Tunisie : la «<i> révolution</i> » à la sauce publicitaire.
Dans la révolution, tout est bon: depuis la chute de Zine El Abidine Ben Ali, les agences de
publicité tunisiennes rivalisent d'imagination et inondent les media de slogans détournés. « En
route pour la liberté
», proclame une marque de voitures française pour vanter un modèle qui vient d'arriver sur le
marché. Un autre constructeur français vante carrément «
la révolution du design
». La chaîne privée Hannibal TV, dont le propriétaire Laarbi Nasra avait été arrêté vingt-quatre
heures "pour haute trahison" le 24 janvier dix jours après la fuite de Ben Ali, s'est offert ces
dernières semaines une campagne de pub pour fêter le sixième anniversaire de «
la voix du peuple
» comme se présente la station, sur fond de photos de manifestants prises durant la révolution.
Mais le secteur qui surfe le plus sur la vague/manne révolutionnaire est incontestablement celui
de la téléphonie mobile et de l'internet. C'est en partie grâce à ces outils qu'en décembre la
révolte a gonflé et s'est transformée en une révolution fatale au régime. Aujourd'hui, retour sur
investissement révolutionnaire, les opérateurs s'offrent de pleines pages et des spots radio à
longueur de journée.
« Dégage ...la vie chère ! »
« Le peuple veut Tunisiana », entend-on sur les ondes. Cet opérateur de téléphonie mobile a
tout simplement détourné un des slogans fétiche après la chute de Ben Ali: "le peuple veut que
le gouvernement dégage". Un concurrent fait passer des pleines pages avec, sur fond rouge,
des silhouettes noires de manifestants, bras en l'air et signes de victoire, brandissant des
pancartes stylisées: « internet libre », « facebook », « twitter ». Et
pour bien montrer que le groupe est sensible à ce qui se passe dans le pays, il a même
régionalisé ses offres promotionnelles: 6 mois d'ADSL gratuits pour les gouvernorats de l'Ouest,
les régions défavorisées d'où est partie la révolution, notamment à Sidi Bouzid avec le suicide
par le feu d'un marchand de légumes le 17 décembre. Les gouvernorats de l'Est, qui faisaient
l'objet de toutes les attentions financières du temps de Ben Ali, n'auront droit qu'à trois mois.
Certains font simple: « la liberté se fête chez Topnet », vante un opérateur. Tel autre recherche
la sophistication et propose un système permettant de lire les codes barres sur des emballages
de produits grâce à « la révolution par la
convergence ».
Visiblement les campagnes de pub essayent de coller aux inquiétudes et aux préoccupations
de la Tunisie post-Ben Ali. Une société de systèmes de sécurité propose des mini caméras de
surveillance en jouant sur la peur: « 8.000 évadés de prison toujours en liberté, la protection n'a
pas de prix!!! ». Et alors que la croissance est quasi nulle
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