Université d'Angers - Faculté de Médecine - 2e cycle, D2, Pôle 2, Médecine Physique et Réadaptation Complications de Décubitus Objectif 2e cycle module 4 N0 50. Complications de l’immobilité et du décubitus prévention et prise en charge Expliquer les principales complications de l’immobilité et du décubitus Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient. Bibliographie : Abrégé Masson module 4 p 31 à 50 Encyclopédie médico-chirurgicale Kinésithérapie D Colin L’escarre L’immobilisation est une situation rencontrée au décours de très nombreuses situations cliniques. Elle peut être la conséquence d’un déficit moteur. Elle peut aussi être secondaire à l’asthénie au décours d’une pathologie quelquonque ou être imposée par les modalités de traitement (immobilisation après fracture, hospitalisation en unité de soins intensifs). Elle expose à des complications propres, qu’il faut prévenir. Le chapitre « pathologie de l’immobilisation » doit donc être présent à l’esprit dès qu’on cherche à remplir la case « préventions des complications secondaires » d’une stratégie thérapeutique. Ces complications ont plusieurs origines : Le décubitus prolongé entraine un appui sur certaines zones de la peau. Ceci peut être à l’origine d’escarres. L’absence de mobilisation des segments de membre conduit à une sous-utilisation musculaire et à une amyotrophie. L’immobilisation d’une articulation dans une position induit une rétraction des tissus abarticulaires et menace le jeu articulaire normal. L’absence d’orthostatisme et d’effort perturbe des fonctions homéostasiques plus générales notamment le retour veineux, l’adaptation tensionelle, la ventilation et le drainage bronchique le métabolisme phospho-calcique, le transit abdominal. 1 Physiopathologie, Clinique, Traitement préventif et curatif des escarres 1.1 Physiopathologie L’escarre est une nécrose cutanée, sous cutanée et pouvant interesser les tissus musculaires et osseux sous jascent. Elle est secondaire à une ischémie cutanée et sous cutanée liée à l’application d’une pression supérieure à la pression de perfusion tissulaire. Différents facteurs vont donc concourir à la formation d’une escarre : - Des facteurs mécaniques, liés aux zones d’appui et aux qualités biomécaniques des supports. Ceci explique la survenue très préférentielle des escarres dans les zones d’appui : occiput, épines de l’omoplate, épineuses, sacrum, talons en position couchée ; ischions et zones rétro-trochantériennes en position assise. Le positionnement correct au lit et au fauteuil sont donc des facteurs essentiels de prévention. L’installation de positions anormales peut modifier la répartition des pressions (rotation externe de membre inférieur au décours d’une fracture du col du fémur et escarre du bord latéral du pied par exemple). Le changement régulier de position est impératif chez le patient immobilisé.Les supports (coussins, matelas) ont une capacité plus ou moins grande à répartir les pressions. - Des facteurs métaboliques, qui modifient la résistance des tissus à l’hypoxie et à l’ischémie. L’hypotension, l’immunodépression, les troubles métaboliques sévères, la dénutrition. L’âge augmente le risque d’escarres. - L’existence de déficiences neurologiques augmente le risque d’escarres par deux mécanismes Prof I Richard, Complications de l’immobilisation, modifié le 17/0603 Page 1 sur 4 Université d'Angers - Faculté de Médecine - 2e cycle, D2, Pôle 2, Médecine Physique et Réadaptation Les modifications de la vasomotricité induites par le déficit modifie les régulations locales ; L’existence de troubles sensitifs supprime l’alarme douloureuse qui aurait conduit à une plainte et à un changement d’appui. Des échelles de risque ont été construites à partir de ces différents facteurs. L’une des plus utilisée est l’échelle de Waterlow 1.2 Clinique La constitution de la lésion va passer par plusieurs stades - Stade 1 : Rougeur. Une rougeur qui ne disparaît pas à la levée de l’appui correspond déjà à une ischémie du derme. - Stade 2 : Désépithélialisation. - Stade 3 : Nécrose interessant le derme, et l’hypoderme - Stade 4 : Necrose interessant les tissus musculaires, les tissus osseux et articulaires. Une escarre au stade de nécrose met potentiellement en jeu le pronostic vital. L’examen clinique précise le stade de la lésion. Les examens radiologiques (radiographies standard, TDM, scintigraphie) rechercheront une extension aux tissus osseux et articulaires sous-jascent, notamment dans les escarres talonnières et rétro-trochantériennes. Lors de la cicatrisation d’une escarre le traitement va assurer - la détersion. Toutes les zones nécrotiques doivent être supprimées. - le bourgeonnement ou culture du tissu sous-cutané - l’épithélialisation L’escarre constitue un écosystème bactérien particulier dans lequel des germes divers, aérobies remplacent la flore résidente cutanée habituelle. Toute escarre nécrotique comprend notamment des germes gram -. Dans les situations cliniques usuelles, aucun prélèvement bactériologique n’est utile et aucun traitement antibiotique local ou général ne doit être utilisé. L’appartion de signes généraux doit faire rechercher une collection, qu’il faut évacuer ou une atteinte articulaire sous-jascente. 1.3 Traitement préventif LE traitement de l’escarre est préventif et cette pathologie doit disparaître. Cette prévention repose avant tout sur la levée des appuis par - le changement régulier des points d’appui ; retournement régulier (toutes les 3h) des patients alités ; soulèvement régulier des patients assis ; - la surveillance des points d’appui et l’intervention dès qu’une rougeur est constatée ; - le choix de matelas et coussins répartissant les appuis ; - la prévention des positions vicieuses des membres, l’installation correcte au fauteuil et au lit. - La diminution de la macération cutanée (prise en charge de l’incontinence, hygiène) Chez le patient gardant un déficit moteur et sensitif (blessé médullaire, paraplégie traumatique) l’éducation du patient et/ou de son entourage vis a vis de la surveillance des points d’appui fait partie intégrante du programme thérapeutique. Le contrôle des paramètres généraux et notamment le bilan nutritionnel des patients âgés est également nécessaire. 1.4 Traitement curatif La lévée de l’appui est indispensable. Le traitement médical repose sur les soins locaux et la correction des facteurs de risque généraux. Exemple : Escarre de stade 3 : Nécrose La première phase est la détersion éliminant tous les tissus nécrotiques. Elle peut être mécanique (détersion au bistouri), au lit du patient ou dans le cas de lésions étendues chirurgicalement. Des produits locaux peuvent avoir un pouvoir détersif (eau oxygénée, Dakin, enzymes, gels détersifs). Cette phase est douloureuse et un traitement antalgique, y compris morphinique peut être necessaire. Prof I Richard, Complications de l’immobilisation, modifié le 17/0603 Page 2 sur 4 Université d'Angers - Faculté de Médecine - 2e cycle, D2, Pôle 2, Médecine Physique et Réadaptation Lorsque la plaie est propre le bourgeonnement puis l’épidermisation est obtenu en maintenant la plaie en milieu humide. 3 groupes de pansements existent les pansement gras. Ils sont peu absorbants et indiqués en cas de plaie propre peu exsudative ; les pansements hydrocolloides, existant en diverses présentations ; les pansements hydrocellulaires et les alginates qui sont très absorbant et adaptés à des plaies exsudatives. Seuls les principes de détersion préalable et de culture en milieu humide, associés à la levée de l’appui sont importants. Aucune étude scientifique ne démontre de façon indiscutable le bénéfice de tel pansement sur tel autre. Contrôle des facteurs généraux : Une enquète nutritionnelle et des apports équilibrés, notamment protidiques sont necessaires. Les compléments caloriques et protidiques sont utiles chez certaines personnes âgées. Les escarres étendues du siège (ischions et trochanters notamment) sont chirurgicales. Ces situations sont fréquentes chez le blessé medullaire. Le traitement utilise des lambeaux musculo-cutanés. Il permet une réduction du temps d’hospitalisation et une qualité de couverture prévenant les récidives. 2 Complications musculaires et articulaires de l’immobilisation- L’ immobilisation d’une articulation entraine rapidement une rétraction des éléments tendineux, musculaires et aponévrotiques limitant ensuite les articulations. L’immobilisation doit donc toujours se faire en position de fonction. Lors du décubitus prolongé, il convient notamment de prévenir l’installation d’un équin des pieds par l’installation correcte au lit (mise en place d’un oreiller ou d’une mousse maintenant les pieds à l’équerre). Si des troubles du tonus ou un déficit induisent une position préférentielle particulière, l’installation au lit la corrigera (par exemple installation d’un traversin pour prévenir la rotation externe après fracture du col du fémur). Chaque fois que l’immobilisation de l’articulation n’est pas nécessaire des exercices de mobilisation passive seront prescrits pour prévenir l’installation de rétractions. L’absence de contraction musculaire induit une amyotrophie dite de non utilisation. Des exercices de contraction musculaire doivent être proposés. Ils peuvent être isométriques si le déplacement des segments de membre est contre indiqué (patient sous platre). 3 Complications l’immobilisation. viscérales de Complications digestives L’immobilisation induit un ralentissement du transit abdominal qui doit être prévenu (régime riche en fibres, hydratation suffisante) ou traité (huile de paraffine, suppositoires d’Eductyl, éventuellement lavement doux et non répété). Le décubitus prolongé majore aussi le risque de reflux gastro-oesophagien et de fausse route Complications cardio-vasculaires L’immobilisation prolongée conduit à une désadaptation des mécanismes de régulation tensionnelle avec un risque important d’hypotension orthostatique lors du lever. Celle ci peut être traitée par une contention veineuse et une reprise progressive de la position debout (verticalisation sur table sous contrôle du pouls et de la tension). Plusieurs mécanismes conduisent à une augmentation très importante du risque de thrombose veineuse. L’immobilité réduit le retour veineux par diminution des contractions musculaires des membres inférieurs. Cet effet est majoré par l’existence concommittente d’un déficit moteur. Par ailleurs l’immobilité peut être liée à des affections qui augmentent en elles mêmes le risque de thrombose (suite de chirurgie orthopédique, syndrome inflammatoire, hyperviscosité). La prévention des thromboses veineuses repose sur la contention élastique, la réduction de la durée de décubitus, la réalisation de contractions statiques des membres inférieurs, et dans des situations définies la prescription préventive d’héparine de bas poids moléculaire. Prof I Richard, Complications de l’immobilisation, modifié le 17/0603 Page 3 sur 4 Université d'Angers - Faculté de Médecine - 2e cycle, D2, Pôle 2, Médecine Physique et Réadaptation Complications respiratoires L’immobilisation entraîne un syndrome restrictif lié à des modifications de la cinétique diaphragmatique et une moindre efficacité de la toux avec une stase bronchique. La prévention de l’encombrement pulmonaire repose sur des exercices de ventilation dirigée, une aide au drainage bronchique et des postures en décubitus latéral. Modification du métabolisme phosphocalcique L’absence de mise en charge perturbe le métabolisme phospho-calcique. Chez le sujet jeune, après alitement prolongé, et d’autant plus qu’il existe un déficit moteur on peut observer une hypercalcémie dite d’immobilisation qui peut être symptomatique (confusion, nausée). Il existe une hypercalciurie qui expose au risque de lithiase calcique L’immobilisation très prolongée, et l’existence d’un déficit moteur persistant est par ailleurs une cause d’ostéopénie et expose au risque de fractures (tassements vertébraux, fractures de os longs). Celle ci peut être majeure notamment chez les blessés medullaires. Complications urinaires Les mictions allongées peuvent, notamment chez la personne âgée être incomplètes, entrainant un résidu post-mictionnel et un risque accru d’infection urinaire Prof I Richard, Complications de l’immobilisation, modifié le 17/0603 Page 4 sur 4