Les économistes classiques
D’Adam Smith à Ricardo, de Stuart Mill à Karl Marx.
Si pour les économistes classiques de la n du XVIIIème et du XIXème, l’économie relève bien d’une discipline
scientique, ils ne la séparent généralement pas totalement des autres aspects de la réalité sociale, se distinguant ainsi
des économistes néo-classiques.
Les questions posées à l’époque restent très modernes.
Ø Quels sont les facteurs favorables à la croissance ?
Ø La misère ouvrière peut-elle être réduite ?
Ø Faut-il aider les plus démunis ?
Ø Quelles sont les conséquences de la croissance économique ?
Ø D’où provient le chômage ?
Principaux économistes de la période classique
Ecole classique : A. Smith, D. Ricardo, T. R Malthus et J-B. Say
Courant réformiste : J.S Mill, S. Sismondi, F. List, C.H. de Saint-Simon
Courant socialiste : C. Fourier, K. Marx, P.J Proudhon, R. Owen.
I. Des premiers économistes aux classiques :
Pendant longtemps, le pensée économique est restée dépendante de la morale. Dans l’Antiquité Platon et Aristote
s’intéressent aux problèmes de la maison. Au Moyen-âge, St Thomas d’Aquin dans La somme théologique (1266)
détermine quelles sont les pratiques économiques justes selon la religion chrétienne. Renaissance marque rupture,
l’expansion du protestantisme comme le montre Weber favorise le développement du capitalisme. Prot et intérêt ne
sont plus condamnés mais valorisés.
A. Les mercantilistes :
A partir du XVIème siècle, les mercantilistes inuencent la conduite des politiques économiques. Ils cherchent à savoir
comment les pays peuvent s’enrichir.
1/ Le mercantilisme espagnol :
L’obsession des métaux précieux
Ce qui intéresse les aventuriers espagnols, ce ne sont pas les pays abondamment approvisionnés en matières premières
mais régions où il y a beaucoup d’or et d’argent.
Les erreurs des mercantilistes espagnols
Ils confondent richesse et détention d’or et d’argent. Au niveau national, possession de monnaie n’est pas égale à
capacité d’acquisition.
2/ Le mercantilisme français :
Jean Bodin et l’analyse de l’ination
Jean Bodin met en évidence une relation entre quantité de monnaie en circulation et niveau des prix. C’est la première
tentative d’explication monétariste de l’ination.
Protectionnisme et politique industrielle
Au XVIIIème les mercantilistes voyaient dans le veloppement des manufactures la source essentielle de
l’enrichissement.
Antoine de Monchrestien dans Traité d’économie politique (1615) préconise donc une aide de l’Etat à l’industrie
nationale par la mise en place d’une politique protectionniste efcace et une intervention directe dans la vie des affaires
pour assurer haute qualité des produits nationaux. Cette politique est concrétisée par Colbert ministre de Louis XIV (ex
de la manufacture des Gobelins).
3/ Le mercantilisme anglais :
La recherche d’un excédent de la BC
Le mercantilisme anglais est qualié de commercial. Donc instauration de droits élevés pour marchandises extérieures et
substitution par produits nationaux compétitifs et de haute qualité. Favoriser abondance monnaie et faible taux d’intérêt
pour favoriser le commerce.
La fable des abeilles
Célèbre fable de Mandeville (1705) « Chaque partie étant pleine de vice, le tout était cependant un paradis ». Annonce
pensée libérale classique, à travers la recherche de l’intérêt individuel, on aboutit à l’intérêt général. Conso préconisée
et « frugalité » critiquée.
Tous les mercantilistes sont d’accord sur le fait que l’Etat doit intervenir pour augmenter les richesses nationales.
B. Les physiocrates :
François Quesnay et l’école physiocratique :
Le courant se veloppe en France sous la conduite de Quesnay (1694-1774). Il publie le Tableau économique en
1758.
Autres physiocrates : Dupont de Nemours, Mirabeau, l’abbé Baudeau…
D’où vient le surplus ?
Les physiocrates considèrent que seule la terre est productive. Ils mettent l’accent sur le fait que la richesse repose sur
la production de biens et non pas sur la possession d’or et d’argent.
La défense de la propriété privée et de l’agriculture :
Les mécanismes économiques résultent d’un fonctionnement spontané de l’activité économique, d’un « ordre naturel
essentiel et général ».
Le tableau économique :
C’est une approche globale de l’activité économique. Dans le tableau Quesnay cheche à mettre en évidence les inter
relations économiques entre les différents participants à la vie économique :
Ø la classe productive (exploitants agricoles) : fait renaître par la culture du territoire les richesses naturelles de la
nation.
Ø la classe des propriétaires terriens : classe subsiste par rente ou produit net de la culture.
Ø la classe stérile (artisans, manufacturiers, marchands) : leurs dépenses sont payés par les 2 autres classes.
II. L’école classique :
Ecole française
Ecole anglaise
A. Adam Smith (1723-1790) :
Avec Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Smith est le premier représentant du
libéralisme économique. Mais il est avant tout un philosophe, et il publie au préalable la Théorie des sentiments
moraux (1759). Dans cet œuvre, il montre que la sympathie pour autrui et le jugement des autres exercent une inuence
essentielle sur les actes humains.
Question centrale chez Smith est celle de l’origine de la croissance économique.
Ø La division du travail est l’élément essentiel donc il faut une éco de marché
Ø La main invisible du marché assure la meilleure allocation possible des ressources disponibles
Ø Théorie des avantages absolus
D’où vient la croissance économique ?
Smith distingue travail productif et improductif :
L’ouvrier ajoute de la valeur à la valeur du matériau qu’il travaille,
le roi, les militaires, les ecclésiastiques, les penseurs, ne produisent pas de valeur.
Degré de richesse d’une nation dépend de 2 facteurs :
Ø Habilité et intelligence des travailleurs
Ø Part respective des travailleurs productifs et improductifs.
Or l’habilité des travailleurs augmente avec division du travail :
Ø Toujours la même tâche
Ø On évite perte de temps de passer d’une tâche à une autre
Ø Favorable à invention nouvelle machines car permet à certains individus de se consacrer entièrement à la
recherche.
Mais il existe 2 limites à la division du travail
Ø Dimension du marché : plus la marché est grand, plus il y a commerce
Ø Coûts sociaux : si on fait toujours même opération alors on ne développe pas intelligence.
La main invisible
Chacun investit le plus près possible de chez lui donc développement économique nationale. Les capitaux s’orientent
spontanément vars les secteurs à forte valeur ajoutée. « Il est conduit par une main invisible à remplir une n qui n’entre
nullement dans ses intentions ». Donc critique du protectionnisme et apologie du libre-échange.
La théorie des échanges absolus
Chaque pays a intérêt à se spécialiser car trouve avantage dans l’échange.
Limites au libre-échange :
Ø Quand l’indépendance nationale est menacée
Ø Quand l’industrie intérieure est pénalisée par rapport aux concurrents étrangers par une forte scalité
Ø Quand l’emploi est menacé.
Le rôle de l’Etat
Pour Smith, l’Etat doit être uniquement un Etat gendarme, défense des droits de propriété, défense publique et production
des biens collectifs.
Le problème de la valeur et des prix
Ø Différenciation valeur d’usage et valeur d’échange. La valeur d’usage c’est l’utilité d’un bien, la valeur
d’échange c’est la valeur relative à chaque bien sur le marché.
Smith souligne « le paradoxe de la valeur », certains biens sont très utiles et peu cher (l’eau par ex) et d’autres sont
inutiles et très cher (le diamant par ex).
Pour Smith, « le travail est la mesure réelle de la valeur échangeable de toute marchandise ».
Ø Distinction prix réel : valeur de chaque marchandise et prix nominal : quantité
d’argent qu’il faut pour céder ce bien contre un autre bien donné. Ainsi, la valeur de l’or et de l’argent variant, le prix
nominal peut changer sans qu’il y ait changement du prix réel. Donc, la valeur travail est difcile à mesurer donc
véritable prix, celui du marché qui est marchandé, débattu .
Dans les sociétés avant accumulation du capital, échanges en fonction de la valeur travail des marchandises, dans les
sociétés industrialisées, prix des marchandises constitué des salaires du travail, des prots et de la rente.
Ø Distinction prix naturel : ce que vaut vraiment la marchandise et prix de marché : confrontation offre et
demande. Théorie de la gravitation des prix de marché autour du prix naturel.
L’analyse de la répartition
Salaires, prots et rentes sont trois sources primitives de revenus.
Ø Les salaires : c’est parce qu’il y a eu appropriation privée des moyens de production que le travailleur
ne récolte pas l’ensemble du produit de son activité. Conits d’intérêts et les employeurs sont presque toujours
gagnants car moins nombreux et plus riches donc plus organisés. Donc le salaire se xe au niveau du minimum
de subsistance.
Ø Les prots : la concurrence tend à faire diminuer les prots.
B. David Ricardo (1772-1823) :
IL publie en 1817, Des principes de l’économie politique et de l’impôt et il entretient une riche correspondance avec
Malthus et Say.
La théorie des avantages comparatifs
Ricardo va montrer que même en l’absence d’avantages absolus, les pays ont intérêt à se spécialiser à condition qu’ils
détiennent un avantage comparatif dans la production d’un bien. Cette théorie a été afnée par des travaux plus récents
de Heckscher, Ohlin et Samuelson (HOS).
Cette théorie n’est valable que dans le cadre de l’hypothèses suivante :
Rigidité des facteurs de production entre les pays, les individus ne veulent pas travailler dans un autre pays ni y placer
des capitaux. Le développement des FMN aujourd’hui remet en cause cette théorie.
La théorie de la répartition et de la croissance
Ø La rente :
La rente c’est ce qu’on paie aux propriétaires terriens pour exploiter la terre. Au fur et à mesure que l’on met des terres
en culture, elles sont de moins en moins fertiles. La rente, c’est la quantité de travail nécessaire pour produire sur la
terre la moins fertile. Sur cette terre la moins fertile, rente = 0, donc au fur et mesure que la fertilité augmente la rente
augmente, c’est un différentiel vis à vis de la rente inférieure. La rente n’existe que grâce à la différence de fertilité des
terres. La rente tend à augmenter en période de croissance éco car besoins plus élevés et mise en culture de terres de
moins en moins productives.
Ø Les salaires :
Le prix naturel c’est le salaire de subsistance, c’est à dire assez pour que l’ouvrier puisse vivre et entretenir sa
descendance qui assure sa reproduction. Donc le salaire dépend du prix des biens nécessaires à l’ouvrier et à sa famille.
Ce salaire peut être différent selon les périodes, c’est un min sociologique.
Le prix courant c’est le salaire qui se xe en fonction du jeu de l’offre et de la demande sur le marché du travail. Il tend
à se rapprocher du prix naturel même si la croissance peut être favorable aux salariés car dans ces périodes, le salaire se
xe à un prix courant supp au prix naturel.
Ø Les prots :
Ricardo part du principe que chaque entrepreneur essaie de placer son capital de la manière la plus avantageuse. Donc
à terme égalisation des taux de prot. Implicitement, hypothèse d’information parfaite reprise par éco néo-class. Pour
Ricardo, plus salaires sont élevés, plus prots sont bas. Or, salaires dépendent prix des biens en particulier prix du blé
donc dépendent de la rente. Donc indirectement, plus rente élevée, plus prots bas. Ricardo est contre les Corn Laws
votés en 1815. Comme avec la croissance rente augmente, à terme prots de plus en plus bas et état stationnaire.
La théorie de la valeur et des prix
Valeur échangeable des biens double :
Le travail nécessaire pour acquérir marchandises
Le degré de rareté des biens.
Donc deux sortes de biens, ceux dont la rareté est la valeur (par ex œuvres d’art) et ceux qu’il nomme marchandise qui
désigne l’ensemble des biens reproductibles en grande quantité par l’industrie.
Pour Ricardo, travail incorporé et non pas commandé au sens de Smith, c’est à dire quantité de travail nécessaire pour
produire un bien + quantité de travail pour produire les outils qui entrent dans la fabrication de ce bien.
C. Jean-Baptiste Say :
Il publie en 1803, Traité d’éco pol.
Le prix, un indicateur de l’utilité des biens
Valeur d’échange : le prix
Valeur d’usage : l’utilité pour satisfaire l’acheteur de ce bien.
« Le prix est une indication de l’utilité que les hommes reconnaissent dans une chose ».
La seule limite min au prix c’est le coût de production.
Say a une conception large de la richesse, la production étant une création d’utilité.
Produits matériels et immatériels
Produits matériels : susceptibles d’être conservés
Produits immatériels : services qui ont pour caractéristique d’être consommés en me^me temps que produits.
Say rejette la distinction de Smith entre activité productive et improductive.
Une remise en cause de l’analyse de la répartition de Ricardo
Say va proposer une étude différente de la répartition toute perception de revenu est une juste contrepartie de la
participation de chacun à l’activité productive.
Le propriétaire foncier perçoit le « prot du fonds de terre »
Les apporteurs de capitaux le « prot de capital »
Et les salariés « le prot de l’industrie ».
Toutes les catégories sont de même nature et toutes ont pour contrepartie une valeur produite. « Personne ne récolte
où il n’a pas semé ».
La loi des débouchés
C’est la production qui ouvre des débouchés aux produits. L’acte productif créé des richesses distribuées sous forme de
salaires, rentes et prots, qui servent par la suite à acheter les produits sur le marché. Ainsi, les sommes distribuées lors
de la production sont égales aux sommes demandées pour consommer. Comme la demande tend toujours à correspondre
à l’offre, alors seules les crises sectorielles sont possibles et se résorbent par le libre jeu du marché.
Cette thèse sera reprise par les neo-class qui tentent de montrer qu’il existe un équilibre général sur tous les marchés.
Critiques formulées par Malthus et Sismondi à la même époque puis par Keynes qui montre que l’hypothèse sous-
jacente est celle de la monnaie voile et qu’elle n’est pas forcément avérée.
D. Thomas-Robert Malthus (1766-1834) :
Il publie en 1798 Essai sur le principe de population et en 1820 Principes d’éco pol.
La loi de la population
La pauvreté procède du décalage existant entre le taux de croissance des biens de subsistance et celui, sans entrave, de la
population. Les biens alimentaires croissent en progression arithmétique : 1, 2, 3, 4, 5, … et la population en progression
géométrique : 1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, … Ainsi, la population croit plus vite que la production de biens alimentaires donc
création de pauvreté.
L’expansion de la population peut être freinée par :
La misère, le vice et l’attitude des individus qui les conduit à ne pas se marier avant de pouvoir subvenir aux besoins de
leurs enfants. Malthus hostile au veloppement du vice est partisan du mariage tardif pour éviter hausse trop importante
de la population.
La pauvreté n’est pas le résultat des mécanismes de marché mais la conséquence naturelle d’une loi qui s’impose à tout
système.
Malthus est partisan de la suppression de « la loi sur les pauvres », l’assistance aux plus démunis permet aux pauvres
d’assurer la subsistance d’un plus grand nombre d’enfants et donc la croissance démo s’accélère. De plus, si la masse de
biens disponibles reste constante, la poussée démo et l’augmentation de la demande engendrent une hausse des prix des
biens alimentaires et une baisse des salaires réels. Donc « les lois sur les pauvres tendent à aggraver la situation courante
des pauvres ».
Malthus est également contre les politiques de réduction des inégalités car si il n’y a plus de pauvreté il n’y a plus de
frein à l’expansion démo et à terme la pénurie s’installe. Il défend par contre l’aide aux agriculteurs pour développer
production de biens alimentaires.
La loi de Malthus a été contredite par les faits. Elle reposait implicitement sur l’absence de gains de productivité et sur
la progression géométrique de la population. Or, ces deux hypothèses ne sont pas vériées. La validité de cette loi reste
posée pour les PVD.
La question du rôle de la demande effective
Malthus s’interroge sur les causes de la croissance. Il va centrer son argumentation sur les motivations qui poussent
les entreprises à accumuler. Malthus s’accorde avec Say sur le fait que ce qui pousse les entrepreneurs à produire c’est
l’existence de débouchés. Là où sa pensée diffère c’est lorsque Say afrme qu’il ne peut y avoir d’insufsance générale
de la demande. Pour Malthus, la demande peut s’établir à un niveau trop faible pour assurer l’écoulement sur le marché
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