N. Brusadelli - L’économie marxiste
Cercles d’éducation populaire d’Ensemble ! 80 – Novembre 2014
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faisons tous de la marchandise, comme valeur d’usage, n’a rien à voir avec sa valeur, qui est
sociale au plus haut point. Le marché renforce cette impression : dans un supermarché, nous
ne voyons que des marchandises qui s’exposent les unes vis-à-vis des autres, mais nous ne
savons rien des rapports sociaux qui sont en jeu pour produire ces marchandises. Nous ne
savons rien des conditions de production du sucre que nous mettons le matin dans notre café,
nous ne savons rien des conditions de travail de l’ouvrier qui récolte la canne à sucre ou la
betterave. « La valeur », nous dit Marx, « transforme tout produit du travail en hiéroglyphe
social » ; et il ajoute « le rapport social déterminé des hommes entre eux prend pour eux la
forme fantasmagorique d’un rapport entre choses ». C’est ce qu’il nomme le « fétichisme de
la marchandise ».
Forme monnaie
Dans l’acte d’échange le plus simple où une marchandise est confrontée à une autre, c’est à
dire le troc (M-M), il y a toujours nous dit Marx une marchandise désirée pour sa valeur
d’usage et une marchandise qui sert d’étalon pour l’échange. Marx nous explique qu’avec le
développement des rapports marchands et pour leur permettre de se développer davantage, un
« équivalent universel » a vu le jour : la « forme monnaie » (M-A-M). Pourquoi « forme
monnaie », et pas « monnaie » tout court ? Parce que c’est en réalité une marchandise, nous
dit Marx, qui a pris la forme d’une monnaie, qui a finit par s’imposer, grâce à ses propriétés
physiques (elle est homogène, et peut être à souhait séparée puis refondue), comme équivalent
universel : l’or. Il faut remarquer que, dans le cas de la marchandise-monnaie, la valeur
d’usage devient la forme matérielle de son contraire, la valeur d’échange : la valeur d’usage
de l’or, c’est majoritairement de servir de valeur d’échange
Prix
C’est le nom monétaire de la valeur, qui en est, nous dit Marx, une « représentation
imparfaite ». Pourquoi ?
1/ Parce que, quand une marchandise reçoit un prix, il y a une marge de manœuvre entre le
prix imaginé par le vendeur et le prix que la marchandise va effectivement recevoir sur le
marché
2/ Car, comme l’or est une marchandise déterminée comme toutes les autres par le travail
« cristallisé » en elle, les conditions de sa production affectent sa valeur, et donc les prix
puisqu’il est la marchandise-monnaie, c'est-à-dire l’étalon de l’ensemble des marchandises
3/ Parce que, pour des raisons d’ordre historique, le poids originel et le nom monétaire (livre,
franc, écu) se sont dissociés, et la régulation monétaire fut finalement le fait de l’Etat, qui a
joué un rôle crucial dans le remplacement des marchandises-monnaies métalliques par des
formes symboliques (papier-monnaie, chiffres sur un écran d’ordinateur, etc.). Il faut dire
qu’il est vrai que, des paillettes d’or pour payer sa baguette de pain, c’est ingérable… L’or fut
néanmoins socialement nécessaire jusque dans les années 1970 : les monnaies, au niveau
international, étaient indexées sur lui, jusqu’à ce que des organisations étatiques
internationales (FMI, Banque Mondiale) prennent le relai. Aujourd’hui le système est
purement symbolique, mais pour autant l’ajout de monnaie (en faisant « tourner la planche à