L`économie marxiste 1/2

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N. Brusadelli - L’économie marxiste
Cercles d’éducation populaire d’Ensemble ! 80 – Novembre 2014
L’économie marxiste 1/2
Bibliographie introductive
D. Bensaïd, Marx, mode d’emploi, La Découverte, 2009.
D. Harvey, Lire Le Capital, Les prairies ordinaires, 2012.
H. Lefebvre, Le marxisme, PUF, « Que sais-je », 1948.
E. Mandel, Introduction au marxisme, Editions Formation Léon Lesoil, 2007.
E. Mandel, Initiation à la théorie économique marxiste, conférences données au PSU, 1963.
K. Marx, Travail salarié et capital, Altiplano, 2007 (1848).
K. Marx, Le Capital (livre 1), PUF, 1993 (1867)
Objectifs
1° - Comprendre la théorie marxiste de la valeur : qu’est-ce qui, en régime capitaliste,
constitue la « valeur » économique ?
2° - Comprendre la théorie marxiste de la monnaie : d’où vient, pour Marx, la monnaie ?
Quelle est sa fonction dans le système capitaliste ?
3° - Commencer à saisir ce qu’est, pour Marx, le « Capital » et, par extension, le
« capitalisme ».
Concepts
Marchandise
Valeur d’usage
Valeur d’échange
Valeur (économique)
Fétichisme de la marchandise
Forme monnaie
Prix
Circulation monétaire
Capital
Plus-value
Force de travail
Rapports sociaux de production
Forces productives
Mode de production
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Introduction
La pensée marxiste, c’est un monde à part entière, extrêmement vaste. Marx est un penseur
qui a irrigué de nombreuses sciences sociales : il y a une sociologie marxiste, une économie
marxiste, une géographie marxiste, une philosophie marxiste, etc. Ici, étant dans un module
d’initiation à l’économie, je vais me concentrer sur les concepts, c'est-à-dire les instruments
de pensée, qu’il a forgés pour comprendre la réalité économique. Marx ne pense pas
l’économie indépendamment du reste de la société, ni de manière intemporelle – c’est ce qui
fait la force, mais aussi la complexité, de sa pensée – mais il faut bien faire des choix, et par
ailleurs d’autres topos fait par d’autres camarades (sur l’impérialisme, sur le fascisme, sur les
rapports sociaux de classe ou de sexe, etc.) risquent fort d’aborder les vues historiques et
sociales héritées du marxisme.
Je ne suis pas économiste de formation, et de plus l’idée de ces cercles d’éducation populaire
c’est qu’on s’approprie collectivement des instruments intellectuels qui nous sont utiles pour
penser l’action militante. De ce fait, je ne tenterais d’abord pas de vous restituer la pensée de
Marx relativement aux autres penseurs économiques de son époque – d’autres ici le feraient,
et le feront peut être, mieux que moi – mais je tacherais d’entrer directement dans le « dur »
du sujet, de vous restituer des concepts qui, en tant que militant, m’ont aidé à penser la réalité
économique et sociale dans laquelle on vit. Pour ça, j’ai choisi de vous restituer les concepts
de base que Marx met au point dans Le Capital : si vous voulez trouvez les écrits originaux de
ce que je vais tenter de vous raconter aujourd’hui, cf. les 5 premiers chapitres de l’ouvrage
(ou dans la meilleure vulgarisation, à mon sens, qui en a été faite, c'est-à-dire chez D. Harvey,
Pour lire le Capital).
Qu’est-ce que la « valeur »
Marx veut étudier le système capitaliste, mais par quel bout le prendre ? Il va choisir de
l’attraper par sa manifestation la plus évidente dans nos vies de tous les jours, les
« marchandises » : « La richesse des sociétés dans lesquelles règne le mode de production
capitaliste apparait comme une gigantesque collection de marchandises ». Il est vrai que nous
sommes entourés de marchandises, il y en a partout : nous sommes habillés de marchandises,
nos logements, qui sont eux même des marchandises, sont remplis de marchandises, etc.
Qu’est-ce qu’une marchandise ?
Marchandise
« Une marchandise est d’abord un objet extérieur, une chose, qui satisfait, grâce à ses qualités
propres, des besoins humains d’une espèce quelconque », nous dit-il. Il faudrait ajouter
qu’une marchandise, c’est un bien qui se vend sur un marché, qui n’a pas été produit
directement pour en faire usage mais qui a été produit pour l’échange. Toute marchandise,
nous dit-il, peut d’ailleurs être vue de deux manières, comme une « valeur d’usage » et
comme une « valeur d’échange ».
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Valeur d’usage
C’est la marchandise concrète vu sous l’angle de « à quoi elle sert », unique par rapport à ses
semblables du point de vue de cette utilité. Un même objet peut être utilisé différemment en
fonction des contextes, des utilisateurs (ex : une bouteille d’Evian / un diamant dans le
Sahara). Elle est unique aussi du point de vue de sa matière, de sa forme. Une table n’a rien à
voir avec une chaise, les chaises entre elles n’ont pas toutes la même forme ou la même
matière. La valeur d’usage est mesurable d’un point de vue qualitatif.
Valeur d’échange
Toute marchandise possède une « valeur d’échange », ce qui veut dire qu’elle a de la valeur
dans le cadre d’un rapport d’échange. C’est la marchandise vu sous l’angle de « contre quoi je
vais pouvoir l’échanger » : si j’ai 3 poules en trop, je vais pouvoir l’échanger contre 1 paire de
chaussure. La valeur d’échange est mesurable d’un point de vue quantitatif, sous forme
d’équation : « 3 poules = 1 paire de chaussure » ; ou « 3 poules = 15 euros » ; ou encore « 3
poules = 1 paire de chaussure = 3 euros ». Elle ne se révèle que dans le rapport social
marchand, quand une marchandise en rencontre une autre sur le marché, sans médiation de
l’argent (M-M) ou avec (M-A-M).
Valeur (économique)
La valeur d’usage et la valeur d’échange font apparaitre une contradiction dans la
marchandise. Alors que chaque marchandise, du point de vue de sa valeur d’usage, est unique,
elle peut être mise en équivalence avec une autre marchandise du point de vue de sa valeur
d’échange. Si les marchandises sont échangées les unes contre les autres, alors qu’elles sont
incommensurables prises sous l’angle de leur valeur d’échange, c’est qu’elles ont une seule
propriété commune : celle d’être des produits du travail humain. Dans le capitalisme, le
travail est la dépense d’énergie humaine qui, définie par sa durée, sert de mesure de la valeur
économique. Si Marx emprunte cette théorie à Ricardo, il lui fait subir une modification : il
parle du travail « socialement nécessaire » : c’est-à-dire qu’il tient compte de la productivité
du travail moyenne dans une société. Si une paire de chaussure a moins de valeur aujourd’hui
qu’il y a 50 ans, c’est qu’il faut moins de temps de travail pour la fabriquer ; et si quelqu’un
met aujourd’hui beaucoup plus de temps qu’en moyenne pour les fabriquer, il aura du mal à
faire face à la concurrence.
Remarques sur la valeur (économique)
La valeur, nous dit Marx, est donc une « objectivité fantomatique », elle n’existe que
« relationnellement », comme la pesanteur, c’est un « rapport social ». Cette théorie a
plusieurs conséquences :
1/ la valeur ne se définit que socialement, et n’est pas contenue en tant que telle dans
telle ou telle marchandise : le café que je me prépare chez moi ou celui que me prépare
le serveur du PMU à côté de chez moi est le même, c’est les contextes sociaux de la
production du café qui diffèrent et qui font que l’un va être doté d’une valeur
d’échange et pas l’autre.
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2/ comme la valeur ne se définit que socialement, elle n’a pas donc toujours été définie
de la même manière : la valeur n’est définie par le temps de travail que dans le
capitalisme, c’est la « convention capitaliste de la valeur » dit B. Friot
3/ toute société produit une infinité de valeurs d’usage, mais toute société sélectionne
parmi ces valeurs d’usages celles qui seront dotées d’une valeur économique, en
fonction de la convention de la valeur en vigueur. De ce point de vue, le capitalisme
innove par rapport à d’autres systèmes antérieurs, car en faisant non pas de
l’appartenance statutaire (à telle ou telle caste, ou à tel ou tel groupe sexuel, par
exemple) mais du travail la source de la valeur, tout individu est un producteur en
puissance, qui participe à la vie sociale.
4/ si la valeur n’a pas toujours été définie de la même manière, si elle ne relève pas
d’une loi « naturelle », elle ne sera donc peut être pas toujours définie ainsi, et pour
inventer un dépassement du capitalisme il faudra certainement faire émerger d’autres
définitions de la valeur
Remarque sur le rapport au « prix naturel » des classiques
Marx dénonce la théorie classique de l’offre et de la demande, qui ferait émerger un « prix
naturel », mais lui reconnait pourtant une certaine réalité. Rappel théorie classique, ici dans le
cas du marché du travail :
Marx nous dit que ça n’explique pas grand chose : ça n’explique pas pourquoi, sur le long
terme, les oscillations des prix pour chaque type de marchandise s’effectuent autour de telle
valeur monétaire et pas d’une autre. Pour lui, la concurrence et le marché ont un rôle de
« régulateur » du système => la concurrence entre vendeurs de telle ou telle marchandise les
amènent à fixer des prix qui oscillent autour du coût de production des marchandises, c'est-àdire autour de la valeur de l’ensemble du travail « cristallisé » en chacune d’elle.
D’où vient la monnaie ?
Fétichisme de la marchandise
La marchandise, et le rapport de valeur qu’elle entretient avec les autres produits du travail,
n’ont donc rien à voir avec sa nature physique. L’expérience quotidienne concrète que nous
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faisons tous de la marchandise, comme valeur d’usage, n’a rien à voir avec sa valeur, qui est
sociale au plus haut point. Le marché renforce cette impression : dans un supermarché, nous
ne voyons que des marchandises qui s’exposent les unes vis-à-vis des autres, mais nous ne
savons rien des rapports sociaux qui sont en jeu pour produire ces marchandises. Nous ne
savons rien des conditions de production du sucre que nous mettons le matin dans notre café,
nous ne savons rien des conditions de travail de l’ouvrier qui récolte la canne à sucre ou la
betterave. « La valeur », nous dit Marx, « transforme tout produit du travail en hiéroglyphe
social » ; et il ajoute « le rapport social déterminé des hommes entre eux prend pour eux la
forme fantasmagorique d’un rapport entre choses ». C’est ce qu’il nomme le « fétichisme de
la marchandise ».
Forme monnaie
Dans l’acte d’échange le plus simple où une marchandise est confrontée à une autre, c’est à
dire le troc (M-M), il y a toujours nous dit Marx une marchandise désirée pour sa valeur
d’usage et une marchandise qui sert d’étalon pour l’échange. Marx nous explique qu’avec le
développement des rapports marchands et pour leur permettre de se développer davantage, un
« équivalent universel » a vu le jour : la « forme monnaie » (M-A-M). Pourquoi « forme
monnaie », et pas « monnaie » tout court ? Parce que c’est en réalité une marchandise, nous
dit Marx, qui a pris la forme d’une monnaie, qui a finit par s’imposer, grâce à ses propriétés
physiques (elle est homogène, et peut être à souhait séparée puis refondue), comme équivalent
universel : l’or. Il faut remarquer que, dans le cas de la marchandise-monnaie, la valeur
d’usage devient la forme matérielle de son contraire, la valeur d’échange : la valeur d’usage
de l’or, c’est majoritairement de servir de valeur d’échange
Prix
C’est le nom monétaire de la valeur, qui en est, nous dit Marx, une « représentation
imparfaite ». Pourquoi ?
1/ Parce que, quand une marchandise reçoit un prix, il y a une marge de manœuvre entre le
prix imaginé par le vendeur et le prix que la marchandise va effectivement recevoir sur le
marché
2/ Car, comme l’or est une marchandise déterminée comme toutes les autres par le travail
« cristallisé » en elle, les conditions de sa production affectent sa valeur, et donc les prix
puisqu’il est la marchandise-monnaie, c'est-à-dire l’étalon de l’ensemble des marchandises
3/ Parce que, pour des raisons d’ordre historique, le poids originel et le nom monétaire (livre,
franc, écu) se sont dissociés, et la régulation monétaire fut finalement le fait de l’Etat, qui a
joué un rôle crucial dans le remplacement des marchandises-monnaies métalliques par des
formes symboliques (papier-monnaie, chiffres sur un écran d’ordinateur, etc.). Il faut dire
qu’il est vrai que, des paillettes d’or pour payer sa baguette de pain, c’est ingérable… L’or fut
néanmoins socialement nécessaire jusque dans les années 1970 : les monnaies, au niveau
international, étaient indexées sur lui, jusqu’à ce que des organisations étatiques
internationales (FMI, Banque Mondiale) prennent le relai. Aujourd’hui le système est
purement symbolique, mais pour autant l’ajout de monnaie (en faisant « tourner la planche à
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billets ») ne produit pas de la valeur supplémentaire mais simplement une hausse des prix (il
faut plus de monnaie pour s’approprier telle ou telle marchandise, c’est l’« inflation »).
Circulation monétaire
L’échange, nous dit Marx, produit une duplication de la marchandise en marchandise ET en
marchandise-monnaie. En réalité, l’échange est un processus où la valeur subit non pas 1
changement de forme (M-A-M) mais 2 (A-M puis M-A). Ce sont deux changements de
formes asymétrique – on va échanger du travail privé, particulier, contre du travail social,
universel – et qui peuvent être temporellement disjoint. « La circulation sur en permanence de
l’argent », nous dit Marx, et elle le fait de différentes manières :
1/ Par la thésaurisation, c'est-à-dire par la « nécessité et le désir passionné de ne pas lâcher le
produit de la 1ère métamorphose de la marchandise », sa « chrysalide d’or ».
- « Désir passionné » car, avec de l’or, équivalent universel, on peut tout faire ! La
monnaie tend à faire du travail privé un moyen d’expression du travail social au
départ, mais elle implique aussi que des personnes privées peuvent s’approprier
l’équivalent universel, et surtout l’accumuler : il y a une contradiction entre la limite
quantitative qui s’impose au thésauriseur (qui a toujours une quantité donnée d’argent)
et l’absence de limite qualitative du pouvoir de l’argent (on peut toujours en avoir
plus, et être plus puissant). Le thésauriseur, nous dit Marx, est « plongé dans le destin
de Sisyphe de l’accumulation ». Surtout, comme on le verra plus tard, l’argent ouvre la
possibilité d’une concentration monétaire d’un pouvoir privé et, au final, d’un pouvoir
de classe.
- « Nécessité » car, en temps de crise notamment, mieux vaut avoir de la valeur sous
forme universelle et, parfois, un décalage temporel est obligatoire entre l’achat et la
vente (ex : l’agriculteur qui vend sa marchandise une fois par an, au moment de la
récolte)
2/ Par le crédit (exemple du même agriculteur).
Qu’est-ce que le Capital ?
Capital
Si l’on ne se place pas du point de vue du débiteur mais du créancier, il existe donc un
nouveau cycle, inversé : A-M-A Dès lors, le statut de l’argent, de la représentation de la
valeur, change : ce n’est plus un médium de circulation, c’est la visée et l’objectif de la
situation, la valeur économique commence à avoir une existence autonome. Par ailleurs, s’il
est normal, s’agissant de valeur d’usages, d’échanger des valeurs égales, dans ce type de
processus c’est stupide : transformer 100 € en pizzas pour avoir de nouveau 100 € ça n’a
aucun sens. Ce cycle inversé est en réalité nécessairement A-M-A’ où A<A’. « Le capital »,
nous dit Marx, « apparait lorsque l’argent circule pour rapporter davantage d’argent » : le
capital, c’est avant tout un processus de circulation de la valeur. L’argent n’est pas toujours du
capital : celui qui est sur votre tirelire n’est pas du capital, pas plus que des bijoux de famille
par exemple. Il y a capital quand la valeur devient le sujet d’un processus dans lequel, à
travers ses changements de formes, elle modifie sa grandeur elle-même. Elle « pond des œufs
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d’or ». A-M-A’ c’est la formule la plus simple du processus capitaliste, de n’importe quel
type : capital commercial, capital usurier, capital industriel.
Plus-value / Force de travail
D’où vient cet incrément de valeur ? Marx est d’accord avec les classiques sur un point, c’est
que l’échange n’est pas un gain : même si une escroquerie peut arriver, la perte de l’un
explique peut être le gain de l’autre mais n’explique pas l’augmentation globale de la valeur
produite. La formule du Capital est une contradiction en tant que telle, A-M-A’ est un procès
impossible en soi, car A = M, et M = A’, alors que A ≠ A’. Quelle est la clef de l’énigme ?
Marx nous dit qu’il existe une marchandise connaissant une particularité : sa valeur d’usage
est d’être une source de valeur, sa consommation effective est elle-même objectivation de
valeur (fixation de valeur dans un objet). C’est la « force de travail » : dans le système
capitaliste, le travail lui-même se vend comme une marchandise (d’où l’appellation « force de
travail », et non pas simplement « travail »). La force de travail connait son marché propre, le
marché du travail, et elle a un prix (le « salaire ») qui est le nom monétaire de sa valeur.
Comme toute marchandise donc, la force de travail possède une valeur d’échange (c’est son
prix sur le marché du travail, le « salaire ») et une valeur d’usage (qui est précisément de créer
de la valeur) : Marx nous dit que la différence entre A et A’, le surplus de valeur entre les
deux, vient précisément du fait que le travail est une marchandise dont la valeur d’usage est
de créer plus de valeur que cette marchandise mesurée en temps n’en coûte.
 Ex : un capitaliste emploie un salarié durant 7h pour 9,53*7 = 66,71 €, même s’il créé
durant ces 7 heures de la valeur économique à hauteur de 116,74 € => En réalité, au
bout de 4h le salarié a déjà créé ses 67€ de valeur, et il créé durant les 3h de travail
restante une plus-value de 50 €.
Journée de travail type
Travail nécessaire
0h
Surtravail / Plus-value
4h
7h
Comment est déterminée la valeur d’échange de la force de travail ? De la même manière que
toutes les autres marchandises, nous dit Marx : elle est déterminée par le temps de travail
nécessaire à sa production, c'est-à-dire par le temps de travail nécessaire à la production des
moyens de subsistance, de formation et de reproduction du travailleur. Evidemment, les
« besoins » c’est quelque » chose de social : les besoins ne sont pas les mêmes en fonction des
corps de métiers (un mineur et un cireur de chaussure), et plus généralement en fonction du
climat, de la culture, du degré de développement capitaliste d’un pays, de l’état de la lutte des
classes, etc.
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Rapports sociaux de production / Forces productives
Le Capital, au-delà de ce qu’on a déjà dit, c’est donc avant tout un rapport social de
production : le capital n’existe pas sans l’existence de la force de travail, ils s’engendrent l’un
l’autre. Les rapports sociaux de production c’est la manière dont on s’organise pour produire,
c’est-à-dire la division sociale du travail et ses modalités. Dans le cas des rapports sociaux de
production capitalistes : d’un côté des propriétaires des moyens de production, agent du
processus que Marx nomme le Capital (des « capitalistes » donc) ; de l’autres des personnes
réduites dans l’activité de production à vendre leur travail, produisant de la valeur d’échange
sans avoir de maîtrise sur les valeurs d’usage qu’elles produisent ou non, ou encore sur la
manière dont elles produisent => c’est le prolétariat, c'est-à-dire un groupe dont les membres
sont contraints d’inscrire leur capacité de production de valeur d’usage dans une marchandise
– le CV – qu’il porte sur le marché du travail dans l’espoir qu’un propriétaire les achètera.
Une fois achetée, les forces de travail vont produire des marchandises, et à ce moment-là le
propriétaire lucratif pourra en récupérer la valeur d’échange. Il faut remarquer que les
rapports sociaux sont dépendants de l’état de développement de ce que Marx appelle les
« forces productives » : les forces productives désignent les moyens dont on dispose pour
produire à un instant T, c’est-à-dire à la fois les matières premières naturelles (eau, bois) déjà
travaillées ou non et donc sous forme-marchandise (coton, ciment), les outils (marteaux,
machines) et les techniques et connaissances. Pourquoi y-a-t-il un lien entre certains rapports
sociaux et l’état de développement des forces productives ? Car, pour ne prendre qu’un
exemple, pour que le mode de production féodal du haut moyen-âge, qui repose sur le
servage, existe, il faut que l’agriculture comme technique soit développée (pas de surplus et
donc de « corvées » dans une société de chasseurs-cueilleurs…).
Mode de production
Quand Marx parle de « mode de production », il entend donc un bloc historique formé par une
combinaison particulière des rapports de production et des forces productives. Marx en
distingue plusieurs dans l’histoire : le mode de production « esclavagiste », « féodal », ou
encore, évidemment, « capitaliste ». Il désigne donc de manière générale la façon dont on
produit, dans une société déterminé, ce qu’on a besoin pour vivre.
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