Devenir concepteur-rédacteur en publicité

publicité
Didier
LAVANANT
en
publicité
✔ Découvrir le métier au quotidien
✔ Créer des messages efficaces
✔ Concevoir et suivre une campagne de A à Z
Devenir
concepteur-rédacteur
en publicité
33Découvrir le métier au quotidien
33Créer des messages efficaces
33Concevoir et suivre une campagne de A à Z
Didier Lavanant
www.vuibert.fr
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
par Didier Lavanant
© Vuibert – janvier 2017 – 5, allée de la 2e DB – 75015 Paris
ISBN 978-2-311-62214-0
Maquette de couverture : Les PAOistes
Mise en page : Hervé Soulard
La loi du 11 mars 1957 n’autorisant aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part,
que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non
destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et courtes citations
dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou
partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est
illicite » (alinéa 1er de l’article 40).
Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc
une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.
Le « photocopillage », c’est l’usage abusif et collectif de la photocopie sans autorisation des
auteurs et des éditeurs. Largement répandu dans les établissements d’enseignement, le « photocopillage » menace l’avenir du livre, car il met en danger son équilibre écono­mique. Il prive
les auteurs d’une juste rémunération. En dehors de l’usage privé du copiste, toute ­reproduction
totale ou partielle de cet ouvrage est interdite. Des photocopies payantes ­peuvent être faites
avec l’accord de l’éditeur.
S’adresser au Centre français d’exploitation du droit de copie :
20 rue des Grands Augustins, F-75006 Paris. Tél.: 01 44 07 47 70
T
able des matières
Introduction 7
Chapitre 1 – Conception-rédaction : la parole est à l’écrit 11
1. Les idées ont le dernier mot 11
2. Le cadre professionnel 16
3. Les valeurs du concepteur-rédacteur 19
4. Les règles à suivre 26
5. Explications de textes 33
6. Des mots et des images 47
7. À chacun sa place 54
8. Quiz n˚ 1 62
Chapitre 2 – La conception-rédaction en action 63
1. Partir en campagne 63
2. Une consultation de A à Z 64
3. Au travail 70
4. La dernière ligne droite 92
5. Quiz n˚ 2 101
Chapitre 3 – La publicité sous toutes ses formes 103
1. Médias et supports 103
2. Quiz n˚ 3 143
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Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Chapitre 4 – De la théorie à la pratique 145
1. Les grandes stratégies publicitaires 145
2. Les grands précurseurs 147
3. Les nouveaux stratèges 152
Chapitre 5 – Liberté, moralité, publicité 159
1. Éthique : la publicité en question 159
2. De l’interdiction à la punition 175
3. Quiz n˚ 4 202
Chapitre 6 – Droit devant : cadre juridique et droits d’auteur 203
1. Droit zéro pour les créatifs 203
2. Photographes et illustrateurs 205
3. Droits musicaux : pas de fausse note ! 205
4. SDRM et SACEM : les incontournables 206
5. Quiz n˚ 5 208
Corrigé des quiz 209
Conclusion 219
Lexique 221
Annexes 231
Index 237
4
I
ntroduction
Les poids des mots, le choc des typos
Le métier de concepteur-rédacteur/conceptrice-rédactrice vous tente ? Vous
l’êtes déjà ? Vous souhaitez le devenir ?
Drôle d’idée ! Mais bon, après tout, cette activité ne consiste-t-elle pas justement à avoir des idées ?
D’ailleurs, vous avez raison, c’est un beau métier, intéressant, jamais ennuyeux,
bien rémunéré à condition d’avoir de l’expérience, évolutif… Sachez néanmoins qu’il est difficile au quotidien, exigeant, stressant, et passablement
usant pour les nerfs.
Donc, schématiquement, c’est très simple, le métier de concepteur-rédacteur
consiste à avoir des idées et à savoir les rédiger, c’est-à-dire à les traduire par
des mots.
Des idées, tout le monde en a. La différence, et elle n’est pas mince, c’est
que le concepteur-rédacteur doit non seulement avoir des idées, mais avoir
de bonnes idées tous les jours sur de nombreux sujets ! Sous une forme ou
sous une autre, les bonnes idées sont celles qui sont capables de convaincre
un consommateur d’acheter un produit ou un service dont il n’a, reconnaissons‑le, pas vraiment besoin.
De surcroît, les produits ou les thèmes sur lesquels travaille le concepteurrédacteur ne le passionnent pas forcément et il n’est pas toujours facile de
se motiver pour faire la carte de vœux du syndicat de la métallurgie du SudOuest, ou encore pour écrire toute une brochure sur des armoires électriques.
Et puis, ces bonnes idées, il lui faut aussi savoir les formuler, les écrire avec
concision et précision, les présenter et les défendre avec force arguments.
7
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Avoir son mot à dire
Nous sommes tous, vous comme moi, plus ou moins créatifs. Nous trouvons
de temps à autre des idées saugrenues, impertinentes, décalées, nous aimons
tous faire des jeux de mots, des contrepèteries ou des calembours qui font
rire nos proches, et nous savons apprécier les leurs. Nous sommes sensibles
à un slogan drôle ou intelligent, à une phrase bien ciselée, à un texte superbement écrit. Nous aimons les « bons mots ». De là à en faire son métier,
il y a une marge, d’autant que la publicité a la réputation d’être bassement
mercantile, futile si ce n’est inutile, qu’elle est méprisée des intellectuels et
que ces derniers, au mieux, la considèrent avec dédain ou commisération.
Mais si, contre vents et marées, vous vous sentez capable de surfer sur les
idées, si vous ne craignez pas les tempêtes sous les crânes, si vous avez la
vitalité d’un dauphin et l’appétit d’un requin, alors toutes ces « difficultés »
vous paraîtront ressembler à une goutte d’eau dans un tsunami.
Quant à savoir si concepteur-rédacteur est un métier d’avenir… À cela, nous
répondrons que le temps où l’on mettra dans un ordinateur toutes les données stratégiques nécessaires à la création d’une campagne publicitaire et
qu’un concept génial en sortira quelques secondes plus tard, visuel et mots
à l’appui, ce temps-là n’est pas encore arrivé, loin s’en faut !
Tant mieux. De ce point de vue, nous avons tendance à penser que l’on n’est
pas près de se passer de l’humain, de sa culture, de ses contingences, de ses
passions, de ses émotions, de son humour, de ses doutes, de ses interrogations,
bref de sa condition d’homme.
Quant à présager de l’avenir de l’expression écrite elle-même, nous nous
contenterons de vous décrire le dessin d’un illustrateur connu pour son « petit
monsieur » (les histoires sans paroles sont parfois les plus parlantes)1 : il s’agit
donc d’un petit monsieur regardant la vitrine d’une librairie. Dans cette
vitrine, tous les livres exposés, et donc toutes les nouveautés, prédisent ou
annoncent la fin de l’écrit, l’impasse de l’écriture, le crépuscule du livre, etc.
Nous disons bien tous les livres… Une sacrée contradiction qui vaut tous
les discours sur la soi-disant mort annoncée de l’écrit. De même, à l’époque
de l’avènement d’Internet, des réseaux sociaux, et de la prolifération des
écrans, nombreux étaient les esprits chagrins qui prédisaient à court terme
la fin définitive de l’écrit. Que nenni ! La preuve : on n’a jamais autant écrit
1.Insondables mystères par Sempé, éditions Denoël, 1993.
8
Introduction
qu’aujourd’hui ! Par ailleurs, certains s’affligent de la pollution publicitaire
et de notre exposition permanente à ses desseins malsains, pervers, machiavéliques et manipulateurs. Que l’on se rassure, la majorité des gens ne s’en
inquiète nullement et aurait même globalement tendance à aimer la publicité,
dans la mesure où elle conserve sa capacité de divertissement.
Certes, les campagnes publicitaires qui font date ne représentent pas la majorité de la production, nous vous l’accordons volontiers, mais tous les livres,
tous les films et tous les disques qui sortent chaque semaine sont-ils tous de
pures merveilles ?
À l’évidence, non, et personne ne s’en afflige ou ne s’en offusque.
Pour notre part, nous avouons avoir un faible pour une publicité intelligente,
dérangeante, voire insolente. Nous nous réjouissons toujours autant d’une
accroche subtile, nous nous émerveillons toujours autant d’un superbe visuel,
nous apprécions toujours autant un texte brillant.
Le talent étant l’antichambre du génie, peu de concepteurs-rédacteurs sont
géniaux (et c’est tant mieux, sinon ils seraient invivables !). Les « meilleurs »
d’entre eux passent d’ailleurs vite à autre chose, soit quelque chose de plus
sérieux, de plus médiatique ou de plus rémunérateur (Jean-Luc Delarue,
Frédéric Beigbeder, Étienne Chatiliez, Thierry Ardisson…).
Évidemment, nous n’en sommes pas là. Pour le moment, vous en êtes à vous
demander si la conception-rédaction publicitaire est un vrai métier et s’il
peut vous convenir.
Le propos de cet ouvrage consiste donc à vous donner une idée de ce qu’est
le métier de concepteur-rédacteur au quotidien, à vous initier à ses particularités, à ses exigences, pour, en définitive, vous permettre d’en valider ou
non le choix professionnel.
Nous allons donc aborder ici l’ensemble des domaines où le concepteurrédacteur est amené à intervenir, qu’il soit stagiaire, junior ou senior.
Si vous êtes déjà dans l’un de ces cas, nous espérons, en toute humilité, que
cet ouvrage vous offrira quelques clés destinées à vous améliorer encore.
Par la suite, et pour plus de commodité, nous emploierons le terme de CR
pour désigner un concepteur-rédacteur, et le terme de DA pour désigner un
directeur artistique.
Pour en terminer avec ce préambule, il va sans dire que notre futur CR, outre
le fait qu’il aime réfléchir, écrire, argumenter et élaborer le concept d’une
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Devenir concepteur-rédacteur en publicité
campagne, doit impérativement posséder la maîtrise de la langue française
avec, bien évidemment, une orthographe, une grammaire, une syntaxe et
une ponctuation sans reproche. De même, comme dans tous les métiers
ayant trait à la communication, la maîtrise de la langue de Shakespeare est
fortement conseillée. Sans ces compétences de base, il serait utopique de
prétendre exercer ce métier… Vous voilà prévenu. Cela étant, et pour paraphraser Simone de Beauvoir, gardez présent à l’esprit qu’on ne naît pas créatif,
mais qu’on le devient… Tous les espoirs vous sont donc permis !
10
CHAPITRE
1
Conception-rédaction :
la parole est à l’écrit
1. Les idées ont le dernier mot
Concepteur-rédacteur ! Mais c’est quoi ce métier ?
Spécialiste du texte, le concepteur-rédacteur (CR) a pour mission de créer
le message publicitaire et de le rédiger.
Notre CR va travailler en étroite collaboration avec un directeur artistique
(DA), spécialiste des images, leur objectif commun étant de mettre au point
des projets publicitaires sur des supports aussi divers et variés que des
annonces presse, des affiches, des spots TV et autres bandeaux Internet,
mais aussi des brochures, des mailings, des plaquettes et des publicités sur
le lieu de vente (PLV).
À partir d’un brief1 réalisé par des commerciaux et représentant la synthèse
stratégique d’un problème marketing spécifique à l’annonceur, nos deux
compères vont réfléchir à la traduction publicitaire de cette problématique.
Ils vont plancher ensemble sur des idées possibles, des axes de réflexion, des
1.Concernant l’utilisation courante de termes anglo-saxons ou issus de la langue anglo-saxonne, vous
pouvez vous reporter p. 31.
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Devenir concepteur-rédacteur en publicité
pistes créatives qu’ils sélectionneront eux-mêmes avant de les soumettre, lors
d’une première étape, au directeur de création.
Lors de cette phase de conception, le CR et le DA vont donc élaborer ensemble
plusieurs projets, et ce en fonction des supports envisagés : pour les annonces
et les affiches, un titre et une image seront associés, pour les messages audiovisuels, un argument et un film seront mis au point.
Notre team créatif (CR + DA) va devoir tenir compte de la notoriété de
l’annonceur, du caractère éventuellement novateur du produit, de la cible
visée, du support ou des supports retenus, du budget imparti à la campagne
de communication et, par conséquent, du coût de réalisation correspondant.
Lors de l’élaboration de ses premières pistes, le team créatif va se contenter
de réaliser des crayonnés rapidement esquissés, de façon à faire comprendre
l’idée, mais sans aller plus loin. Sur une feuille de papier basique format A4, le
DA va exécuter un crayonné rapide et sommaire, tandis que le CR va écrire
l’accroche à la main.
À ce stade, il est tout à fait inutile de vouloir finaliser l’idée proposée, même
si c’est ce qui sera fait plus tard sur la ou les pistes retenues.
Seul en scène
Une fois l’idée créative élaborée, c’est donc au CR, et à lui seul, qu’il incombe
de la traduire sous forme de mots : une accroche, c’est-à-dire un slogan, pour
une annonce presse ou encore une affiche, des dialogues ou un commentaire
pour un spot TV ou un spot radio, des titres, des sous-titres et des textes
pour un argumentaire d’annonce presse, une brochure ou une plaquette.
Autrement dit, le CR doit aussi bien savoir écrire une accroche courte et
percutante qu’une brochure de plusieurs dizaines de pages. Autant le savoir
tout de suite : il sera amené à écrire l’une comme l’autre.
Concrètement, il pourra donc lui être demandé d’écrire une accroche pour
un nouveau modèle de voiture électrique révolutionnaire de marque X, un
argumentaire d’annonce presse, encore appelé « body copy », sur les avantages
de la mutuelle Y dédiée aux étudiants, ou encore une plaquette entière sur la
stratégie de la banque Z dans le cadre de sa gestion de patrimoine.
Parallèlement, le CR aura également pour tâche d’effectuer des recherches de
noms, pour un nouveau produit, par exemple une nouvelle gamme de produits ou encore un programme immobilier. C’est aussi à lui que reviendra la
12
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
charge d’écrire une signature de marque, encore appelée base line. Notez que
nous reviendrons plus loin, et dans le détail, sur tous ces types de travaux.
L’éclectisme du CR constitue l’une des particularités de ce métier. Mais c’est
aussi ce qui en fait son intérêt car celui-ci va être amené à découvrir de
nombreux domaines, à s’intéresser à de nombreux sujets qui lui sont étrangers, voire totalement inconnus. Comme le dit la sagesse populaire : on en
apprend tous les jours !
En élargissant sa mission, le CR peut aussi être amené à rédiger des communiqués de presse, des présentations d’articles, les accroches et les textes
correspondant à la page d’accueil d’un site Web, des brochures techniques,
des journaux d’entreprise, des publicités sur le lieu de vente (PLV), et à participer à des brainstormings.
C’est au CR de récolter et de rassembler l’information dont il a besoin. Pour ce
faire, il doit maîtriser la navigation sur le Web lorsqu’il se trouve en phase de
recherche de documentation. Il sera éventuellement amené, tel un journaliste,
à réaliser des interviews qui viendront alimenter ses textes ou faire l’objet
d’encadrés distincts sous forme de témoignages, encore appelés testimoniaux.
Mais là où le CR ne peut compter que sur lui seul, le DA n’étant aucunement
appelé à intervenir sur ce type de travail, c’est bien dans le cadre d’un spot
radio (voir p. 118). À lui d’imaginer le spot de A à Z, de l’écrire, d’en déterminer le nombre d’intervenants, le ton de chacun d’eux, l’ambiance sonore, le
type de musique. À lui d’assister à l’enregistrement, au montage et au mixage,
à lui de valider le tout car il est, dans ce cas, le seul et unique responsable.
Pour tout le reste, c’est-à-dire l’immense majorité des cas, le CR et le DA
travailleront ensemble, en binôme.
Poète ou tueur ?
Une chose est sûre : on ne s’improvise pas concepteur-rédacteur. William
Maynard, de l’agence Bates, avait coutume de dire qu’il existait deux sortes
de rédacteurs : les poètes et les tueurs, les poètes considérant la publicité
comme une fin en soi, les tueurs comme le moyen d’aboutir à une fin. Et
William Maynard de conclure : « Si vous êtes à la fois un poète et un tueur,
vous deviendrez très riche ».
La formule va plus loin que la simple anecdote. D’apparence contradictoire,
elle se révèle pourtant assez juste dans sa complémentarité.
13
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Traditionnellement, il est admis que le poète est un doux rêveur, à la fois
sensible et artiste. Il dessine ses textes avec des mots comme le peintre utilise
ses pinceaux pour donner vie à ses toiles.
A contrario, le tueur est un être froid et insensible. Prêt à tout pour réussir sa
mission, il n’éprouve aucune pitié et poursuit son objectif sans s’embarrasser
du moindre sentiment.
Le concepteur-rédacteur peut-il être les deux à la fois et, plus important
encore, doit-il le devenir ? Le champion américain de tennis Jimmy Connors,
artiste dans son genre, avait l’habitude de dire que le seul moyen de gagner
des matchs consistait à entrer sur le court avec le « killer instinct ».
Sachant que le CR est un amoureux des mots et du style et que, parallèlement,
il est en compétition permanente pour acquérir (ou garder) le budget de communication d’un annonceur, les deux critères semblent appropriés à son cas.
Poète, il se doit de l’être dans sa sensibilité et sa finesse. Tueur, il se doit de
l’être pour s’affirmer et imposer ses idées.
L’un et l’autre
Il est déconseillé de n’être que l’un sans être un peu de l’autre. Ce sera à vous
d’en gérer les proportions car celles-ci ne sont pas figées et peuvent évoluer
selon les sujets abordés, en fonction des interlocuteurs, voire des périodes.
Si l’on en croit Henry Miller, « Nous participons tous à la création. Nous
sommes tous des rois, poètes, musiciens ; il n’est que de s’ouvrir comme un
lotus pour découvrir ce qui est en nous. » Bref, nous sommes tous poètes,
donc créatifs, et nous l’ignorons plus ou moins. Graines de poètes, il ne tient
qu’à nous de germer.
Par contre, et ce sera sans doute plus délicat, si vous n’avez pas un moral de
tueur (cf. Freud et la pulsion d’agressivité), il va falloir l’acquérir, vous faire
violence pour devenir un guerrier et retrouver l’instinct naturel du prédateur. C’est le prix à payer pour ne pas rester dans l’ombre et pour se faire
une place au soleil.
Loin de nous l’idée d’affirmer que ce profil ne correspond qu’au métier de
concepteur-rédacteur. Il existe nombre de professions qui nécessitent en
même temps la douceur d’un Bisounours et un appétit de carnassier… Nous
tenions seulement à avertir nos futurs concepteurs-rédacteurs qu’ils devront
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Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
tenir à la fois du poète et du tueur pour prétendre tenir leur place dans un
service de communication ou une agence de publicité - pardon, toutes nos
excuses - une agence conseil en communication.
Ce préambule étant effectué, il va être temps de se mettre au travail.
La création : tête d’affiche des agences
Il ne fait aucun doute que la création représente la partie émergente du
travail d’une agence. Volontiers spectaculaire (une publicité qui ne se fait
pas remarquer n’existe pas !), voire légèrement exhibitionniste, elle se veut
et doit se donner les moyens d’être partout visible, sa plus grande hantise
étant justement de passer inaperçue.
À ce propos, sachez qu’un Européen urbain moyen est confronté à environ
300 messages publicitaires par jour. C’est énorme. La question est de savoir
combien il en retient et surtout lesquels, mais c’est une autre histoire et nous
y reviendrons plus loin.
La création est le porte-drapeau, l’étendard, la vitrine d’une agence de publicité. C’est sa création que l’agence mettra en avant dans sa brochure ou sur
son site Internet, c’est sa création qu’elle valorisera au moment de prospecter un client, c’est toujours sa création qui, à stratégie égale ou presque,
fera la différence lors d’une consultation, et c’est encore sa création qui sera
récompensée lors des grands rendez-vous comme le Festival de Cannes du
film publicitaire. Tout cela pour dire combien la création « parle » au nom
de l’agence.
Même si le département création est la pierre angulaire d’une agence, on
n’oubliera pas pour autant tout le travail fourni en amont par les équipes
de commerciaux qui – travaux, réflexion et études à l’appui – élaborent la
stratégie marketing servant de plate-forme, voire de tremplin, aux créatifs.
Hommage leur soit rendu sur ce point.
On soulignera parallèlement qu’une mauvaise stratégie commerciale ne peut
en aucun cas déboucher sur une bonne création, et que les as du marketing
n’ont pas toujours raison, n’en déplaise aux grosses têtes bourrées de diplômes
et de fonctions aux titres ronflants mais, hélas, trop souvent déconnectées
des réalités, des véritables attentes des consommateurs, de la vraie vie… Le
département création est donc plus qu’au cœur de l’agence, il en est le cœur.
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Devenir concepteur-rédacteur en publicité
2. Le cadre professionnel
De l’âge d’or à la chute
Dans les années soixante-dix/quatre-vingt, les créatifs étaient des « seigneurs ». Adulés, surestimés et surpayés, ils ont longtemps marqué de leur
empreinte l’image du milieu publicitaire, et ce auprès du grand public comme
des annonceurs.
C’était l’âge d’or de la publicité, une période où les créatifs étaient vénérés
et où les agences faisaient la pluie et le beau temps. Par méconnaissance
du fonctionnement et des mécanismes publicitaires, les annonceurs avaient
tendance à prendre tout ce que leur proposaient leurs agences pour parole
divine… et argent comptant.
Le meilleur exemple de cette admiration à la fois excessive et imméritée
nous a été donné par Fréderic Beigbeder dans le cadre de son ouvrage le plus
célèbre, à savoir 99 francs, sorti en 2000. On y découvre un certain Octave
Parrango, créatif imbu de lui-même, paresseux, cynique, manipulateur et
drogué, bref un imposteur qui va connaître la gloire avant de sombrer. Le
portrait d’Octave s’avère caricatural à outrance mais possède néanmoins
le mérite de se baser sur des traits réels de personnages gravitant dans le
milieu publicitaire des années 80. Le succès public de ce livre iconoclaste,
d’ailleurs adapté plus tard au cinéma avec Jean Dujardin dans le rôle d’Octave,
a malheureusement contribué à faire perdurer l’image d’un métier superficiel,
surestimé, voire même ouvert à n’importe quel idiot un tant soit peu ambitieux. Il va sans dire qu’aujourd’hui plus que jamais, la réalité est tout autre.
Dans les années 80, nous étions alors dans une sorte de surenchère du spectaculaire. Un exemple ? Le fameux spot TV pour la Citroën Visa GTI, un
film conçu par RSCG et qui a fait date. La voiture s’élance sur la piste d’envol
d’un porte-avions, décolle, tombe dans la mer et refait surface sur le pont
d’un sous-marin…
Aujourd’hui, très franchement, un créatif qui aurait l’audace de proposer un
spot TV dans lequel interviennent un porte-avions et un sous-marin se verrait
considéré au mieux comme un doux rêveur, au pire comme un fou furieux…
16
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
Une obligation d’évolution
Le début des années quatre-vingt-dix s’est chargé de mettre fin à la « belle
époque » de la publicité, à ses fastes et à sa démesure. La crise, en partie
liée à la loi Sapin1, a subitement mis sur le marché nombre de créatifs et de
commerciaux.
Dans ces années-là, les grosses agences s’en sont sorties en se re­grou­pant
et en fusionnant, les agences moyennes ont difficilement encaissé le coup
et ont licencié à tout va, les petites agences qui avaient souvent eu le tort
d’avoir misé sur un seul gros client ont dû mettre la clé sous la porte. Une fois
débauchés des agences, tous ces créatifs et commerciaux se sont empressés
de se faire embaucher chez les annonceurs. Résultat, ces derniers ont fortement élevé leur niveau de compétence et d’exigence. On ne pouvait plus leur
raconter n’importe quoi. Les départements communication des annonceurs
se voyaient désormais composés de professionnels exigeant des campagnes
efficaces et, plus encore, sachant les reconnaître.
Trop d’argent dépensé à des fins douteuses, trop d’abus et trop d’outrances
ont précipité le déclin de l’empire publicitaire et engendré une restructuration salutaire.
Désormais, qu’on se le dise, l’heure est au réalisme, voire à l’humilité.
En payant ses erreurs et ses errements, la publicité a gagné en professionnalisme et en crédibilité. Le dos au mur, elle a du profondément évoluer pour
devenir plus mature, plus adulte, bref plus responsable. Est-ce un mal ? Pas
si sûr. Un budget limité force les créatifs à donner le meilleur d’eux-mêmes,
à être malins et intelligents. En publicité, moins il y a d’argent, plus on a
besoin d’idées.
Seules quelques grandes marques (Nike, Adidas, Coca-Cola, Chanel…)
peuvent encore se permettre de réaliser des films dont les coûts de production sont très élevés. Ceci expliquant cela, il est vrai qu’il s’agit, la plupart du
temps, de films à vocation mondiale…
1. Depuis le 1er avril 1993, date d’entrée en vigueur de la loi Sapin, dont les principales dispositions ont
pour but d’assurer la transparence des tarifs, l’agence est rémunérée par l’annonceur sous la forme
d’honoraires (et non plus, comme c’était le cas, sous la forme d’une commission – en général 15 %
– sur l’achat d’espace). De plus, toute remise accordée par le vendeur d’espace doit figurer sur la
facture remise à l’annonceur et ne peut être gardée par l’intermédiaire qu’en vertu d’une stipulation
expresse figurant dans le contrat de mandat liant l’agence à son client.
17
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Une bonne crise, ça ne peut pas faire de mal
Les contraintes que connaissent aujourd’hui les créatifs sont sans commune
mesure avec la latitude qu’ils possédaient autrefois. Les marges de manœuvre
budgétaires se réduisent comme peau de chagrin et tous les postes sont
soumis au regard scrutateur des annonceurs et de leurs services de communication, voire des cost-killers.
Faut-il s’en plaindre ? La réponse est délicate, car elle tient à la fois du oui et
du non. Oui, car les créatifs peuvent, parfois à juste titre, se sentir brimés,
voire censurés. Non, car il ne sert à rien d’avoir une grande idée si elle dépasse
le budget imparti et s’avère donc, forcément, irréalisable. Bref, il ne faut pas
hésiter à mettre une « fausse bonne idée » à la poubelle !
Malheureusement, en période de crise, en cas de difficultés écono­miques
conjoncturelles, voire même en cas de suspicion quant à des difficultés à
venir, tous les annonceurs réduisent en priorité leur budget de communication. L’erreur est assez commune. Elle relève d’une réflexion stratégique
étriquée, d’une vision limitée au très court terme, mais c’est ainsi. Hélas, il
faut faire avec !
À ce propos, nous n’allons pas résister au plaisir de vous raconter une anecdote, elle-même citée par David Ogilvy1 :
« Lors d’un voyage en train, l’un des amis de M. Wrigley (chewing-gums aussi
connus que Hollywood et distribués sous la marque Freedent en France) lui
demanda pourquoi il continuait à faire de la publicité alors qu’il était largement numéro 1 sur ce marché.
“À quelle vitesse pensez-vous que ce train avance ?” demanda Wrigley.
“Je dirais environ 130 km/h” répondit l’autre.
“Bien, dit Wrigley, voulez-vous dire qu’il faut que nous détachions la locomotive ?”»
Aujourd’hui, plus que jamais, les mots d’ordre sont efficacité et sobriété. Les
cigales n’ont d’autre solution que de se faire fourmis. Sauf une nouvelle et inattendue période de « trente glorieuses », sachez que ce n’est pas près de changer !
En marge de cette évolution, le monde de la publicité devra également
résoudre un autre problème majeur, celui de l’exode des cerveaux. Après
1.Ogilvy, La publicité selon Ogilvy, Dunod, 1984.
18
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
avoir fait rêver toute une génération de jeunes talents bénéficiant de hauts
salaires et de l’image d’un métier stratégique, la publicité a perdu peu à peu
de sa superbe et de son attrait, non seulement sur le plan du statut social mais
également sur celui des rémunérations. Ainsi s’exprimait, il y a peu, le PDG
d’une grande agence parisienne : « Actuellement, les jeunes talents vont vers
l’industrie de la télévision ou du cinéma, ou, côté stratégique, vers la finance
et les cabinets d’avocats, où ils gagnent, en début de carrière, bien plus que
dans une agence de publicité tout en travaillant moins. »
De là à dire que la publicité ne fait plus rêver, il y a une marge. L’ambiance
plutôt conviviale et sympathique qui règne dans une agence de publicité n’a
rien à voir avec l’austérité d’esprit d’une banque ou d’un cabinet d’avocats.
C’est là un aspect à ne pas négliger au moment de faire un choix professionnel
qui, soulignons-le, correspond aussi à un choix de vie…
3. Les valeurs du concepteur-rédacteur
Les fondamentaux de l’écriture publicitaire
Répétons-le : il est impensable de vouloir exercer le métier de concepteurrédacteur non seulement sans avoir des bases très solides en français,
orthographe, syntaxe et grammaire, mais aussi sans savoir en maîtriser les
subtilités. Disons qu’il s’agit d’une plate-forme de départ, aussi indispensable
que des roues à une voiture.
Orthographe, syntaxe et grammaire constituent le Code de la route de l’écriture. Il faut le connaître et en appliquer les règles pour circuler dans la langue
française sans risquer un dérapage intempestif, un accrochage ou un accident.
Il est obligatoire de maîtriser ce code, car il s’agit là, tout simplement, d’une
preuve de respect envers le lecteur, l’auditeur ou le spectateur. Question de
déontologie !
En d’autres termes, il est hors de question d’envoyer un texte constellé de
fautes à un client. Ce n’est pas pensable, c’est de l’ordre de l’interdit. Tout
ce qui sort de l’agence, qu’il s’agisse d’une maquette ou d’une ébauche de
texte, la représente à l’extérieur. Un texte mal ou trop vite relu, un texte dont
l’expression est approximative, un texte « vite fait, bien fait » mettra à mal
l’image de l’agence et la dévalorisera.
19
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Chères études
A priori, on pourrait penser que tous les concepteurs-rédacteurs ont fait des
études de lettres, classiques ou modernes, ou bien qu’ils ont, de toute façon,
suivi un cursus littéraire. Détrompez-vous car c’est loin d’être le cas. Certes,
la moitié d’entre eux possède un bagage d’études littéraires plus ou moins
approfondies, mais l’autre moitié présente des origines aussi diverses que
variées, souvent sans rapport direct avec cette profession.
D’où cela vient-il ? Vraisemblablement du fait qu’entre 20 et 30 ans – et,
semble-t-il, aujourd’hui plus que jamais –, on ne sait pas toujours avec exactitude ce que l’on va faire plus tard. À part une ultraminorité d’étudiants qui
peut se prévaloir d’en posséder la vocation, le reste patauge allégrement entre
les secteurs, les formations, les métiers. Par méconnaissance des réalités professionnelles, mais aussi par méconnaissance de soi, il arrive qu’on navigue à
vue pendant des années sans savoir où jeter l’ancre…, ou plutôt l’encre en ce
qui nous concerne. Cela veut-il dire pour autant qu’être concepteur-rédacteur
relève systématiquement d’une vocation tardive ? Nous n’irons pas jusque-là,
mais force est de reconnaître que les bons CR juniors ne courent ni les rues
ni les couloirs des agences.
Sauf à être un génie précoce, un concepteur-rédacteur a plus de difficultés à
exprimer son talent avant 27/28 ans. Question de maturité ? Peut-être bien,
car l’une des qualités requises pour exercer ce métier consiste en une culture
générale étendue, plurisectorielle, et une maturité d’esprit correspondant
plus à la tranche d’âge 27/28 ans qu’à celle des 21/22 ans.
Par ailleurs, la conception-rédaction publicitaire étant un métier relativement
atypique, le débutant CR devra désapprendre ce qu’on lui a enseigné sur la
rédaction, sur le style, sur l’expression française. Il lui faudra abandonner
son écriture universitaire, disons même scolaire, pour adopter un style argumentatif, à la fois direct et commercial, bref vendeur. N’oublions pas que la
finalité de la publicité est, et sera toujours, de faire acheter des produits ou
des services !
Autrement dit, ce n’est pas parce qu’on a une agrégation de français, un DEA
de psychosociologie ou un master de communication, qu’on fera forcément
un bon CR.
Reste, tant les variables sont nombreuses, qu’il est relativement difficile de
dresser un portrait type du concepteur-rédacteur.
20
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
Priorité aux qualités
Nous venons de voir que ce métier exige une excellente maîtrise de la langue
française, une bonne culture générale et une vraie maturité d’esprit.
Hormis ces impératifs, il est conseillé au futur CR de posséder des qualités
plus subjectives. Nous estimerons que la première d’entre elles est liée à un
bon relationnel. La création, ne l’oublions jamais, est un travail d’équipe.
De plus, sauf dans le cas très particulier de la radio, le CR travaille systématiquement en team, c’est-à-dire en équipe, avec un directeur artistique
(schématiquement, le premier s’occupera des mots, le second des images, et
ils œuvreront ensemble pour chercher et trouver des idées, des concepts, en
se renvoyant la balle comme lors d’une partie de ping-pong).
Selon le fonctionnement interne des agences, soit le CR travaillera toujours
avec le même directeur artistique (comme un couple… avec des problèmes
de couple !), soit il sera amené à croiser, c’est-à-dire à changer de collaborateur selon les sujets, selon les disponibilités des uns et des autres, selon les
desiderata du directeur de création.
Quoi qu’il en soit, le CR devra composer avec chacun et il n’est pas sûr qu’il
ait autant d’atomes crochus ou d’affinités avec tous. Il y a toujours des préférences, mais il faudra faire avec, et le problème s’avère d’ailleurs identique
pour les DA.
De ce point de vue, le CR doit avoir suffisamment de souplesse pour s’adapter
à tous les contextes au sein du département création. N’oublions pas non plus
qu’un CR est appelé à rencontrer régulièrement ses clients ou ses représentants lors de réunions, et à communiquer souvent avec eux par mail ou par
téléphone. À ce titre aussi, il doit aimer le contact humain.
Puisque nous en sommes au chapitre des qualités subjectives, soulignons
qu’un CR se doit non seulement de posséder une grande ouverture d’esprit,
mais également il doit parallèlement se montrer fin ob­ser­vateur.
Curieux de tout, il se tient au courant de l’actualité dans de nombreux
domaines, notamment artistiques (cinéma, musique, mode, danse, théâtre…).
Bien évidemment, il lit beaucoup, aussi bien des journaux que des magazines,
des romans que des essais. Bref, il fait corps avec son époque et, plus encore,
« renifle » les nouvelles tendances pour rester en permanence à l’avant-garde
des comportements sociaux.
21
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Enfin, et c’est là une qualité incontournable, le CR aime participer, discuter,
débattre, confronter ses idées à celles des autres, argumenter et, par-dessus
tout, faire des images avec des mots.
À l’évidence, il prend du plaisir à écrire, à chercher le mot juste, le terme
exact, l’expression adéquate, à ciseler une phrase, à peaufiner un texte. C’est
un perfectionniste et, comme tout perfectionniste qui se respecte, un éternel
insatisfait.
Zoom sur…
Le profil du concepteur-rédacteur idéal
S’il est risqué de faire un portrait type du CR, il est cependant tout à fait possible de lister les qualités requises pour exercer au mieux ce métier. Certaines
de ces qualités sont fondamentales, d’autres sont accessoires mais bienvenues. Rassurez-vous : personne n’est parfait !
Les qualités essentielles
• Maîtriser l’orthographe, la syntaxe et la grammaire.
• Aimer écrire.
• Posséder une large culture générale.
• Avoir l’esprit de synthèse.
• Être créatif.
• Avoir de l’humour.
• Avoir le goût du travail en équipe.
• Être curieux et observateur.
• Ne pas avoir peur du travail.
• Être résistant au stress.
• Parler anglais couramment.
• Être perfectionniste.
Les qualités accessoires
• Savoir appréhender les nouvelles tendances et les mouvements de mode.
• Se tenir au courant de tout dans tous les domaines.
• Être réactif.
• Avoir du goût pour l’image.
• Avoir la capacité de visualiser les choses.
22
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
• Être modeste et tolérant.
• Aimer argumenter.
• Savoir prendre la parole en public.
La motivation, moteur de l’action
On ne le dira jamais assez : la conception-rédaction publicitaire n’est pas
un métier facile. Pression, stress des compétitions, charrettes jusqu’à tard le
soir les veilles de présentation (ah, la photocopieuse qui rend l’âme la veille
d’une présentation !), angoisse de la page blanche, de l’idée qui ne vient pas, du
concept insaisissable, sueurs froides, insomnies… Pour paraphraser Étienne
­Chatiliez, ex-CR, la publicité n’est pas un long fleuve tranquille, ce serait
plutôt une rivière sauvage, alternant courants calmes et courants rapides.
Bref, quelque chose de toujours imprévisible.
La conception-rédaction est à l’image de la vie : peu de bons mo­ments pour
beaucoup de mauvais. Mais, tout comme dans notre existence, ces bons
moments sont si forts et si agréables à vivre qu’ils parviennent à nous faire
oublier tous les autres. L’un des meilleurs étant incontestablement le fait de
remporter une compétition, et donc le budget d’un annonceur, après des
semaines ou des mois de travail acharné, de doutes, de débats houleux, de
remises en cause, d’engueulades parfois…
Pour continuer sur l’envers du décor, tout futur CR doit également savoir
que, contrairement à un journaliste par exemple, il ne signera jamais ni ses
textes, ni ses accroches, ni ses créations, quelles qu’elles soient. Le CR est
condamné à rester anonyme. Aussi, et avant de vous lancer dans la grande
aventure, faites vôtre le fameux proverbe « Pour vivre heureux, vivons cachés ».
Cela doit être su : si vous cherchez la célébrité, si vous êtes en mal de gloire
et d’honneurs, ne faites pas ce métier car il ne peut que vous décevoir. Par
contre, rien ne vous empêchera de vous livrer pour vous-même (égoïste !) à
des exercices d’écriture de nouvelles, de romans, d’essais, de scénarios de
films… À vous de voir si vous avez le temps de vous y consacrer et l’énergie
d’aller jusqu’au bout de vos idées.
Vous me direz que tout est question de motivation et vous aurez raison.
Moteur de l’action, elle peut soulever les montagnes et accoucher de campagnes.
23
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Voici d’ailleurs, selon David Ogilvy, les qualités requises pour faire un bon
CR :
–– une curiosité obsessionnelle des produits, des gens et de la publicité ;
–– le sens de l’humour ;
–– l’habitude de travailler dur ;
–– la capacité d’écrire de façon intéressante ;
–– la capacité de visualiser sa pensée (films TV) ;
–– l’ambition d’écrire les meilleures campagnes.
Libérez votre créativité !
À l’évidence, la créativité est plus manifeste chez certaines personnes que
chez d’autres. Comment cela se fait-il ? Pour paraphraser Simone de Beauvoir,
nous pourrions nous demander si l’on naît créatif ou si on le devient. Bref, y
a-t-il une démarche ou une méthodologie permettant d’être ou de devenir
créatif ? Quels sont les critères de la créativité et existe-t-il, à ce propos, des
règles, des techniques et des bonnes pratiques à mettre en œuvre ?
En fait, nombreux sont les auteurs et les chercheurs à s’être penchés sur la
question. Des philosophes grecs à Sigmund Freud, de Thomas Edison à Henri
Poincaré en passant par Karl Jung et Todd Lubart, les réponses diffèrent en
ce sens qu’elles ne tiennent pas compte des mêmes paramètres. Néanmoins,
tous s’accordent à penser que la créativité, fille de l’imagination, est d’abord
et avant tout le résultat d’un savant travail, mêlant imagination, persévérance
et motivation, ce que résumait d’ailleurs Thomas Edison avec cette formule :
« La créativité, c’est 99 % de transpiration et 1 % d’inspiration. »
Pour chercher des idées, il faut en avoir envie. Autrement dit, la motivation
est un puissant facteur déclenchant, mais elle n’est pas le seul car la créativité
nécessite également une bonne part de ténacité et un véritable goût du défi.
Cette prise de risques, les créatifs doivent l’assumer jusqu’au bout et, de ce
point de vue, nous irons jusqu’à dire que nous préférons des idées qui vont
trop loin à des idées prudentes ou timorées. « Soyons fou » est un leitmotiv
qui convient aux créatifs car, dans la pratique, il s’avère beaucoup plus facile
d’atténuer une idée trop novatrice que de s’acharner à faire décoller une idée
banale ou ordinaire.
S’il faut du tempérament pour être créatif, voire un brin de folie, il est conseillé
d’être parallèlement méthodique et structuré. La démarche de la créativité
24
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
n’a rien à voir avec de la magie, mais se caractérise plutôt par un judicieux
mélange de rigueur et d’imagination.
Pour ce qui concerne la rigueur, on connaît l’intérêt des méthodes associatives
depuis les Grecs. En voici les trois règles principales :
•• La contiguïté, qui exprime les rapprochements de proximité (exemple :
blessure fait penser à douleur).
•• La similitude, c’est-à-dire les rapprochements catégoriels (exemple :
un chat peut faire penser à un tigre).
•• Le contraste, à savoir les rapprochements inversés (exemple : l’image
d’un nain peut renvoyer à celle d’un géant).
Ces mécanismes de la pensée sont recommandés pour la phase de production
d’idées. Il semble même qu’ils fonctionnent de façon inconsciente pendant
les périodes d’incubation ou de détente, lorsque le créatif fait une pause et
se tient à l’écart du problème.
Quant à la métaphore, elle a aussi son mot à dire. Aristote l’avait déjà bien
compris lorsqu’il écrivait dans sa Poétique : « C’est une preuve d’intelligence
supérieure que de faire des métaphores, car c’est percevoir des ressemblances
cachées entre les choses. »
En 1960, les Américains H. Prince et W. J. J. Gordon avaient fait de l’analogie, en tant que rapprochement métaphorique de deux idées ordinaires, un
instrument de créativité.
Alors quelle est la recette et, d’ailleurs, y en a-t-il une ? Difficile à dire tant
la créativité ressemble à une mosaïque de comportements. Reste que les
créatifs, au sens large du terme, présentent quelques traits communs parmi
lesquels on retiendra surtout l’esprit de combativité, le sens de la rigueur et,
bien évidemment, une bonne dose d’imagination.
Autrement dit, être créatif, c’est à la fois se montrer rigoureux et inventif,
et ne pas craindre de bousculer les idées reçues et le conservatisme. Pour
exemple, c’est en faisant preuve de telles qualités qu’Einstein est parvenu,
après des années et des années d’effort, à découvrir et à mettre au point la
théorie de la relativité.
Alors, après tout, être créatif, ne serait-ce pas chercher à acquérir une nouvelle dimension ?
25
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
4. Les règles à suivre
Simplicité, clarté, efficacité
À propos de littérature, Marguerite Duras avait l’habitude de dire : « Le plus
difficile est de faire simple. » Il est vrai que son style, très fluide, a toujours
été un modèle de concision et de précision.
L’écriture publicitaire peut prendre exemple sur cette simplicité car elle a le
caractère de l’évidence. À la simplicité, dont on ne se lassera jamais de répéter
et de répéter encore qu’elle est fondamentale – les plus grandes campagnes
de pub ne sont-elles pas les plus simples, les plus, apparemment, évidentes ?
–, on ajoutera la clarté, le style, la transparence de l’expression, la précision,
bref autant de critères qui rendent un texte agréable et plaisant à lire.
Au quotidien, qu’il s’agisse de la rédaction d’une accroche, d’une signature
de marque ou d’un texte, le premier réflexe du CR doit être de se dire : est-ce
que je ne peux pas faire encore plus simple, dire les choses de façon encore
plus concise ? C’est ce que souligne Jean-Marie Dru dans Le saut créatif1 :
« Simple signifie facile à comprendre. La simplicité d’une idée, c’est la garantie
de compréhension du message par le consommateur. […] Il ne sert à rien
d’avoir une idée originale, reposant sur une stratégie pertinente, si le destinataire ne la comprend pas ou la comprend de travers. Le publicitaire doit
donc dépouiller son style, pour aller à l’essentiel. Les Américains aiment
employer une formule qui s’applique particulièrement bien à la publicité. Ils
disent : Less is more2. […] Pour être simple, il ne suffit pas de dire une seule
chose. Il faut aussi parler avec simplicité. La démarche qui consiste à tout
simplifier, et encore simplifier, est à la base de la plupart des grandes idées.
Ex : « Eram. Paris-Bagdad. 120 francs ». Il faut beaucoup de talent, ou de
travail, pour parvenir à s’exprimer de façon aussi ramassée. »
Sachez-le, en publicité, la simplicité conduit à l’efficacité.
Si le CR s’interdit d’employer des termes confus ou alambiqués, s’il s’attache
à écrire dans un langage simple, dans un style clair, accessible, mais aussi
enlevé et vivant, alors un pas important sera effectué dans l’objectif de retenir
l’attention du lecteur et, exercice encore plus délicat, de la garder jusqu’au bout.
1.Jean-Marie Dru, Le saut créatif, Lattès, 1984.
2.Moins c’est plus: l’expression vient d’un architecte d’origine allemande, émigré aux États-Unis au
moment de la montée du nazisme, en 1938.
26
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
L’efficacité, condition essentielle du bon fonctionnement de toute communication publicitaire, constitue donc le fruit d’un subtil équilibre entre simplicité du ton, clarté du message, qualité de la promesse et impact (nous y
reviendrons plus loin).
Dans la mesure où les insertions sont chères, voire très chères, dans tous
les médias, sur tous les supports et plus encore à la TV, l’efficacité s’avère
primordiale en publicité.
On ne regarde pas la publicité, on se contente de la voir
Pour qu’une publicité soit efficace – n’oublions pas que la finalité de la publicité est de faire acheter un produit ou un service par un consommateur –, il
faut que le récepteur l’ait vue et retenue. Autrement dit, elle se doit de sortir
du lot par son caractère créatif. Elle doit marquer et se faire remarquer.
Pour faire partie de celles qui restent, c’est-à-dire de celles qui sont mémorisées, les autres étant oubliées sitôt qu’elles sont vues, il faut donc nécessairement retenir l’attention, créer un impact fort, surprendre, éventuellement
créer un choc émotionnel.
Comme les informations ont tendance à s’annuler au fur et à mesure – le
meilleur exemple étant celui de l’effet de trop-plein du journal télévisé –,
l’accumulation des messages publicitaires conduit à leur neutralisation.
Structurellement sélective, la mémoire efface d’elle-même par autodéfense
l’immense majorité des sollicitations publicitaires auxquelles l’individu se
voit confronté au quotidien. L’indifférence, ce cauchemar du publicitaire,
guette sans cesse le consommateur saturé. Avec beaucoup d’appelés et peu
d’élus, bien malin le message publicitaire qui restera inscrit, consciemment
ou inconsciemment, dans la tête de ce même consommateur.
Quelques repères
Pour vous donner une idée de l’importance essentielle de l’impact en publicité, sachez que le temps d’exposition à une affiche 4x3 ne dure pas plus de…
trois secondes. Autrement dit, nous ne sommes pas prêts à accorder plus de
trois secondes à une affiche pour en comprendre le visuel, lire l’accroche et
voir de quel annonceur il s’agit. Un paramètre qui, une fois encore, plaide
pour la simplicité.
27
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
Cela implique que tous les éléments composant une publicité s’appréhendent
en même temps, de manière globale et dans un temps de décodage extrêmement court.
Même punition en ce qui concerne une annonce presse, qu’il s’agisse d’une
simple page ou d’une double page. Le lecteur qui feuillette un magazine se
voit confronté à des dizaines de sollicitations publicitaires. Pour retenir son
attention, il faut faire très fort : notre lecteur n’a pas de temps à perdre, il
ne va pas s’arrêter sur toutes les publicités. Soit par un visuel, soit par une
accroche, soit par les deux, retenir son attention devient donc essentiel.
Autre critère à prendre en considération au moment où l’on écrit un texte
publicitaire : seuls 2 à 3 % des prospects potentiels le liront, c’est-à-dire le
cœur du cœur de cible ! Ce n’est pas pour autant qu’on pourra se permettre
de bâcler ledit texte. Les minorités ont aussi droit au respect.
Pour en terminer sur ce problème de la surexposition du consommateur à
la publicité et de son degré de mémorisation, sachez également que 30 %
des gens se souviennent à peu près de ce qu’ils ont vu, mais sans pouvoir le
préciser, et que 10 % seulement d’entre eux se souviennent tout juste correctement de ce qu’ils ont lu !
C’est vous dire s’il est important de se différencier avec intelligence de ses
concurrents, d’avoir une création qui, non seulement émerge, mais fait le
trou. La reconnaissance constitue l’un des critères fondamentaux de l’efficacité publicitaire.
Savoir dire non
Nous avons vu combien la simplicité constitue l’un des paramètres fondamentaux de l’efficacité publicitaire.
Pour un CR comme pour un DA, faire simple, c’est aller droit au but, mais
c’est aussi le faire par rapport à une stratégie complexe et, quelquefois, insuffisamment travaillée par des commerciaux pressés et stressés, voire même
non motivés ou carrément incompétents.
Autant savoir tout de suite que les briefs élaborés par les commerciaux pour
les créatifs sont loin d’être parfaitement réfléchis et exempts de défauts, certains commerciaux comptant d’ailleurs sur les créatifs pour pallier leurs
déficiences en matière de stratégie marketing. De ce point de vue, les créatifs
peuvent toujours, avec l’accord du directeur de création, refuser le brief et
28
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
renvoyer les commerciaux à leurs chères études. Le cas est rare, mais il existe,
et il faut le signaler.
Lorsqu’il s’agit de suivis de campagne, ou de travaux estimés sans enjeux
particuliers, les commerciaux ont aussi la désagréable habitude de briefer les
créatifs sur un coin de table, si ce n’est dans un couloir, sans aucune trace
écrite, bien entendu. Un conseil : refusez systématiquement un brief, qui ne
sera d’ailleurs, dans ces conditions, qu’un ersatz de brief. Appliquez plutôt
l’adage suivant : « Brief oral ? Maquette orale ! » Généralement, c’est suffisant
pour secouer les commerciaux paresseux !
Faire simple, c’est faire court
Sachant que le temps de décodage moyen d’une affiche 4x3 ne dépasse pas
trois secondes, il est fortement conseillé au rédacteur d’écrire une accroche
courte. Force est de reconnaître qu’une accroche de deux lignes aura moins
de chances d’être lue qu’une autre ne comprenant que trois ou quatre mots.
C’est une évidence, mais encore faut-il la rappeler au bon souvenir des tous
nos actuels et futurs CR.
Pour ce qui concerne une accroche sur une annonce presse, dans un magazine
par exemple, le problème sera légèrement différent. La règle des trois secondes
n’a plus lieu d’être ici. La personne qui feuillette le magazine en question
peut passer une page de publicité en moins de 2/10e de seconde ou bien, au
contraire, s’y attarder jusqu’à lire le texte qui, éventuellement, accompagne
le visuel. En fait, le temps que le lecteur passera sur cette page de publicité
sera fonction soit de l’impact en tant que tel de l’annonce (visuel choc, texte
provocateur), soit de son implication en termes d’achat de produit ou de
service en cette période précise. D’ailleurs, ne nous faisons pas d’illusions
car seuls quelques petits pour cent du cœur de cible iront jusqu’à lire le texte
d’accompagnement en entier, à condition que ce dernier soit suffisamment
court, vivant et bien écrit pour garder son attention jusqu’au bout.
Si notre lecteur est en phase d’achat d’une automobile, il existe de grandes
chances pour qu’il soit intéressé par toutes les publicités vantant tel ou tel
modèle de voiture et qu’il s’attarde donc de façon naturelle sur l’annonce.
Par contre, si son objectif consiste à acheter un nouvel ordinateur dans les
mois à venir, votre annonce presse automobile, quels que soient son impact,
sa pertinence et son talent, lui sera, très vraisemblablement, indifférente.
29
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
L’accroche, à juste titre
■■ Une heureuse idée
La majorité des gens l’appelle encore slogan. Les professionnels préfèrent
parler d’accroche (on dira claim ou encore punch line en anglais). Il est vrai
que le mot est évocateur.
Une accroche, c’est donc tout simplement le titre d’une affiche ou d’une
annonce presse. Comme son nom l’indique, sa fonction principale consiste
à accrocher le lecteur, à retenir son attention.
Le nec plus ultra étant, bien entendu, qu’elle soit suffisamment forte pour être
mémorisée, la marque émettrice accompagnant parallèlement ce processus.
On n’oubliera pas la campagne de l’agence Alice pour le Club Méditerranée,
ses visuels évocateurs et ses accroches apparemment laconiques : « Faire. Voir.
Manger. Dormir. Boire. Jouer. Partager. » Une campagne épurée, certes, mais,
plus encore, la synthèse d’une stratégie pointue, débanalisant nos actions
quotidiennes basiques en les projetant dans un univers de vacances où elles
prennent, tout à coup, une autre dimension.
En quelques visuels, en quelques mots, le Club Méditerranée promet une
autre vie où plaisir, temps de vivre, détente, convivialité et nature sont présents dans leur plus simple expression. Mine de rien : un tour de force.
Est-ce pour autant qu’il faut suivre un tel modèle ? Nous ferons une réponse
de normand en disant oui… et non.
Oui, car cette campagne est exemplaire dans sa concision. Non, car ce type
de réponse ne peut s’adapter à tous les sujets, loin de là. De plus, seule une
marque bénéficiant déjà d’une forte notoriété peut se permettre ce type de
communication.
■■ Les plus courtes sont-elles les meilleures ?
Ne nous leurrons pas : être à la fois synthétique, précis et concis en une seule
accroche à partir d’une problématique complexe – c’est rare qu’elle ne le soit
pas ! – constitue un exercice incontestablement difficile.
À ne vouloir oublier aucun argument, le CR débutant aura tendance à en
faire trop, à tenter de tout dire à la fois. Erreur fatale. Il vaut mieux choisir un
avantage différenciateur, un argument discriminant vis-à-vis de la concurrence, et s’y tenir. Dans la mesure où il en existe généralement plusieurs,
30
Conception-rédaction : la parole est à l’écrit
sélectionner le meilleur argument, le plus pertinent, relève d’un travail de
stratégie. Le choix de l’argument mis en avant peut exprimer la synthèse de
nombreux paramètres dont, par exemple, une parfaite adéquation à la cible,
une innovation ou encore un bénéfice consommateur concret, encore appelé
plus-produit. Mais il peut aussi être volontairement centré sur un seul et
unique avantage considéré comme majeur : une consommation minimale
pour une automobile, le poids plume d’une tablette tactile, l’apport vitaminique d’un paquet de céréales, etc.
Point de loi
Loi Toubon : en bon français
Alors ministre de la Culture, Jacques Toubon fait passer en 1994 une loi relative à l’emploi de la langue française, aujourd’hui plus connue sous le nom
de loi Toubon. Cette loi est destinée à assurer la primauté de la langue française, chez nous, en France, là où son emploi est de plus en plus menacé par
« l’impérialisme » de l’anglais.
Dans le cadre de la publicité, l’un des secteurs les plus visés, la loi Toubon doit
absolument être connue des CR dans la mesure où elle oblige le rédacteur à
ne pas utiliser d’anglicismes lorsqu’il écrit une accroche, un dialogue de film
ou de spot radio, un texte de brochure ou tout autre document destiné au
grand public.
L’obligation est croustillante pour qui sait combien la publicité aime à utiliser,
dans son vocabulaire interne notamment, des expressions anglaises, il est vrai,
difficilement traduisibles en français. On peut d’ailleurs se demander si tous
ces anglicismes ne sont pas uniquement destinés à disqualifier le non-initié,
à lui faire comprendre qu’il ne fait pas partie du milieu, justement parce qu’il
n’en « maîtrise » pas le langage.
Un exemple ?
Prenons une simple note de service circulant dans une agence à l’attention
des créatifs : Le brief sur le brainstorming du marketing corporate en cobranding sur « Skateboard and Co » aura lieu après le debrief sur le packshot du
sponsoring en access prime time du surf clothing « Pacific motion ».
Traduction ? Voici ce que cela pourrait donner : La réunion concernant l’exposé de
la tempête de cerveau sur les procédés de commercialisation de la prise de parole
de l’entreprise en son nom propre en partenariat de communication sur « Planche
à roulettes et compagnie » aura lieu après la réunion de rapport de fin de mission
sur la photo produit de fin d’annonce du parrainage d’accès aux grandes heures
d’écoute des vêtements spéciaux de glisse « Mouvement pacifique ».
31
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
À savoir
Même en tant que CR senior, avec un bon bagage et de nombreuses années
d’expérience derrière soi, il reste difficile de faire son trou dans cette profession avec le statut de free-lance.
Autant dire que pour un débutant dont le dossier est forcément un peu léger,
ce n’est même pas la peine d’y penser. Seul un CR bien introduit auprès de ses
clients, apprécié et demandé, certain d’avoir déjà au départ un bon volant de
travaux mensuels fixes peut raisonnablement espérer s’en sortir.
Conclusion : choisir le statut de free-lance après seulement quelques années
passées en agence, relève d’une conduite suicidaire. Qu’on se le dise !
8. Quiz n˚ 1
Vérifiez vos connaissances en répondant à ces quelques questions :
1. Qu’appelle-t-on body copy ?
2. À combien de messages publicitaires sommes-nous confrontés en
moyenne par jour ?
3. À quelle loi est due la crise des années quatre-vingt-dix dans le secteur
de la publicité ?
4. Quelles sont les qualités essentielles du concepteur-rédacteur idéal ?
5. Qui a dit : « La créativité, c’est 99 % de transpiration et 1 % d’inspiration » ?
6. À combien estime-t-on le temps d’exposition moyen du consommateur
à une affiche ?
7. Quelle est la loi assurant la primauté de la langue française dans la
publicité ?
8. Quels sont les trois niveaux de lecture d’une annonce presse ?
9. Qu’est-ce qu’un concepteur-rédacteur free-lance ?
Voir le corrigé p. 209.
62
C
orrigé des quiz
Les réponses aux questions du quiz n˚ 1 (p. 62)
1. Qu’appelle-t-on body copy ?
La body copy correspond au terme anglophone désignant tout simplement
le texte d’une annonce presse. De nombreuses agences emploient exclusivement ce terme.
2. À combien de messages publicitaires sommes-nous confrontés
en moyenne par jour ?
D’après les études, l’Européen moyen est confronté à une moyenne de 300
messages publicitaires par jour, tous médias confondus (TV, presse, radio,
affichage, etc.).
3. À quelle loi est due la crise des années quatre-vingt-dix
dans le secteur de la publicité ?
Il s’agit de la loi Sapin, entrée en vigueur le 1er avril 1993. Cette loi avait pour
but d’assurer la transparence des tarifs dans le cadre de l’achat d’espaces
effectué, commissions à l’appui, par les agences de publicité. Celles-ci sont
désormais tenues de livrer à leurs différents clients la photocopie des factures
originales d’achat d’espace. Il va sans dire que cette loi a mis fin à des abus
manifestes.
4. Quelles sont les qualités essentielles du concepteur-rédacteur
idéal ?
•• Maîtriser l’orthographe, la syntaxe et la grammaire.
•• Aimer écrire.
•• Avoir une large culture générale.
•• Avoir l’esprit de synthèse.
209
Devenir concepteur-rédacteur en publicité
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Être créatif.
Avoir de l’humour.
Avoir le goût du travail en équipe.
Être curieux et observateur.
Ne pas avoir peur du travail.
Être résistant au stress.
Parler anglais couramment.
Être perfectionniste.
5. Qui a dit : « La créativité, c’est 99 % de transpiration
et 1 % d’inspiration » ?
Il s’agit de Thomas Edison, l’inventeur américain du télégraphe, du phonographe, de l’ampoule électrique dite lampe à incandescence, et du kinétoscope, première machine à produire des films par succession rapide de vues
individuelles.
6. À combien estime-t-on le temps d’exposition moyen
du consommateur à une affiche ?
Pour un automobiliste circulant en ville, le temps d’exposition moyen à une
affiche 4x3 m ne dépasse pas trois secondes. Cela veut donc dire qu’il ne
dispose que de trois secondes pour décoder une affiche. Un laps de temps
très limité qui plaide pour des visuels d’affiche sobres, voire épurés, et des
accroches plutôt courtes.
7. Quelle est la loi assurant la primauté de la langue française
dans la publicité ?
C’est la loi Toubon, du nom de son auteur, alors ministre de la Culture. Datée
de 1994, cette loi était destinée à lutter contre la déferlante des anglicismes
de toutes sortes (très prisés par les métiers de la publicité) et à assurer la
primauté de la langue française dans notre pays.
8. Quels sont les trois niveaux de lecture d’une annonce presse ?
Il s’agit de :
–– la lecture rapide (visuel, accroche) ;
–– la lecture écrémée (visuel, accroche, marque) ;
–– la lecture totale (visuel, accroche, marque, texte, et intertitres s’il y
a lieu).
210
L
exique
AACC – Association des agences conseil en communication.
Accroche – Slogan d’une annonce publicitaire destiné à attirer l’attention des
consommateurs. On peut aussi parler de titre, de claim ou encore de headline en
langue anglaise.
AD (art director) – En français, c’est le directeur artistique (DA).
Advertising – Publicité en langue anglaise.
Affiche – Média publicitaire plus connu sous le terme de 4 x 3, soit 4 mètres par
3 mètres.
Agence – Abréviation d’agence conseil en publicité.
Animatic – Story-board d’un film TV ou cinéma, monté comme un dessin animé.
En fait, il s’agit d’une maquette d’images montées « cut », destinée à mieux faire
comprendre le rythme et le style donnés au futur film.
Annonceur – Entreprise finançant une campagne de publicité.
Approche – En typographie, désigne l’espace existant entre deux lettres imprimées.
ARPP – Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ex-BVP).
Attaque – Se dit de la première phrase d’un texte, souvent déterminante dans le
but d’engager le lecteur à aller plus loin.
Attribution – Capacité d’un consommateur à relier une publicité à son annonceur.
Audience – Ensemble des individus en contact avec un média.
Audimat – Appareil électronique branché sur un poste de TV, permettant de quantifier le taux d’écoute des chaînes.
Award – En langue anglaise, prix récompensant une création publicitaire.
221
Didier
LAVANANT
en
publicité
Tout ce qu’il faut savoir pour élaborer un projet publicitaire,
de l’idée au suivi de la réalisation.
Cet ouvrage, riche en informations sur la création publicitaire,
ses méthodes et ses enjeux, s’appuie sur de nombreuses
campagnes récentes.
Riche en exemples et conseils, il permet au concepteur-rédacteur
de maîtriser certaines règles essentielles du métier :
✔ Structurer et rédiger ses textes selon des techniques
d’expression écrite propres à l’argumentation publicitaire :
simplicité, clarté, efficacité !
✔ Suivre les étapes essentielles depuis l’idée jusqu’au suivi
de réalisation : étude du brief, premières pistes, validation,
prétest, présentation, argumentation…
✔ Collaborer avec le directeur artistique afin que textes
et visuels s’agencent parfaitement. Didier Lavanant est concepteur-rédacteur depuis plus de 20 ans,
dont 12 passés chez Publicis. Aujourd’hui, concepteur-rédacteur
indépendant, il est aussi professeur de communication à l’ISEG, à
l’ISCOM et l’ISCPA de Lyon : il enseigne la pratique du métier de créatif
aux étudiants de Licence et Master.
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