Résolution d’un problème d’écoulement de puissance optimal en régime alternatif (AC-OPF ) avec prise en compte de l’arrêt-démarrage des groupes de production Manuel Ruiz1 , Alexandre Marié1 , Pierre Girardeau1 Artelys 12 rue du Quatre Septembre, 75002 Paris, France {manuel.ruiz, alexandre.marie, pierre.girardeau}@artelys.com Mots-clés : Optimal Power Flow, Contraintes de complémentarité, MINLP, Méthodes de points intérieurs. 1 Description du problème Le réseau très haute tension (THT) permet de transporter l’énergie depuis les moyens de production électrique (hydrauliques, thermiques, éoliens, etc.) vers les postes de consommation (résidentiels, industries, stations de pompage). A chaque instant, le réseau est soumis à un certain nombre de lois physiques (loi des mailles, loi des noeuds) et de règles de sécurité (bornes en tension et en courant) qui, si elles ne sont pas respectées, peuvent rapidement conduire à des situations critiques pour l’ensemble du système. En fonction des caractéristiques du réseau, de la demande et des capacités de production, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité doit déterminer un point de fonctionnement du flux d’énergie. Plus précisément, il s’agit du niveau de production de chaque groupe, de la valeur du flux d’énergie transitant sur les lignes et des valeurs des phases et tensions aux différents points du réseau. Les variables d’optimisation sont ainsi constituées, entre autres, des plans de production (qui peuvent être modifiés par le gestionnaire de réseau pour des raisons relatives à la sécurité) et des matériels disponibles sur le réseau tels que, par exemple, les transformateurs-déphaseurs dont le rapport de transformation ou le déphasage peut varier. Le problème d’écoulement de puissance optimal (Optimal Power Flow ou OPF ) consiste donc à déterminer, sur les bases des consommations et productions prévues sur le réseau électrique, un plan de fonctionnement satisfaisant les contraintes liées au transport de l’énergie tout en minimisant un critère économique pouvant être, selon les cas, la dissipation par effet Joule sur les lignes ou bien la déviation au planning de production initialement prévu par les producteurs d’énergie. 2 Description du réseau Le réseau est modélisé par un multi-graphe G dont les arcs représentent les lignes entre deux noeuds électriques, appelés « bus ». À chaque bus, de l’électricité est produite et/ou consommée et/ou en transit à travers les lignes vers d’autre bus. Le premier ensemble de contraintes physiques correspond à l’ensemble des bilans de puissance : en chaque noeud, la somme de ce qui est produit, consommé et en transit est nulle : c’est la loi des noeuds. Ces équations sont complexes (dans C) et font intervenir des termes quadratiques en niveau de tensions ainsi que des termes trigonométriques (sin et cos) prenant en compte le déphasage. Des seuils (ou limites de courants) sont imposés à l’entrée et à la sortie de chaque ligne afin d’éviter des surcharges conduisant à des accidents électriques. De plus, chaque groupe est contraint par des bornes sur la quantité de puissance qu’il peut fournir. Il convient enfin de sélectionner, parmi ces groupes, lesquels mettre en marche. Ce modèle constitue un problème d’optimisation fortement non-convexe. 3 Formulation des contraintes d’arrêt-démarrage Des variables entières sont généralement utilisées pour modéliser les décisions à prendre sur plusieurs matériels. Dans cette présentation, nous proposons une approche utilisant des contraintes de complémentarité pour modéliser l’arrêt ou le démarrage des groupes de production. Ces contraintes s’expriment ainsi : 0≤x⊥y≥0 (1) La contrainte 1 signifie x = 0 ou y = 0 avec x, y ≥ 0. Elle est donc équivalente à x · y = 0 avec x, y ≥ 0. Afin de traiter numériquement ces contraintes, nous utilisons l’implémentation de la méthode de points intérieurs de Knitro pour les problèmes non linéaires [3], qui gère de façon spécifique les contraintes de complémentarité [2]. Pour un groupe k, nous noterons Pk sa production de puissance active et Qk sa production de puissance réactive 1. Si ce groupe est arrêté alors Pk = 0. Sinon, Pk est simplement soumise à des contraintes de bornes. Nous proposons et étudions deux formulations pour modéliser cette contrainte. La première s’inspire des modèles en nombres entiers où une variable vaut 0 si le groupe est arrêté et 1 s’il ′ est démarré. La seconde introduit une variable auxiliaire Pk représentant une puissance fictive qui sera non nulle quand le groupe n’est pas utilisé. Dans les deux cas, aucune variable entière n’est introduite dans le modèle. 4 Expérimentation Ces deux formulations sont testées sur un jeu de données réaliste fourni par RTE dans le cadre du projet collaboratif iTesla qui s’appuie sur les résultats du projet Pegase [1]. Plusieurs instances sont disponibles, elles correspondent à des configurations différentes du réseau où la demande et les groupes disponibles changent. 5 Conclusion Nous présentons une méthode pour modéliser et résoudre un AC-OPF, comportant des contraintes d’arrêt-démarrage des groupes de production, de taille réelle. Deux formulations sont introduites, dont l’une est basée sur le formalisme des contraintes de complémentarité qui est intégré et géré spécifiquement dans Knitro. Les tests numériques démontrent que cette formulation compacte surpasse celle en nombres entiers. Références [1] S. Fliscounakis, F. Zaoui, M.-P. Houry, and E. Milin. Loss reduction as a mixed integer optimization problem. In PowerTech, 2009 IEEE Bucharest, pages 1–6, July 2009. [2] Sven Leyffer, Gabriel López-calva, and Jorge Nocedal. Interior methods for mathematical programs with complementarity constraints. SIAM J. Optim, 17 :52–77, 2004. [3] R. A. Waltz, J. L. Morales, J. Nocedal, and D. Orban. An interior algorithm for nonlinear optimization that combines line search and trust region steps. Math. Program., 107(3) :391– 408, July 2006. 1. La puissance complexe dans le cas du courant alternatif doit être décomposée en sa partie réelle et sa partie imaginaire : la puissance active et la puissance réactive.