer d’une affection psychiatrique.
6- Troubles cognitifs
Ils sont de plus en plus connus dans la maladie de Behçet. Il s’agit le plus souvent de
troubles de la mémoire, d’une bradyphrénie et des troubles des fonctions exécutives,
pouvant réaliser parfois un tableau de démence sous-corticale.
8- Les troubles sphinctériens
Ils témoignent d’une atteinte médullaire, faisant souvent partie d’un tableau d’atteinte
diffuse. L’atteinte médullaire isolée est exceptionnelle.
9- Les autres manifestations cliniques
Elles sont représentées par les crises d’épilepsie, les mouvements anormaux. Les
troubles sensitifs, contrairement à la SEP sont rares, de même que la névrite optique
rétro-bulbaire.
Tous ces signes neurologiques sont souvent associés, de façon très variable. Toutes les
associations sont possibles. Cependant, certains tableaux sont très suggestifs : Le
73
tableau classique est caractérisé par un début aigu ou subaigu, et associe des signes
d’atteinte des voies longues (syndrome pyramidal ou cérébelleux), des signes bulbaires
ou pseudobulbaires, des troubles sphinctériens, et des troubles psychiatriques.
B- Thromboses veineuses cérébrales superficielles
Elles représentent une complication majeure de la maladie de Behçet. Elles peuvent
toucher tous les sinus duraux, en particulier le sinus longitudinal supérieur (SLS) et les
sinus latéraux. Elles réalisent sur le plan clinique soit un tableau d’hypertension
intracrânienne, associant céphalées, vomissements, et œdème papillaire au fond d’œil,
soit un tableau d’infarctus veineux, associant au syndrome d’hypertension
intracrânienne, des crises épileptiques et des déficits neurologiques focaux d’installation
brutale ou rapide.
C- Thrombose du système veineux profond
Ce tableau est caractéristique de la maladie. Il s’agit d’une thrombose du système
veineux cérébral profond, en particulier les veines cérébrales internes et les veines
basales de Rosenthal.
Le tableau neurologique est caractérisé par l’installation brutale ou rapide de déficits
neurologiques focaux, associant une atteinte pyramidale et un syndrome du tronc
cérébral, et surtout la présence de troubles neuro-psychologiques pouvant aller jusqu’à
la démence.
D- Autres manifestations
Elles sont beaucoup plus rares ou exceptionnelles :
- Les anévrysmes intracérébraux
- Les neuropathies périphériques ou l’atteinte musculaire ( myosite inflammatoire )
V- EXAMENS PARACLINIQUES
A- Biologie
Les examens biologiques peuvent montrer un syndrome inflammatoire avec une
accélération de la vitesse de sédimentation. Une hyperleucocytose à polynucléaires
neutrophiles est également habituelle.
B- Etude du LCR
L’étude du LCR montre dans la plupart des cas un LCR inflammatoire, avec une
méningite lymphocytaire, une augmentation modérée des protides totaux. La sécrétion
intrathécale des gamma-globulines est inconstante. Parfois, on peut retrouver une
hypercytose à polynucléaires (méningite puriforme aseptique) ou bien une formule
panachée. La présence de polynucléaires dans le LCR est très suggestive du diagnostic.
74
C- Scanner cérébral
Le scanner cérébral montre des aspects différents, selon qu’on est devant un tableau de
méningo-encéphalo-myélite ou devant un tableau de thrombophlébite cérébrale
- Dans le cas de la méningoencéphalomyélite : le scanner est généralement normal ou
montre une simple atrophie cortico-sous-corticale. Parfois, il montre des hypodensités
au niveau du tronc cérébral, qui s’étendent aux noyaux gris centraux, en particulier au
niveau du thalamus.
- Dans le cas d’une thrombose des sinus duraux : il peut être normal ou montrer des
signes indirects d’une thrombose veineuse: signe du delta vide ou triangle vide =
hypodensité à l’intérieur du sinus longitudinal supérieur (après injection du produit de
contraste) ; ou un infarctus hémorragique
- Dans le cas d’une thrombose du système veineux profond : l’aspect typique est celui
d’hypodensités bilatérales des NGC, en particulier des thalamus, avec extension au
tronc cérébral. Ces hypodensités prennent le contraste de façon intense, pouvant parfois
être pris pour un processus infectieux. Elles évoluent classiquement vers la régression
spontanée (ou sous traitement)
D- IRM et angio-IRM cérébrale
Elle est beaucoup plus sensible que le scanner, que ce soit pour montrer les lésions du
tronc cérébral lors de la méningo-encéphalo-myélite ou pour le diagnostic des
thromboses cérébrales en montrant directement la thrombose.
E- Artériographie cérébrale
Elle est utile pour le diagnostic des thrombophlébites cérébrales, superficielles et
profondes. Elle doit être pratiquée systématiquement, à défaut d’IRM, devant tout
tableau évocateur d’une thrombophlébite cérébrale.
VI-DIAGNOSTIC POSITIF
On peut se trouver devant deux situations différentes :
- 1ère situation : Maladie de Behçet connue
Il s’agit dans ce cas d’un malade suivi dans un service de dermatologie ou de médecine
interne pour aphtose récidivante ou bien dans un service d’ophtalmologie pour atteinte
oculaire dans le cadre d’une maladie de Behçet, et qui fait apparaître des signes
neurologiques. Dans ce cas, il est facile de rattacher les manifestations neurologiques à
la maladie de Behçet.
- 2ème situation : Maladie de Behçet inconnue
Le diagnostic doit être évoqué devant :
- Un tableau neurologique caractéristique : thrombophlébite cérébrale, AVC du sujet
jeune, syndrome psycho-organique
- Une symptomatologie neurologique récidivante, chez un sujet jeune de sexe masculin.
75
- Les signes neuro-radiologiques peuvent aider au diagnostic.
Les signes cardinaux de la maladie doivent être recherchés de façon systématique, en
particulier l’aphtose buccale qui n’est pas toujours spontanément rapportée par les
patients.
VI- TRAITEMENT
Le traitement est basé dans tous les cas sur la corticothérapie. Elle doit être instaurée le
plus tôt possible et poursuivi au long cours.
On utilise la Prédnisone à raison de 1 à 1,5 mg/ Kg/ j.
- Dans les formes sévères de méningoencéphalomyélite : le traitement corticoïde seul
n’est pas suffisant, et on associe des immunosuppresseurs : le plus souvent le
Cyclophosphamide en cure d’induction suivie de Bolus mensuels pendant 1 à 2 ans.
- En cas de thrombose veineuse : le traitement corticoïde est associé à des
anticoagulants : Héparine puis antivitamines K pendant au moins 6 mois.
- Un traitement d’appoint : à base de Colchicine doit toujours être associé.
VIII- PRONOSTIC
Les manifestations neurologiques de la maladie de Behçet représentent des
complications graves, et sont classiquement de mauvais pronostic aussi bien sur le plan
vital que fonctionnel (séquelles à la fois motrices et neuro-psychologiques).
Les thrombophlébites cérébrales des sinus duraux, sont de meilleur pronostic que la
méningo-encéphalo-myélite et les thromboses profondes.
Le pronostic est d’autant plus mauvais que le traitement est instauré tardivement, d’où
l’intérêt d’un traitement précoce et bien conduit.
OBJECTIFS
-
Préciser les principales complications neurologiques de la maladie de Behçet.
Décrire le tableau clinique de la méningoencéphalomyélite = neurobehçet
Décrire le tableau clinique des thromboses veineuses cérébrales superficielles et
profondes.
Préciser les examens complémentaires utiles au diagnostic des complications
neurologiques du Behçet, et leurs résultats.
Préciser le traitement et le pronostic des complications neurologiques du Behçet.
76
LES CEPHALEES
I- INTRODUCTION
La céphalée désigne classiquement une douleur ressentie au niveau du crâne. Les
céphalées représentent le premier motif de consultation en neurologie et relèvent de
causes multiples. Il est important de distinguer les céphalées essentielles bénignes, de
loin les plus fréquentes, des céphalées symptomatiques dont certaines sont des urgences
neurologiques.
Le diagnostic des céphalées a largement bénéficié de la classification internationale des
céphalées, adoptée par l’International Headache Society (IHS), qui a permis de définir
des critères stricts pour chaque type de céphalée.
II- CONDUITE DU DIAGNOSTIC
Elle est basée essentiellement sur un interrogatoire bien conduit, étape capitale du
diagnostic devant une céphalée, et complété par un examen clinique neurologique et
général.
A- Interrogatoire
Il permet de préciser :
-
-
-
L’âge et le sexe : Certaines pathologies sont particulièrement fréquentes chez la
femme jeune, comme la migraine, d’autres pathologies sont plutôt fréquentes
chez le sujet âgé comme la névralgie faciale essentielle.
Les antécédents personnels et familiaux de céphalées ou d’autres pathologies,
notamment les facteurs de risque cardio-vasculaires.
Les caractéristiques de la céphalée : siège, sévérité, type, durée, et surtout son
profil évolutif ce qui permettra de différencier entre céphalée récente, et
céphalée chronique.
Les signes accompagnateurs : peuvent être de grande valeur, telle une aura
neurologique en faveur d’une migraine ou une altération de l’état général et des
douleurs articulaires en faveur d’une maladie de Horton.
B- Examen clinique
Il doit comporter un examen neurologique, une auscultation du crâne, un examen du
fond d’œil, et un examen général. Le moindre signe neurologique anormal doit imposer
la réalisation d’un scanner cérébral.
C- Examens paracliniques
Le scanner cérébral est systématique devant une céphalée d’installation brutale ou
rapidement progressive, même si l’examen clinique est normal.
Le diagnostic des céphalées essentielles bénignes reste purement clinique, mais la
pratique d’investigations complémentaires est néanmoins justifiée chaque fois qu’existe
la moindre atypie sémiologique ou évolutive.
77
III- DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
Le diagnostic étiologique est essentiellement fonction du profil évolutif de la céphalée.
On distingue ainsi :
- les céphalées récentes, qui s’installent soit brutalement, soit de façon rapidement
progressive. Ce sont des urgences neurologiques, et nécessitent des
investigations rapides.
- les céphalées chroniques, qui évoluent par crises ou de façon permanente. Ce
sont les céphalées essentielles bénignes, dont le chef de fil est la migraine.
A- Les céphalées récentes = urgence neurologique
1 – Les céphalées brusques
Dans ce cas trois principaux diagnostics sont à envisager :
-
L’hémorragie méningée : qui se manifeste par une céphalée brutale ressentie
comme un coup de poignard, associée le plus souvent à des vomissements.
L’examen neurologique retrouve une raideur de la nuque, et le scanner et/ou la
ponction lombaire permettent le diagnostic. L’artériographie en urgence s’impose
pour diagnostiquer un éventuel anévrysme artériel.
-
L’hémorragie cérébrale : c’est un tableau d’hémorragie méningée avec des signes
de focalisation.
-
L’encéphalopathie hypertensive : est une cause rare de céphalées récentes et
brutales. Elle peut s’observer dans le cadre d’une hypertension artérielle maligne, en
particulier secondaire à des néphropathies.
2 – Céphalées rapidement progressives
Ce sont des céphalées qui s’aggravent sur quelques jours ou quelques semaines. Elles
témoignent soit d’un tableau d’hypertension intracrânienne, soit d’une méningite, ou
beaucoup plus rarement d’une artérite temporale de Horton.
- Hypertension intracrânienne (HIC)
Les céphalées sont diffuses ou en casque, et elles sont associées à des nausées et / ou
des vomissements, à une diminution de l’acuité visuelle, et à une paralysie éventuelle de
la VIème paire crânienne. Le fond d’œil retrouve un œdème papillaire bilatéral.
Le syndrome d’hypertension intracrânienne peut être en rapport avec trois étiologies
principales : un processus expansif intracérébral, une thrombophlébite des sinus
veineux, ou une hypertension intracrânienne bénigne (quand le LCR et la neuroimagerie
sont normaux).
- Méningites
Une méningite est évoquée lorsque les céphalées sont associées à de la fièvre.
L’examen retrouve une raideur de la nuque. Le diagnostic est confirmé par la ponction
lombaire.
78
- Artérite temporale de Horton
Cette affection doit être évoquée devant toute céphalée d’apparition récente chez un
sujet de plus de 60 ans. La céphalée peut s’associer à des troubles visuels, qui font toute
la gravité de la maladie, à une fièvre et une altération de l’état général. Le diagnostic est
basé sur l’accélération de la vitesse de sédimentation, et l’existence d’anomalies
caractéristiques à la biopsie de l’artère temporale.
B- Céphalées essentielles bénignes
Ce groupe de céphalées a largement bénéficié des précisions apportées par la
classification de l’international headache society (IHS), qui a définit des critères stricts
pour chaque type de céphalée. Ce groupe est largement dominé par la migraine et les
céphalées de tension.
1-Migraine
La migraine est une affection très répandue, qui survient surtout chez le sujet jeune,
entre 20 et 40 ans, avec une nette prédominance féminine (3 F / 1 H). Elle a souvent un
caractère familial, mais il n’existe aucune preuve formelle du caractère héréditaire de la
migraine. L’évolution de la migraine se fait par crises, dont la fréquence est très
variable d’un sujet à l’autre, et tout au long de l’existence d’un même individu.
Sur le plan clinique, on distingue deux types de migraines : la migraine commune ou
migraine sans aura, de loin la pus fréquente, et la migraine avec aura.
a- Migraine commune (migraine sans aura )
Dont les caractéristiques ont été précisées par l’IHS :
Critères diagnostiques de la migraine commune, selon l’IHS ( 1988) :
A- Au moins 5 crises répondant aux critères B à D
B- Crises de céphalées durant 4 à 72 heures (sans traitement)
C- Céphalées ayant au moins deux des caractéristiques suivantes :
- unilatéralité
- Pulsatilité
- Caractère modéré à sévère
- Aggravation par les activités physiques de routine, telles que montée ou
descente des escaliers.
D- Durant les céphalées, au moins l’un des caractères suivants :
- Phonophobie et photophobie
- Nausées et / ou vomissements
b- Migraine avec aura
L’aura est un dysfonctionnement neurologique focal et transitoire, qui marque le début
de la crise, la précède de 30 minutes à une heure. Elle dure par définition moins de 15
minutes. Les céphalées ont les mêmes caractéristiques que la migraine commune.
79
Plusieurs types d’auras sont décrits :
- les auras visuelles sont les plus fréquentes, et caractérisent la migraine
ophtalmique. Les deux principales manifestations en sont :
*Le scotome scintillant = point lumineux et scintillant
*les phosphènes= volontiers brillantes et colorées à type de taches, zigzag,
éclairs ou étoiles.
- les auras sensitives, plus rares, sont le plus souvent à type de paresthésies
unilatérales de distribution chéiro-orale (autour de la bouche).
- les troubles du langage et l’hémiparésie sont encore plus rares, et généralement
associés aux troubles visuels et sensitifs.
Le traitement de la crise de migraine fait appel aux antalgiques (paracetamol), aux
AINS ou aux Triptans (Médicaments spécifiques des crises de migraine).
Le traitement de fond est parfois nécessaire devant des crises fréquentes et sévères. Il
fait appel souvent aux betabloquants (Avlocardyl*) ou à l’amitryptiline (Laroxyl*).
2-Céphalées de tension (CT)
Elles sont aussi fréquentes que la migraine à laquelle elles sont souvent associées. Le
terme « céphalées de tension » fait référence à la tension psychologique qui les soustend souvent, et à la tension des masses musculaires qui les accompagnent.
L’IHS définit les CT comme des céphalées souvent bilatérales diffuses en casque. La
douleur est décrite comme une sensation de pression ou d’étau. Elle est d’intensité
modérée ou légère, ne s’aggravant pas par l’activité normale, et rarement accompagnée
de symptômes associés tels que nausées ou photophobie. L’examen somatique retrouve
parfois une contracture des muscles du cou, des épaules, et des masséters.
La prise en charge des CT est difficile, et nécessite souvent une prise en charge à la fois
médicamenteuse et psychologique.
3-Névralgie faciale essentielle
C’est une affection du sujet âgé qui débute après 50 ans. La prédominance féminine est
la règle. Le diagnostic est aisé et repose sur quatre éléments cliniques :
- la qualité de la douleur : intense et paroxystique, décrite comme une décharge
électrique ou un éclair.
- la topographie de la douleur : elle est unilatérale, strictement localisée au territoire
du trijumeau.
facteurs déclenchants de la douleur : le plus fréquent est la stimulation cutanée
(attouchement ou frôlement) d’une zone précise du territoire douloureux appelée
« trigger zone »ou « zone gâchette ».
l’examen neurologique : doit s’assurer de la parfaite normalité de la sensibilité
faciale et de la cornée. La constatation du moindre trouble sensitif oriente vers le
diagnostic de névralgie symptomatique (recherche étiologique nécessaire)
Le traitement est basé sur les anti-épileptiques (Carbamazeépine (Tegretol*),
Gabapentin (Neurontin*)).
80
4- L’algie vasculaire de la face (AVF)
L’algie vasculaire de la face est une affection rare, 25 fois moins fréquente que la
migraine.
Elle affecte le sujet jeune (20 à 30 ans), le plus souvent de sexe masculin.
Sa symptomatologie est stéréotypée. Il s’agit d’une douleur extrêmement sévère,
strictement unilatérale, qui s’accompagne souvent de signes sympathiques
homolatéraux à la douleur (rougeur oculaire, larmoiement, écoulement nasal, myosis,
ptosis, et sudation du front).
5-Céphalées inhabituelles
Elles regroupent un certain nombre de céphalées, de sémiologie très spécifique ou
survenant en présence d’un facteur déclenchant particulier parmi lesquels : les céphalées
induites par le froid, la toux, l’effort, l’exercice physique.
C-Céphalées associées à des
stomatologiques ou cervicales
affections
ORL,
ophtalmologiques,
De nombreuses affections relevant de ces spécialités peuvent s’accompagner de
céphalées. Mais dans ces cas, les céphalées ont une sémiologie propre et des signes
accompagnateurs spécifiques, qui permettent rapidement de les évoquer.
- les affections ORL : sinusites aiguës ou chroniques
- les affections ophtalmologiques : glaucome aigu, troubles de la réfraction non ou mal
corrigés.
- les affections stomatologiques : affections dentaires, ou dysfonctionnement de
l’articulation temporo-maxillaire
- les affections cervicales : localisées au cou et à la région occipitale, peuvent irradier
au niveau du crâne.
OBJECTIFS
-
Préciser la conduite diagnostique devant une céphalée.
Différencier entre céphalée récente et céphalée essentielle bénigne.
Préciser les différentes étiologies des céphalées brutales et des céphalées
rapidement progressives.
Citer les principales céphalées essentielles bénignes.
Décrire les caractéristiques cliniques des deux types de migraine.
Décrire les caractéristiques cliniques des céphalées de tension.
Décrire les caractéristiques cliniques de la névralgie faciale.
81
MANIFESTATIONS NEUROLOGIQUES DE LA TUBERCULOSE
Fléau majeur dans les pays en voie de développement, la tuberculose est en
recrudescence dans les pays occidentaux surtout depuis l'avènement du Sida. L'atteinte
neuroméningée, souvent grave, est très polymorphe.
I- EPIDEMIOLOGIE
Le délai de contamination peut aller de 6 mois à 5 ans. Il faut savoir qu’il existe des
facteurs favorisants tel que la dénutrition, un logement insalubre, l’alcoolisme, le
diabète, une gastrectomie, les thérapeutiques immunodépressives et le SIDA. Il est à
noter que le vaccin par le BCG ne met pas à l'abri d’une tuberculose du système
nerveux central lors d’une contamination massive ou à distance de la vaccination.
II- PHYSIOPATHOLOGIE
La transmission du germe peut se faire par voie sanguine, par lésion tuberculeuse des
plexus choroïdes, par effraction d'un tubercule méningé de la corticalité du cerveau ou
par voie directe d'un foyer osseux paraméningé, d'une otite ou d'une mastoïdite
tuberculeuse.
Nous traiterons dans un premier temps de la méningite tuberculeuse, ensuite des
tuberculomes et des autres formes de tuberculose du système nerveux.
III-MENINGITE TUBERCULEUSE
La méningite tuberculeuse est une urgence médicale dont le pronostic dépend de la
précocité du diagnostic et de la mise en route du traitement.
A- Aspects anatomopathologiques
Il existe un exsudat méningé à la base du cerveau, en interpédonculaire, au niveau de la
scissure sylvienne, des plexus choroïdes et des régions épendymaires. Puis il diffuse
vers le bulbe, le cervelet, les citernes de la base et le trou de Luschka. Ces exsudats
peuvent toucher les artères et entraîner des artérites qui conduiront à la nécrose
fibrinoïde, à la thrombose et à de multiples infarctus. Dans les formes évoluées,
l’œdème et la réaction gliale sont importants et aboutiront à une fibrose.
Lorsque la méningite est traitée tôt, les lésions disparaissent au bout du 3ème mois,
remplacées éventuellement par une sclérose. Dans la méningite spinale, l’exsudat
adhère à la dure-mère et aux leptoméninges évoluant vers une arachnoïdite et le
développement possible de kystes arachnoïdiens.
B- Signes cliniques :
Les prodromes sont faits de signes généraux à type de somnolence, d’anorexie,
d’amaigrissement, de malaise, d’irritabilité, de céphalées, de confusion, et de fièvre aux
alentours de 38°C. Ensuite s’installent des signes méningés, rarement au complet et qui
82
peuvent manquer dans les formes comateuses. Les symptômes possibles au début
peuvent être des troubles de la conscience (coma) ou du comportement, une confusion
mentale, une indifférence, une adynamie ou des symptômes dépressifs. Ils sont souvent
accompagnés de signes basilaires à type de paralysies oculomotrices et des troubles
végétatifs (troubles du rythme respiratoire, cardiaque et de la tension artérielle, ainsi que
des bouffées vasomotrices). Des signes de focalisation (déficits moteurs, troubles
cérébélleux) ou des crises épileptiques sont fréquemment associés.
C- Formes syndromiques
-
-
-
La méningite basilaire associant un syndrome méningé, des paralysies
oculomotrices, une somnolence ou une obnubilation
La méningo-encéphalite tuberculeuse associant des signes méningés, des
troubles de la conscience, une hémiplégie et/ou des crises épileptiques ;
La méningite (ou arachnoïdite) spinale qui se traduit par une paraplégie
d’installation aiguë, subaiguë ou chronique constituant un tableau de
compression médullaire lente.
La radiculo-myélopathie associant des radiculalgies et une paraplégie ou
tétraplégie.
La tuberculose miliaire du névraxe s'apparentant à celle observée dans la
miliaire pulmonaire ; elle est de séméiologie peu bruyante évoluant sur plusieurs
mois.
Chez le nourrisson, les symptômes peuvent être à type de troubles digestifs,
d’arrêt de la courbe pondérale, d’hypotonie (la raideur méningée peut manquer),
de somnolence inhabituelle, de plafonnement intermittent du regard et d’une
tension de la fontanelle.
D-Examens complémentaires
1 - L’examen ophtalmologique
Il recherche un œdème papillaire, une atrophie optique ou des tubercules de Bouchut
(tâches rondes ou ovalaires, jaunâtres autour de la papille ou le long des vaisseaux)
témoins d'une dissémination choroïdienne.
2 - L’IDR à la tuberculine
Elle peut être phlycténulaire mais peut aussi être négative dans la moitié des cas.
3 - Examens biologiques
a- Ponction lombaire
- Le liquide céphalo-rachidien est clair, ou jaune citrin avec une cytologie de 50 à
1000 lymphocytes /mm3 et une hyper-protéinorachie supérieure à 1 g/l.
L’hypoglycorachie est constante (à corréler avec les valeurs sanguines).
L’électrophorèse des protides objective une forte sécrétion intrathécale des
immunoglobulines.
- L’examen direct met rarement en évidence le BK et les cultures sont positives dans
45 à 90 % des cas après 3 à 6 semaines. La " polymerase chain reaction " (PCR)
reste l’examen le plus sensible et le plus spécifique. Elle permet un diagnostic
83
rapide (dans les 48 h), mais n’est applicable en routine que dans des centres
spécialisés.
b. L’ionogramme sanguin recherche une hyponatrémie (due à une sécrétion
inappropriée d’ADH ou syndrome de Schwartz-Barter).
c. Le reste du bilan biologique objective un syndrome inflammatoire sanguin et parfois
une lymphopénie.
4- L’imagerie cérébrale : scanner ou IRM
Réalisés avant et après injection de produit de contraste, ils objectivent une prise de
contraste des citernes de la base du cerveau et / ou une dilatation ventriculaire qui signe
l’existence d’une hydrocéphalie par défaut de résorption du LCR. Ils peuvent mettre en
évidence des infarctus cérébraux secondaires à une artérite tuberculeuse (des vaisseaux
de petits et moyens calibres). Parfois, des tuberculomes sont associés à la méningite.
L’IRM analyse mieux les lésions du tronc cérébral et de la moelle épinière.
E- Diagnostic
Le diagnostic positif est souvent posé sur un faisceaux d’arguments épidémiologiques
(notion de contage), cliniques (méningite subaiguë basilaire), biologiques (méningite
lymphocytaire, hyperprotéinorachie, hypoglycorachie et hyponatrémie) et radiologiques
(prise de contraste de la base et hydrocéphalie). La mise en évidence du BK dans le
LCR étant souvent difficile, le traitement antibacillaire doit être démarré rapidement
sans attendre la confirmation bactériologique.
Le diagnostic différentiel est celui des autres méningites lymphocytaires : virales,
listériennes, brucélliennes, carcinomateuses, purulentes décapitées et dans notre
contexte une complication neurologique de la maladie de Behcet.
IV-LES TUBERCULOMES
A- Aspects anatomopathologiques
Le tubercule retrouvé à la superficie du cerveau ou dans la leptoméninge est constitué
de cellules géantes épithélioïdes entourant une zone centrale de nécrose caséeuse. Alors
que le tuberculome parenchymateux est une masse de tissu granulomateux avec caséum
central dont la gliose puis fibrose entourent la capsule et évoluent vers la calcification.
B- Signes cliniques
Ils sont fonction de la localisation des lésions.
- Les tuberculomes hémisphériques peuvent engendrer des crises épileptiques
et/ou une hémiplégie associés ou non à une HIC.
- Au niveau du tronc cérébral ils entraînent des céphalées, des paralysies
oculomotrices, un déficit moteur, une ataxie, un syndrome alterne, une
altération de la conscience.
84
-
-
L’atteinte du chiasma optique entraîne une baisse de l'activité visuelle ou une
hémianopsie bitemporale et une insuffisance hypothalamique et
antéhypophysaire si extension au 3ème ventricule.
Dans la moelle épinière, les tuberculomes entraînent une compression
médullaire lente ou un syndrome de Brown-Séquard.
C- Examens neuroradiologqiues
1- Scanner cérébral
Le tuberculome se traduit par une image circonscrite, hypodense ne prenant pas le
contraste au stade initial. Parfois la lésion est isodense ou légèrement hyperdense
entourée d'une zone d'œdème et prenant le contraste de façon homogène plus ou moins
intense ou en couronne.
L’abcès tuberculeux est sous forme d’hypodensité cerclée par une fine prise de
contraste.
2- Imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale
Elle est plus sensible que le scanner et permet de visualiser les tuberculomes de petite
taille ou localisés au niveau du tronc cérébral en montrant un aspect en cible à noyau
clair. Elle reste l’examen de choix dans l'atteinte médullaire en appréciant à la fois la
gravité et l'extension des lésions intramédullaires et méningées.
D- Diagnostic
Le diagnostic positif ne pose pas de problème en cas de tuberculose extraneurologique
associée. En cas de tuberculomes cérébraux isolés une biopsie stéréotaxique s’avère
nécessaire.
Le diagnostic différentiel se pose avec des processus expansifs intracrâniens : abcès à
pyogènes, tumeurs qu’elles soient primitives (gliomes) ou secondaires (métastases).
V- TRAITEMENT
A- Traitement médicamenteux
Il fait appel aux antituberculeux majeurs : Isoniazide (INH), Rifampicine, Ethambutol,
Pyrazinamide et parfois Streptomycine ou Quinolones. La durée du traitement est au
minimum d’une année combinant au moins 4 antibacillaires majeurs.
La corticothérapie par voie orale est indiquée dans les formes graves de méningite
tuberculeuse : en cas d’hypertension intracrânienne avec œdème papillaire, de troubles
de la conscience, de tuberculomes de grande taille et en cas de protéinorachie très
élevée. Certains préconisent une corticothérapie en intrathécal (hémisuccinate
d’hydrocortisone) en cas d’arachnoïdite spinale.
B- Traitement chirurgical
Il est indiqué dans l’hydrocéphalie (drainage ventriculo péritonéal ou ventriculo atrial),
et dans la compression médullaire.
85
VI- EVOLUTION ET PRONOSTIC
La méningite tuberculeuse reste une urgence médicale dont le pronostic dépend de la
précocité du traitement. La guérison sans séquelles est possible dans les formes sans
signes de focalisation ni troubles de la conscience. La mortalité peut aller jusqu’à 50%
chez les sujets âgés et les nourissons.
Des complications peuvent survenir : hydrocéphalie, cécité avec atrophie optique,
surdité, crises épileptiques, retard mental chez l’enfant, complications endocriniennes
(obésité, retard de croissance, hypogonadisme, diabète insipide, panhypopituitarisme),
complications médullaires telle que paraplégie par arachnoïdite.
Sous traitement médical, l'involution du tuberculome se fait lentement, sur plusieurs
mois, et la résolution définitive n'est souvent obtenue que très tardivement (1 à 2 ans).
Des calcifications séquellaires ou une atrophie adjacente ne sont pas rares. Après
traitement médical, l’absence de séquelle au scanner cérébral est possible.
OBJECTIFS
-
Connaître les signes cliniques de la méningite tuberculeuse
Citer les différentes formes syndromiques de méningite tuberculeuse
Savoir quels examens complémentaires demander devant une suspicion de
méningite tuberculeuse
Connaître la description clinique des tuberculomes
Connaître les aspects scannographiques et IRM des tuberculomes
Connaître les principes du traitement de la tuberculose du système nerveux
Connaître les principales complications de la tuberculose du système nerveux
86
LA NEURO-SYPHILIS
I- GENERALITES
La syphilis est une MST due au Tréponema Pallidum appartenant aux Spirochètes. Elle
est connue depuis l'antiquité et est répandue dans tous les pays.
L'introduction de la Pénicilline en 1948 a laissé espérer son éradication.
Malheureusement après une phase de régression, elle connaît de nos jours une
expansion surtout après l'avènement du SIDA.
La recrudescence actuelle fait intervenir plusieurs facteurs :
- la mauvaise utilisation des antibiotiques (doses et durée insuffisantes)
- la prostitution sous toutes ses formes.
- l'homosexualité
- la toxicomanie
II- LES DIFFERENTS STADES DE LA MALADIE
Selon la nouvelle classification, on distingue :
A- La syphilis récente qui comprend :
1- L'accident primaire : c'est à dire le chancre syphilitique
2- La syphilis secondaire : elle survient 45 jours après l'incubation et
comporte une atteinte cutanéomuqueuse sous forme de roséole ou de
syphilides papulo-érosives. S'y associent des signes généraux : fièvre,
méningite, hépatite, ostéite, iridocyclite.
3- La syphilis congénitale précoce, souvent mortelle.
B- La syphilis tardive
- Congénitale tardive
- Acquise : Localisation cutanéomuqueuse, cardiovasculaire et neurologique.
III- LA NEUROSYPHILIS
A- Généralités
Elle avait presque disparu dans les pays occidentaux jusqu’à l’apparition du SIDA. Elle
reste fréquente dans notre pays en raison de la mauvaise prise en charge de la syphilis
primaire.
Elle apparaît classiquement 5 à 15 ans après la phase primaire. En fait la réaction
méningée est concomitante de la phase septicémique qui caractérise la syphilis récente.
L'age d'apparition se situe dans la 4ème ou 5ème décade, mais nous remarquons un
rajeunissement de ce début. Elle touche plus l'homme que la femme.
B- Aspects cliniques
Le tableau clinique de la neurosyphilis dépend de la phase évolutive : au stade
secondaire c’est la méningite et la méningovascularite, au stade tertiaire c’est la
méningoencéphalite chronique et le tabès.
87
1- La méningite aiguë ou subaiguë
Les lésions touchent les méninges seules ou diffusent au parenchyme cérébral. Le
tableau clinique sera alors soit celui d'une méningite de la convexité avec céphalées,
asthénie, troubles du caractère et crises comitiales ; ou une méningite de la base qui
associe aux signes méningés une atteinte des nerfs crâniens en particulier les nerfs
oculomoteurs et la VIIIème paire (surdité et vertiges).
2- Méningovascularite
C'est le tableau d'un AVC le plus souvent carotidien : Hémiplégie d’installation brutale
associée à une méningite lymphocytaire. La positivité des réactions syphilitiques dans le
LCR confirmera le diagnostic. Sur le plan anatomopathologique il s'agit d'une
panartérite segmentaire prédominant sur les artères de moyen et de gros calibre. Les
atteintes veineuses sont exceptionnelles.
3- Méningo-encéphalite chronique ou « paralysie générale »
Elle se caractérise par une double symptomatologie neurologique et psychiatrique.
Le début se fait presque toujours par des troubles du comportement à type d'agitation,
d'agressivité, de perturbation des conduites sociales, des troubles de la mémoire et de
l'attention. Les idées délirantes typiquement mégalomaniaques ou dépressives sont
caractéristiques mais inconstantes.
L’évolution se fait vers un tableau de démence cortico-frontale fait de troubles
intellectuels, de la mémoire, du raisonnement et du jugement qui seront au mieux
évalués par un examen neuropsychologique. L’association d’un délire mégalomaniaque
est très évocatrice d’une démence syphilitique. Les signes neurologiques souvent
associés sont dominés par la dysarthrie extrapyramidale pratiquement pathognomonique
: c'est une voix faible, tremblante avec des achoppements sur les syllabes avec un faciès
amimique et un tremblement labial ainsi que des anomalies pupillaires (signe d'Argyll
Robertson).
4- La syphilis médullaire :
Elle peut réaliser trois formes cliniques :
a- La myélite aigue transverse : elle est due à une atteinte artérielle réalisant une
myélomalacie. Elle se manifeste par une paraplégie brutale avec incontinence
sphinctérienne et anesthésie superficielle. La paraplégie est au début flasque puis elle
évolue vers la spasticité.
b- La myélite d'Erb : Elle est due à une atteinte des cordons latéraux de la moelle. Elle
se manifeste par une paraparésie progressive sans troubles sensitifs.
c- Le tabès : C'est un syndrome radiculo-cordonal postérieur qui se manifeste par de
gros troubles de la sensibilité profonde responsable d'une ataxie de la marche, une
aréflexie ostéo-tendineuse et des douleurs cordonales fulgurantes. S'y associent parfois
des arthropathies nerveuses (grosses déformations articulaires sans douleurs), des crises
88
viscérales et un signe d'Argyll Robertson. L'association d'une atrophie optique réalise le
tableau de tabès amaurotique.
5- Les formes rares
- L’atrophie optique syphilitique qui peut être isolée est souvent responsable d’une
cécité irréversible.
- La pseudo-SLA Syphilitique : signes d'atteinte de la corne antérieure mais asymétrique
- La striatite syphilitique : C’est le tableau d’un syndrome parkinsonien
- La cérébellite syphilitique
- La gomme cérébrale syphilitique : c'est un abcès cérébral froid révélé par des signes de
focalisation (Hémiplégie, crises épileptiques, ...).
C- Aspects paracliniques
1- Examens biologiques :
- Les sérologies de la syphilis (VDRL, TPHA) sont fortement positives dans le sang.
- LCR: l’étude cytochimique montre souvent une lymphocytose et une
hyperprotéinorachie modérées. L’électrophorèse des protides objective une sécrétion
intratéchale importante des gammaglobulines. Le diagnostic de neurosyphilis requiert la
positivité des sérologies syphilitiques (VDRL, TPHA) dans le LCR.
2- Radiologie
Le scanner cérébral montre soit une hypodensité de topographie vasculaire en cas de
vascularite, soit une atrophie cortico-sous-corticale à prédominance frontale en cas de
méningo-encéphalite. En cas de gomme on trouvera un processus occupant de l'espace.
L'IRM cérébrale n'est que rarement indiquée. L'IRM médullaire peut être utile en cas de
myélopathie (myélite aigue ou myélite d'Erb).
Des Radio simples sont indiquées en cas d'atteinte osseuse (arthropathies tabétiques).
IV-TRAITEMENT ET EVOLUTION
La Pénicilline reste le meilleur antibiotique de la neurosyphilis.
Le protocole utilisé est le suivant : 10 Millions dans du sérum glucosé isotonique en
perfusion IV pendant 4 heures 2 fois par jour, pendant 10 jours. Ce traitement est à
refaire tous les 3 mois jusqu'à totaliser 4 cures.
On peut y associer selon les cas un traitement symptomatique : les neuroleptiques, les
antalgiques à action centrale, les anti-épileptiques…..
L’évolution sous traitement est habituellement favorable dans les méningites et les
méningovascularites. Dans la méningo-encéphalite et le tabès par contre, l’amélioration
est rare avec persistance de séquelles neurologiques sévères.
OBJECTIFS
-
Retenir les éléments épidémiologiques de la syphilis et sa place parmi les
MST
89
-
Retenir les différents stades de la maladie
Connaître la symptomatologie des différentes formes cliniques: de la
méningo-encéphalite, du tabès, de la myélite d’Erb.
Demander les examens paracliniques adaptés pour confirmer le diagnostic
Connaître le traitement de la neurosyphilis.
90
LES MANIFESTATIONS NEUROLOGIQUES DUES
A L'INFECTION PAR LE VIH
I- INTRODUCTION
Le syndrome d'immunodéficience humaine acquise (SIDA) est lié à un rétrovirus (VIH)
qui a une affinité particulière pour l'antigène CD4 des lymphocytes à médiation
cellulaire.
L’atteinte du système nerveux (SN) est très fréquente au cours de l'infection par le VIH
(dans 40 à 80% des cas). Elle peut être secondaire à la pathologie infectieuse ou
tumorale induite par l'immunodépression ou directement liée au neurotropisme propre
du VIH.
Les manifestations cliniques sont polymorphes et peuvent concerner aussi bien le
système nerveux central que périphérique. Elles s'observent à tous les stades de
l'infection, de la séroconversion au stade de SIDA.
II- PHYSIOPATHOLOGIE DE L'ATTEINTE NERVEUSE PAR LE VIH
Deux mécanismes peuvent expliquer les atteintes neurologiques dues au VIH :
-
-
l'atteinte directe du SN par le VIH : la présence du virus a été démontrée dans
les macrophages et les cellules de la microglie du parenchyme cérébral. Elle
reste discutée dans les neurones, les astrocytes et les oligodendrocytes. La
réplication virale est responsable de la destruction cellulaire.
l'immunodépression : explique les infections opportunistes et les lymphomes.
III- LES MANIFESTATIONS LIEES AU VIH LUI-MEME
A- Atteinte du système nerveux central (SNC)
1 - L’encéphalite subaiguë
C'est la plus fréquente des atteintes neurologiques (40 à 70% des cas), elle peut révéler
l'infection par le VIH.
Elle peut survenir lors de la primoinfection et constituer la seule manifestation patente
de l’infection virale sans association à une infection opportuniste. Le début est
progressif avec des épisodes d’aggravation brutale ; il est plus rarement subaigu ou
même aigu.
Elle se caractérise sur le plan clinique par des troubles cognitifs avec troubles de la
mémoire, des anomalies du comportement et des troubles moteurs et de l’équilibre. Une
akinésie, un tremblement, une hypertonie, ou une incontinence peuvent être associés.
L’évolution se fait vers une démence sous-corticale avec état grabataire. Plus tard
surviennent des troubles de la conscience puis le décès en quelques mois. Une
stabilisation ou même une amélioration sont possibles chez les patients traités.
Le diagnostic est évoqué devant les données cliniques. Les investigations ne montrent
pas d’anomalies spécifiques :
- EEG : souffrance cérébrale diffuse
91
-
TDM ou IRM cérébrale : atrophie corticale et sous corticale, signes de
démyélinisation.
LCR : légère augmentation de la protéinorachie et des IgG, pléiocytose
Sérologie VIH positive.
Le diagnostic différentiel se pose avec les autres étiologies de démence ou d’encéphalite
subaiguë. Devant de tels tableaux, la sérologie VIH doit être systématique.
2- La méningite aseptique
Elle représente 5 à 10 % des atteintes neurologiques du VIH. Elle survient au cours de
la séroconversion. Elle se révèle par des céphalées, de la fièvre et une raideur méningée
habituellement modérée, parfois par une atteinte des nerfs crâniens en particulier les V,
VI et VII.
Le LCR contient une réaction lymphocytaire (20 à 800 cellules / mm3) et une discrète
hyperprotéinorachie (0.5 à 1 g/l). L'évolution est spontanée en quelques jours mais la
récidive est possible. Elle doit être distinguée des méningites infectieuses qui relèvent
d'un traitement spécifique.
3- Myélopathie
La myélite aiguë est rare. La myélopathie chronique progressive est plus fréquente. Il
s’agit d’une dégénérescence vacuolaire de la substance blanche cordonale postérieure et
latérale prédominant au niveau de la moelle thoracique. Elle peut être isolée ou associée
à l’encéphalite subaiguë. Le tableau clinique est celui d’une paraplégie spastique
progressive associée à une ataxie.
B - Atteintes du système nerveux périphérique (SNP)
Elles sont fréquentes et polymorphes et s'observent à tous les stades de l'infection
1- Polyradiculonévrites (PRN) inflammatoires
Elles surviennent au stade de séropositivité et sont dues à l'hyperstimulation
Β lymphocytaire. Il peut s'agir de :
- PRN aiguë au cours de la séroconversion, le traitement est basé sur les échanges
plasmatiques ou les immunoglobulines intraveineuses.
- PRN inflammatoire chronique démyélinisante sensible aux corticoïdes
2- Polyneuropathie sensitive distale symétrique
La symptomatologie clinique est dominée par les paresthésies et les douleurs
neuropathiques. Cette neuropathie s'observe au stade SIDA et est due à
l'immunodépression. Elle pose un problème de diagnostic différentiel avec les neuropathies
toxiques dues aux antiviraux (AZT).
3- Mononeuropathie multiple
Il s’agit d’une atteinte sévère asymétrique de plusieurs troncs nerveux qui apparaît au
stade avancé de l'immunodépression.
92
4- Les manifestations musculaires
Elles sont variables :
- atteinte inflammatoire (polymyosite) responsable d'un déficit des ceintures avec
myalgies, augmentation des créatines kinases sériques et infiltrat inflammatoire à la
biopsie.
- myopathie toxique à l'AZT, qui apparaît si la dose quotidienne est > 1g/j. Elle est
difficile à distinguer de la polymyosite. L'arrêt de l'AZT entraîne une amélioration
en 1 à 3 mois. La reprise du traitement peut se faire à demi-dose.
Il peut s’agir parfois d’atteintes infectieuses opportunistes (CMV, toxoplasmose) et
néoplasiques.
IV- LES LYMPHOMES
Les lymphomes primitifs du SN de type immunoblastique représentent 10 à 20% des
atteintes neurologiques du VIH. Ils sont dus à l'absence, au niveau cérébral, de la
répression de la prolifération B lymphocytaire.
Le tableau clinique est celui d'un processus expansif intracrânien : signes déficitaires,
hypertension intra-crânienne, crises convulsives ...
Le scanner cérébral ou l’IRM peuvent objectiver une ou plusieurs lésions nodulaires
prenant fortement le contraste.
Le diagnostic différentiel se pose surtout avec la toxoplasmose. Le diagnostic de certitude
se fait par la biopsie des lésions. Le pronostic est rapidement défavorable en quelques
semaines (chimiothérapie inefficace).
V- LES INFECTIONS OPPORTUNISTES DU SYSTEME NERVEUX
Elles se voient au stade SIDA.
A- Toxoplasmose
C'est une parasitose due à Toxoplasma Gondii, elle constitue une infection ubiquitaire
extrêmement répandue dans le monde. Elle est inapparente dans la plupart des cas,
habituellement bénigne sauf dans deux situations : la grossesse et l'immunodépression.
L'atteinte du SNC par la toxoplasmose est fréquente, elle survient chez les patients avec
des CD4 < 200 / mm3. Elle se manifeste sous deux formes :
- l'atteinte focale : la plus fréquente, responsable de signes déficitaires tels que
hémiplégie, déficit sensitif, syndrome cérébelleux, atteinte de nerfs crâniens.
D'installation habituellement progressive, ce tableau peut se compléter par des crises
épileptiques partielles ou généralisées.
- l'atteinte encéphalitique plus diffuse qui se traduit par des troubles de la conscience et
des crises épileptiques généralisées.
La TDM cérébrale objective des nodules hyperdenses, ou un aspect d'abcès cérébral
réalisant des images annulaires (hypodensité entourée d'une zone hyperdense),
évocateurs du diagnostic de toxoplasmose cérébrale. Ces images peuvent être uniques
ou multiples avec effet de masse sur les structures ventriculaires ou médianes.
93
L'examen du LCR objective une réaction cytochimique inflammatoire non spécifique,
sans mise en évidence du parasite. Les sérologies sont d'interprétation difficile.
Les données paracliniques ne sont pas spécifiques. Le diagnostic est à évoquer devant
tout signe neurologique central et devant toute image TDM d'abcès cérébral chez un
séropositif. Dans ces cas, le traitement anti-toxoplasmique est systématique. La réponse
au traitement constitue une preuve diagnostique.
B– Cryptococcose
Elle réalise un tableau de méningite chronique de la base avec parfois des signes de
méningoencéphalite. Le diagnostic repose sur la mise en évidence de la levure dans le
LCR à l'examen direct après coloration à l’encre de Chine et à la culture. Le traitement
est à base d'amphotericine B. La récidive est fréquente (60% des cas).
C – Cytomégalovirus (CMV)
L'encéphalite à CMV au cours du SIDA est souvent asymptomatique. Le virus peut
également entraîner un tableau d'encéphalite aiguë : fièvre, troubles de la conscience et/
ou du comportement associés parfois à des signes de focalisation. Les signes
systémiques associés, en particulier la rétinite à CMV, aident au diagnostic. L'atteinte au
CMV réalise plus rarement un tableau de myéloradiculite ou de méningite.
Le diagnostic est basé sur la mise en évidence du virus dans les inclusions
intranucléaires du tissu infecté (biopsie, autopsie), rarement en culture du LCR.
D- La leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP)
C'est une atteinte démyélinisante du système nerveux central fréquemment associée aux
maladies lymphoprolifératives, leucémies chroniques et troubles immunitaires. Le virus
responsable appartient à la famille des papovavirus. L'atteinte est multifocale avec
signes déficitaires associés à une atteinte des fonctions supérieures (aphasie, apraxie) et
à des troubles visuels (hémianopsie, agnosie visuelle, cécité corticale).
L'étude du LCR est normale dans 50% des cas. L'imagerie TDM montre des lésions
hypodenses diffuses de la substance blanche se traduisant à l'IRM par un signal
hyperintense en T2. L'évolution se fait vers le décès en 3 à 18 mois.
E- Autres infections
- Encéphalite herpétique
- Tuberculose neuroméningée
- Neuro-Syphilis
- Neurolistériose
VI- TRAITEMENT
- Antiviraux spécifiques du VIH
- Antibiotiques et antiparasitaires spécifiques des infections opportunistes
- Corticoïdes dans les manifestations immunoallergiques (PRN)
- Symptomatique (douleurs, crises épileptiques...)
- Traitement préventif : dépistage des sujets à risque
- Prévention primaire
94
OBJECTIFS
- Résumer la physiopathologie des manifestations neurologiques du VIH
- Énumérer les manifestations liées au VIH lui-même
- Décrire les aspects cliniques et paracliniques de l'encéphalite au VIH
- Résumer les caractéristiques des lymphomes primitifs du SN liés au VIH
- Énumérer les principales infections opportunistes
- Décrire les aspects cliniques et paracliniques de la toxoplasmose cérébrale
- Résumer les caractéristiques de la LEMP
- Principes thérapeutiques
95
MYELOPATHIES AIGUES
I- INTRODUCTION
Le terme de myélopathie aiguë (MA) regroupe l’ensemble des affections médullaires
dont le maximum des troubles s’installe en moins de 4 semaines
La myélite aiguë transverse cryptogénique d’origine probablement virale constitue la
principale étiologie, dont on va décrire dans ce chapitre les données
anatomopathologiques, épidémiologiques et cliniques. Un autre chapitre décrira les
étiologies.
Sont exclus de ce chapitre les infarctus médullaires, les hématomyélies et les
malformations vasculaires médullaires qui ont une présentation clinique différente.
II- LA MYELITE AIGUË TRANSVERSE CRYPTOGENIQUE
A- Epidémiologie
L’incidence des MA transverses varie entre 1,3 et 4,6 / 1 000 000/ an.
Aucune étude n’a trouvé de prédominance saisonnière. L’âge de survenue est très
variable, allant de 17 mois à 80 ans. Il semble exister deux pics de fréquence des MA,
l’un entre 10 et 19 ans, l’autre au-delà de 40 ans. Le sexe ratio est de 1.
B- Anatomopathologie
Dans la plupart des cas examinés, on observe une nécrose aspécifique qui intéresse la
substance grise et la substance blanche, prédominant généralement sur cette dernière.
Cette nécrose détruit les corps cellulaires, les axones et la myéline. Les lésions ont une
topographie variable, localisées à certains segments médullaires (préférentiellement
dorsaux) ou plus étendues en hauteur. Le degré de nécrose varie proportionnellement à
la durée d’évolution : la moelle peut être oedématiée, ramollie et hyperhémiée, ou
liquéfiée, et on peut observer de véritables cavitations proches de la syringomyélie. On
peut observer occasionnellement une réaction lymphocytaire et parfois des
polynucléaires.
C- Etude clinique
La survenue d’une infection virale dans les jours ou semaines précédant la survenue de
la MA est retrouvée dans un tiers des cas. Il s’agit essentiellement d’infections des voies
respiratoires hautes d’allure virale. Le délai entre l’infection et la survenue de la MA est
de 5 à 21 jours. D’autres circonstances précédant la survenue de la MA sont rapportées :
accouchement, effort physique inhabituel, grossesse….
1- Les symptômes de début
Ils sont variables et comprennent :
-Faiblesse des membres inférieurs bilatérale d’emblée dans 70% des cas
96
-Paresthésies et douleurs : une douleur dorsale médiane inter scapulaire est présente
dans un tiers des cas, son niveau correspond en général au niveau lésionnel ; le plus
souvent sévère, d’installation brutale, elle peut irradier à l’épaule.
-Les troubles sensitifs sont décrits comme des engourdissements, des picotements, des
piqûres, plus rarement comme des brûlures. Les orteils sont d’abord touchés puis
l’ensemble des pieds. Les troubles sensitifs sont bilatéraux d’emblée dans 80% des cas.
-Les troubles sphinctériens se traduisent par une rétention d’urine et une constipation.
La durée d’installation est variable : les débuts aigus en moins de 24 heures ne sont pas
rares, le déficit atteint son maximum entre 1 et 10 jours chez 50% des sujets. Les
évolutions subaiguës (10 jours à 4 semaines) sont plus rares.
2- La phase d’état
Les troubles moteurs sont au premier plan : la paralysie est flasque, d’intensité variable
avec abolition des réflexes ostéotendineux et cutanés. Dans trois quarts des cas, le
déficit intéresse seulement les deux membres inférieurs, et dans un quart des cas les
quatre membres. Le déficit peut toucher les muscles du tronc et de l’abdomen.
Près de 80% des patients ont des troubles sensitifs bilatéraux, l’anesthésie à la douleur
sous un certain niveau est constante. Le niveau sensitif, ascendant dans les premiers
jours, est le plus souvent dorsal haut.
Les troubles sphinctériens sont constants. L’anomalie la plus fréquente est la rétention
aiguë d’urines avec mictions par regorgement. Une dysurie, une diminution des
sensations lors de la miction, une incontinence urinaire et fécale peuvent être observées.
Indépendamment de toute infection, une fièvre est notée dans 25 à 60% des cas et une
raideur de nuque dans 10 à 70% des cas.
Un tableau de section médullaire complète avec choc spinal est observé dans 15% des
cas.
D- Examens complémentaires
1- Etude du LCR
- Le liquide céphalorachidien (LCR) peut être normal (un tiers des cas).
- La pression d’ouverture du LCR est habituellement normale.
- Une pléiocytose est trouvée dans 30 à 50 % des cas : le nombre des cellules varie de
zéro à plusieurs centaines, avec une prédominance de lymphocytes. Toutefois des
valeurs de plusieurs milliers (jusqu’à 8800 éléments/mm³) ont pu être
occasionnellement rapportées, avec parfois un excès de neutrophiles dont le taux ne
dépasse généralement pas 20%.
-La protéinorachie est le plus souvent augmentée mais dépasse rarement 1,5 g/l.
-Les gammaglobulines peuvent être augmentées jusqu’à 30%.
2- IRM
- L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est actuellement l’examen d’imagerie de
première intention devant un tableau de MA. Si possible réalisée en urgence, son intérêt
essentiel est d’éliminer une compression médullaire. L’IRM est normale dans 40 à 50 %
des cas. L’anomalie la plus fréquente est la présence d’un ou de plusieurs hyper signaux
sur les séquences pondérées en T2 au niveau cervical, dorsal ou lombaire. Sur les
séquences pondérées en T1, on peut voir une augmentation du volume de la moelle ou
97
un hypo-signal. Les lésions peuvent se rehausser après injection de gadolinium. A
distance peut s’observer une atrophie sévère.
E- Traitement et évolution
Le traitement à la phase aiguë repose sur les corticoïdes : ACTH, prednisone ou méthylprednisolone par voie veineuse.
Parallèlement, des soins symptomatiques spécifiques de nursing et de rééducation sont
indispensables.
Dans un tiers des cas, il n’y a pas de handicap fonctionnel résiduel. La régression se fait
en 3 à 6 mois ; au-delà de 1 an, les récupérations motrices sont rares. Toutefois les
troubles sensitifs peuvent s’améliorer sur une période plus prolongée (jusqu’à 4 ans). Le
décès, autrefois inévitable par complications de décubitus, est devenu rare : 4 à 7 % des
cas.
L’existence d’un choc spinal est en revanche de pronostic défavorable, de même que
l’existence de douleurs dorsales intenses, un début brutal et l’absence d’amélioration
après 3 mois.
III- AUTRES ETIOLOGIES DES MYELOPATHIES AIGUES
A- Sclérose en plaques (SEP) : deuxième étiologie des myélites aiguës. Le
diagnostic se basera sur les données de l’IRM médullaire et encéphalique, les
potentiels évoqués, l’analyse du LCR et l’évolution clinique (nouvelle poussée,
atteinte encéphalique).
B- Les étiologies infectieuses
1- Virales
Virus de la rougeole
Virus des oreillons
Herpès Virus (virus d’Epstein-Barr, HSV 1 et 2)
Cytomégalovirus (CMV)
Virus de la varicelle et du zona (VZV)
Virus de l’immunodéficience humaine (VIH)
2- Bactériennes
Tuberculose
Syphilis
Mycoplasma pneumoniae
Maladie de Lyme
Neurobrucellose
3- Parasitaires
Schistosomiases
Toxoplasmose
98
C- Les myélopathies aiguës post-vaccinales
D- Etiologies toxiques
Héroïne
Médicaments cytotoxiques
Anesthésie épidurale
E- Autres étiologies
Myélopathies post-radiques
Maladies systémiques (lupus et anticorps antiphospholipides , neurobehcet…)
Myélopathies paranéoplasiques
OBJECTIFS
-
Connaître les signes cliniques de la myélite aiguë transverse (MAT)
Savoir quels sont les examens complémentaires à réaliser devant une myélite
aiguë transverse
Connaître le traitement et le pronostic des MAT
Citer les principales étiologies des myélopathies aiguës
99
LA SCLÉROSE LATÉRALE AMYOTROPHIQUE (SLA)
OU MALADIE DE CHARCOT
INTRODUCTION
La SLA est une maladie dégénérative du système nerveux caractérisée par une atteinte
des deux neurones de la voie motrice : le premier motoneurone (neurone pyramidal) et
le deuxième motoneurone (neurone de la corne antérieure et des noyaux moteurs des
nerfs crâniens).
Elle est caractérisée cliniquement par l'association des signes périphériques par atteinte
du motoneurone de la corne antérieure (amyotrophie, fasciculations) à des signes
centraux par atteinte du neurone pyramidal (syndrome pyramidal).
C'est une maladie fréquente d'étiologie inconnue. Il existe cependant de rares syndromes
SLA secondaires à des étiologies précises à rechercher systématiquement.
La SLA est une maladie grave, l'évolution vers l'atteinte bulbaire est responsable du
décès en quelques mois.
I- ÉPIDÉMIOLOGIE
A- Fréquence
La SLA est la maladie dégénérative du système nerveux la plus fréquente après la
maladie de Parkinson et la maladie d’Alzheimer.
Son incidence est de 0.5 à 2.5 cas / an / 105 habitants
Elle est responsable d'une mortalité évaluée à 1 décès / 105 habitants.
B- Age
C'est une maladie de l'adulte d'âge moyen avec un début entre 45 et 60 ans en moyenne.
C- Sexe
Il y'a une légère prédominance masculine : 1,5 à 2 H / F
II- ANATOMIE PATHOLOGIQUE
L’atteinte des cornes antérieures de la moelle est caractérisée par une raréfaction
neuronale observée à tous les niveaux mais prédomine au renflement cervical.
L’atteinte de la voie pyramidale se traduit par une dégénérescence axonale des fibres de
la voie pyramidale. Les lésions prédominent au niveau de la moelle et du bulbe.
L’atteinte des nerfs crâniens se traduit par une dégénérescence des noyaux moteurs des
nerfs bulbo-protubérantiels. Les lésions prédominent au niveau des nerfs XII, X et XI,
elles sont plus rares au niveau du VII et V.
100
III- HYPOTHÈSES PATHOGÉNIQUES
L’étiologie de la SLA reste encore inconnue, 3 hypothèses pathogéniques sont
discutées.
1- Excitotoxicité
Cette théorie est basée sur la mise en évidence d'un excès de glutamate extracellulaire
dans le système nerveux central de patients atteints de SLA associé à un défaut de
recaptage du glutamate après son utilisation (neurotransmetteur inhibiteur).
2- Manque en facteurs neurotrophiques
3- Déficit en Cu/Zn superoxyde-dismutase
Ce déficit aboutit à l’accumulation de radicaux libres responsables de la mort neuronale.
III- ETUDE CLINIQUE
Type de description : La forme commune à début brachial
A- Signes de début
Certains symptômes peuvent précéder de quelques mois la fonte musculaire comme des
crampes, des fasciculations et une fatigabilité musculaire anormale.
Le tableau peut commencer d'emblée par une amyotrophie souvent unilatérale associée
à un déficit moteur au niveau de l'extrémité distale d'un membre supérieur. L'atteinte
intéresse d'abord les muscles de l'éminence thénar puis ceux de l'éminence hypothénar,
réalisant la main plate d'Aran-Duchenne (ou main de singe).
B- Phase d'état
Elle est caractérisée par l'atteinte en quelques mois du membre supérieur controlatéral,
des muscles proximaux, des membres inférieurs et des muscles bulbaires.
- L'amyotrophie est bilatérale et asymétrique, elle va atteindre progressivement les
muscles les plus proximaux aux membres supérieurs, les muscles du tronc et
secondairement les membres inférieurs (jambiers antérieurs puis postérieurs et ensuite
les muscles des cuisses).
- Le déficit moteur suit la progression de l'amyotrophie, il frappe d'abord les
mouvements fins des doigts pour atteindre progressivement les muscles les plus
proximaux.
- Les fasciculations peuvent être abondantes, fréquentes et intenses et sont donc
observées facilement. Elles précèdent souvent l'amyotrophie et le déficit moteur. Elles
tendent à diminuer ou à disparaître avec l'évolution.
101
- Le syndrome pyramidal est d'intensité variable allant d'une simple conservation des
ROT dans les territoires amyotrophiques à une exagération des ROT avec signe de
Babinski. Parfois il existe un syndrome tétrapyramidal franc avec importante spasticité
aux membres inférieurs.
- L’atteinte bulbaire se traduit par :
Une dysphonie, une dysarthrie paralytique, des troubles de la déglutition des
liquides d'abord puis des solides responsables de fausses routes et
d'hypersalivation.
L'atteinte linguale se manifeste sous forme d'une amyotrophie de la langue qui
est le siège de fasciculations. Elle est à rechercher systématiquement.
La paralysie des muscles de la face, orbiculaire des lèvres et houppe du menton
peut être très apparente
C- Évolution
Elle est inexorablement progressive vers un état grabataire, une anarthrie totale, des
troubles majeurs de la déglutition, une dyspnée laryngée et des troubles de la ventilation
pulmonaire qui peuvent nécessiter une assistance respiratoire.
Le décès survient par fausse route et pneumopathie de déglutition et par insuffisance
respiratoire terminale. Il survient 2 à 3 ans en moyenne après le début des premiers
signes.
IV- FORMES CLINIQUES
A- Formes symptomatiques
1- SLA pseudopolynévritique (forme de Patrikios)
Les signes débutent par les muscles distaux des membres inférieurs avec abolition ou
diminution des réflexes achilléens.
Elle pose un problème de diagnostic différentiel avec une polyneuropathie.
L'évolution est lente en plusieurs années vers l'atteinte des membres supérieurs et
l'apparition de signes pyramidaux francs.
2- Forme bulbaire
Elle débute par l'atteinte bulbaire.
Son évolution est rapide vers le décès en quelques mois, des fois avant même
l'extension des signes aux membres.
3- Forme pyramidale pure (Sclérose latérale primitive)
L'atteinte est limitée aux faisceaux pyramidaux souvent sous forme d'une paraparésie ou
d'une tétraparésie spastique.
L'atteinte du 2ème moto-neurone peut survenir plusieurs années après.
102
B- SLA familiales
Elles sont rares, de transmission souvent autosomique dominante. Certaines sont dues à
des mutations du gène d'une enzyme appelée Cu/Zn Superoxyde-Dismutase (SOD) sur
le chromosome 21.
C- SLA juvéniles
Elles sont rares, souvent familiales de transmission autosomique récessive ou
dominante. Elles débutent dans l'enfance ou au cours de l'adolescence. Leur évolution
est plus lente.
D- Les syndromes SLA ou SLA secondaires.
Ce sont des formes très rares qui peuvent être secondaires à un néoplasme (lymphome,
gammapathie monoclonale), une syphilis, une hyperthyroïdie, ou une
hyperparathyroïdie.
V- EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
A- Electroneuromyogramme (ENMG)
C'est un examen capital. Il met en évidence un syndrome d’atteinte diffuse de la corne
antérieur qui se traduit par : une normalité des vitesses de conduction motrices et
sensitives, des signes de dénervation active des muscles au repos et des tracés
neurogènes à l'effort musculaire.
Le caractère diffus de cette atteinte neurogène est important à mettre en évidence en
particulier au niveau des muscles à innervation bulbaire (houppe, langue)
B- IRM
Une IRM médullaire ou bulbaire s’avère souvent nécessaire pour écarter une autre cause
du syndrome SLA.
C- Examen du LCR :
Il peut être normal ou montrer une hyperprotéinorachie modérée.
D- Examens biologiques
Réalisés essentiellement pour éliminer une SLA secondaire.
- Sérologies syphilitiques (TPHA, VDRL)
- Bilan phosphocalcique
- Hormones thyroïdiennes
- Bilan Inflammatoire : NFS, VS, EPP
103
VI- DIAGNOSTIC
A- Positif
Le diagnostic de SLA est basé sur la clinique et l’ENMG
Le bilan biologique et l’IRM servent à éliminer les étiologies possibles.
B- Différentiel
1- Dans les formes habituelles à début aux membres supérieurs
a- Myélopathie cervicarthrosique
L’âge, la topographie du syndrome neurogène périphérique sont communes aux deux
affections, mais il est rare qu’il n’existe pas de signes sensitifs ou de névralgie
cervicobrachiale : l’IRM cervicale permettra le diagnostic.
b- Syringomyélie
Elle associe toujours des signes sensitifs objectifs suspendus, mais ceux-ci doivent
parfois être recherchés avec attention pour être décelés. L’IRM permet de mettre en
évidence la cavité centro-médullaire.
2- Les formes bulbaires
Elles doivent être distinguées d’une myasthénie ou d’un syndrome pseudo-bulbaire
d’origine vasculaire.
3- Les formes pseudo –poly névritiques
Le diagnostic différentiel se pose avec une polyneuropathie. L’ENMG et l’évolution
permettent habituellement de résoudre le problème diagnostique
VIII- TRAITEMENT
Comporte 2 volets : symptomatique et à visée étiopathogénique
A- Traitement symptomatique
- Kinésithérapie adaptée
- Traitement de la spasticité : dans les formes pyramidales
- Crampes, si gênantes : Dihydan*, Hexaquine*
- Troubles de la déglutition : alimentation semi-liquide, gastrostomie si acceptée par le
patient
- Troubles respiratoires : ventilation assistée si le patient et sa famille l'acceptent.
104
B- Traitement à visée étiopathogénique
- Traitement de l'étiologie dans les formes secondaires
- Nombreux essais thérapeutiques basés sur la physiopathologie de la mort neuronale.
- Un seul médicament est actuellement prescrit : Riluzole (Rilutec*) ; c’est un antiglutamates dont l’efficacité a été démontrée, il prolonge la survie de quelques mois.
OBJECTIFS
- Définir la SLA
- Résumer les données épidémiologiques
- Décrire les manifestations cliniques et l'évolution de la forme commune à début
brachial
- Citer les formes cliniques
- Citer les étiologies des formes secondaires
- Énumérer les éléments du diagnostic positif dans la SLA
- Préciser l'intérêt de L'EMG dans le diagnostic de la SLA
- Citer les diagnostics différentiels
- Citer les principes thérapeutiques
105
LES MALADIES HEREDITAIRES DU SYSTEME NERVEUX
I- GENERALITES
A- Du concept de maladie dégénérative à celui de maladie génétique.
La notion de maladie dégénérative date de l'époque de Gowers (début du 20ème siècle) et
s'appliquait aux maladies dont l'étiologie restait obscure et qui ne s'expliquent pas par
une origine métabolique, infectieuse, ou auto-immune. Ces affections se caractérisent
par des lésions histologiques relativement systématisées du système nerveux central
et/ou périphérique, une évolution lente et l'absence de troubles biochimiques
spécifiques.
Il y a plusieurs années on prévoyait déjà que certaines de ces maladies allaient échapper
à ce cadre nosologique pour rejoindre des affections métaboliques spécifiques (maladie
de Wilson...), des affections à prions (maladie de Creutzfeld-Jacob) et tout récemment
les maladies génétiquement déterminées. En effet à partir de 1980 l'émergence de la
génétique moléculaire a profondément modifié le paysage de la pathologie neurologique
héréditaire. Les progrès accomplis ont permis de nouvelles perspectives et de nouveaux
espoirs. Ainsi, la génétique a déjà dans certains cas des retombées thérapeutiques, dans
d'autres elle permet un conseil génétique au moins.
B- Rappel sur les modalités de transmission des gènes
L'enquête génétique fait partie de l'observation médicale. Elle repose sur la construction
d'un arbre généalogique en recherchant l’existence d’une consanguinité, de cas
familiaux. L’examen neurologique et général ne doit pas concerner que le patient mais
également les membres de sa famille à risque (fratrie, ascendants, descendants et
collatéraux). L'analyse de ces données permet de définir le mode de transmission qui
peut être :
1-Autosomique dominant
Il est caractérisé par une transmission verticale parents enfants. L’un des parents est
atteint. Les 2 sexes peuvent être atteints. Le risque de transmission à chaque enfant est
de 50%.
106
2- Autosomique récessif
Il y’a une consanguinité des parents. Le trait pathologique ne peut se manifester que
chez les sujets portant deux allèles mutants pour un même gène, l'un provenant du père
l'autre de la mère. Les parents sont sains. Les probabilité à chaque grossesse sont : 25%
d’avoir un enfant atteint et 75% d’avoir un enfant sain mais avec une probabilité de 50
% qu’il soit porteur de la tare et risquant à son tour de la transmettre en cas de mariage
consanguin.
3- Liée à l'X
C'est la mère qui transmet la maladie, les garçons sont atteints et les filles sont
conductrices et asymptomatiques ou manifestent un phénotype modéré.
4- L'hérédité maternelle
Elle concerne l'ADN mitochondrial donc cytoplasmique. Ce dernier provient de l'ovule
maternel. Ainsi certaines maladies mitochondriales sont d'hérédité maternelle.
5- Les maladies génétiques non héréditaires
Une mutation ponctuelle peut survenir dans un gène après la fécondation, au cour de
l'embryogenèse et après. Elle peut donc être source de maladies du tissu concerné mais
elle n'est pas transmissible. C'est une mutation somatique; c'est le cas des cancers par
exemple : glioblastomes, méningiomes…
6- Maladies multigéniques et gènes de susceptibilité
Le facteur génétique intervient dans le déterminisme de certaines affections
neurologiques multifactorielles telles que : SEP, maladie de Parkinson, SLA ...etc
107
C- Applications cliniques des progrès génétiques
Les progrès génétiques actuels ont permis :
- un diagnostic moléculaire précis (pour certaines affections) par identification
du gène responsable d’une maladie neurologique donnée.
- un conseil génétique aux familles concernées en expliquant les risques de
transmission et par le diagnostic prénatal quand celui ci est possible.
- la compréhension des mécanismes pathogéniques de certaines affections
neurologiques héréditaires.
- des espoirs thérapeutiques : plusieurs essais de thérapie génique sont
actuellement en cours.
II- LES HEREDO-ATAXIES
Ce sont des affections héréditaires du système nerveux central caractérisées sur le plan
clinique par une ataxie cérébelleuse d’installation progressive à laquelle s’associent
selon le cadre nosologique: un syndrome pyramidal, cordonal postérieur,
extrapyramidal, une neuropathie périphérique, des troubles de l’oculomotricité et un
syndrome dysmorphique.
On les sépare en ataxies récessives et dominantes.
A- Ataxies Récessives :
Ce sont les plus fréquentes dans notre pays.
1- la maladie de Friedriech
Sa prévalence est de 1 à 2 cas pour 100 000 hab.
Elle débute entre l'âge de 5 et 16 ans et se transmet selon le mode autosomique récessif.
Elle se manifeste par :
- un syndrome cérébelleux
- un syndrome cordonal postérieur
- une abolition des réflexes ostéotendineux
- un syndrome pyramidal réduit à un signe de Babinski bilatéral
- un syndrome dysmorphique (pied creux, cyphoscoliose)
- l’association d’une polyneuropathie axonale à prédominance sensitive
- des troubles du rythme cardiaques par cardiomyopathie hypertrophique
(peuvent mettre en jeu le pronostic vital)
- une atteinte endocrinienne : diabète insulinodépendant
- une évolution très progressive, la perte de la marche survient souvent après
10 ans d’évolution, le décès est fréquent entre 30 et 40 ans suite à l’atteinte
cardiaque, au diabète ou à la cyphoscoliose (complications respiratoires)
En 1995 le gène de la maladie a été localisé en 9q13-p21, il code pour une protéine
appelée Frataxine qui joue un rôle important dans les mécanismes d’oxydoréduction au
sein des mitochondries.
108
Le diagnostic prénatal est possible.
L’essai de substances visant à piéger les radicaux libres au niveau des mitochondries
(quinones) a donné des résultats prometteurs.
2- L'ataxie récessive par déficit en vitamine E
Son expression clinique est identique à celle de la maladie de Friedriech. Le gène
responsable est localisé sur le chromosome 8q13. C'est une mutation (délétion d'une
adénine en position 744) du gène d’une protéine appelée : alpha-tocopherol transfer
protein (alpha TTP) qui permet d'incorporer la vitamine E aux lipoprotéines dans le
foie.
Chez ces patients, la diminution de la vitamine E sérique et du cholestérol est très
évocatrice du diagnostic. Un traitement substitutif par la vitamine E permet une
amélioration clinique ou au moins une stabilisation de l’évolution.
B- Ataxies Dominantes
Le tableau clinique est dominé par un syndrome cérébelleux statokinétique avec
dysarthrie. S’y associe un syndrome pyramidal net avec vivacité des réflexes, un signe
de Babinski. Il s’accompagne rarement de troubles sphinctériens. La sensibilité est
conservée. L’association de troubles visuels à type d’atrophie optique, de troubles
oculomoteurs complexes est fréquente. Il existe habituellement un syndrome
dysmorphique.
Actuellement on parle d’Ataxie Cérébelleuse Autosomique Dominante (ADCA =
Autosomal Dominant Cerebellar Ataxia).
Les ADCA sont classées en 3 types :
- ADCA de type I : sont les plus fréquentes et les mieux connues. Les signes
associés au syndrome cérébelleux sont variables même au sein d'une même
famille. Elles correspondent à plusieurs gènes connus (voir tableau).
- ADCA de type II
- ADCA de type III
Dans tous les cas l’anomalie génétique est une expansion de triplet de trinucléotides.
109
Tableau : CLASSIFICATION DES ATAXIES CÉRÉBELLEUSES AD (ADCA)
Type
I
II
Signes associés au syndrome Autres désignations
cérébelleux
Localisation
chromosomique
- Syndrome pyramidal +++
- Démence modérée parfois
- Atrophie optique très rare
- Ophtalmoplégie
- Signes extrapyramidaux
- Amyoptrophie
SCA 1 : 6p
SCA2 : 12q
SCA3 : 14p
SCA4 : 16q
SCA5 : 11
Autres
*Hérédoataxie de
Pierre-Marie
* Atrophie olivo-pontocérébelleuse de Menzel
- Rétinite pigmentaire +++
- Ophtalmoplégie ±
- Signes extrapyramidaux ±
SCA7
:
chromosome 3
- Troubles de la Sensibilité * Atrophie cerebe-lleuse
profonde
tardive familiale
III
SCA8 à SCA13
* Atrophie cerebello- Autres
olivaire de Holmes
- Absence de Sd pyramidal
- Sd cérébelleux isolé souvent
SCA = Spino-Cerebellar Ataxia = désignation des gènes des ADCA
110
III- LES PARAPARESIES SPASTIQUES FAMILIALES (PSF)
Ce sont des paraparésies spastiques lentement progressives qui débutent à des âges
variés entre 3 et 15 ans. Elles peuvent être de transmission autosomique dominante;
récessive, plus rarement liée à l'X.
Le tableau clinique comprend :
- un syndrome pyramidal prédominant aux membres inférieurs avec hypertonie
spastique. Les réflexes tendineux sont vifs et polycinétiques avec clonus du pied. Aux
membres supérieurs les réflexes sont souvent normaux, parfois vifs. Le déficit moteur
est modéré, la marche est longtemps conservée avec un fauchage bilatéral.
- Habituellement il n'y a pas de troubles sensitifs ; plus rarement il existe une diminution
de la pallésthésie au niveau des membres inférieurs.
- Il existe souvent un syndrome dysmorphique : pieds creux, cyphoscoliose.
Lorsque l’atteinte motrice est isolée, on parle de « PSF pure ». Les « PSF plus » sont
caractérisées par l’association d’autres signes neurologiques tels que neuropathie
périphérique, syndrome cérébelleux, atrophie optique, signes extrapyramidaux ou
vestibulaires.
L’IRM médullaire peut être normale ou montrer une atrophie médullaire.
Plus de 25 formes génétiques sont actuellement identifiées.
IV- LES NEUROPATHIES HEREDITAIRES
A- La maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT)
C’est une neuropathie héreditaire senstivo-motrice. Sa transmission peut être
dominante, récessive ou liée à l'X. C'est la forme récessive qui est fréquente au Maroc.
L’âge de début est variable.
Elle se manifeste cliniquement par :
- Un déficit moteur et une amyotrophie des membres inférieurs qui prédominent
sur les loges antéro-externes des jambes responsable d’un steppage bilatéral.
- L’amyotrophie peut remonter jusqu’aux tiers inférieurs des cuisses réalisant
l’aspect « en jambes de coq ». Les troubles sensitifs sont plus rares. Le déficit
moteur et l’amyotrophie peuvent intéresser plus tardivement les mains.
- Les réflexes tendineux sont abolis.
- Il existe des déformations des pieds et du rachis : pieds creux et cyphoscoliose.
- L'évolution est lentement progressive, le handicap fonctionnel qui en résulte est
très variable selon les formes génétiques, d’un état asymptomatique à l’état
grabataire.
L'ENMG confirme le diagnostic de neuropathie périphérique par la mesure des vitesses
de conduction nerveuse et permet de différencier entre deux formes : la forme axonale
(vitesses normales) et la forme démyélinisante (vitesses ralenties).
L’étude génétique (la recherche des mutations) est actuellement possible ; elle permet
un diagnostic précis et un conseil génétique. Actuellement plus de 35 formes génétiques
sont identifiées.
La forme génétique autosomique dominante la plus fréquente, est due à une duplication
du gène de la PMP22 (protéine de la myéline) situé sur le chromosome 17, une autre
forme AD moins fréquente est due à une mutation du gène de la P0 (protéine de la
myéline compacte) sur le chromosome 1. La forme liée à l’X est due à une mutation du
111
gène d’une autre protéine de la myéline appelée connexine 32.
Les formes autosomiques récessives sont dues majoritairement à une mutation du gène
GDAP1 sur le chromosome 8 ou du gène de la lamine A/C sur le chromosome 1. Ce
sont les plus fréquentes au Maroc.
B- La neuropathie héréditaire par hypersensibilité à la pression (NHHP)
Appelée également neuropathie tomaculaire. Elle est caractérisée cliniquement par
l’apparition de paralysies tronculaires indolores après une compression même minime
des troncs nerveux (croisement des jambes pour le nerf sciatique poplité externe, appui
du bras contre un plan dur pour le nerf cubital). Ces paralysies sont habituellement
regressives sans séquelles.
La biospie de nerf (non nécessaire au diagnostic) montre un épaississement des gaines
de myéline réalisant un aspect en saucisses (ou tomacula). Le gène est situé sur le
chromosome 17 et code pour une protéine de la myéline : la PMP22 (déletion).
OBJECTIFS
-
Définir une hérédoataxie
Décrire les aspects cliniques de l'ataxie de Friedreich
Résumer les données génétiques et étiologiques de l'ataxie de Friedreich
Citer les formes cliniques et génétiques des Hérédoataxies AD
Décrire les signes cliniques des PSF
Décrire les signes cliniques de la neuropathie héréditaire de Charcot-MarieTooth.
112
LES POLYRADICULONEVRITES (PRN)
INTRODUCTION
Les polyradiculonévrites (PRN) sont l’expression d'une atteinte inflammatoire
démyélinisante touchant à la fois les troncs nerveux des membres et les racines
rachidiennes dès leurs émergence de la moelle.
Elles sont responsables d'une atteinte bilatérale et symétrique atteignant les 4 membres
mais prédominant sur les membres inférieurs.
On distingue 2 formes :
- Les PRN aiguës (dont le syndrome de Guillain-Barré), les plus fréquentes, qui
constituent une urgence neurologique.
- Les PRN chroniques et subaiguës sont beaucoup moins fréquentes.
PRN AIGUË
Type de description : SYNDROME DE GUILLAIN-BARRÉ (SGB)
I- GÉNÉRALITÉS
Le SGB est une polyradiculoneuropathie inflammatoire aiguë d'origine auto-immune
responsable d’une démyélinisation segmentaire multifocale des nerfs périphériques.
C’est une urgence médicale qui peut entraîner le décès par atteinte respiratoire et
troubles végétatifs nécessitant fréquemment une prise en charge en unité de soins
intensifs.
II- ÉPIDÉMIOLOGIE
L’incidence est de 1 cas /105 habitants / an, avec 2 pics de fréquence en automne et en
été.
Tous les âges sont concernés mais c’est exceptionnel avant 5 ans
Un facteur déclenchant est souvent trouvé à l’interrogatoire dans les deux semaines ou 1
mois qui précèdent le début comme : un syndrome grippal ; une infection : plusieurs
virus sont incriminés (O.R.L., respiratoire, digestive ...) ; une vaccination ; une
intervention chirurgicale.
III- PHYSIOPATHOLOGIE
A- Aspects histo-pathologiques
On trouve une réaction inflammatoire faite de cellules mononuclées périvasculaires
dans le tissu interstitielle du nerf périphérique. Les lésions prédominent au niveau des
racines antérieures, des plexus et la partie proximale des nerfs crâniens les plus bas. Des
lésions de démyélinisation segmentaires sont observées associées parfois à une
dégénérescence axonale.
113
B- Mécanisme pathogénique
Le SGB est une maladie auto-immune : les lésions de démyélinisation sont secondaires
au passage dans les espaces endoneuraux, d'anticorps dirigés contre certains antigènes
de la myéline.
Ces auto-anticorps sont dus à un mécanisme de réaction immunologique croisée
(similitudes antigéniques entre le virus responsable et certains constituants de la
myéline périphérique).
C- Mécanisme lésionnel responsable des signes neurologiques.
Les lésions de démyélinisation sont responsables d’un ralentissement de la conduction
nerveuse. Les lésions de dégénérescence axonale sont responsables d’une dénervation
musculaire d’où l’amyotrophie et la récupération lente et parfois partielle des déficits.
IV- DESCRIPTION CLINIQUE
L’évolution se fait en trois phases : une phase d'extension des paralysies, une phase de
plateau et une phase de récupération.
A- Phase d'extension des paralysies :
Sa durée est par définition < 4 semaines.
Elle dure habituellement quelques heures à 3 semaines.
1- Les signes de début
Ils sont variés. Les troubles sensitifs sont fréquents sous forme de paresthésies à type de
fourmillements ou picotements des extrémités ou de douleurs à type de myalgies,
dorsalgies, lombalgies ou radiculalgies. Le déficit moteur peut apparaître d'emblée sans
être précédé des signes sensitifs. Il débute souvent par les membres inférieurs. L’atteinte
des nerfs crâniens est rarement inaugurale.
2- Extension de la paralysie
Au niveau des membres, la paralysie progresse de façon ascendante de topographie
bilatérale et symétrique touchant d’abords les membres inférieurs puis les membres
supérieurs. L’atteinte des muscles du tronc et des muscles à innervation bulbaire est
fréquente responsable des difficultés respiratoires.
Le risque de décès au cours de cette phase est le plus élevé. D’où la nécessité d’une
surveillance rapprochée du patient ; le recours à la ventilation assistée peut s’avérer
nécessaire.
B- Phase de plateau
C’est la phase où le déficit neurologique a atteint son maximum et n'évolue plus.
114
1- Le déficit moteur
Il est d’intensité variable. La tétraplégie flasque est fréquente. Parfois il s’agit d’une
tétraparésie prédominant sur les muscles proximaux et sur les membres inférieurs.
Rarement le déficit peut être distal des 4 membres ou limité aux membres inférieurs.
2- Les réflexes tendineux
Ils sont souvent abolis aux quatre membres. Rarement ils peuvent être abolis aux
membres inférieurs et diminués ou présents aux membres supérieurs.
3- L'amyotrophie des muscles paralysés
Son apparition dépend de la durée de la phase d'état et du degré de dénervation
musculaire (et donc de la dégénérescence axonale). Elle est absente dans les formes à
récupération rapide. Elle peut être très prononcée dans les formes prolongées.
4- L'atteinte des nerfs crâniens
- La paralysie faciale est la plus fréquente (50% des cas), elle est souvent bilatérale et
asymétrique.
- L’atteinte des nerfs mixtes (bulbaires) également fréquente sera responsable des
troubles de la déglutition, d’une voix nasonnée et des troubles respiratoires qui font la
gravité du SGB.
- Les autres atteintes sont moins fréquentes : paralysie des nerfs oculomoteurs, du nerf
trijumeau sous forme de paresthésies faciales. L’atteinte du XII est très rare.
5- Le déficit sensitif.
Il est plus rare, il intéresse surtout les membres inférieurs et peut concerner la sensibilité
proprioceptive et la sensibilité tactile et algique.
6- L'atteinte du système nerveux végétatif
Les troubles dysautonomiques sont assez fréquents sous forme de : tachycardie,
hypotension orthostatique, hypertension permanente ou paroxystique, troubles du
rythme cardiaque, troubles vasomoteurs des extrémités, anomalies de la sudation,
constipation, rétention urinaire.
Ces troubles peuvent être précoces et peuvent être responsables du décès. Ils doivent
être recherchés systématiquement.
C- Phase de récupération
Elle survient après une phase de plateau de durée variable : quelques jours à plusieurs
mois. La récupération des déficits se fait généralement dans le sens inverse de leur
installation. Sa durée est variable quelques semaines à 18 mois.
115
D- Complications :
Elles peuvent survenir à toutes les phases et peuvent entraîner le décès. Leur traitement
doit être préventif.
1- Phase d'extension des paralysies
Troubles respiratoires ; troubles de la déglutition avec fausses routes ; troubles
végétatifs.
2- Phase de plateau
Infections intercurrentes surtout pneumopathies ; troubles végétatifs ; complications de
décubitus : infection urinaire, escarres, phlébite des membres inférieurs, embolie
pulmonaire.
3- Phase de récupération
Complications de décubitus ; rétractions tendineuses.
V- DIAGNOSTIC
A- Diagnostic positif
Il est basé sur les données cliniques et confirmé par les examens complémentaires
dominés par la ponction lombaire et l’électroneuromyographie (ENMG).
1- Les données clinique
Déjà détaillées plus haut avec en particulier : La tétraplégie symétrique rapide
ascendante avec aréflexie et atteinte des nerfs crâniens. La phase d'installation inférieure
ou égale à 4 semaines.
2- Examens paracliniques
a- L’étude du LCR met en évidence la dissociation albumino-cytologique qui se traduit
par : un nombre normal de cellules et une hyperprotéinorachie qui apparaît 3 à 10 jours
après le début (souvent > 1 g/l)
b- L’électroneuromyographie (ENMG)
Elle met en évidence des aspects de démyélinisation du nerf périphérique qui se
traduisent par un ralentissement de la conduction nerveuse jugé sur un allongement des
latences des réponses motrices et une diminution des vitesses de conduction motrices et
souvent par des blocs de conduction et des dispersions des potentiels d’action
musculaires. Il peut montrer des signes de dégénérescence axonale sous forme de
diminution des amplitudes des réponses motrices et sensitives et de signes de
dénervation musculaire.
c- D’autres examens complémentaires sont souvent nécessaires pour rechercher une
cause éventuelle (PRN aiguë secondaire) : sérologies VIH, campylobacter jejuni…,
116
examens biologiques sanguins (bilan inflammatoire, immunologique…) ou pour
dépister les complications : ECG, RX poumon, ECBU...
B- Diagnostic différentiel
Il se pose avec les autres étiologies de paraplégie ou tétraplégie flasques aiguës :
- Myélite aiguë transverse ascendante (signes centraux, troubles sphinctériens, niveau
sensitif).
- Myélopathie aiguë ischémique (vascularite, MAV médullaire)
- Poliomyélite antérieure aiguë (atteinte asymétrique, devenue exceptionnelle) se
discute dans les formes motrices pures.
- Crise myasthénique peut être discutée dans les formes débutant par les nerfs crâniens
ou par une détresse respiratoire (recherche de bloc neuromusculaire à l’ENMG, test à la
prostigmine)
VI- FORMES CLINIQUES
A- Formes symptomatiques
Elles sont rares (<5% des SGB)
1- Formes motrices pures
2- Formes sensitives pures
3- Syndrome de Miller-Fisher
Caractérisé par la triade ophtalmoplégie, ataxie, aréflexie ostéo-tendineuse sans déficit
moteur.
4- Forme axonale de SGB
C’est une forme grave caractérisée par une amyotrophie rapide, et l’association
d’importants troubles végétatifs. La phase de plateau est prolongée et les séquelles
peuvent être importantes. L’association à une infection par le Campylobacter Jejuni y
est fréquente. L’ENMG met en évidences des signes de dégénérescence axonale
précoce.
B- Selon l'age
Les formes de l'enfant sont semblables à la forme de l'adulte. Le SGB est la cause la
plus fréquente de neuropathie périphérique chez l'enfant.
C- Formes étiologiques
1- PRN aiguë idiopathique ou SGB
C’est la forme décrite plus haut. C’est la plus fréquente et est due à un mécanisme de
réaction auto-immune croisée.
117
2- PRN aiguës secondaires
- Infection au VIH : PRN aiguë de la séro-conversion ou bien au stade de séropositivité.
La sérologie du VIH doit être systématique devant tout tableau de PRN aiguë.
- Autres étiologies : maladie de Hodgkin, maladie lupique, sarcoïdose, paranéoplasique.
V- ÉVOLUTION - PRONOSTIC
A- Évolution habituelle
Comme nous l’avons vu plus haut, l’évolution se fait en trois phases. La récupération
est variable en quelques semaines à plusieurs mois. La majorité des patients ont une
guérison totale. Dans 7 à 22% des cas, il persiste des séquelles souvent sous forme d’un
steppage à la marche. Le décès peut survenir dans 2 à 7% des cas. Rarement, des
rechutes sont possibles (< 5% des cas).
B- facteurs pronostiques
Le pronostic vital, mis en jeu par l’atteinte respiratoire, bulbaire et dysautonomique, est
actuellement nettement amélioré par la prise en charge en milieu de soins intensifs et
par la mise en route précoce du traitement.
Les facteurs de mauvais pronostic fonctionnel sont : une phase de plateau de durée
prolongée, la présence d’une amyotrophie précoce, une diminution importante de
l'amplitude des potentiels d'action musculaires à l'ENMG (reflète le degré de perte
axonale) et l’existence de signes importants de dénervation musculaire.
VI- TRAITEMENT
Il comporte 2 aspects : symptomatique et immunothérapie
A- Traitement symptomatique
Il consiste à prévenir et à traiter les complications éventuelles :
- Ventilation assistée si troubles respiratoires
- Mise en place d'une sonde gastrique pour alimentation en cas de troubles de la
déglutition
- Prévention des escarres : mobilisation, matelas à eau
- Prévention des phlébites : héparinothérapie
- Traitement symptomatique des douleurs
- Kinésithérapie précoce régulière et systématique tant qu'existe le déficit moteur;
parfois transfert en service de rééducation fonctionnelle.
B- Immunothérapie
Elle vise à retirer de la circulation sanguine les anticorps responsables de l’atteinte du
système nerveux périphérique.
118
1- Échanges plasmatiques (plasmaphérèse)
Leur efficacité est démontrée. Ils doivent être réalisés au début pendant la phase
d'installation de préférence au cours des 5 premiers jours. Le risque infectieux a été
réduit par l'utilisation de l'albumine.
2- Immunoglobulines intraveineuses (Ig. IV)
Elles ont une efficacité comparable à la plasmaphérèse mais c’est un traitement très
coûteux.
N.B. Il a été démontré que la corticothérapie n'a aucune efficacité.
LES POLYRADICULONEVRITES INFLAMMATOIRES DEMYELINISANTES
CHRONIQUES
Appelée communément PRN chronique. C’est une polyradiculoneuropathie
démyélinisante inflammatoire chronique caractérisée par une installation progressive
des déficits neurologiques sur plus de 2 mois.
Il existe 2 formes étiologiques : La PRN chronique idiopathique d'origine auto-immune
mais d'étiologie inconnue, c’est la plus fréquente ; et les PRN chroniques ou subaiguës
secondaires à des étiologies précises.
L’évolution est souvent fluctuante avec des phases d’aggravations espacées de phases
d'amélioration. On distingue les PRN chroniques progressives (d’évolution d’emblée
progressive) et les PRN chroniques à rechutes (évoluant par poussées espacées de
rémissions).
Du point de vue clinique La PRN chronique se présente sous forme d’un déficit moteur
ascendant prédominant aux membres inférieurs avec abolition des réflexes tendineux,
accompagnés parfois de troubles sensitifs et d'amyotrophie prédominant en distal.
L’étude du LCR met en évidence très souvent une hyperprotéinorachie (critère
diagnostique)
L’ENMG est capital dans le diagnostic. Il objective des signes de démyélinisation aux 4
membres sous forme d’un ralentissement marqué de la conduction nerveuse (critères
précis pour retenir le diagnostic).
Les formes secondaires justifient une recherche étiologique à faire devant toute PRN
chronique.
Etiologies :
- maladies de système : lupus, sarcoïdose, syndrome sec ;
- paranéoplasiques ; lymphomes ; Myélomes ; Gammapathies à IgM, ou IgG
119
Traitement :
Les Corticoïdes sont souvent efficaces. En cas d’échec on peut recourir aux
Immunosuppresseurs : Azathioprine (Imurel*) principalement, aux Echanges
plasmatiques ou aux Ig IV
Tableau : Éléments distinctifs entre syndrome de Guillain-Barré et PRN chronique.
SGB
- Événements précédant le Fréquents
début des symptômes
PRN chronique
Rares
- Intervalle entre le début et < 4 semaines
le déficit maximal
> 2 mois (6 mois à
quelques années)
- Rechutes
Exceptionnelles
Habituelles
- Troubles respiratoires
Fréquents
Rares
- Atteinte nerfs crâniens
fréquente
Rares
- Troubles végétatifs
Fréquents
Rares
- Hyperproteinorachie
90%
95%
- Anomalies
électrophysiologiques
précoces
Blocs de conduction
proximaux
Ralentissement
marqué de la
conduction nerveuse
- Sensibilité aux
corticoïdes
Non
Oui
OBJECTIFS
- Définir la polyradicuonévrite
- Définir le syndrome de Guillain-Barré
- Décrire les manifestations cliniques du SGB
- Décrire les phases évolutives du SGB
- Citer les complications du SGB
- Énumérer les éléments du diagnostic positif du SGB
- Citer les diagnostics différentiels
- Résumer le mécanisme physiopathologique du SGB
- Citer les principes thérapeutiques du SGB
- Définir les PRN chroniques
- Citer les éléments distinctifs entre SGB et PRN chronique
120
LES POLYNEUROPATHIES : ORIENTATIONS DIAGNOSTIQUES
I- INTRODUCTION- DÉFINITIONS
Une Neuropathie périphérique est une altération du système nerveux périphérique
(SNP). On distingue selon la topographie des lésions au sein du SNP les terminologies
suivantes.
Dans une Polyneuropathie, les altérations sont diffuses et symétriques
La Mononeuropathie correspond à l’atteinte d'un seul tronc ou plexus nerveux
Dans une Mononeuropathie multiple (multinévrite) il existe une atteinte asymétrique
successive ou simultanée de plusieurs troncs nerveux.
Les polyneuropathies posent un problème de diagnostic étiologique imposant une
véritable enquête tenant compte du contexte de survenue, des modalités de début et
d'évolution (aiguë ou chronique), des signes associés et du type lésionnel (démyélinisant
ou axonal).
II- ENQUÊTE ÉTIOLOGIQUE
A- Aspects cliniques
1- Motifs de consultation
a- Troubles sensitifs subjectifs : de topographie distale bilatérale prédominant sur les
membres inférieurs. Ils peuvent être sous forme de paresthésies à type de
fourmillements, picotements, ou de douleurs à type de brûlures ou de décharges
électriques.
Ces manifestations sensitives sont d'intensité variable : intenses, prédominant la nuit et
insomniantes ou plutôt d’intensité modérée ou minime. Elles peuvent résumer à elles
seules le tableau clinique.
2- Déficit moteur : Sous forme d’une gêne motrice à la marche (steppage surtout)
associé ou non à des difficultés à la réalisation des gestes quotidiens par les mains. Son
intensité est variable de minime à très invalidant. Il peut être isolé ou associé aux
symptômes sensitifs.
121
2- L’interrogatoire
Il est capital et permet de :
a- Préciser le contexte
- Origine ethnique et géographique : certaines neuropathies sont endémiques (La lèpre).
- Profession : causes toxiques
- Antécédents médicaux (diabète, maladie de système, néoplasie…)
- Prise de médicaments (Neuropathies iatrogènes)
- Habitudes toxiques : alcool
- Habitudes alimentaires : Régimes amaigrissants
- Événements récents : infectieux ou autres
- Contexte de maladie héréditaire: consanguinité, antécédents familiaux de
neuropathies.
b- Préciser l'histoire naturelle de la polyneuropathie
Les modalités de début et l’évolution.
- Un début aiguë (quelques heures à quelques jours) doit faire évoquer un SGB, un
mécanisme ischémique (vascularite), une porphyrie, certains toxiques..
- Une installation subaiguë (quelques semaines) doit faire rechercher des causes
métaboliques, toxiques, carentielles ou inflammatoires.
- Une évolution chronique (plusieurs mois) doit faire discuter des causes génétiques,
une PRN chronique inflammatoire, une dysglobulinémie.
- L'évolution fluctuante est surtout l'apanage des PRN chroniques inflammatoires.
3- Examen clinique
Le syndrome d'atteinte périphérique qui associe variablement un déficit sensitivomoteur, une amyotrophie, une abolition des ROT, peut être isolé ou accompagné de
signes généraux.
a- L'Examen neurologique doit préciser
- La topographie des signes d’atteinte périphérique
Dans une polyneuropathie, le déficit moteur et/ou sensitif prédomine aux
extrémités distales des membres inférieurs.
Dans une polyradiculonévrite, à l’atteinte distale, s’ajoute une atteinte des
muscles proximaux du tronc et des nerfs crâniens.
Le début par les membres supérieurs est rare il fait évoquer certaines
neuropathies toxiques ou une neuropathie avec blocs de conduction.
Dans une mononeuropathie multiple Les déficits sensitivo-moteurs sont
asymétriques et renvoient à plusieurs troncs nerveux (vascularite dans le cadre
d’une PAN, d’une hépatite C ou d’un lupus, lèpre, diabète…)
122
- Le type de fibres atteintes
L’examen electroneuromyographique complète l’examen clinique pour déterminer le
type de fibres atteintes.
- Dans une Neuropathie sensitive avec lésions des petites fibres on note des troubles de
la sensibilité thermique, algique et tactile ; une intégrité de la sensibilité proprioceptive
et l’absence des troubles moteurs (causes toxiques et métaboliques).
- Dans une Neuropathie avec lésions des grosses fibres myélinisées on note une
aréflexie, des troubles proprioceptifs responsables d’une marche ataxique et talonnante.
Des déficits moteurs sont possibles. Elles peuvent être axonales ou démyélinisantes
(SGB, PRN chroniques, paranéoplasique, syndrome sec). L’atteinte peut dans certains
cas intéresser uniquement les ganglions rachidiens postérieurs réalisant une
neuronopathie sensitive ou une ganglionopathie.
- Une Neuropathie avec atteinte du système nerveux végétatif évoque des étiologies
particulières comme le diabète et l’amylose...
- Les Neuropathies motrices pures évoquent selon le contexte et le mode d’installation
et l’évolution un SGB, une cause toxique, une cause héréditaire, une neuropathie à
blocs.
- L'existence d'autres signes neurologiques associés
- Un tremblement d’attitude des extrémités surtout des mains se voit essentiellement
dans la PRN chronique due à une gammapathie monoclonale à IgM et dans certaines
neuropathies héréditaires.
- Des troubles trophiques des membres inférieurs ou des ulcérations acro-mutilantes
accompagnent certaines neuropathies sensitives chroniques (lèpre, amylose, diabète).
- Une hypertrophie des nerfs s’observe dans certaines causes génétiques,
inflammatoires, la lèpre...
c- L'examen somatique doit être le plus complet possible
Il doit s’attacher à recherche des signes systémiques associés pouvant orienter vers une
étiologie précise de la neuropathie.
B- Examens Paracliniques
1- Examen électro-neuro-myographique (ENMG)
Il est capital et doit être considéré comme le prolongement de l’examen clinique.
Il permet d'affirmer l'atteinte du système nerveux périphérique, de déterminer la nature
de l'atteinte : démyélinisante ou axonale (indispensable pour l'orientation étiologique),
de préciser le type de fibres atteintes et de rechercher des signes évolutifs de la
neuropathie.
123
2- Étude du LCR
La ponction lombaire n’est pas systématique. Elle est nécessaire devant toute
neuropathie démyélinisante (aiguë ou chronique) et devant toute polyneuropathie
d'installation aiguë ou subaiguë.
Elle doit faire rechercher une hyperprotéinorachie (PRN), une hypercytose (méningite,
affection virale ou inflammatoire).
3- Biopsie neuro-musculaire
Elle n’est pas systématique. Elle sera faite dans les situations suivantes :
- Polyneuropathie aiguë : si on dispose d’arguments en faveur d'une maladie de système
à la recherche de vascularite ou d’infiltrat inflammatoire.
- Polyneuropathie subaiguë : si elle est évolutive à la recherche de vascularite ou
d’infiltrat inflammatoire.
- Polyneuropathie chronique : si suspicion d'une amylose, d'un syndrome sec, d'une
lèpre ...
4- Autres examens complémentaires de première intention
- NFS, VS, CRP, Electrophorèse des protides
- Glycémie à jeun
- urée sanguine, créatinine
- transaminases hépatiques
- radiographie pulmonaire
- sérodiagnostic VIH, hépatite B et C
5- Autres examens complémentaires selon l'orientation diagnostique
III- CLASSIFICATION DES POLYNEUROPATHIES EN FONCTION DES
ÉTIOLOGIES
La classification étiologique des polyneuropathies est basée sur le mode évolutif
(polyneuropathie aiguë, subaiguë ou chronique) et sur le type d’atteinte démyélinisante
ou axonale déterminé par les données cliniques et ENMG ; le contexte clinique et
biologique permet d’ajouter d’autres éléments d’orientation étiologique.
A- Formes aiguës (installation en quelques jours; < 4 semaines)
A- formes démyélinisantes
- PRN aiguë idiopathique (Syndrome de Guillain Barré) ou secondaire.
124
B- Formes axonales
- Porphyrie aiguë intermittente
- Toxique (sels de thallium, lithium, arsenic...)
- Vascularite nécrosante (PAN)
- Rares cas de PNP diabétique
B- Formes subaiguës (installation en semaines et mois)
1- Formes axonales
- Métaboliques (diabète ++, insuffisance rénale, hypothyroïdie)
- Nutritionnelles (alcoolique, carences vitaminiques diverses surtout vitamine B12)
- Toxiques (industriels, médicaments)
- Maladies de système (vascularite nécrosante, sarcoïdose,...)
- Sida
- Lymphomes
- Dysglobulinémies (myélome multiple)
- Amylose primitive
2- Formes démyélinisantes
- PRN inflammatoire subaiguë idiopathique ou secondaire
3- Neuronopathies sensitives (ganglionopathies) : neuropathie sensitive
ataxiante par atteinte des grosses fibres
- Syndrome de Gougerot-Sjögren (syndrome sec)
- Syndrome paranéoplasique de Denny-Brown
- Toxique (Cisplatine)
C- Formes chroniques (installation en plusieurs années)
1- Formes axonales
a Héréditaires
- Forme axonale de maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT)
- Amylose héréditaire
- PNP sensitive héréditaire
b Acquises
- Rares formes associées aux gammapathies monoclonales bénignes à IgG
2- Formes démyélinisantes
a Héréditaires
- Formes démyélinisantes de CMT
- Maladie de Refsum
- Leucodystrophie métachromatique
125
b Acquises
- PRN inflammatoires chroniques
- PNP associées aux gammapathies monoclonales bénignes à IgM.
OBJECTIFS
- Définir : polyneuropathie, mononeuropathie, mononeuropathie multiple
- Citer les éléments de l'interrogatoire d'orientation étiologique
- Décrire les données de l'examen clinique à rechercher devant une polyneuropathie
- Préciser l'intérêt et les indications de l'étude du LCR
- Préciser l'apport de l'examen électrophysiologique
- Préciser les indications de la biopsie neuro-musculaire
- Citer les examens complémentaires de première intention
- Citer les étiologies des polyneuropathies
126
LA MYASTHENIE (MYASTHENIA GRAVIS)
I- INTRODUCTION
La myasthénie est une affection auto-immune caractérisée par une fatigabilité
musculaire anormale à l’effort, régressant au repos, en rapport avec un
dysfonctionnement de la transmission neuro-musculaire.
C’est une affection de la femme jeune dont la gravité est le risque de détresse
respiratoire.
II- EPIDEMIOLOGIE
La myasthénie s’observe à tous les âges, dans les deux sexes et dans toutes les races.
Son incidence est estimée à 2,5 à 20 cas par an et par million d’habitants. Sa prévalence
se situe entre 45 et 142 cas par million.
Il existe avant l’âge de 40 ans une prédominance féminine ; au delà de 40 ans, l’écart
entre les deux sexes se réduit.
Une prédisposition immunogénétique à développer la maladie est vraisemblable,
comme en témoignent les différentes associations HLA (essentiellement HLA-B8 et
DR3 chez la femme jeune), l’association à d’autres maladies auto-immunes et les cas
observés chez les jumeaux homozygotes.
III- PHYSIOPATHOLOGIE
A– La transmission neuro-musculaire normale
Elle se fait au niveau d’une synapse qui comprend une terminaison nerveuse et une
plaque motrice (figure 1A).
L’acétylcholine (Ach), médiateur de la transmission neuromusculaire, est contenue dans
des vésicules au niveau de la terminaison du nerf moteur. L’arrivée d’un potentiel
d’action sur le nerf dépolarise la membrane synaptique et provoque le déversement des
vésicules dans la fente synaptique. L’Ach ainsi libérée se lie aux récepteurs d’Ach (R
Ach) post-synaptiques qui prédominent au sommet des replis de la membrane post
synaptique. Il en résulte une dépolarisation de cette membrane. Au delà d’un certain
seuil, cette dépolarisation donne naissance à un potentiel d’action qui se propage sur la
membrane musculaire et provoque la contraction musculaire. L’Ach est rapidement
hydrolysée (en acide acétique et en choline) sous l’effet de l’acétylcholinestérase postsynaptique pour rendre possible une nouvelle contraction musculaire.
B– Au cours de la myasthénie
Le versant présynaptique est normal. En revanche, la fente synaptique est élargie, la
membrane post-synaptique est appauvrie en plicatures et le nombre de R Ach est réduit
(Figure 1B).
La myasthénie est une affection auto-immune, les facteurs intervenant dans cette
maladie sont :
127
–
–
–
la réduction importante du nombre des R Ach, qui a pour conséquence la
diminution de l’amplitude du potentiel post-synaptique et l’insuffisance de la
dépolarisation membranaire.
la présence d’autoanticorps (Ac) anti-R Ach dans environ 85 % des cas, qui
induisent une déplétion en Ach
le rôle du thymus : le thymus joue un rôle mal élucidé dans l’étiopathogénie de
la myasténie, mais il est considéré comme le lieu d’origine de la réponse autoimmune. Certaines de ses cellules partagent en effet des antigènes communs
avec les R Ach de la jonction neuromusculaire. Par ailleurs, il est anormal chez
75 % des patients myasthéniques. Dans la majorité des cas, il s’agit d’une
hyperplasie et dans 10 à 25 %, d’un thymome bénin ou plus rarement malin.
III- SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE
Il s’agit le plus souvent d’une femme jeune.
A – Signes de début
Le début se traduit par l’atteinte d’un ou plusieurs groupes musculaires :
- Oculaire dans 50 % des cas. Le signe le plus habituel est un ptosis uni ou bilatéral
asymétrique, souvent à bascule. L’atteinte oculomotrice est caractéristique par son
absence de systématisation, la diplopie est intermittente, le contingent intrinsèque est
respecté.
- Oro-pharyngé dans 20 % des cas avec dysphagie, fausses routes, dysphonie (voix
nasonnée) et dysarthrie.
- L’atteinte faciale se traduit par un faciès amimique avec déficit des orbiculaires des
paupières souvent asymétrique, impossibilité de gonfler les joues, de siffler, de sourire.
L’atteinte des muscles masticateurs est responsable des difficultés de la mastication
avec une mâchoire tombante.
- L’atteinte des muscles extenseurs du cou se caractérise par une chute de la tête en
avant que le malade compense par le soutien du menton par la main (signe de la tête
tombante, évocateur de la myasthénie).
- Au niveau des membres, l’atteinte prédomine sur la ceinture pelvienne.
Tous ces symptômes s’aggravent à l’effort et en fin de journée et s’améliorent au repos
réalisant le phénomène myasthénique.
B– Phase d’état
C’est le tableau de myasthénie généralisée caractéristique, le patient présentant un faciès
inexpressif, un ptosis bilatéral asymétrique, des paralysies oculomotrices, une voix
nasonnée, et un déficit des ceintures. Le pronostic vital peut être mis en jeu par la
présence de fausses routes et par une détresse respiratoire due à une atteinte des muscles
thoraciques (diaphragme, intercostaux) imposant des mesures de réanimation d’urgence.
128
C– Examen neurologique
Il met en évidence le déficit musculaire qu’on peut provoquer par la répétition d’un
mouvement :
- accroupissements répétés (ceinture pelvienne)
- fermeture, ouverture des yeux (releveur de la paupière supérieure, orbiculaire
des paupières)…
Certains signes négatifs sont importants à signaler : les réflexes ostéotendineux sont
conservés, les sensibilités sont normales et il n’y a pas d’amyotrophie.
IV- EXAMENS COMPLEMENTAIRES
A– Tests pharmacologiques
Leur but est de confirmer le diagnostic clinique. On réalise une injection IV de
Tensilon* (édrophonium) de 2 mg ou une injection IM de 1 à 2 mg de Prostigmine*
(néostigmine).
La réponse positive se traduit par la régression transitoire, plus ou moins complète, des
signes.
B– Electromyogramme (EMG)
L’EMG peut mettre en évidence le bloc neuromusculaire post synaptique, y compris
dans les territoires cliniquement indemnes.
La stimulation répétitive supramaximale à faible fréquence (3 Hz) d’un nerf moteur
n’entraîne pas normalement de baisse d’amplitude du potentiel d’action musculaire
enregistré à l’aide d’électrodes à la surface du muscle.
Un décrément d’amplitude d’au moins 10 % entre le 1er et le 5ème potentiel indique
l’existence d’un bloc neuro-musculaire (figure 2).
Cette anomalie peut se corriger après injection d’anticholinestérasique.
L’examen peut être négatif dans d’authentiques myasthénies surtout si elles sont
focalisées, en particulier oculaires.
C– Dosages immunologiques et biologiques
1 – Anticorps anti- RACh
Ils sont spécifiques de la maladie. Leur dosage est positif dans 85 % des formes
généralisées, mais seulement dans 50 % des formes oculaires.
Il n’y a aucun parallélisme entre leur taux et la gravité du tableau clinique. Cependant,
ce taux est le reflet des poussées chez un même malade, d’où son intérêt pour la
surveillance de l’évolution et l’adaptation du traitement
2 – Autres examens biologiques
Ils sont effectués à la recherche d’autres maladies associées :
- Ac antithyroïdiens, T3, T4, TSH (thyroïdite)
129
-
Ac anti-muscles striés (augmentés en cas de thymome)
Ac anti-estomac et anti-facteur intrinsèque (maladie de Bieremer)
Ac anti-DNA (Lupus)
Facteur rhumatoïde ….
D– Examens radiologiques
Tout malade myasthénique doit bénéficier d’une imagerie du médiastin (radiographies
simples, scanner ou IRM) à la recherche d’une éventuelle anomalie thymique
(thymome).
V – EVALUATION DE LA GRAVITE CLINIQUE
Au terme de cette enquête diagnostique, il est possible d’évaluer la gravité du tableau
constaté grâce à certaines classifications.
La classification d’Osserman modifiée par Genkis est actuellement abandonnée en
raison de son imprécision. D’autres classifications ont été proposées. La classification
clinique de la Mysthenia Gravis Fondation of America (MGFA) est destinée à identifier
des sous groupes de myasthénie généralisée avec des signes cliniques ou de gravité
différents (voir annexe 1)
VI– FORMES CLINIQUES
A– Formes symptomatiques (myasthénie oculaire)
Dans 50 %des cas, la myasthénie débute par des signes oculaires qui peuvent rester
localisés dans la moitié des cas. L’extension à d’autres territoires est rare après 2 ans
d’évolution.
B– Formes selon l’âge
1– Myasthénie néonatale
Elle touche environ 10 % des enfants nés de mères myasthéniques. Elle est due au
passage transplacentaire des anticorps maternels. Son évolution est favorable dans un
délai de 2 à 4 mois.
2 – Myasthénie infantile et juvénile autoimmune
10 à 15 % des myasthénies débutent avant l’âge de 15 ans, le plus souvent à partir de 10
ans. Elles sont semblables à celles de l’adulte.
130
C– Formes associées à des anomalies thymiques
1 – Hyperplasie thymique
Elle s’observe le plus souvent dans les myasthénies à début précoce (avant l’âge de 40
ans). La myasthénie est souvent généralisée et grave, le taux d’Ac anti-Rach élevé.
2 – Thymome
Les thymomes sont associés à la myasthénie dans 10 à 25 % et sont souvent observés
au-delà de 40 ans. Leur pronostic dépend de leur caractère invasif ou non et de leur type
histologique.
D – Formes associées à d’autres maladies
La myasthénie peut être associée à d’autres affections souvent auto-immunes :
dysthyroïdie (souvent hyperthyroïdie), anémie de Biermer, lupus érythémateux
disséminé, polyarthrite rhumatoïde, anémie hémolytique ….
E– Formes induites par la D-pénicillamine
Elles sont rares et caractérisées par la régression des signes sur plusieurs mois (en 3 à 6
mois) après l’arrêt de la D-pénicillamine.
VII– DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
- Dans les formes oculaires, le diagnostic peut se poser avec les myopathies oculaires ou
oculo-pharyngées.
- Dans les atteintes du carrefour pharyngo-laryngé, le diagnostic risque de se poser avec
les formes bulbaires de la sclérose latérale amyotrophique et les AVC du tronc cérébral.
- La fluctuation des symptômes et la normalité de l’examen clinique au repos peuvent
faire évoquer à tort une cause psychologique.
- Le diagnostic peut se poser également avec les autres syndromes myasthéniques :
- Le syndrome myasthénique de Lambert-Eaton qui est un syndrome
paranéoplasique, touche plus souvent l’homme d’âge moyen ; il est dû à un bloc
neuromusculaire présynaptique. Il est habituellement associé à un cancer
pulmonaire à petites cellules.
- Les syndromes myasthéniques congénitaux sont en rapport avec des anomalies
génétiques de la plaque motrice.
VIII – EVOLUTION ET PRONOSTIC
C’est une évolution par poussées imprévisibles, alternant avec des épisodes de
rémission.
A tout moment, le tableau clinique peut s’aggraver de façon rapide et mettre en jeu le
pronostic vital par insuffisance respiratoire due à la défaillance des muscles respiratoires
et l’encombrement laryngo-trachéo-bronchique : c’est la crise myasthénique.
L’aggravation peut être spontanée ou favorisée :
131
-
par un facteur déclenchant (infection, anesthésie, traumatisme physique ou
psychologique, modification endocrinienne chez la femme …)
par certains médicaments contre-indiqués (voir annexe 2)
ou par un surdosage médicamenteux (crise cholinergique)
Le pronostic est lié à l’âge, à la gravité et au type de myasthénie défini selon la
classification clinique sus citée et à l’association à un thymome malin ou à d’autres
maladies auto-immunes.
X– TRAITEMENT
A– Moyens thérapeutiques
1 – Les anticholinestérasiques
Ils constituent le traitement symptomatique de base :
- la néostigmine (Prostigmine*)
- la pyridostigmine (Mestinon*)
- le chlorure d’ambemonium (Mytélase*)
Ils diffèrent par leur délai et leur durée d’action.
Un certain nombre de règles doit être respecté pour leur prescription :
- ils doivent être pris à jeûn, une-demi heure à une heure avant le repas
- il n’y a pas avantage à associer deux anticholinestérasiques
- la posologie quotidienne doit être recherchée par tâtonnements en commençant
par des doses faibles réparties régulièrement dans la journée (toutes les 4 heures
environ)
Des accidents de surdosage peuvent survenir et se manifester par une crise
cholinergique avec des signes muscariniques (coliques intestinales et diarrhée,
hypersalivation, hypersécrétion bronchique, sueurs) et nicotiniques (fasciculations et
crampes musculaires).
2– La thyméctomie
Elle est impérative en cas de thymome ; son indication est discutée en l’absence de
thymome.
3– La corticothérapie
Prednisone 1 mg/kg/jour (à atteindre progressivement)
4– Les immunosuppresseurs
Azathioprine 2 à 3 mg/kg/jour
Cyclophosphamide
Cyclosporine
5 – Les échanges plasmatiques
6 – Les immunoglobulines intraveineuses (0,4 g/kg/j pendant 5 jours)
132
7 – Les soins intensifs
En cas de décompensation lors d’une crise myasthénique ou lors d’un surdosage
médicamenteux
B– Indications thérapeutiques
Dans tous les cas, le traitement anticholinestérasique reste le traitement de base.
Dans les myasthénies généralisées :
-
la thymectomie est impérative en cas de thymome et doit être suivie de
radiothérapie s’il est invasif. Pour les formes sans thymome, le bénéfice de la
thymectomie n’est pas établi avec certitude.
- Lorsqu’il persiste un déficit fonctionnellement important sous traitement
anicholinestérasique, le traitement le plus efficace est l’association de
prednisone et d’azathioprine. La durée de ce traitement n’est pas définie avec
certitude, mais il doit être prolongé pendant plusieurs mois. En cas d’échec ou
de contre-indication à l’azathioprine, on a recours à d’autres
immunosuppresseurs, cyclophosphamide ou cyclosporine.
- La survenue d’une aggravation aiguë du déficit musculaire, de troubles de la
déglutition ou d’une insuffisance respiratoire doit bénéficier des échanges
plasmatiques ou des immunoglobulines intraveineuses.
Dans les myasthénies oculaires, le traitement est plus délicat et malgré des résultats
inconstants, une corticothérapie peut être proposée pour les formes entraînant une
diplopie invalidante.
OBJECTIFS
-
Expliquer la physiopathologie de la myasthénie
Connaître la symptomatologie clinique de la myasthénie
Savoir quels sont les examens complémentaires à réaliser devant une suspicion
de myasthénie
Citer les formes cliniques de myasthénie
Savoir évaluer le pronostic de la myasthénie en fonction de la classfication de la
MG
Citer les diagnostics différentiels
Connaître les moyens thérapeutiques et leurs indications
133
Annexe 1
Classification clinique de la Myasthenia Gravis Fondation of America (MGFA)
-
-
-
Classe I : déficit des muscles oculaires. Peut avoir une faiblesse de l’occlusion
des yeux. La force de tous les autres muscles est normale.
Classe II : déficit discret des muscles autres qu’oculaires. Peut avoir un déficit
des muscles oculaires quelle qu’en soit la sévérité :
II a : affectant de façon prédominante les muscles des membres ou
axiaux
II b : affectant de façon prédominante les muscles oropharyngés ou
respiratoires
Classe III : déficit modéré des muscles autres qu’oculaires. Peut avoir un
déficit des muscles oculaires quelle qu’en soit la sévérité :
III a : affectant de façon prédominante les muscles des membres ou
axiaux
III b : affectant de façon prédominante les muscles oropharyngés ou
respiratoires
Classe IV : déficit sévère des muscles autres qu’oculaires. Peut avoir un déficit
des muscles oculaires quelle qu’en soit la sévérité :
IV a : affectant de façon prédominante les muscles des membres ou
axiaux
IV b : affectant de façon prédominante les muscles oropharyngés ou
respiratoires.
134
Annexe 2
Liste des médicaments contre-indiqués en cas de myasthénie
Absolues
D-pénicillamine
Curares (sauf astracurium, vécuronium)
Quinine et dérivés
Bêta-bloquants (même locaux)
Trimétadione
Diphénylhydantoïne
Dantrolène
Magnésium IV
Cycline IV
Colimycine
Polymyxine
Relatives (à utiliser avec précaution
en fonction de l’état)
Aminosides
Carbamazépine
Chlorpromazine
Lithium
Benzodiazépines
Progestérone
Contre-indications vaccinales
Les traitements corticoïdes ou immunosuppresseurs contre-indiquent l’utilisation de
vaccins vivants (polio buccal, rubéole …).
135
LES MYOPATHIES
INTRODUCTION
Les myopathies sont des affections musculaires d'origine héréditaire, hétérogènes sur
le plan clinique et génétique.
Elles sont fréquentes chez l'enfant, certaines formes n'apparaissent qu'à l'âge adulte. La
plus fréquente est la myopathie de Duchenne.
Il s’agit de maladies graves se caractérisant par un syndrome musculaire (déficit avec
amyotrophie) prédominant sur les ceintures, d'installation progressive et d'évolution
chronique, responsables d'un handicap fonctionnel important et souvent de décès.
Les progrès actuels de la biologie moléculaire ont permis des possibilités de diagnostic
et de conseil génétiques et la compréhension des mécanismes pathogéniques de ces
affections.
LE SYNDROME MYOPATHIQUE
I- ASPECTS CLINIQUES
A- Circonstances de découverte
1- Chez l'enfant
Le syndrome myopathique peut être diagnostiqué à l’occasion d’une hypotonie ou
d’une détresse respiratoire à la naissance, d’un retard des acquisitions motrices, de
constatation de déformations articulaires (arhtrogrypose) ou de l’apparition de
difficultés motrices après une acquisition motrice normale
2- Chez le grand enfant, l'adolescent et l'adulte
La myopathie peut être révélée par une fatigabilité à la marche, des chutes fréquentes,
des difficultés à courir et à monter les escaliers ou des difficultés à se relever de la
position assise.
B- L'interrogatoire:
Il doit préciser le déroulement de la grossesse de l'accouchement et les acquisitions
psychomotrices de l'enfant
Il doit rechercher la présence d’une consanguinité des parents, l’existence de cas
similaires dans la fratrie, chez les ascendants et les collatéraux, l’âge de début et le
mode d’installation et l'évolution de l'atteinte musculaire.
C- L'examen clinique
Il doit s’attacher à examiner l’ensemble des groupes musculaires et préciser la
distribution de leur atteinte et à rechercher l’existence d’autres signes en particulier des
déformations ostéo-articulaires et une atteinte cardiaque.
136
1- Le syndrome musculaire:
Le déficit musculaire est de sévérité variable. Sa topographie déprend du type de
myopathie, Il intéresse généralement les ceintures pelvienne et scapulaire auxquelles
peut être associée une atteinte des muscles axiaux, de la face, des muscles
oculomoteurs. Dans certains cas l’atteinte peut débuter par les muscles distaux des
membres.
L’amyotrophie suit habituellement la topographie et la distribution du déficit
musculaire.
Une hypertrophie musculaire peut être constatée au niveau des mollets mais n’intéresse
que rarement l'ensemble des muscles.
Le phénomène myotonique correspond à un retard de décontraction musculaire : si on
demande au patient de serrer la main de l’examinateur, il aura du mal à relâcher
rapidement les doigts.
Les déformations ostéo-articulaires doivent être recherchées systématiquement :
rétractions tendineuses, scoliose.
Le degrés du handicap fonctionnel doit être évalué : périmètre de marche, autonomie
motrice.
2- Examen neurologique complet
Des signes neurologiques périphériques ou centraux peuvent être associés dans certains
syndromes musculaires.
3- Examen somatique complet
L’examen doit rechercher l’existence de signes cardiaques, respiratoires et
endocriniens.
II- LES EXAMENS PARACLINIQUES
Trois examens sont indispensables pour le diagnostic de myopathie: le dosage des
enzymes musculaires, l’électromyogramme et la biopsie musculaire.
A- Enzymes musculaires : taux plasmatiques élevés des:
- créatines phospho-kinases (CPK), les plus spécifiques
- lactico deshydrogénases (LDH), aldolases
B- Electromyogramme (EMG)
Le syndrome myogène se caractérise par une activité musculaire anormale au repos et
des tracés myogènes à l'effort alors que la conduction nerveuse est normale.
C- Biopsie musculaire
Elle permet d’affirmer le type d'atteinte musculaire.
137
La Dystrophie musculaire (DM) se définit histologiquement par :
- Nécrose et régénération des fibres musculaires
- Associée à une prolifération fibroadipeuse du tissu interstitiel
Elle permet de diagnostiquer certaines maladies métaboliques (lipidose, glycogénose ou
maladies mitochondriales...)
L’immunohistochimie permet de déterminer les déficits protéiques mis en cause dans
certaines dystrophies musculaires.
L'examen en microscopie électronique peut être nécessaire pour mettre en évidence des
anomalies de structure.
D- Autres examens
-
ECG, échographie cardiaque
Exploration fonctionnelle respiratoire
Imagerie : TDM, IRM (muscles, système nerveux central)
Radiographies du squelette
Autres explorations biologiques selon le cadre nosologique
III- ASPECTS GÉNÉTIQUES
L’enquête familiale est nécessaire dans le but d’établir l'arbre généalogique de la
famille et déterminer le mode de transmission.
A- Modes de transmission
4 situations possibles (voir chapitre maladies héréditaires du système nerveux)
1- Transmission autosomique dominante (AD)
2- Transmission autosomique récessive
3- Transmission liée au chromosome X
4- Cas isolé ou sporadique : pas d'atteinte familiale.
B- Diagnostic génétique
Il est possible pour certaines myopathies par :
l’identification du gène responsable par les techniques de biologie moléculaire
et des protéines musculaires impliquées (par exemple la dystrophine) par l’étude
immunohistochimique sur la biopsie musculaire.
C- Conseil génétique
Il peut être réalisé à la demande de la famille, il consiste à
- Expliquer les risques de transmission (50% si AD, 25% si AR)
- Faire un diagnostic moléculaire pour les sujets à risque
- Réaliser un diagnostic prénatal : possible pour certaines myopathies
138
MYOPATHIES DE L'ENFANT
I- DYSTROPHIES MUSCULAIRES PROGRESSIVES DE L'ENFANT
A- Myopathie (ou dystrophie musculaire) de Duchenne de Boulogne = DMD
C’est la myopathie la plus fréquente et la plus sévère de l'enfant
1- Aspects génétiques
La transmission est récessive liée à l'X : seuls les garçons sont touchés dans la famille,
les femmes sont conductrices, elle ne sont pas malades.
Le gène est localisé sur le bras court du chromosome X : Xp21 (gène DMD),
l’anomalie la plus fréquente est une délétion (60% des cas).
La protéine impliquée est la Dystrophine (427 Kd) qui fait partie du complexe
protéique du sarcolemme.
2- Aspects cliniques
Le début se fait entre l'âge de 3 et 6 ans par des difficultés à courir, à sauter et à monter
les escaliers et par des chutes fréquentes. La marche est dandinante sur la pointe des
pieds avec hyperlordose lombaire. Le passage de la station assise à la station debout
nécessite l’utilisation des mains qui prennent appui progressivement sur les genoux et
les cuisses : c’est le signe de Gowers. L’hypertrophie des mollets se constitue vers 5-6
ans, les muscles sont fermes à la palpation.
3- Évolution
Elle se fait vers l’aggravation progressive du déficit et de l'amyotrophie de la ceinture
pelvienne puis de la ceinture scapulaire et des muscles axiaux.
La perte de la marche se fait généralement vers l'âge de 10 ans. Les déformations ostéoarticulaires s’aggravent également: rétractions tendineuses, cyphose dorsale, scoliose.
La phase terminale se situe vers l’âge de 20 ans, la paralysie et l’amyotrophie
intéressent tous les muscles sauf ceux de la face, les oculomoteurs et les muscles buccopharyngés. Le décès survient par des complications respiratoires ou atteinte cardiaques
4- Autres atteintes
- Cardiaque : cardiomyopathie : Elle peut apparaître vers l’âge de 5 ans sou forme de
roubles de la conduction auriculo-ventriculaire. Elle est responsable du décès dans 10 à
50 % des cas
- Atteinte intellectuelle : le retard mental est habituellement modéré, il s’observe chez
1/3 des patients.
- Troubles digestifs : constipation, gastroparésie.
139
5- Diagnostic
a-Positif : se base sur les arguments suivants :
- Garçon, début < 6 ans
- Déficit des ceintures + hypertrophie des mollets
- Augmentation des CPK (10 à 100 fois la normale)
- EMG : myogène
- Aspect de dystrophie musculaire à la biopsie
- Diagnostic génétique :
Recherche du gène DMD (prise de sang, analyse en BM)
Absence totale de la dystrophine sur la biopsie musculaire.
b- Différentiel
- Avec les autres myopathies de l'enfant
- Avec l'amyotrophie spinale dans sa forme proximale (ENMG, biopsie)
6- Formes cliniques :
DM de Becker = DMB
Elle se différencie de la maladie de Duchenne par un début plus tardif (après l’age de
10 ans), une atteinte moins sévère est une évolution plus lente. La dystrophine est
présente mais elle est de poids moléculaire anormal.
7- Conseil génétique
Il est possible par le diagnostic des femmes conductrices et le diagnostic prénatal.
B- Les autres DM de l'enfant
1- DM autosomiques récessives sévères de l'enfant
Le tableau clinique et l’évolution sont semblables à la DMD mais avec les différences
suivantes :
- Transmission AR : elle touche garçons et filles avec consanguinité des parents
- Début entre 3 et 18 ans
- Décès entre 20 et 30 ans
- La cardiomyopathie est exceptionnelle.
- Diagnostic génétique : plusieurs sous groupes génétiques selon les protéines du
sarcolemme impliquées. Au Maroc les déficits en sarcoglycanes sont les plus fréquents.
2- Autres
- DM congénitales : une atteinte du système nerveux central est souvent associée.
- DM des ceintures à début précoce
140
II- AUTRES MYOPATHIES DE L'ENFANT
A- Myopathies congénitales
Elles peuvent débuter avant la naissance par une diminution des mouvements fœtaux.
Une hypotonie généralisée est constatée à la naissance, d'intensité variable pouvant
aller à la détresse respiratoire. Elles peuvent être révélées par un retard des acquisitions
motrices.
Cinq sous groupes différents sont individualisés en fonction des aspects histologiques
du muscle, des tableaux cliniques (début, gravité) et des anomalies génétiques.
B- Myopathies métaboliques
- Myopathies mitochondriales associant souvent une atteinte système nerveux central
et/ou périphérique.
- Myopathies des glycogénoses ou des lipidoses associant parfois des signes
systémiques de surcharge (hépatiques ...)
MYOPATHIES DE L'ADULTE
I- MYOPATHIE FACIO-SCAPULO-HUMÉRALE (FSH) (ou myopathie de
Landouzy-Déjerine)
Elle est peu fréquente, de transmission AD et de sévérité très variable d'un patient à
l'autre.
A- Aspects cliniques
Le début se situe habituellement vers l’âge de 20 ans.
L’atteinte musculaire (déficit et amyotrophie) a la particularité d’être sélective et
asymétrique.
L’atteinte faciale s’exprime par une inocclusion des paupières au cours du sommeil,
des difficultés à souffler et une asymétrie du sourire.
L’atteinte de la ceinture scapulaire intéresse essentiellement les muscles fixateurs des
l'omoplates et les sterno-cleïdo-mastoïdiens en respectant les deltoïdes.
Les biceps et les longs supinateurs sont précocement atteints.
L’atteinte des muscles distaux et proximaux aux membres inférieurs est possible.
Il faut souligner que le muscle cardiaque, les muscles pharyngés et respiratoires sont
épargnés.
B- Évolution
Elle est habituellement lente, la majorité des patients gardent une autonomie de la
marche.
141
C- Diagnostic
Le diagnostic positif est aisé par le tableau clinique caractéristique et la transmission
AD. La biopsie est inutile car non spécifique.
D- Aspects génétiques
- Transmission AD
- Gène sur le chromosome 4q (extrémité télomérique)
- Protéine impliquée inconnue
- Diagnostic génétique et prénatal possibles.
II- DYSTROPHIE MYOTONIQUE DE STEINERT
C’est la plus fréquente des DM de l'adulte. Elle est de transmission AD
A- Aspects cliniques
La maladie débute habituellement vers 20 - 25 ans. La formule clinique est très
particulière :
Le déficit et l’amyotrophie prédominent sur la face et les muscles distaux (mains et
releveurs des pieds)
Il existe une myotonie des mains : c’est une difficulté et une lenteur de la
décontraction musculaire
Le faciès est caractéristique : atonie faciale, ptosis et calvitie chez les hommes.
L’atteinte des muscles pharyngo-laryngés et respiratoires est fréquente
Des signes systémiques sont souvent présents :
- atteinte cardiaque : troubles de la conduction intracardiaque qui peuvent entraîner une
mort subite.
- cataracte +++
- troubles endocriniens (diabète, hypothyroïdie, hypogonadisme)
- atteinte digestive
La sévérité est variable, la maladie a tendance à s'aggraver au fil des générations
(phénomène d’anticipation)
B- Diagnostic
Le diagnostic est aisé par l’aspect clinique caractéristique et la mise en évidence de la
myotonie cliniquement et à l’EMG (décharges myotoniques dans le muscle au repos)
C- Aspects génétiques
- Transmission AD
- L’anomalie génétique est une expansion anormale du triplet CTG (> 50 copies) sur le
chromosome 19
- Le nombre de répétitions est corrélé à la sévérité
142
III- AUTRES MYOPATHIES DE L'ADULTE
A- DM des ceintures
Elles peuvent être de transmission dominante ou récessive en rappot avec différentes
anomalies génétiques.
B- Myopathies distales
Elles débutent par une atteinte sélective des muscles distaux. Elles sont hétérogènes sur
le plan clinique et génétique.
C- Myopathies oculopharyngées
Leur début est tardif après l’âge de 40 ans. Elles sont caractérisées cliniquement par une
ophtalmoplégie symétrique avec ptosis bilatéral, et dysphagie. Leur transmission est
AD. La forme la plus fréquente est liée au chromosome 14.
D- Myopathies métaboliques
- Mitochondriales
- Glycogénoses
- Lipidoses
PRISE EN CHARGE CLINIQUE DES MYOPATHIES
La rééducation fonctionnelle passive est indispensable et doit être régulière, elle a pour
but d’éviter les déformations ostéoarticulaires et d’entretenir la trophicité musculaire
Un suivi multidisciplinaire est nécessaire :
Pneumologique : EFR, indication de la ventilation assistée
Cardiologique : dépistage et traitement de la cardiomyopathie
Orthopédique : prévention et traitement des déformations ostéo-articulaires
O.R.L. : dans les formes avec atteinte pharyngo-laryngée
Psychologique : soutien psychologique du patient et sa famille.
Nutritionniste : pour éviter la surcharge pondérale.
Conseil génétique
Information des familles sur les risques d'avoir d'autres enfants atteints.
A la demande de la famille : dépistage des sujets à risque, diagnostic prénatal
Aspects médico-sociaux (handicap)
Insister sur le maintien de l’éducation scolaire des enfants myopathes à l’école ou à
domicile.
Assurer la meilleure adaptation possible du patient à sa vie quotidienne et
professionnelle.
Informer le patient sur les possibilités d'aides techniques et les démarches possibles
d'aide sociale.
143
Espoirs thérapeutiques :
Par les techniques de thérapie génique : essais en cours, prometteurs.
OBJECTIFS
-
Définir une myopathie
Décrire le syndrome myopathique
Citer les examens complémentaires
Citer les types de transmission héréditaire
Décrire la clinique de la dystrophie musculaire de Duchenne et ses aspects
génétiques
Citer les autres myopathies de l'enfant
Citer les myopathies de l'adulte
Décrire la myopathie facio-scapulo-humérale
Décrire la maladie de Steinert
Énumérer les éléments de la prise en charge des myopathies.
144
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