Qu’est-ce que la VNI ? Docteur Sandrine Pontier Service de Pneumologie, Unité de Soins Intensifs Hôpital Larrey CHU de Toulouse La Ventilation Non Invasive (VNI) est devenu au cours de ces dernières années, un des traitements majeurs utilisé dans les services de pneumologie et de réanimation dans le cadre de l’insuffisance respiratoire aiguë comme chronique. DEFINITION Le terme « VNI » regroupe toutes les techniques d’assistance ventilatoire délivrant une aide ventilatoire sous la forme de pression positive, sans intubation trachéale ou trachéotomie. Avant 1955, l'assistance ventilatoire mécanique utilisait principalement le poumon d'acier (ventilation en pression négative). Après 1955, le relais est pris par la ventilation en pression positive intermittente via une trachéotomie ou une intubation, que ce soit en situation aiguë (réanimation) ou au long cours, à domicile, pour les insuffisants respiratoires chroniques (IRC). Les bénéficiaires en sont les victimes d'une épidémie de poliomyélite antérieure aiguë survenue dans les années 55-60. Cependant, les sondes en caoutchouc utilisées sont sources d'infection et les ballonnets trop gonflés entraînent très fréquemment des lésions trachéolaryngées. Ces arguments ont incité à utiliser des interfaces « non invasives » : pièce buccale (années 60), masques d'anesthésie, voire masques d'aviateurs. Leur inconfort, à l’époque, a aboutit à l’abandon de la ventilation au masque. Dans les années 90, les résultats français sur l'insuffisance respiratoire aiguë chez le BPCO marquent le début de la VNI « moderne ». La France est un des leaders dans le domaine, avec l’Italie et l’Espagne, ce qui explique le nombre de patients actuellement ventilés en comparaison avec d’autres pays européens ou les USA. BASES PHYSIOPATHOLOGIQUES Les échanges gazeux dépendent du renouvellement périodique de l'air alvéolaire ; lors d'une inspiration, l'air est transféré vers les alvéoles ; lors de l'expiration, l'air alvéolaire est transféré vers l'extérieur. Ces transferts sont rendus possibles par l'existence d'une différence de pression entre les alvéoles (Palv) et l'entrée des voies aériennes (Pao). Ainsi : - à l'inspiration, Pao > Palv par abaissement de Palv (contraction des muscles inspiratoires) - à l'expiration, Palv > Pao, par élévation de Palv à cause des forces élastiques de rappel de la cage thoracique et du tissu pulmonaire Sur le plan physiopathologique, on distingue : - l’insuffisance ventilatoire : la fonction « pompe » de l’appareil respiratoire (des centres respiratoires aux muscles en passant par la paroi thoracique et les voies aériennes supérieures) est altérée, avec pour conséquence une hypoventilation alvéolaire (hypoxémie + hypercapnie). - l’insuffisance respiratoire : la fonction d’échange du poumon est altérée, aboutissant à une hypoxémie isolée. En cas de défaillance ventilatoire, l’intérêt de la VNI sera d’assumer une partie de travail ventilatoire ainsi que de diminuer la charge à laquelle doit faire face la « pompe » pour maintenir une ventilation alvéolaire adaptée aux besoins métaboliques. Au cours d’une défaillance respiratoire, l’objectif étant d’améliorer l’oxygénation du sang veineux mêlé sans pour autant voir survenir d’hypoventilation, le rôle de la VNI sera surtout joué par l’application d’une pression expiratoire positive externe (PEPe) par le biais du recrutement alvéolaire. En pratique, de nombreuses situations pathologiques juxtaposent les deux types de défaillances. EPIDEMIOLOGIE Dans un éditorial publié en 2004 dans la Revue des Maladies Respiratoires, JF Muir estimait à environ 20 000 le nombre de patients ventilés en France par trachéotomie et par VNDP, en se basant à la fois sur les chiffres de l’enquête européenne et sur ceux de l’observatoire ANTADIR. La ventilation assistée à domicile (VAD) est en augmentation depuis de nombreuses années en France. Cette augmentation a été estimée à plus de 12% par an ces dernières années (www.antadir.com). Entre 1992 et 2005, le nombre de patients ventilés (apnées du sommeil et insuffisance respiratoire chronique confondues) a été multiplié par plus de 6. Les chiffres sont très difficiles à obtenir, en raison de la multiplicité des intervenants et des pathologies. 2 GRANDS TYPES DE VNI La Pression Positive Continue (PPC) La PPC est le traitement de référence du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) devant les orthèses d’avancée mandibulaire et la chirurgie. Elle joue le rôle de « prothèse aérique », permettant l’ouverture des voies aériennes supérieures pendant le sommeil, libérant ainsi la filière. Les appareils sont multiples, de plus en plus petits, légers et silencieux. 2 grands types de PPC existent : - les PPC constantes : une pression positive de niveau constant est appliquée. Ce niveau est mis en place après une titration. - les PPC auto-pilotées : la pression positive est fixée entre 2 niveaux, la machine détectant les apnées. La Ventilation à 2 niveaux de pression (VNDP) La VNDP est une assistance ventilatoire qui prend en charge une partie ou tout l’effort respiratoire en procurant une aide inspiratoire. Elle permet donc de diminuer l’effort musculaire respiratoire. Le type d’assistance fourni par la machine peut être très varié en fonction des modes utilisés, mais le plus souvent, on utilise le mode VSAI-PEP (Ventilation Spontanée avec Aide Inspiratoire et Pression Positive Continue) qui laisse au patient une autonomie ventilatoire. Les machines sont multiples ; elles ont actuellement des capacités ventilatoires égales voire supérieures à des appareils de réanimation. Cela permet de traiter de mieux en mieux les patients, pour des pathologies extrêmement variées mais entraîne aussi une complexité telle que la pratique de la VNI en chronique devient presque une spécialité en tant que telle. Les pathologies traitées peuvent être séparées en 2 grands cadres : - les pathologies de la pompe : responsables d’hypoventilation alvéolaire ce sont les pathologies qui bénéficient le plus d’une assistance respiratoire. Il s’agit essentiellement de maladies neuromusculaires (Sclérose Latérale Amyotrophique, myopathies…) mais aussi de déformations thoraciques (cyphoscolioses), ou de syndromes restrictifs entrant dans le cadre d’une obésité - les anomalies de l’échangeur pulmonaire : résultant le plus souvent d’anomalies des rapports ventilation – perfusion ou de pathologies de l’interstitium pulmonaire, ces pathologies relèvent plus d’une oxygénothérapie que d’une assistance ventilatoire. Néanmoins, la VNI peut avoir un intérêt notamment en cas de pathologie musculaire ou de dénutrition associée. Dans certains cas, la VNI permet chez ces patients une meilleure qualité de vie. A QUOI RESSEMBLE LA VNI ? LA GESTION DE LA VNI AU LONG COURS • Machine • Circuit • Ajout d’oxygène : facultatif • Interface La VNI s’administre par le biais de machines spécifiques qui ont toutes en commun de se brancher sur le courant, de prendre l’air de la pièce, le filtrer et l’administrer au patient via un circuit et une interface. L’air peut éventuellement être enrichi en oxygène. Certaines machines ont une batterie interne de durée variable. Un patient ventilé plus de 12 heures par jour doit avoir 2 machines avec batterie, en état de marche à son domicile. Le facteur limitant de la VNI est l’interface. Actuellement, l’industrie fait de gros efforts dans ce domaine, avec des interfaces de plus en plus variées, bien qu’il y ait encore des problèmes dans des situations particulières comme la pédiatrie. Aux masques naso-buccaux initiaux, se sont ajoutés des masques nasaux, des pipettes nasales ou buccales… Les matériaux utilisés actuellement procurent un confort tel qu’on doit actuellement presque toujours trouver une interface adaptée pour nos patients. QUELLE SURVEILLANCE ? Les patients pris en charge par PPC pour SAS doivent bénéficier d’une surveillance annuelle une fois que le SAS est contrôlé. Cette surveillance est surtout clinique (évaluation de la somnolence). Les patients appareillés par VNDP sont des insuffisants respiratoires chroniques graves qui nécessitent une surveillance rapprochée (en état stable au moins 2 fois par an chez les pneumologue) avec évaluation clinique mais aussi nocturne et fonctionnelle. L’appareillage en lui-même est fourni par un prestataire qui doit en surveiller le bon fonctionnement régulièrement selon un cahier des charges précis. Le prestataire doit pouvoir être joint 24h/24. Ses coordonnées sont généralement notées sur la machine.