Présentation des Etats généraux de la presse écrite
Baisse tendancielle de la diffusion, déficit chronique d’un certain nombre de titres, menaces de
disparition de journaux, vieillissement du lectorat, contraction des rédactions, les signes d’une crise
profonde de la presse écrite se multiplient et s’aggravent. Confrontés à un redoutable effet de ciseaux,
avec la hausse des coûts d’un côté, la baisse des recettes de l’autre, qu’il s’agisse des ventes, de la
publicité, ou des annonces, de nombreux journaux sont dans l’impasse économique ou s’y acheminent.
Certes, la presse magazine est foisonnante, mais elle sait qu’elle ne sera épargnée ni par la crise du
marché publicitaire, ni par la croissance du numérique. Le développement des gratuits atteste d’une
demande persistante d’information sur support papier, mais son modèle économique reste fragile de
l’aveu même de ses éditeurs. Internet envoie pour sa part des signes ambivalents : les sites
d’information des journaux sont très consultés et de nouvelles opportunités se créent ; en même temps,
en permettant une multiplication de sites de plus en plus spécialisés, Internet modifie notre rapport à
l’information, fragmente nos besoins, fonctionne davantage selon une logique de la demande que de
l’offre. L’essence même des journaux généralistes, qui est d’offrir aux lecteurs un panorama régulier et
complet de l’information, semble compromise. Quant à la viabilité économique des sites d’information,
qu’ils soient associés ou non à des journaux existants, elle n’est pour le moment pas assurée : la
gratuité reste le modèle dominant sur Internet et les recettes de publicité sont à la fois insuffisantes et
trop mal réparties pour assurer la rentabilité de ces sites.
Qu’elle soit imprimée sur le papier ou accessible par Internet, nul ne conteste pourtant l’importance
capitale d’une presse écrite dans une démocratie. Nécessaire à la liberté d’expression et d’information,
support indispensable à la révélation d’informations, instrument d’analyse et de mise en perspective de
l’actualité, l’écrit offre à ses lecteurs, à intervalles réguliers, un tableau non seulement vérifié et
hiérarchisé, mais encore complet de ce qu’un honnête homme doit savoir de son activité, de son pays,
et du monde, pour exercer sa responsabilité de citoyen et vivre en homme libre. Acteur majeur du débat
public et de l’évolution des idées, la presse écrite joue un rôle déterminant dans la construction de
l’opinion publique et l’émergence d’une culture commune partagée. C’est bien pour cela qu’elle doit être
pluraliste et indépendante, pour cela qu’elle doit vivre de ses propres moyens, pour cela qu’elle doit
reposer sur des rédactions puissantes, pour cela qu’il faut se préoccuper de l’écart croissant entre ceux
qui lisent régulièrement la presse et ceux qui la lisent peu, voire jamais.
Tout en soulignant les nombreux efforts déjà entrepris par la profession, l’enjeu des Etats généraux de
la presse écrite est de favoriser l’adaptation de la presse à son nouvel environnement dans un contexte
incertain, qui évolue à toute allure, pour que notre presse reste vivante, pluraliste, indépendante.
Ces Etats généraux sont ceux de toute la presse écrite : quotidienne, périodique et magazine,
généraliste, thématique et spécialisée, nationale, régionale et locale, gratuite ou payante, sur papier, sur
Internet ou multi-supports, car aujourd’hui presse écrite ne signifie plus forcément presse papier.
Ces Etats généraux sont ceux de toute la société, les professionnels bien sûr, mais aussi les lecteurs,
les consommateurs, les citoyens, les responsables publics.
En invitant à ce débat et en se proposant de l’organiser, l’Etat est dans son rôle, non seulement au titre
des aides qu’il verse à la presse, mais plus encore au titre de sa mission de garant de la liberté, de
l’indépendance et du pluralisme de la presse et des médias que la Constitution lui confie.
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Le premier objectif des Etats généraux est d’élaborer un diagnostic partagé, en particulier autour de
quelques questions centrales : la crise de la presse écrite est-elle spécifique à la France ou bien est-elle
commune à tous les pays occidentaux ? Presse spécialisée, presse généraliste, presse quotidienne,