l’économie concernée. De quoi étayer cette démonstra-
tion faite par les gestionnaires établissant qu’une politique
de couverture visant à prémunir les portefeuilles contre
les fluctuations des devises est caduque ou inefficace sur
le long terme. Mais l’économiste québécois ne veut pas
s’aventurer sur ce terrain.
L’adoption élargie d’un système de taux de change
flexible au début des années 1970 a été accompagnée
d’une volatilité accrue, parfois très forte. L’un et l’autre
vont de pair. Mais quelle est la cause? «Je ne pourrais
dire qu’est-ce qui alimente ou justifie cette volatilité.
Mais elle est observable, renchérit Sylvain Leduc lors
d’une entrevue. En revanche, cette croyance à l’effet
que la volatilité vient influencer à la baisse les échanges
commerciaux et réduire la productivité et la qualité de
vie ne se vérifie pas. Étonnamment, cette volatilité n’a
que peu ou pas d’effet sur une longue période, que l’on
regarde du point de vue de la production, des exporta-
tions nettes, des dépenses de consommation ou de l’in-
vestissement.»
Diplômé de l’Université McGill, Sylvain Leduc a
obtenu son doctorat de l’University of Rochester en mai
1999. Sa thèse a porté sur les taux de change et sur les
mécanismes de stabilisation des cycles, économiques et
monétaires. Il explique qu’en cette matière l’une des prin-
cipales variables à considérer est le taux de change réel,
soit le taux de change nominal, qui désigne le prix d’une
devise par rapport à une autre, multiplié par le rapport
des prix entre les deux pays concernés. Cette absence de
résonance ou de transmission répond à l’échec de loi du
prix unique. Cette dysfonction, qui compte pour l’essen-
tiel de la volatilité du taux de change réel, n’est pas étran-
gère à l’absence d’arbitrage sur les prix entre les pays.
Voilà pour la théorie, résumée simplement.
En pratique, cette volatilité liée à un régime de taux de
change flexible ne compte pas ou peu dans l’allocation
efficace des ressources. Et cette volatilité peut venir
diluer cette affirmation du Nobel de l’économie Milton
Friedman voulant que la stabilité des conditions écono-
miques sous-jacentes vienne atténuer les fluctuations des
devises, une telle sensibilité n’est pas sans coût pour une
économie. La volatilité étant associée au risque, lui-même
synonyme d’incertitude, on peut penser qu’elle va se tra-
duire par une prime de risque. Si cette volatilité n’in-
fluence pas le niveau des investissements, elle peut influer
sur le coût lié au financement de ces investissements.
«C’est probable. On peut effectivement observer qu’en
taux de change fixe le coût du financement est plus bas»,
reconnaît l’économiste originaire de Longueuil, qui
œuvre aux États-Unis depuis 1993. «En revanche, le prin-
cipal déterminant de ce coût, de cette prime de risque,
sera la confiance. Ce sera la crédibilité accordée aux
autorités du pays associée à leur capacité de défendre le
taux de change.»
OBJECTIF CONSEILLER
18
Mythes et réalités des taux de change
Philadelphie, site de l’une des 12 banques