EntrEtiEn avEc FrançoisE du chaxEL
Guy Freixe : Comment t’est venue l’idée
d’écrire cette pièce ? La destinais-tu pour des
enfants de primaire ?
Françoise du Chaxel : Lorsque j’écrivais, il
y a 30 ans, le conte qui est à l’origine de la
pièce La Terre qui ne voulait plus tourner, les
écologistes faisaient gure de doux rêveurs
ou d’oiseaux de mauvais augure. Quelques
voix d’hommes de science ou de conscience
s’élevaient pour donner l’alarme. Celles de
René Dumont, de Michel Serres, de Jean Dorst,
de Pierre Rabhi annonçaient dans l’indifférence
générale la catastrophe à venir. Et nous y voilà.
Aujourd’hui, on ne se moque plus des
écologistes. Même si certains scientiques
mettent en doute le réchauffement annoncé,
la décroissance n’est plus un mot interdit, les
hommes, les femmes surtout, changent de
comportement, sont plus raisonnables que les
politiques.
Alors écrire une pièce qui avec légèreté aborde
ce sujet grave, pourquoi pas ?
L’occasion m’en a été donnée par une commande
de l’Ermitage Lamourous, un lieu exceptionnel,
un foyer école qui, au Pian-Médoc, en Gironde,
accueille des enfants en difculté familiale.
Pour eux, pas question d’écrire un théâtre du
quotidien de l’enfance.
Plutôt une fable moderne qui parlerait
d’aujourd’hui sans parler d’eux précisément,
qui les promènerait entre la Terre et l’Espace,
là où les planètes ont des conversations
mystérieuses, une fantaisie pas tellement
fantaisiste qui les ferait dialoguer avec la
Lune. Un texte qui leur permettrait de dire aux
adultes qu’il n’y a plus de temps à perdre s’ils
veulent leur laisser un monde décent.
J’ai repris ce conte, dont j’avais fait une
première adaptation théâtrale qui ne me
satisfaisait pas et j’ai écrit, pour ces enfants
de Pian-Médoc, bien sûr, mais aussi pour tous
ceux à qui on donne des conseils sans leur
expliquer pourquoi, l’histoire de cette colère
terrible de la Terre
G.F. : Avais-tu, en écrivant, une forme visuelle
en tête ?
F. du C. : Non, je n’avais pas en tête de forme
visuelle précise. Je voyais le spectacle sous
une forme qui pourrait se rapprocher du dessin
animé, rapide et ludique, avec des accessoires
qui situeraient immédiatement la scène sans
qu’il y ait besoin de décor.
G.F. : Pourquoi les scènes s’enchaînent-elles
si vite (une vingtaine de séquences en tout) ?
N’avais-tu pas envie de développer certaines
situations ?
F. du C. : Les scènes sont comme des
instantanés qui laissent aux spectateurs sa
part d’imaginaire pour prolonger la scène, sauf
bien sûr les dialogues entre la Terre et la Lune,
la Terre et Mars qui sont plus longues et plus
posées.
G.F. : Par rapport à notre actualité, la n ne te
paraît-elle pas trop optimiste?
F. du C. : Pour moi la n est ironique. Bien
sûr que je ne suis pas trop optimiste et
que les grandes réunions mondiales sur le
réchauffement climatique ne nous donnent
pas beaucoup de raisons de l’être, par contre
je fais conance à l’intelligence des hommes
qui comme le colibri de Pierre Rahbi sont de
plus en plus conscients que chacun doit faire
sa part.
Carnets pédagogiques, Collection Théâtrales Jeunesse, www.tjeu.fr