Petite archéologie
de la notion de valeur
Celui qui désire connaître la théorie marxiste de la marchandise, de la forme valeur et de
la substance valeur, du travail général-abstrait, du fétichisme de la marchandise et de la
“réification” (mise en avant par la suite, entre autres, par Lukacs), se heurte rapidement à de
grandes difficultés s’il ou si elle ne se contente que d’une version superficielle. On peut se
satisfaire par exemple de l’“explication” selon laquelle, avec la production marchande et la
monétarisation, les rapports sociaux vis-à-vis des hommes se seraient autonomisés, sans pour
cela aller plus loin et se demander pourquoi cette autonomisation est intervenue : par exemple,
à la suite d’un parasitisme naturel qui peut se développer à partir d’une symbiose ? Jacques
Camatte, dont l’ouvrage : Capital et Gemeinwesen offre quelques analyses brillantes et
contourne la théorie des classes ainsi que Marx lui-même, explicite la magie de
la marchandise : il s’agirait du phénomène du centre “disparu” (escamoté(*)). Il serait
attaché à la marchandise, et naturellement à l’argent qui est sa forme la plus pure, une
certaine faculté potentielle, une certaine puissance potentielle (la “valeur”) sur les autres
marchandises qui s’opposent à elle sur le marché, du fait de leur caractère concret, et, dans
cette affaire, le travail qui produit la valeur serait “oublié”. D’où la naturalisation d’un rapport
social. Les “rapports sociaux” mentionnés correspondraient selon cette interprétation au
“travail”, plus pcisément : à un rapport de travail, et encore plus précisément : au rapport
classiste d’exploitation entre la classe ouvrière produisant la valeur et la classe capitaliste, qui
rémunère certes la reproduction individuelle et relative à l’espèce, mais qui s’approprie les
valeurs produites. Cette interprétation est classiquement classiste. Elle omet qu’il s’agit, à
propos de ce “travail” (la substance de la valeur), d’un travail qui se déroule dans le rapport
social de la non-socialité, c'est-à-dire du capital, et non pas du travail qui s’effectue parmi
toutes les relations sociales, par exemple celles du féodalisme. Telle est l’une des nombreuses
interprétations vulgaires du premier chapitre du Capital, livre I.
H. G. Backhaus, un “appasionado” du Marx philosophe, fait ouvrir les yeux (dans
Dialektik der Wertform. Untersuchungen zur Marxschen Ökonomiekritik [Dialectique de la
forme valeur. Recherches sur la critique de l’économie chez Marx]) sur les difficultés de
compréhension de ce premier chapitre célèbre qui représente l’entrée ardue dans l’analyse et
la reproduction conceptuelle de ce complexe qu’est l’“économie”.
Au début, c’est l’étonnement : les universaux, les catégories et les concepts, ne se
révèlent pas être simplement des ingrédients du sujet pensant, et donc des aides purement
pratiques de rangement destinées à venir à bout d’une réalité complexe, comme le sont les
systèmes de classification qui sont différents selon l’ethnie, ou l’époque historique, et qui
peuvent pour ainsi dire varier dans un cadre pragmatique-fonctionnel : la “société” en tant que
totalité globale s’avère être réellement une définition intégrative des individus. Le fait de
parler de “société” n’est pas totalitaire, mais il dévoile un rapport totalitaire (la médiation
(*) En français dans le texte. (NdT).
universelle par l’argent et le capital, lequel constitue l’essence de la société). Il en est de
même pour la valeur : la valeur n’est pas ce qui reste de la marchandise après qu’on a fait
abstraction de toutes les propriétés naturelles qui la transforment en objet de désir sensuel,
intellectuel, esthétique ou moral, mais elle est une véritable abstraction qui apparaît dans
l’échange d’équivalent : que les hommes le sachent ou non, lorsqu’ils s’engagent dans une
relation d’échange et qu’ils réduisent des choses répondant à des usages ou à des satisfactions
de natures les plus variées (dans le vocabulaire marxiste : “valeur d’usage”) en valeurs
d’échange, ils accomplissent socialement-réellement une opération conceptuelle. La
conceptualisation ne se situe pas simplement et uniquement dans la tête de l’homme qui
réfléchit à l’échange, mais dans la réalité elle-même. Si le positivisme ne reconnaît que des
actes d’échange et non pas l’essence qui s’y niche, il démontre alors justement en cela qu’il
méconnaît, en ce qui concerne tout un tas d’actes, la dynamique qui les engendre. Il s’agit
essentiellement de la naturalisation du social : d’une existence humaine fondée sur l’argent et
sur le capital ; ce dernier est légitimé, et même sacralisé par la nature, comme étant la cause
profonde de l’être-ensemble humain ; la supériorité du social fait apparaître la société comme
la première nature.
On peut assurément parler ici de fétichisme, mais seulement d’un fétichisme
entièrement immanent. Le fétiche de la valeur abstraite-concrète, suprasensible-sensible, du
produit de la création de valeur dans le procès capitaliste, est entièrement temporel-idéel. Il
manque tout lien avec une unité, un infini, un absolument non-réel, universels. Le capital et la
valeur sont des créatures de l’esprit humain et de la praxis humaine, et non pas des
émanations d’une divinité. Il existe également dans l’objet sacré (“fétiche”, relique,
accessoires rituels, etc.), une tension (quelque chose d’analogue avec la valeur d’usage versus
la valeur d’échange) entre le caractère concret et le contenu spirituel. Mais les différences
phénoménales sont remarquables : si la valeur de la marchandise dérive d’une
“transcendance” immanente (complexe de l’économie, c’est ainsi que nous l’avons appelée
ici), la sacralité dérive en revanche d’une cosmologie mythique fondée sur des pratiques
rituelles ou sur une liturgie religieuse (voir à ce propos la critique du livre de R. A. Rappaport
dans le présent cahier). La marchandise est le corps (fortuit) de la valeur ou le facteur du
procès de valorisation. Dans l’objet sacré, la relation entre l’aspect physique de l’objet et sa
signification sacrée n’est pas fortuite ; c’est pourquoi il n’est pas non plus aliénable. Ou bien
devrait-on pouvoir parler réellement, à propos du fétichisme de la marchandise, de la forme
économique-rationnelle du mystère de l’absolu qui se concrétise dans le particulier ?
Revenons encore une fois à la marchandise, et à la marchandise par excellence(*), c'est-
à-dire à l’argent. Si nous ne pouvons pas contester son être réel et objectif à la valeur, l’on ne
peut pas non plus parler seulement, à propos de la fétichisation du capital et de la
marchandise, de fausse conscience. Les marchandises sont déjà transformées de manière
structurelle-idéelle en argent/capital, et pas seulement dans l’opinion des individus. Nous
trouverions donc ici aussi une conscience collectrice in concreto. En outre, on pourrait
apporter la preuve qu’il y a quelque chose d’aussi contradictoire qu’une pensée irréfléchie”
dans le processus d’échange.
Le secret de l’argent réside dans le fétichisme de la marchandise, lequel se rapporte
globalement au monde des marchandises (la marchandise “monde”). Le fétichisme n’est, ainsi
qu’Adorno l’affirme dans une conférence de 1962, en rien psychologique, et il n’est pas par
conséquent une pathologie individuelle-psychique comme le fétichisme psychanalytique. Il
s’agit donc ici de l’aspect subjectif de l’abstraction réelle qui fait apparaître la marchandise
comme une chose en soi. Il faut en revanche souligner que le développement du complexe de
l’“économie” implique un certain stade de développement mental : la rationalité. Cela
(*) En français dans le texte. (NdT).
s’exprime dans le fait que, tout au long du Moyen-âge européen, il ne peut être encore
question de parler en majeure partie d’un marché transparent avec une commensurabilité
universelle des biens. On connaît bien les proportions tarifaires dans l’échange des “produits
excédentaires” traditionnels les uns contre les autres, par exemple du bœuf contre des
vêtements de laine en Islande, ou bien aussi le barème des pénitences pour compenser les
infractions à la loi dans le Pentateuque. Un exemple amusant : encore au début du XIX° siècle
dans l’archipel Bismarck, les poissons étaient échangés contre des colliers de coquillages de
même longueur. En Inde, les honoraires du médecin devaient être fixés de manière
extrêmement différenciée, en fonction de la position du patient : le gouverneur de province
payait un char à bœufs, le paysan un jeune bœuf. Nous sommes ici manifestement très loin du
point de vue économique. Que devaient donc régler les proportions d’échange si la vraie
valeur des marchandises ne se réalisait pas encore à l’aide du prix, en tant que produit de la
concurrence ? On a le sentiment d’être renvoyé aux actes d’évaluation dans les expériences de
Piaget : des enfants au stade pré-opérationnel mesurent le volume de liquides dans différents
récipients de verre exclusivement en fonction de la hauteur, et ils négligent donc la base de
ces récipients comme cofacteur du volume. Cette façon de procéder est très imprécise, mais
pas complètement erronée. C’est ainsi que les rapports d’échange traditionnels ont pu se
mettre en place à l’époque (voir Gerloff et Gottl). Simmel insiste sur le fait que des hommes
qui n’étaient pas habitués au marché universel ne se sentaient pas du tout à l’aise lors de
l’échange de produits inhabituels et c’était pour lui une confirmation de la théorie subjective
de la valeur qu’ils se laissaient guider par leur désir immédiat, et donc qu’ils
n’accomplissaient pas des actes d’évaluation rationnels.
L’abstraction réelle dans la circulation des marchandises et de l’argent est aussi une
abstraction subjective, c’est ce que nous avons fait ressortir plus haut. Elle repose sur un stade
déterminé de l’évolution de la conscience des agents dans le rapport d’échange. Les marxistes
avaient toujours tendance à nier une telle prédisposition à agir de manière adéquate chez les
hommes qui se situent dans le capital (ou dans les stades qui le précèdent dans le complexe de
l’“économie”), car ils flairaient un chauvinisme de civilisation dans le discours de l’évolution
mentale et culturelle. La disposition psychologique propre à un esprit simple que possèdent
les gauches (des travailleuses sociales déguisées !) arrivait et arriverait de mieux en mieux à
point nommé pour voir une nécessité de type objectif dans la conscience erronée des masses.
Les masses seraient donc des objets, des victimes : de leurs chefs, des idéologies
réactionnaires, de la tentation de la consommation, de l’immédiatisme, du trade-unionisme, ou
même du fétichisme de la marchandise. Je crois qu’il faut considérer cette théorie de la
victime pour le dernier et le plus grand affront fait aux masses, car les hommes ne sont certes
pas forcément individuels, mais assurément responsables de leurs collectivités et de leurs
sociétés. Responsables du fait qu’ils sont en grand nombre (l’on devrait en venir à parler ici
du caractère incontrôlé parallèle du procès de la valeur et de l’explosion démographique), de
leur servitude démocratique, de leur mise sous tutelle civilisatrice, de leur dessaisissement au
profit du marché, de leur excitation due aux plus bas instincts : envie, rancœur, cupidité,
agressivité, etc., qui se manifestent aussi bien individuellement que socialement.
Le développement du complexe “économie” est donc certainement lié au dévelop-
pement de la rationalité et il concerne, en dehors du marché, le métabolisme homme-nature,
qui est maintenant considéré de façon concrète-objective, et celui-ci à l’intérieur de la nature
elle-même. On y trouve maintenant des relations d’équilibre de systèmes qui dépendent
énergétiquement, matériellement et aussi informationellement, du monde extérieur. De tels
rapports d’échange bien réglés existent déjà à un niveau pré-biologique, comme par exemple
entre les anions et les cations en chimie. Et l’on n’a pas le droit d’ignorer à sa guise cet ordre
des choses, même si une marge de manœuvre pour le changement est essentielle pour la vie.
La rationalité universelle se retrouve dans la pensée interconnectée, dans l’écologie, elle
reconnaît les impondérabilités de l’intervention humaine dans les procès de la nature.
Mais on n’en est pas resté à l’échange rationnel, qui remplaça des proportions
d’échange “d’airain”, fixées par la coutume et la loi mythique pour des “biens excédentaires”
particuliers, par une monnaie de compte universelle, un moyen d’échange et de paiement pour
un marché cosmopolite, entièrement transparent ! La rationalité d’une médiation universelle
porte en soi la dynamique impossible à freiner de la perversion du rapport moyen-but en soi,
de sorte que finalement les biens deviennent des marchandises, dont l’essence consiste à être
la forme naturelle de la valeur : le comble de l’irrationalité ! Aujourd'hui encore, il y a des
économistes politiques qui s’illusionnent sur le fait que l’on pourrait créer un ordre
économique naturel, dans lequel des producteurs individuels pourraient échanger, via l’argent,
de manière paisible, universelle et équitable, leurs marchandises sans intentions spéculatives,
selon des règles fixées par papa marché (on parle même d’un marché naturel !) ou bien par
des accords néraux, et dans lequel l’argent resterait donc une pure mesure et un simple
moyen d’échange, et ne dégénèrerait pas en objectif. La rationalité du complexe “économie”
implique cependant une commensurabilité universelle et infinie. Rien n’échappe à la reine
valeur, ou bien à son maréchal unité de valeur. L’unicité (le caractère discret) devient le plus-
ou-moins de cette unité. Entre l’être et le non-être, il y a une infimité de degrés de nuances de
la valeur (continuité).
On assiste à la dissolution de toutes les relations traditionnelles, et le capital, qui attèle
la marchandise force de travail au procès de la valeur qui tire profit d’elle-même, n’est que
l’exécuteur d’un verdict qui prend naissance avec l’argent, lequel, même s’il n’est que peu
purifié de tous les restes pré-économiques, porte en lui le type pur. Mais cette forme pure
correspond à la prise de pouvoir du complexe “économie”, dans lequel l’argent n’est plus une
médiation marginale, mais où il est devenu le but (ultérieurement, l’argent devient à nouveau,
dans ses différentes formes et fonctions, un facteur simplement marginal du procès du
capital). Au début, l’échange, qui se transforme en commerce et dans lequel on fait davantage
d’argent avec l’argent de départ au moyen de l’achat destiné à la revente, repose plus ou
moins sur la tromperie rusée en direction de communautés mythiques, qui ne sont pas
cosmopolites, quand ce n’est pas carrément sur le vol caractérisé. Le commerçant sait
les actes d’échange sont disproportionnés et il exploite cette disproportionalité. L’on ne doit
pas s’occuper par ailleurs ici du procès complémentaire, mais ce qui doit être souligné, c’est
le parallélisme entre l’économie de la valeur (et plus tard du capital) qui s’étend (il faut sans
cesse garder devant les yeux qu’il y eut aussi, au plus tard avec le développement de
l’agriculture, un “mode de production familial” (M. Sahlins) d’avant la valeur, à partir duquel
il y eut chez Aristote l’ébauche d’une oikonomia comme science, qui prit une attitude
négative par rapport à la chrémastique des commerçants !) et la mentalité rationaliste. Et en
effet : une production sous l’égide de la valeur, ou mieux : de la plus-value, avait
naturellement un effet rétroactif sur le monde du travail, et même sur tout le mode de vie. Le
commerce, c'est-à-dire une pensée économique fondée sur la valeur, se détache du cosmos
statique traditionnel, relativise les positions, favorise l’évaluation spéculative, non concrète,
accomplit avec facilité la “réincarnation” qui consiste à se sentir à l’aise dans la position d’un
autre, se rend compte de l’effet et du contre-effet (causalité et “pensée interconnectée”),
acquiert une idée de l’immortalité concrète (en l’occurrence sur l’exemple de la valeur qui se
conserve éternellement), et acquiert même déjà une idée de la totalité (du marché mondial
comme interaction des valeurs partielles, des capitaux partiels). Derrière l’image du
commerçant rusé et cupide se cache sans aucun doute quelque vérité, mais aussi le
ressentiment de ceux qui sont restés des balourds intellectuels, des villageois borné. Les
marchands parlent différentes langues, ils développent même leur propre lingua franca
(contre les langues classiques des fonctionnaires littéraires qui sont les piliers de l’État),
ils connaissent les opérations arithmétiques de base, ils maîtrisent la règle de trois, les intérêts
composés. Les mathématiques, et plus tard les sciences de la nature, qui sont une sorte de
commerce spéculatif avec la nature, ne sont-ils pas à porter au crédit du commerce ?
L’histoire du commerce est largement l’histoire du processus de civilisation.
Dans l’ouvrage de Gerloff : Entstehung des Geldes und die Anfänge des Geldwesens
[L’origine de l’argent et les débuts de la finance], l’on trouve un riche matériel
ethnographique et historico-culturel sur l’échange, la valeur, l’argent, et leurs possibles
ébauches. Cela mérite que l’on y regarde de plus près. Voici les affirmations essentielles de
cet ouvrage : l’origine de l’argent (la question de la nature de l’argent est dans la mesure du
possibles éludée) se situe dans le non-économique, dans des pratiques sociales comme : le
cadeau, le don, l’amende, le sacrifice d’un côté, le service, le droit d’hospitalité et le partage
des biens de l’autre côté. Étymologiquement, cette hypothèse fait l’objet d’une certaine
validation : le mot germanique Gelt(*) signifiait une taxe sacrée-cultuelle, et aussi ce qui
rachète une faute (par exemple vis-à-vis de quelqu’un à qui l’on a crevé un œil volontairement
ou involontairement). L’impôt destiné au temple (pour la subsistance des prêtres et des
prêtresses) n’en est pas très éloigné. Les chefs de tribu et les petits rois représentent une
“classe” qui est, elle aussi, exempte du travail physique. Ils manifestent leur puissance et leur
dignité sociale par la possession de richesses, et Gerloff nomme cela Hortgeld [argent-
refuge]. Un bon exemple de cela, ce sont les “meules” géantes (elles n’avaient en effet aucune
fonction pratique) des Polynésiens sur l’île de Yap. Leur production est commandée par des
personnes honorables, et elle exige un travail pendant plusieurs mois de beaucoup d’hommes.
Le transport sur l’île est extrêmement délicat (le basalte qui est nécessaire à leur fabrication
n’est pas disponible sur l’île de Yap). Ces pierres sont présentées lors de festivités et elles
sont très étroitement liées à leurs propriétaires, c'est-à-dire de manière pratiquement
inaliénable. L’indemnité de guerre, la prévention de la guerre (et donc des actions de
l’“État”), et parfois l’achat d’une épouse (qui est rien de moins qu’une affaire politiquement
importante), constituent des exceptions. N’y a-t-il pas là déjà une “abstraction réelle” à
constater ? La valeur de ces “meules” n’est en aucun cas fondée seulement sur une réputation
purement subjective (et donc sur une prétention, sur une “fausse conscience”), mais sur un
rapport social qui, lui, est objectif : les meules sont très étroitement liées à leur propriétaire.
Mais celui-ci détient une position sociale centrale : il constitue la compensation entre les
nombreuses économies familiales des groupes en redistribuant les tributs exigés. M. Sahlins et
Meillassoux en arrivent, dans leurs recherches, au sultat selon lequel les petits groupes
peuvent être frappés de contingences et de malheurs dans leur isolement, lequel est nécessité
par la forme qui leur sert à acquérir les moyens de leur subsistance, par exemple la
cueillette/chasse ou le défrichement par le feu. Il y a fréquemment par exemple un
déséquilibre numérique entre les jeunes et les vieux, ou entre les sexes, ou bien encore c’est
une situation critique qui se produit localement. L’instance proto-étatique d’un pouvoir
princier (ou sacerdotal) remédie dans ces cas- d’une certaine façon à ces problèmes. Les
toutes premières formations étatiques sont en rapport étroit avec la constitution d’un cercle
qui dépasse les limites des “tribus” et des villages. La charte, l’organisation et le pouvoir,
doivent, grâce au regroupement, protéger les communautés relativement petites des
contingences, des aléas de nature extrahumaine et humaine, comme par exemple la vendetta et
des luttes tribales. La dentarisation fut déjà un pas dans cette direction. Et en particulier,
certaines pratiques agricoles requéraient absolument un peu de régulation afin d’entraver la
dégradation de la base écologique. Que l’on pense à ce propos à l’irrigation et au drainage qui
représentent de sévères atteintes à l’hydro-géographie et à la podologie, ou bien la culture sur
brûlis, l’aménagement de terrains en terrasses, la déforestation ! Une fois encore, on se heurte
(*) Le mot allemand pour l’argent est Geld. (NdT).
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