1. Introduction.
En de nombreux contextes, l’être humain discoure pour persuader un auditoire
d’adopter ses propositions. De la publicité au discours politique, les procédés
d’argumentation sont variés. Un seul d’entre eux, aux multiples occurrences,
occupera ce mémoire : l’emploi de la narration dans un discours persuasif.
L’instrumentalisation du phénomène narratif à des fins persuasives implique une
réflexion conjointe sur l’argumentation et la narration, considérées comme des
macro-catégories d’appréhension et de structuration du discours. Ces deux
catégories, définies comme pratiques langagières, se trouvent être deux pôles
structurants du langage humain (Plantin 1996 : 4-6), n’ayant sens que l’une par
rapport à l’autre, tant d’un point de vue linguistique qu’anthropologique (Rabatel
2004 : 8). L’étude des pratiques discursives a alors l’avantage de mettre en
exergue les nombreuses interrelations entre argumentation et narration :
« Les deux registres de discours [argumentation et narration] ont, en effet, toujours
entretenu des rapports étroits et l’analyse montre qu’ils concourent ensemble à
l’émergence d’une parole socialement élaborée, qui vise tant la persuasion que la
transmission d’une certaine vision du monde. […] D’un côté, la narration a pour
fonction de représenter des événements, de donner du sens à une situation, de construire
un récit auquel une communauté, ou un individu, peut s’identifier. Ainsi la narration
aurait pour visée première, essentielle, de donner du sens à l’environnement humain via
la représentation dynamique de ce qu’il advient, de ce qui est advenu, mais aussi de ce
qui pourrait advenir. D’un autre côté, l’argumentation est reconnue comme une fonction
supérieure du langage, dont la visée complexe est de convaincre ou de persuader autrui,
et cela, le plus souvent en vue de lui faire prendre une décision. » (Danblon 2008 : 8-9).
L’argumentation et la narration ont un rapport étroit sur le plan cognitif et
langagier. Elles jouent toutes deux un rôle complémentaire au niveau social : ceci
malgré une tradition qui, depuis Platon, les définit souvent comme deux entités
opposées. Néanmoins, les frontières entre narration et argumentation sont plus
ténues qu’il n’y paraît, et une multitude de passerelles se dessine entre ces deux
phénomènes. La saisie de ces manifestations discursives complexes nécessite
l’inscription de ce mémoire de fin d’étude dans l’analyse d’un discours
particulier : la publicité se présente comme un lieu privilégié pour observer les
interrelations de ces deux macro-catégories, car le discours publicitaire –
éminemment persuasif - emploie couramment des stratégies argumentatives dans
Gilles Merminod - Mémoire de Maîtrise – Décembre 2009. 5