
Publicité directe des médicaments d’ordonnance : protéger les Canadiens avec une information de qualité
Union des consommateurs, 2003-2004, p. 4
SOMMAIRE EXÉCUTIF
Il existe en médecine un principe qui veut qu’un médicament soit une substance plus un mode
d’emploi, c’est-à-dire, en langage savant : une posologie. En cette ère de surabondance
d’information, les compagnies pharmaceutiques ont beau jeu de prétendre que des patients mieux
informés seront plus à même de s’orienter dans le système de santé pour demander et obtenir les
traitements dont ils ont besoin. Mais si ce sont les compagnies pharmaceutiques seules qui
enseignent le mode d’emploi aux patients, ce qui rencontrerait évidemment leurs objectifs
économiques, nous courons le risque de les voir dicter pour de bon « l’agenda » du système de
santé, qui s’énoncerait désormais comme suit: « une pilule, une p’tite granule, une infusion, une
injection2 ».
L’enjeu qui consisterait à fournir aux consommateurs une information de qualité relative aux
médicaments d‘ordonnance a été identifié par les gestionnaires de la santé dans toutes les
économies avancées. Deux pays autorisent la publicité directe aux consommateurs des
médicaments d’ordonnance, les États-Unis d’Amérique et la Nouvelle-Zélande. Les autres pays, dont
le Canada, l’interdisent, en réponse à un consensus solide entre le public, la profession médicale et
les gestionnaires de la santé.
Mais la présence sur Internet de publicité destinée aux consommateurs américains met quand même
notre système au défi de fournir au public une information complète, intelligible, validée et non
orientée vers la stimulation de la consommation. La présente étude a consisté à visiter
systématiquement des sites Web trouvés par un moteur de recherche en réponse à des mots-clés
décrivant diverses conditions médicales : acné, allergies, cholesterol élevé, dépression, douleurs
musculaires. Nous avons établi une typologie des sites selon quatre grandes catégories : sites
thématiques ou associatifs, sites de vente en ligne de médicaments, sites encyclopédiques, sites de
promotion de médicaments spécifiques.
Nous nous sommes attardés, en particulier, à vérifier dans quelle mesure les sites faisant la
promotion de médicaments spécifiques répondent à une série de critères de qualité de l’information,
critères positifs (présence de contenus d’information spécifiques) et critères négatifs (le promoteur
s’abstient, par exemple, d’utiliser des arguments à caractère émotif). En général, ces critères nous
permettent de définir une information de qualité comme : une information propre à renforcer le
jugement et l’autonomie des patients dans l’interaction avec leur thérapeute et dans la mise en œuvre
des traitements prescrits.
Dans l’ensemble, nos conclusions sont à l’effet que, même si les sites de promotion mis en place par
les sociétés pharmaceutiques américaines, encadrées en cela par les exigences de la Food and
Drug Administration et la prudence de leurs conseillers juridiques, fournissent une information très
complète, on ne peut pas considérer pour autant qu’une information de qualité est disponible en
réponse aux questions des consommateurs. De même, les sites associatifs ou encyclopédiques
sont limités dans leur capacité à répondre aux besoins d’information des consommateurs.
Nos recommandations portent sur l’établissement d’un portail canadien d’information sur les
médicaments d’ordonnance, où l’information serait fournie par l’industrie en conformité avec des
critères précis, mais où la mise en ligne de cette information serait assujettie à la validation d’un
comité réunissant des représentants de Santé Canada, des associations professionnelles
2 Une chanson du groupe néo-folklorique Mes Aïeux porte sur l’omniprésence des solutions pharmaceutiques dans notre
environnement social.