ITEM 50 Item 50 Complications de l’immobilité et du décubitus. Prévention et prise en charge prévention et conduite à tenir Objectifs pédagogiques • Expliquer les principales complications de l’immobilité et du décubitus. • Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient. Plan Aller à : > Complications cutanées > Complications cardio-circulatoires > Complications respiratoires > Complications locomotrices > Complications neurologiques > Complications digestives > Complications urinaires > Complications infectieuses I. INTRODUCTION • Le décubitus prolongé peut avoir des répercussions sur de multiples appareils. En dehors de situations physiologiques exceptionnelles (microgravité), l’homme subit des situations prolongées de décubitus en cas de maladie ou de traumatisme. Les perturbations induites dans ces conditions comportent des modifications en rapport avec : – la perte de l’orthostatisme ; – la pathologie causale à l’origine du décubitus ; – le stress lié à l’affection elle-même et aux contraintes de la perte de mobilité. • Du fait du décubitus : – les structures musculaires concernées par la gravité n’ont plus à assurer la stabilité du corps debout ou au cours de la déambulation ; – les organes sensoriels ne reçoivent plus les informations impliquées pour l’équilibre ; – les modifications du système cardiovasculaire entraînent une désadaptation à l’orthostatisme. • La stratégie d’approche des conséquences et des complications du décubitus et de l’immobilisation réside dans : – l’analyse des modifications physiologiques induites par ce nouvel état ; – l’appréciation des circonstances cliniques particulières liées à l’état pathologique initial ; – la recherche des complications propres à la situation de décubitus et d’immobilité. • Les complications de décubitus se décrivent suivant leur rapidité d’installation et leur siège (> voir tableau I). Elles seront présentées selon leur chronologie d’apparition précoce ou tardive et selon leur siège. II. COMPLICATIONS CUTANEES • Les complications cutanées sont dominées par les escarres. • Il est important d’en connaître les facteurs favorisants et d’individualiser les patients à risque car la mise en place de mesures préventives efficaces permet d’en prévenir la survenue même chez des malades gravement atteints. A. Mécanismes et facteurs favorisants 1.Mécanismes • L’escarre est une nécrose ischémique des tissus cutané et sous-cutané liée une pression prolongée des parties molles, supérieure à la pression de perfusion capillaire, en regard d’un relief osseux. ◊ Chez un sujet sain, une pression continue sur les masses molles de 200 mmHg peut entraîner une escarre en 2 heures. ◊ En position assise, la pression peut varier entre 100 et 200 mmHg selon la nature du siège. Une escarre peut apparaître dans un délai de 3 heures. ◊ En position couchée, les pressions sont mieux réparties variant autour de 100 mmHg. Une escarre peut se constituer en 4 • heures. Ces délais sont raccourcis chez des patients présentant des facteurs de risque. • La survenue d’escarre est une des complications les plus invalidantes du décubitus et de l’immobilisation. Sa fréquence augmente en cas de pathologie neurologique (paraplégie, tétraplégie, coma), chez la personne âgée et en milieu de réanimation. Il s’agit d’une complication potentiellement grave et lourde car les soins sont longs et coûteux, induisant à elle seule une prolongation de l’hospitalisation. 2. Facteurs généraux favorisants a. Hypoxie systémique • Elle aggrave l’hypoxie tissulaire induite par la compression • Les causes d’hypoxie systémiques et/ou régionale sont : fièvre, athérosclérose, diabète, hypotension, vascularites, anémie, pathologie respiratoire. b. Dénutrition, déshydratation • Chez l’adulte la mesure la plus simple pour apprécier l’état nutritionnel est l’indice de masse corporelle (IMC) : IMC = poids [en kg] divisé par la taille [en mètre] au carré • Une dénutrition est définie par un IMC inférieur à 18,5 entre 18 et 65 ans. Une perte de poids rapide > 5 % en 1 mois, > 10 % en 6 mois témoigne d’une dénutrition récente. Les critères biologiques de dénutrition sont plus fiables que la clinique chez le sujet âgé et le sujet paralysé. Le dosage de l’albumine et de la préalbumine, interprété en fonction de la CRP est un bon reflet de l’état nutritionnel. La préalbuminémie a une demi-vie de deux jours, ce qui permet une appréciation plus précoce des modifications nutritionnelles. La dénutrition est affirmée par un dosage d’albumine < 35 g, un dosage de pré-albumine < 200 mg. c. Risques spécifiques à certaines situations – Maladies neurologiques induisant : trouble de vigilance, troubles sensitifs et/ou moteurs qu’ils soient d’origine centrale ou périphérique entraînant une immobilisation avec impossibilité de se mouvoir (coma, paraplégie, hémiplégie…). – Médicaments : corticoïdes, ergotamine, alphabloquants… – Facteurs mécaniques : • hyperpression, favorisée par une mauvaise installation et/ou une attitude vicieuse, positionnement sur un plan dur ; • cisaillement provoqué par des pressions exercées obliquement (au cours des transferts par glissement par exemple) ; • frottements et macération qui rendent la peau plus sensible ; • soins locaux : massages traumatiques, agression thermique : de vessie de glace… B. Description clinique et signes de gravité 1. Stades évolutifs • Une escarre évolue selon différents stades successifs (>voir fig. 1 : schéma des lésions et > fig. 2 : aspects cliniques) : – stade 1 : rougeur (hyperhémie) qui ne disparaît pas à la pression ou érythème avec œdème périphérique persistant à la levée de l’appui. L’épiderme est intact ; – Stade 2 : perte cutanée superficielle épidermique pouvant s’étendre au derme, se manifestant par une abrasion ou par une phlyctène. En cas d’aggravation, la collection séreuse devient sérohématique. Il existe alors une réaction inflammatoire. Cette collection pourra évoluer en l’absence de traitement vers une plaque de désépidermisation avec réaction inflammatoire plus intense et surinfection bactérienne possible. Ces deux stades sont encore réversibles avec les techniques de soins et de prévention ; – Stade 3 : perte cutanée profonde incluant l’épiderme, le derme et l’hypoderme, formant une plaque de nécrose sans atteinte osseuse, ni tendineuse ni articulaire associée. Une réaction inflammatoire et une surinfection sont associées ; la lésion n’est pas spontanément douloureuse mais l’appui et les soins sont douloureux en cas de sensibilité préservée ; – Stade 4 : perte cutanée profonde touchant les trois couches de la peau et s’étendant à l’os, aux tendons et aux articulations sous-jacentes. • L’aspect apparent de l’escarre ne reflète pas toujours sa gravité car le derme résiste mieux à l’ischémie et la nécrose en superficie est en règle générale moins étendue que la nécrose sous-jacente qui peut affecter en profondeur le derme, l’hypoderme et le tissu musculaire. 2. Localisations préférentielles des escarres • Elles correspondent aux zones d’appui selon la position du patient : – décubitus dorsal : occiput, épines des scapula, coudes, rachis dorsal, région sacro-fessière (sacrum, ischion, fesses) et talons ; – décubitus latéral : trochanter, faces internes des genoux si un membre repose sur l’autre, tête de la fibula, malléole latérale, bord externe du pied et du talon, tête humérale, coude et l’oreille ; – position assise : ischions, sacrum, trochanters, talons, occiput et épines du scapulum. 3. Complications L’extension en profondeur de l’escarre est à l’origine des principales complications : – complications infectieuses : survenue d’abcès profonds (à Staphylococcus aureus, Pseudomonas ou à germes anaérobies) ; – fistules responsables de décollements sous-cutanés, ostéites et ostéo-arthrites, septicémies ; – complications locales : extension de l’escarre si la suppression de l’appui n’est pas réalisée, retard ou absence de cicatrisation, bourgeonnement exubérant, transformation cancéreuse tardive. – complications à moyen terme liées à la durée de l’hospitalisation : infection nosocomiale, majoration de la perte d’autonomie, trouble psychique dépression… C. Prévention ◊ La prévention des escarres doit être systématique chez un sujet à risque en décubitus ou immobilisé. 1. Évaluation du risque d’escarres Une évaluation du risque est indispensable ; elle peut être facilitée par l’utilisation d’échelles d’évaluation. - L’échelle de Norton, qui comporte 5 critères d’évaluation est plus particulièrement adaptée aux sujets âgés (65 ans et plus) (> voir tableau II). - L’échelle de Waterlow est plus précise . Le score calculé permet d’identifier un risque faible, modéré, élevé ou très élevé d’escarre, ce qui guidera le choix du support (> Voir tableau III) 2.Mesures de prévention a. Réduction des durées d’appui ◊ Changer le malade de position reste la meilleure prévention. Il importe de changer le malade de position toutes les 4 heures (au minimum) en demandant au personnel soignant ainsi qu’au patient et à son entourage de surveiller systématiquement tous les points d’appui. - Chez un malade paralysé ou ne pouvant être déplacé (fracture non stabilisée), des coussins de décharge en mousse peuvent être confectionnés pour éviter un appui prolongé au niveau des talons ou des coudes. La mobilisation et la verticalisation précoces et régulières obéissent aux mêmes objectifs. ◊ Prévenir toute macération : il est nécessaire de prévenir toute macération, en particulier en cas d’incontinence urinaire ou anale surtout chez le patient obèse. ◊ Assurer des apports nutritionnels suffisants : il importe d’assurer des apports nutritionnels et hydriques suffisants, en particulier en cas de dénutrition ou de carence. ◊ Favoriser l’éducation du patient et de son entourage aux techniques de prévention d’escarre, et à la surveillance cutanée. b. Aides à la prévention • L’utilisation de supports adaptés diminuant les pressions a montré son efficacité dans la prévention des escarres et permet une guérison plus rapide. Il est nécessaire de tenir compte du temps moyen passé en décubitus pour prescrire un support de lit. Lorsque le temps passé au lit est important (plus de 15 heures) des supports correspondant au risque supérieur peuvent être utilisés (> voir tableau IV). • Les principes de choix des supports de fauteuil (coussin de siège) doivent prendre en compte : – la position assise qui doit être équilibrée ; – l’inconfort ; – l’existence d’une éventuelle spasticité ou de douleurs qu’il faut traiter ; – la nécessité de récupérer la mobilité et les gestes de la vie quotidienne. D. Soins locaux en fonction de l’évolution • Toute apparition d’escarre malgré la prévention doit faire reconsidérer les facteurs de risques locaux et généraux. • Le principe de la cicatrisation en milieu humide (qui améliore les processus de cicatrisation) est acquis à tous les stades. • Les principes des soins locaux varient en fonction de l’évolution (> voir tableau V objectifs et traitement et tableau VI : pansements). 1. Phase de nécrose : principe de détersion • L’objectif thérapeutique est de favoriser le décollement de la zone nécrotique par ramollissement puis l’excision afin de permettre une détersion complète. Cette élimination des zones nécrotiques peut être effectuée à la curette ou au bistouri. C’est le traitement essentiel. • Certains traitements complémentaires peuvent être utilisés : – des enzymes protéolytiques qui permettent une détersion des tissus nécrosés par liquéfaction. – de vie courte impliquant la réalisation de pansements faits de façon quotidienne ou biquotidienne ; – des hydrogels sous forme liquide ou en plaque dont le fort pouvoir d’humidification permet de ramollir les zones nécrotiques sèches. • Il est utile de renouveler les pansements de façon quotidienne ou biquotidienne. 2. Phase exsudative • La plaie est recouverte de débris fibrineux ; une colonisation bactérienne sans signification pathologique est fréquente. Un traitement antibiotique systématique n’est pas justifié en l’absence de signes cliniques d’inflammation tissulaire, de complications infectieuses loco-régionales, de signes infectieux généraux. • L’objectif du traitement est de favoriser la détersion de la plaie, préalable nécessaire avant le stade de bourgeonnement. • La plaie pourra être nettoyée à l’eau non stérile ou au sérum physiologique et traitée avec des pansements absorbants qui permettent une absorption de l’exsudat séreux et fibrineux : alginates de calcium, hydrocellulaires, pansements au charbon ou hydrocolloïdes. 3. Phase de bourgeonnement : principe de la cicatrisation en milieu humide • Le bourgeonnement témoigne de la régénération des tissus épidermiques et sous-épidermiques. Il ne peut survenir que lorsqu’il n’y a plus de nécrose ni de débris fibrineux. • L’objectif du traitement est à ce stade de respecter les processus de cicatrisation en utilisant des pansements protecteurs et humides : - hydrocolloïdes en cas de plaie encore exsudative ou des - pansements gras en cas de plaie bourgeonnante plus sèche et superficielle. • Les changements de ces pansements en particulier colloïdes sont effectués en fonction de l’état du pansement et, en tout cas, le moins souvent possible (tous les 2 à 4 jours). 4. Phase d’épidermisation • Le recouvrement de l’escarre par régénération de la couche épidermique se caractérise par une peau fragile, érythrosique, associée à une atrophie de la couche sous-épidermique et à des adhérences au plan profond. Celles-ci peuvent entraîner, lors de mise en tension,une rupture cutanée à l’occasion par exemple d’une mobilisation articulaire. • L’objectif du traitement est de protéger la peau soit par des hydrocolloïdes ou des pansements gras. En cas d’épidermisation excessive (cicatrice chéloïde, bourgeons charnus), on peut utiliser ponctuellement des pansements corticoïdes ou du nitrate d’argent en application (bâtonnet). E. Indications chirurgicales • Un traitement chirurgical est indiqué : – en cas de nécrose tissulaire étendue ; – en cas de perte de substance étendue associée ou non à un décollement pour raccourcir le délai de cicatrisation ; – dans certaines localisations exposant à la récidive par exemple les ischions. > Consulter : Site spécifiquement consacré aux escarres III. COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES Les mécanismes des complications vasculaires et cardiaques sont intriqués. Toutefois, on peut distinguer des mécanismes vasculaires isolés puis des mécanismes cardiaques et enfin les conséquences vasculaires et hormonales des perturbations cardiaques. A. Complications vasculaires : œdème et thrombose veineuse profonde 1. Pour comprendre : mécanismes et conséquences • Deux grands mécanismes sont en cause : la modification des volumes et la stase : – les volumes se répartissent différemment avec augmentation du volume sanguin central, diminution du volume périphérique. Progressivement le volume sanguin total diminue ; – la réduction des volumes sanguins périphériques associés à l’immobilité (absence de contractions musculaires) donc à l’inefficacité des valvules veineuses entraîne une stase veineuse, principale source de thrombose veineuse profonde. • D’autres mécanismes peuvent s’associer : – les modifications des parois capillaires avec augmentation de la taille des pores et augmentation du passage extravasculaire des protéines sanguines responsable d’un œdème déclive ; – les modifications du tonus des capillaires artériolaires. • Les phénomènes de vasoplégie sont beaucoup plus importants en cas de lésion neurologique en particulier si l’atteinte centrale ou périphérique atteint les voies végétatives. 2. Prévention de l’ œdème des membres inférieurs • Les mesures préventives sont : – la contention veineuse des membres inférieurs 24 h/24 (bas ou bandes) ; – les contractions musculaires régulières des membres inférieurs. 3. Prévention de la thrombose veineuse profonde • Les mesures préventives sont : – la contention veineuse des membres inférieurs 24 h/24 (bas ou bandes) ; – la verticalisation précoce ; – les contractions musculaires régulières des membres inférieurs ; – le traitement antithrombotique par les héparines de bas poids moléculaire à titre préventif. • Les recommandations de l’AFSSAPS sont les suivantes : Durée de traitement en fonction de l’indication Prévention d’une thrombose veineuse profonde 1 injection par jour Chirurgie générale 10 jours maximum, Pour toutes les HBPM sauf risque particulier lié au patient Chirurgie orthopédique de hanche Jusqu’à déambulation active du patient En médecine 14 jours maximum Au-delà, si le risque persiste, l’intérêt d’un relais par les AVK doit être évalué • La surveillance hebdomadaire des plaquettes est nécessaire durant le traitement : – avant le traitement ou au plus tard dans les premières 24 heures ; – 2 fois par semaine pendant la durée du traitement ; – 1 fois par semaine au-delà d’un mois de traitement. • La date d’arrêt des traitements en cas de persistance de l’immobilité ou du déficit n’est pas consensuelle. • En cas de contre-indication des HBPM à dose préventive (saignement actif ou récent, hypersensibilité, antécédent de thrombopénie à l’héparine, enfant de moins de 3 ans, risque hémorragique : hypocoagulabilité d’autre origine), le traitement peut comporter, en l’absence de contre-indication, soit une héparine non fractionnée le plus souvent sous-cutanée (2 à 3 injections par jour), soit un traitement par AVK. • Ces mesures ne dispensent pas de la détection précoce des signes directs et indirects de thrombophlébite ou d’embolie pulmonaire ; chez des sujets à risque, au moindre doute, il faut prescrire un écho-doppler des membres inférieurs. B. Complications cardiaques : hypotension orthostatique et diminution des capacités d’endurance 1. Pour comprendre : mécanismes et conséquences • Les grands mécanismes en cause sont : – la réduction du volume sanguin total ; – les modifications des fibres myocardiques (atrophie, diminution du nombre de fibres, infiltration graisseuse…) et de la conduction auriculoventriculaire ; – l’augmentation de la fréquence cardiaque. • Les conséquences en sont : – la chute du volume d’éjection systolique ; – la diminution importante des capacités d’endurance (perte de 25 % de la capacité maximale aérobie (VO2 max.)) ; – un syndrome de désadaptation à l’orthostatisme avec hypotension orthostatique. 2. Manifestations • Les modifications cardiaques sont sévères à partir de la 3e semaine. La remise en orthostatisme, à partir de cette période, peut conduire à l’incapacité du cœur à assurer le débit suffisant dans les territoires demandeurs. • La modification de répartition du volume sanguin s’associe à de nombreuses modifications hormonales. • Ces altérations induites par le décubitus peuvent être modifiées par certains états pathologiques : – au cours des traumatismes craniocérébraux, les atteintes neurovégétatives (excès de catécholamines circulantes) peuvent entraîner une augmentation de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, une hypo-perfusion rénale et digestive, une activation cellulaire myocardique et des cellules musculaires lisses des artères coronaires ; – chez le sujet âgé, la perte sodique est encore plus importante du fait d’un défaut d’apport, d’un déficit chronique en sodium, de modifications hormonales multiples par rapport au sujet jeune. 3. Prévention • Lors de la reprise du lever, l’hypotension orthostatique est prévenue par : – le port de bas de contention élastique grade ; – la verticalisation progressive ; – l’utilisation de moyens médicamenteux dans les cas les plus graves, le plus souvent des vasoconstricteurs (dérivés ergotés), les alphastimulants ou la fludrocortisone. • Le réentraînement à l’effort, par l’amélioration de la fonction aérobie, constitue une partie essentielle de la rééducation postimmobilisation. IV. COMPLICATIONS RESPIRATOIRES (A L’EXCEPTION DE L’EMBOLIE PULMONAIRE) A. Pour comprendre : mécanismes et conséquences • Lles effets prolongés de l’immobilité sur l’encombrement bronchique sont dus en priorité : – aux effets gravitationnels sur la circulation et la ventilation pulmonaires, – aux altérations de la cinétique mucociliaire et – aux modifications de la course diaphragmatique. • Ces anomalies sont responsables d’un syndrome restrictif qui, associé aux troubles de ventilation, favorise le développement d’atélectasies et de pneumopathies segmentaires ; • L’encombrement peut être majoré par la survenue de reflux gastro-œsophagien, de troubles de déglutition favorisés par le décubitus ; • La conséquence des complications respiratoires dues au décubitus est la diminution de la capacité aérobie et la limitation de l’aptitude à l’effort pouvant bénéficier d’un programme de réadaptation. B. Prévention 1. Objectifs • Lutte contre – la stase bronchique – l’hypoventilation – surinfection. 2. Moyens – Surveillance - Elle est importante à prescrire en fonction du niveau de risque. Elle peut être clinique (fréquence respiratoire, coloration cutanée) et ou paraclinique (SaO) avec surveillance gazométrique en cas de gravité clinique. - Les patients présentant un encombrement bronchique associé à un trouble neurologique de même que les nourrissons requièrent une attention particulière du fait de leur faible réserve respiratoire. Leur décompensation est rapide. Le rythme de la surveillance sera adapté à l’état clinique ; – Kinésithérapie respiratoire • elle permet une prévention chez les patients à risque de décompensation, • elle doit alors être quotidienne voire biquotidienne, • elle utilise les techniques : ◊ de toux contrôlée, en position assise, efficace pour drainer les 5 à 6 premières divisions bronchiques. Elle constitue la séquence finale de toute séance de désencombrement. Elle peut être aidée par des aspirations trachéales, ◊ de modulation du flux expiratoire : technique de référence du drainage bronchique chez le sujet n’ayant pas de trouble de la commande respiratoire : les expirations lentes prolongées ont pour but de mobiliser les sécrétions des bronchioles. Elles seront d’autant plus efficaces qu’une résistance laryngée sera associée (effet venturi). Une aide peut être apportée par des pressions manuelles thoraciques et abdominales et favorisée par le décubitus latéral, la région à désencombrer se situant du côté du plan d’appui, ◊ de postures : le procubitus (contre-indiqué en cas d’instabilité hémodynamique, de détresse respiratoire, de volets thoraciques, ou si l’abdomen est ouvert), et le décubitus latéral favorisent le désencombrement. Ces postures peuvent être réalisées par des supports spécifiques comme un lit oscillant ou un lit à rotation ; – les traitements supposant modifier les propriétés rhéologiques des sécrétions (aérosolthérapie, fluidifiants bronchiques) peuvent être associés mais n’ont pas fait la preuve de leur efficacité clinique. V. COMPLICATIONS DE L’APPAREIL LOCOMOTEUR • Les complications d’immobilité sur l’appareil locomoteur concernent l’os, les structures péri-articulaires et les muscles. • • • L’immobilité entraîne : – une ostéoporose ; – un enraidissement articulaire ; – des complications musculaires. A. Ostéoporose 1. Pour comprendre : mécanismes et conséquences – Le maintien des fonctions mécaniques et métaboliques du squelette adulte est assuré par un renouvellement constant du tissu osseux qui résulte d’un équilibre entre la résorption due aux ostéoclastes et la formation osseuse due aux ostéoblastes ; – Au cours de l’immobilité survient une augmentation de la résorption des secteurs corticaux et trabéculaires de l’os. Ce phénomène précoce n’est pas compensé par la formation osseuse. Il paraît répondre à une levée des contraintes physiologiques imposées par l’orthostatisme. Il est particulièrement intense et durable, jusqu’à un an, voire au-delà, dans des contextes neurologiques (paraplégie, tétraplégie et hémiplégie), et aboutit à une négativation de la balance calcique. Ces perturbations métaboliques sont réversibles dans les semaines suivant la reprise de la déambulation. Elles ont bien été identifiées par les épreuves de « bed rest » réalisées pour l’aéronautique spatiale. – Ainsi l’alitement prolongé est associé à une perte osseuse sous l’effet conjoint d’une hyperrésorption ostéoclastique et d’une balance calcique négative. 2. Manifestations cliniques et paracliniques • La perte de masse osseuse est constante chez tous les sujets immobilisés. Elle n’a pas de manifestation clinique hormis des douleurs chez certains sujets lourdement handicapés (myopathes). Le risque fracturaire est augmenté chez un sujet déjà ostéoporotique identifié ou potentiel (âge) et chez tous les patients présentant une paralysie grave. • Détectée sur la radiographie (uniquement après 3 semaines) ou en absorptiométrie, la diminution est évaluée de 3 % à 10 % selon les sites (rachis, col fémoral…). Cette perte osseuse n’est observée que dans les régions du squelette habituellement en charge ou paralysées ; elle intéresse préférentiellement le compartiment trabéculaire de l’os. • Des fractures peuvent être observées à la remise en charge (en particulier du talus), lors de chutes (os longs, rachis), lors de manœuvres en torsion (tibia lors d’un transfert chez un paraplégique). • L’hypercalciurie que la perte osseuse engendre augmente le risque de lithiase urinaire mais aucune étude ne permet actuellement de chiffrer l’incidence réelle de cette complication. L’hypercalcémie est en règle modérée et bien tolérée. La diminution de la parathormonémie et du taux sérique de 1,25-diOHD3, ainsi que l’élévation de la calciurie témoignent d’une réponse adaptée à l’élévation de la calcémie. L’hypercalciurie est un phénomène adaptatif précoce. 3. Prévention • Dans les indications limitées des handicaps sévères et chroniques, les diphosphonates par voie veineuse ont montré leur efficacité. Aucun traitement per os n’a montré son efficacité. • La prévention non médicamenteuse de la perte osseuse n’a pas clairement démontré son efficacité. Elle est cependant mise en œuvre dès que possible et comporte : – un travail musculaire actif ; – une verticalisation précoce. B. Enraidissement articulaire La limitation du jeu articulaire ou raideur articulaire entraîne une perte d’autonomie et une augmentation de la charge en soins. 1. Pour comprendre : mécanismes et conséquences • Les mécanismes décrits ci-dessous sont la synthèse des recherches sur l’animal. En situation d’immobilisation par contention externe ou de décharge prolongées, surviennent des rétractions ligamentaires et capsulaires puis un envahissement de la cavité articulaire par un tissu fibro-adipeux bordé de cellules synoviales, recouvrant les surfaces cartilagineuses libres, et susceptible à terme de les remplacer. Les surfaces articulaires affrontées sont le siège d’érosions, de nécrose localisée, et de formations kystiques intratissulaires. Ces lésions sont en partie comblées par un tissu conjonctif témoignant d’une tentative de réparation. Le cartilage articulaire profond est également remplacé progressivement par un tissu de même type, d’origine sous-chondrale ou médullaire. Les modifications de la capsule articulaire consistent en une désorganisation de la structure fibrillaire et à une diminution du contenu en eau, glycosaminoglycanes et collagène. Le même type d’altérations concerne le système ligamentaire. Les modifications sur les ligaments sont une perte d’élasticité et de résistance aux contraintes. Ces anomalies sont partiellement corrigées par la reprise de l’activité ; • Le tendon est l’objet d’altérations proches de celles observées dans les autres tissus abarticulaires. Il constitue donc avec l’appareil neuromusculaire qu’il prolonge (voir plus loin), un facteur important dans la réduction du jeu articulaire. Ces modifications aboutissent à une diminution d’extensibilité, dont le retentissement est particulièrement net en cas d’immobilisation en position raccourcie ; • La raideur articulaire peut être le symptôme de deux complications surajoutées qui ne sont pas liées au décubitus : les ossifications ectopiques ou paraostéoarthropathies (POA) et les syndromes régionaux douloureux complexes (algodystrophie). 2. Manifestations • L’enraidissement articulaire se fait dans le sens – du muscle le moins déficitaire en cas de paralysie ; – du muscle le plus hypertonique ; – ou des positions prises par le patient. • le tableau clinique est souvent stéréotypé – flexum de hanche, de genou – équins aux pieds, – limitation des rotations et de l’abduction d’épaule, – flexum de coude, – raideur des métacarpophalangiennes, – griffe des orteils. 2. Prévention • Les objectifs sont : – de conserver les amplitudes articulaires ; – de prévenir les attitudes vicieuses. Si un enraidissement s’installe, il faut essayer de préserver une mobilité avec des amplitudes compatibles avec la fonction (par exemple 90° de flexion de hanche pour pouvoir s’asseoir). • Les moyens reposent sur : – un positionnement correct des patients alités, (en évitant les positions segmentaires en flexion au membre supérieur comme au membre inférieur à l’aide de structures modulaires en mousse, prédécoupées ou découpées à la demande) ; – des postures alternées (par exemple en flexion et extension de hanches) ; – des mobilisations articulaires. • Ces mobilisations doivent être effectuées dans les limites imposées par la douleur, d’éventuelles lésions osseuses, articulaires, ou par un processus de cicatrisation (par exemple suture tendineuse…). C. Complications musculaires 1. Pour comprendre : mécanismes et conséquences • Le décubitus est caractérisé par la perte des contraintes exercées sur les muscles antigravitaires et sur les muscles participant à la station debout et à la marche de façon générale, mais aussi des territoires déficitaires en cas de lésion neurologique centrale (paraplégie, hémiplégie) ou périphérique (neuropathie). • Plusieurs mécanismes interviennent : – les atteintes musculaires observées au cours du décubitus et de l’immobilisation concernent l’ensemble des propriétés du muscle : force maximale (dépendant de la masse musculaire), endurance (dépendant de la répartition entre les différents types de fibres et de la vascularisation), élasticité, viscosité, extensibilité (caractéristiques dépendant de la structure du collagène de soutien et de la structure des fibres, du cytosquelette musculaire, de l’organisation tendineuse) ; – la perte de force serait plus importante en position de raccourcissement ; ainsi la position d’immobilisation doit être la plus proche de la position de fonction et de la durée d’immobilisation ; – la perte de force peut être particulièrement rapide pour certains muscles : le quadriceps perd 15 à 30 % de sa force dès le 8e jour d’immobilisation et 26 à 40 % à un mois ; – la récupération est d’autant plus longue que l’immobilisation et le décubitus seront prolongés, mais elle est toujours plus rapide que pour l’os. Le patient aura récupéré son autonomie musculaire, alors qu’il présentera encore une fragilité osseuse. 1. Manifestations • L’immobilisation entraîne : – une réduction du volume musculaire, souvent visible et appréciable par la diminution du périmètre du segment de membre immobilisé ; – une perte de la force de contraction maximale ; – une diminution de la capacité d’endurance à l’effort ; – un raccourcissement musculaire (appelé rétraction) qui dépend de la position d’immobilisation et peut entraîner des déformations d’un ou plusieurs membres pouvant être irréversibles. • Ces rétractions sont d’autant plus fréquentes que s’associe à l’immobilisation, un trouble du tonus musculaire (hypertonie spastique ou extrapyramidale) (> voir tableau VII). 2. Prévention • Elle comporte : – l’installation correcte du patient, mesure de base indispensable. Le sujet doit être positionné en position de fonction : membres en extension, pieds à 90°, doigts en extension neutre, la main étant au mieux légèrement surélevée du plan du lit pour prévenir la stase veineuse ; – des étirements musculaires et des mobilisations articulaires. Le travail du kinésithérapeute est ciblé sur les muscles les plus à risque en fonction de la position. Il permet de maintenir la longueur musculaire physiologique et si possible, en fonction de l’état du patient, de renforcer les muscles. Ce travail est d’autant plus indispensable qu’existe un trouble du tonus musculaire associé à l’immobilisation en particulier après atteinte neurologique ; – la correction de la perte protidique par une supplémentation protidique adaptée au poids de l’individu au moment de son admission, supplémentation en vitamine E, en sélénium (pour leurs actions antioxydantes), en acides gras à chaînes moyennes et polyinsaturés. • La récupération des complications musculaires après une phase de décubitus est longue et parfois impossible en particulier pour les rétractions. Il est essentiel de les prévenir de façon précoce. Les mesures de prévention doivent être prises dès l’admission d’un patient pour lequel est envisagé un décubitus (quelle qu’en soit la raison) ; elles doivent être poursuivies tout au long de la période d’alitement. Elles sont suivies d’un renforcement musculaire en fonction de la diminution de force constatée. • En cas de rétraction non récupérable, la chirurgie d’allongement tendineux peut être indiquée. VI. COMPLICATIONS NEUROLOGIQUES ET COMPORTEMENTALES A. Compression des nerfs périphériques 1. Manifestations • Les compressions de nerfs périphériques se manifestent par une paralysie focale, correspondant au territoire du nerf, associé à un trouble sensitif correspondant au contingent sensitif du nerf considéré. Leur découverte est le plus souvent secondaire à une période de coma ou d’anesthésie prolongée. • Différents troncs nerveux peuvent être comprimés en cas d’immobilisation prolongée. Les nerfs les plus vulnérables sont : – le nerf ulnaire dans la gouttière épi-trochléo-olécranienne ; – le radial dans la gouttière humérale ; – le tronc du nerf sciatique derrière l’extrémité supérieure du fémur ; – le nerf fibulaire commun au col de la fibula. • Le pronostic de ces lésions est apprécié par la sévérité clinique des déficits, l’exploration neurophysiologique EMG qui permet de distinguer la neurapraxie (bloc de conduction régressif en deux à trois mois) d’une lésion axonale avec dégénérescence wallérienne dont le pronostic de récupération est plus long et plus incertain. • Ces compressions nerveuses sont à distinguer des neuropathies diffuses des 4 membres des patients de réanimation dont l’origine n’est pas l’immobilisation. 2. Prévention La prévention passe par un positionnement correct des membres et des changements réguliers de position pour varier les points d’appui. B. Douleurs • Elles sont polyfactorielles et accompagnent de nombreuses complications décrites dans ce chapitre (escarres, douleurs de l’appareil locomoteur, douleurs neurologiques). • Elles nécessitent un traitement spécifique : graduation du traitement en fonction de l’intensité de la douleur, anticipation des situations algogènes, traitement spécifique en tenant compte des effets secondaires (par exemple, troubles de la vigilance, troubles vésicosphinctériens, constipation…). C. Conséquences psychiques • Les conséquences psychiques varient avec l’âge, le type d’immobilisation, sa durée, son caractère définitif ou non, les symptômes associés, les circonstances de survenue mais aussi avec la personnalité du patient et la qualité de son environnement. • Les réactions d’angoisse sont les plus fréquentes et se manifestent par des insomnies, des plaintes somatiques parfois une agitation. Dans certains cas peuvent s’y associer des réactions dépressives. Dans tous les cas, il faut souligner le rôle essentiel des soignants pour informer le patient et l’aider à conserver des contacts et des activités. • La dépendance induite par l’immobilité, si elle est longue et surtout si elle concerne les soins d’hygiène, les fonctions sphinctériennes, voire l’alimentation, peut engendrer une régression psychologique. Ce syndrome de déconditionnement psychologique peut être favorisé par un entourage trop protecteur, le patient acceptant et trouvant un refuge dans la dépendance. • Les psychotropes (benzodiazépines, neuroleptiques, antidépresseurs) seront utilisés en tenant compte du rapport efficacité/effet secondaire avec une prudence particulière chez le sujet âgé. • Une immobilisation prolongée entraîne un déconditionnement sensoriel lié à la réduction d’utilisation des informations vestibulaires, et dans une moindre mesure des informations visuelles et somesthésiques. Ces altérations peuvent favoriser la survenue d’une confusion mentale ou d’hallucinations, surtout lorsqu’il existe une détérioration intellectuelle, des troubles ioniques ou métaboliques, une fièvre, tout particulièrement chez la personne âgée. VII. COMPLICATIONS DIGESTIVES A. Reflux gastro-œsophagien • Il peut être favorisé par le décubitus mais n’est pas induit par l’immobilité. Il est souvent insidieux et sa fréquence augmente avec la durée d’immobilisation. Il est source de complications pulmonaires. • Symptomatique, il justifie la prescription d’accélérateurs de la vidange gastrique ou d’un surnageant protecteur. • La prévention repose sur le maintien en position assise ou demi-assise pendant une heure après le repas. B. Fausses routes • Les fausses routes augmentent avec l’âge par retard de déclenchement du réflexe de déglutition. • Elles doivent être systématiquement recherchées chez les sujets à risque (personnes âgées, accidents vasculaires cérébraux). • Les premières prises alimentaires doivent se faire en présence d’un tiers soignant avec recherche de signes direct (toux) ou indirect (vocalisation gargouillante après déglutition traduisant une stase laryngée). • Les fausses routes sont prévenues par des mesures simples : – adaptations diététiques des solides et des liquides en cas de difficulté de déglutition (alimentation mixée, eau gélifiée, en pensant à informer les familles afin d’éviter des apports alimentaires extérieurs) ; – position demi-assise lors des repas ; – prise des repas par le patient lui-même à privilégier ; – position de tête en légère antéflexion pour favoriser la protection laryngée par la base de langue, en évitant l’utilisation d’un verre à bec verseur pour lui préférer le verre à encoche nasale ; – bonne hygiène dentaire, pour éviter les inhalations septiques, sources de pneumopathies. C. Constipation • La constipation est fréquente chez le sujet alité, particulièrement chez le sujet âgé pour lequel le risque relatif de constipation est très élevé en cas d’alitement. Consécutive à la stase colique et rectale, la constipation favorise des modifications de la flore fécale, source de météorisme. Elle est aggravée par la prise de certains médicaments, en particulier antalgiques (codéine, morphine…) et certaines conditions neurologiques (coma, paraplégie…). • La prévention associe : – une surveillance du nombre de selles hebdomadaires ; – la verticalisation précoce ; – l’utilisation de laxatifs osmotiques ou lubrifiants ou par stimulation du réflexe de défécation (suppositoire libérant du gaz carbonique au contact de la muqueuse rectale ou suppositoire lubrifiant à la glycérine) ; – l’exonération par évacuation des selles au doigt par toucher rectal en cas de fécalome, ce qui permet de contrôler la vacuité de l’ampoule rectale ; – un apport hydrique suffisant. VIII. COMPLICATIONS URINAIRES A. Manifestations cliniques • La stase urinaire responsable d’infections et de lithiases. L’hypercalciurie due à la perte de masse osseuse augmente le risque de lithiases. • Le résidu postmictionnel traduit des mictions incomplètes. L’origine de ce trouble peut être multiple. – obstacle à l’évacuation urinaire dont le plus fréquent est l’adénome prostatique. – caractère inhabituel des mictions effectuées en position allongée – contexte neurologique (lésion médullaire, polyneuropathie) • Les principaux risques sont les infections urinaires et les lithiases. B. Prévention – Diurèse abondante d’au moins 1,5 litre par 24 heures ; – Dépistage et traitement du résidu postmictionnel (sondages intermittents, traitement médicamenteux) ; – La sonde à demeure ou le cathéter sus-pubien ne doivent être utilisés qu’en cas de contre-indication médicale ou d’impossibilité aux sondages intermittents ou dans certains cas d’escarres dont les soins nécessitent une continence parfaite. IX. INFECTIONS NOSOCOMIALES • Les infections nosocomiales sont définies comme une infection contractée au-delà de 48 heures suivant l’admission d’un patient dans un service hospitalier. • De nombreux éléments concourent à rendre particulièrement fréquentes les infections nosocomiales chez le sujet alité, compte tenu de : – certains modes de transmission endogènes (autocontamination par les germes du patient) ; – ou de transmission exogène (contamination croisée manu portée, contamination par un germe du personnel, contamination environnementale par l’eau comme la légionnellose ou l’air) ; – et de certains facteurs favorisants spécifiques : durées de séjour prolongées, multiplicité des lieux de soins et des intervenants, terrain (personnes âgées, polytraumatisés, immunodéprimés, antibiothérapies sélectives et prolongées). • La prévalence d’infections ou colonisations par des bactéries multirésistantes (BMR) chez certains patients en rééducation neurologique (blessés médullaires, traumatisés crâniens, hémiplégies vasculaires), en rééducation respiratoire (mucoviscidose), en rééducation gériatrique, ou chez des patients porteurs de dispositifs invasifs (sonde endovésicale, trachéotomie) est élevée. Cette situation doit faire prendre en compte à la fois les objectifs de rééducation et l’application stricte des règles d’hygiène et en particulier des mesures d’isolement. La nécessité temporaire d’isoler un patient dans sa chambre l’expose à une véritable « pathologie de l’isolement » associant état dépressif, comportement persécutif et poussées d’agitation. La notion d’isolement technique permet d’éviter le confinement en chambre en préservant le principe de l’isolement bactériologique. Ces stratégies doivent s’accompagner d’un effort supplémentaire et répété de formation et d’information des familles et des personnels sur les précautions de base d’hygiène à appliquer auprès de tous les patients, en insistant particulièrement sur le lavage des mains. • L’isolement des patients porteurs de BMR est d’autant plus nécessaire que le(s) site(s) colonisé(s) ou infecté(s) est (sont) potentiellement disséminateur(s), et que le patient est dépendant et soumis à de nombreux contacts (soins). L’isolement est une mesure prescrite par le médecin pour une durée déterminée. Une information claire sur les modalités d’isolement doit être fournie au patient et aux visiteurs. Dans certaines structures (par exemple, les services de gériatrie), les mesures d’isolement sont difficilement applicables. Elles doivent donc être adaptées aux conditions locales et appliquées en priorité aux personnes les plus à risque de dissémination et/ou d’infection. Cet isolement est technique ou géographique. • L’isolement technique est un ensemble de mesures visant à établir des barrières autour du patient colonisé ou infecté. Il correspond aux « précautions contact » et inclut le port de gants non stériles, le renforcement du lavage ou de la désinfection des mains (notamment à la sortie de la chambre), le port d’autres protections (surblouses, éventuellement masques lors de contacts rapprochés avec risque de projection), l’individualisation du petit matériel de soins (stéthoscope, tensiomètre…). Le nettoyage et la désinfection de l’environnement, en particulier des surfaces à proximité du patient porteur, doivent être réguliers. Les procédures habituelles sont, en règle générale, suffisantes, y compris lors de la sortie des patients, mais elles doivent être rigoureusement respectées. • L’isolement géographique nécessite une chambre individuelle ou, à défaut, un poste de lavage des mains situé à proximité du lit et destiné au personnel. Selon les possibilités locales et la situation épidémique, d’autres stratégies sont envisageables telles que le regroupement des patients porteurs de BMR, ou l’affectation spécifique de personnels soignants. L’individualisation, dans un hôpital, d’un secteur septique peut aider à l’observance des mesures d’isolement. Les entrées dans les chambres d’isolement sont limitées, ainsi que la circulation des patients porteurs. > Sigles et abréviations > Points clés > RETOURS : > Complications cutanées > Complications cardio-circulatoires > Complications respiratoires > Complications locomotrices > Complications neurologiques > Complications digestives > Complications urinaires > Complications infectieuses Tableau 1.I. Comparaison de la part prise par les principales pathologies sur la mortalité et l’incapacité dans les pays européens en % (Cermes IFR25, charge de morbidité Europe occidentale OMS 2001) Complications Locales Régionales Générales Précoces Escarre Phlébite Compressions nerveuses Troubles urinaires (dysurie, infections) Constipation Tardive Escarre Rétractions Ostéoporose Désadaptation Troubles psychologiques > RETOUR texte item 50 Fig. 1 : Les différents stades évolutifs d’escarre. > RETOUR texte item 50 Fig. 2 : Aspects cliniques des différents stades évolutifs d’escarre. > RETOUR texte item 50 Tableau II. Échelle de Norton (d’après Norton D. Calculating the risk : reflections of the Norton scale. Decubitus 1989 ; 2 : 24-31 Item Scores Condition physique Mauvaise 1 Passable Bonne 2 3 Excellente 4 Condition mentale Stupeur 1 Confusion Apathie 2 3 Alerte 4 Activité Alité 1 2 Confiné au fauteuil Aide à la marche 3 4 Ambulant Mobilité Immobile 1 2 Très limitée Légèrement limitée 3 4 Complète Incontinence Urinaire et fécale 1 Incontinence urinaire Occasionnelle 2 3 Continent 4 Risque d’escarre Score de Norton Faible 13 à 16 Modéré 12 à 13 Élevé (antécédents d’escarres) 11 à 12 Très élevé (escarres, brûlures) < ou égal à 11 D’après Norton D. Decubitus. 1989 ; 2 ; 24-31. > RETOUR texte item 50 Tableau III. Échelle de Waterlow (d’après Edwards M. The levels of reliability and validity of the Waterlow pressure sore risk calculator. J Wound Care 1995 ; 4 : 373-8 Sexe et âge Continence Masculin 1 Totale/Sonde Féminin 2 Occasionnel. Incontinent 14-49 50-64 1 Incontinence fécale / sonde 2 Incontinence double 65-74 75-80 3 4 Mobilité 0 Complète Malnutrition 0 Cachexie terminale 3 1 Agilité 1 Déficience cardiaque 5 2 Apathique 3 Restreinte 2 Insuffisence vasculaire 3 Anémie 5 2 Immobile (traction) 4 Tabagisme Patient mis au 5 1 fauteuil 81 et + 5 Masse corporelle Aspect de la peau Appétit Moyen Moyenne 0 Saine 0 Au dessus de moyenne 1 Fine 1 Faible Obèse 2 Sèche/Déshydratée Alimentation par 1 sonde 2 En dessous de la moyenne 3 Œdémateuse 1 A jeun, anorexique 3 Etat inflammatoire 0 Déficience neurologique SEP, Diabète, AVC, déficit sensoriel 1 Paraplégie 2 3 Chirurgie / Traumatisme Médicaments inférieure, colonne, intervention > 2H 6 1 Décolorée Irritation cutanée Orthopédie, Partie 4 SCORE Très haut risque ≥ 20 Cytotoxiques. Antiinflammatoires 5 Corticoïdes à haute dose Haut risque 15 à 19 Risque moyen 10 à 14 4 Risque faible < 10 D’après Edwards M. J Wound Cire. 1995 ; 4 : 373-8 > RETOUR texte item 50 Tableau IV. Choix d’un support et risque d’escarre Risque d’escarre Score de Norton Score de Waterlow Support de prévention Faible 13 à 16 < 10 Lit normal ; matelas à insert Modéré 12 à 13 10 à 14 Matelas en mousse composite Elevé 11 à 12 15 à 19 Matelas à pression alternative Lit à gros modules Matelat à insert Matelas à pression alternante Très élevé < 11 20 ou + Lit fluidisé Lit à aérosuspension > RETOUR texte item 50 Tableau V. Soins locaux en fonction de l’évolution Phase évolutive Nécrose (stade 3 et 4) Objectifs Soins locaux Ramollissement et Enzymes protéolytiques détersion de la nécrose Hydrogels Détersion mécanique (bistouri) Pansements quotidiens Pas d’antibiotiques Pansements absorbants : – alginates de calcium ; Exsudative (stades 2, 3 ou 4 sans nécrose) mais avec dépôts fibrineux Détersion de la fibrine – hydrocellulaires ; – pansements au charbon ; Drainage des sécrétions et/ou écoulements séreux – hydrocolloïdes Pansements quotidiens Hydrocolloïdes si exsudation Bourgeonnement Détersion de la fibrine régénération des tissus Drainage des sécrétions Épidermisation Protection de la cicatrisation Rougeur (stade 1) Prévenir l’aggravation Pansements gras si plaie sèche Pansements tous les 2 à 4 jours Hydrocolloïdes Pansements gras Décharge et prévention > RETOUR texte item 50 Tableau VI. Types de pansements TYPE PRESENTATION INDICATION Hydrocolloide/hydrofibre Plaque Tout type Hydrogel Gel liquide, plaque Escarre sèche Hydrocellulaire Plaque Exsudatif Alginate Plaque, mèches Très exsudatif Charbon Plaque Mauvaise odeur Argent Plaque Infection locale Interfaces Plaque Tout type PRECAUTION Diabète À changer souvent > RETOUR texte item 50 Tableau VII. Principaux muscles rétractés selon la position En décubitus Au fauteuil roulant Quadriceps fémoral Fléchisseurs de hanche Triceps suraux Ischios-jambiers Triceps brachiaux Fléchisseurs des doigts > RETOUR texte item 50 © Cofemer 21 septembre 2009