Hospital Management La station de travail clinique (KWS): le GPS du moteur économique de l’hôpital en action Entretien avec le Pr Dr Ir Rudi Van de Velde CIO UZ Brussel, VUB L e Pr Dr Ir Rudi Van de Velde, CIO de l’Universitair Ziekenhuis Brussel (UZB), est l’inspirateur de la station de travail clinique, qui mène à bien tous les processus cliniques dans cet hôpital tertiaire très fréquenté. À l’occasion de sa présentation sous le titre de «La Station de Travail Clinique, le “GPS” du moteur économique de l'Hôpital», lors de la conférence Med-e-Tel 2010 au Luxembourg le 15 avril 2010, nous lui avons demandé d’expliquer les rapports entre les principales idées de son invention. HE0284F_2010 De quel point de vue le KWS de l’UZB se distingue-t-il le plus des autres dossiers médicaux électroniques? pour le management, qui doit maintenir constamment l’équilibre entre une santé financière – de l’hôpital en tant qu’entreprise – et la santé des patients. Le KWS gère les flux d’informations des processus clés d’un hôpital, à savoir ceux dans lesquels le patient occupe une place physique centrale, et est examiné, traité et soigné par de nombreux médecins et infirmiers, le personnel paramédical et des techniciens. Seule une bonne orchestration permet d’apporter un peu de quiétude dans ce qui deviendrait rapidement une foire d’empoigne. Au sein de ce chaos, le KWS fournit une partition, les managers donnent la mesure – chacun à son propre niveau et le personnel sur le lieu de travail joue la portée qui lui a été assignée. Cette orchestration se base sur des modules de planification et de commande au niveau de l’hôpital. A chaque activité sont associés des exécutants possibles, des services, des pièces, des appareils et les heures possibles «Les dossiers médicaux électroniques ont connu toute une évolution. Alors que la génération précédente de ces systèmes se basait sur le dossier médical disponible en version papier, comme une documentation passive et post hoc des actes cliniques, les applications modernes, comme le KWS (Klinisch WerkStation) de l’UZB, s’inspirent bien plus de la «dynamique» des processus cliniques et de leur planification proactive. Travailler dans un hôpital, et surtout à l’UZ Brussel avec son service d’urgences trépidant, donne parfois l’impression de «combattre dans une zone de guerre». Peutêtre pas sur le lieu de travail même, où l’on vise à calmer l’activité. Mais d’autant plus 1 z Healthcare Executive • N°53 • 2010 auxquelles elle peut être exécutée. La série d’activités est fixée dans le temps pour chaque patient, en fonction des interdépendances entre les différentes activités. Cela se traduit, dans chaque service, par des agendas et des listes de travail complétés, qui harmonisent, à leur tour, le fonctionnement des services. Et bien entendu, ces processus en cours d’exécution génèrent toutes sortes d’informations qui sont collectées par rapports électroniques, “rich media data” et formulaires électroniques afin de servir de base aux décisions suivantes et donc, à la série suivante d’activités à planifier. A chaque instant, chacun sait ce qui s’est passé, quels en étaient les résultats, quelles sont les conclusions et ce qui est encore planifié. Voilà pourquoi je compare volontiers le KWS de l’UZB à un GPS, plus précisément avec un GPS de la médecine «en action». Si la planification des activités constitue le noyau du KWS, comment se traduit-elle du point de vue technique? «Le KWS est constitué de trois “couches”: la couche utilisateur qui vise un accès utilisateur cohérent et simple, la couche d’application qui assure la cohérence de la logique des différents actes et le stockage de données pour une mise en mémoire permanente et sûre des informations. Cette cohérence offre également l’avantage que grâce à l’uniformité, le cycle de formation de tous les collaborateurs a pu être réduit au maximum. Au sein de cette architecture, une série de composants a été élaborée, qui forment un ensemble logique séparé et qui sont conçus pour s’incorporer parfaitement avec d’autres composants en un ensemble intégré. Nous distinguons ainsi les composants pour le patient, la planification des activités, les commandes, les médicaments, les résultats, les actes médicaux et les actes soignants. Cela signifie que le KWS peut être utilisé simultanément en intégration fondamentale, et de façon modulaire, aussi longtemps qu’il existe un raccord approprié entre les composants du KWS et les applications étrangères au KWS.» Pr Dr Ir Rudi Van de Velde Si le KWS est intégré du point de vue technique et utilisable de façon modulaire, comment cela se traduit-il dans l’organisation des unités de soins? «Il est clair que le «raccord» avec les personnes sur le lieu de travail constitue une “proof of the pudding”, et surtout dans les unités de soins où le travail manuel au service du patient constitue l’activité principale. Le défi est et reste ici d’effectuer l’enregistrement des actes des soignants le plus près possible du patient, sans trop de retards ou de problèmes pratiques. Idéalement, chaque soignant devrait posséder une troisième main pour manier l’ordinateur. Le progrès technologique est incessant, mais jusqu’ici, notre personnel – nonobstant des essais détaillés avec d’autres outils – continue à préférer l’emploi de leurs notebooks familiers, mais bien montés sur des chariots ergonomiques de postes de travail spécialement équipés dans ce but. Il faut dire également que même avant d’avoir installé le premier notebook, nous avions déjà déchargé les unités de soins d’une foule d’activités en automatisant “simplement” la planification dans le reste de l’hôpital. Cela a permis d’éliminer la cascade classique de coups de fil entre les services. Dans ce contexte, ils avaient d’ailleurs déjà besoin d’une troisième main – pour utiliser le téléphone portable. En ce qui concerne la planification des activités soignantes propres, on dispose de la version électronique des grandes feuilles de traitement classiques, avec tous les perfectionnements pour les calculs automatiques comme le bilan hydrique, la planification des prescriptions en différents moments d’administration, et – last but not 2 z Healthcare Executive • N°53 • 2010 least – l’enregistrement des soins mêmes. Cet enregistrement fournit, à son tour, les informations pour le suivi de la charge de travail et pour les dérivations vers le MVG II. Les aperçus de chaque patient, résumés du point de vue problématique médicale et soignante, les notes de jour de chacun qui a traité le patient ou lui a administré des soins, et la série des consultations effectuées ou restant à effectuer forment ensemble le “tableau blanc médical” à partir duquel chaque équipe traite les patients qui lui sont tement une organisation n’ayant pas recours au papier, mais nous avons tout de même remédié à la plupart des problèmes pratiques du travail sur papier dans le gros de l’organisation. Le but ultime n’est pas un mode de travail totalement exempt de papier, mais bien un support maximal du processus de soins. Comme tout le monde a actuellement une vue instantanée du projet passé et futur des patients, avec toute l’information qui découle de ce trajet, et qu’il devient ainsi beaucoup plus aisé de travailler de façon plus dynamique, on peut dire que nous travaillons de façon beaucoup moins “bête” que par le passé. Le défi consiste désormais à travailler de manière “plus intelligente”, à éviter les problèmes avant même qu’ils apparaissent, et à exécuter des optimisations de routine. Nous pouvons éviter les problèmes en regardant littéralement par-dessus l’épaule des médecins et en leur indiquant ce qui pourrait poser un problème. Nous le faisons dès à présent avec l’interaction entre médicaments, et entre autres par le contrôle attribués au cours des différentes rondes. S’y ajoute encore le fait que, du point de vue technique, le dossier médical et le dossier soignant constituent deux représentations différentes de données qui sont gérées par le même composant. Ainsi, l’échange de données est “intégré” dans le système, et pas «collé dessus» comme dans la plupart des autres applications, avec tous les avantages que cela présente. Les médecins peuvent consulter rapidement ce que les soignants ont enregistré, et les instructions des médecins sont intégrées automatiquement dans le contexte médical des actes soignants, ce qui évite des questions superflues à propos de plus amples explications, étant donné que les médecins et les soignants lisent la même “portée” pour chaque patient.» Comment le KWS va-t-il évoluer? «L’UZB est arrivé à un stade où nous ne sommes peut-être pas encore complè- 3 z Healthcare Executive • N°53 • 2010 de la prescription des antibiotiques. Nous étendons actuellement cette surveillance vers d’autres interactions, comme les «panic lab values» et similaires. Les optimisations peuvent être intégrées dans le flux de travail, et donc également dans sa gestion. Sur cette base, nous disposons déjà d’une application pour le support de la fertilisation in vitro (IVF). Nous avons développé dans ce but un véritable système de gestion du flux de travail, fondé sur les grands composants de base du KWS, qui permet de contrôler la complexité opérationnelle des traitements en vue de les piloter avec un meilleur résultat et plus de confort. Ce mode de travail «plus intelligent» ne cessera de devenir plus important avec l’augmentation systématique de la multidisciplinarité des trajets de soins et l’accroissement de la pluripathologie due au vieillissement de la population. Pour conclure, il faut relever également que l’évolution vers une génération ultérieure du KWS est possible uniquement grâce aux fondations solides jetées par la génération actuelle.»