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L’ INFECTION A VIH
INTRODUCTION
Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est un rétrovirus. Jusqu’au début des années 80 on ne
connaissait que des rétrovirus infectant les espèces animales (chat, mouton, chèvre, cheval, singes...).
Le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA) fut reconnu en 1981 chez des homosexuels
américains. Par analogie avec les modèles animaux, son origine rétrovirale a été rapidement
suspectée. Le virus en cause, identifié en 1983 à partir de cellules lymphoïdes ganglionnaires d’un
malade, fut d’abord dénommé LAV (Lymphadenopathy Associated Virus) puis, dans un second temps,
VIH. Deux années plus tard, la caractérisation du génome viral permettra de distinguer deux virus
apparentés mais génétiquement distincts : le VIH-1, responsable de l’épidémie mondiale actuelle et le
VIH-2, de moindre virulence, qui reste encore à l’état endémique en Afrique de l’Ouest.
La famille des rétrovirus comprend trois sous familles :
Les lentivirus dont fait partie le VIH
Les oncovirus, ayant la capacité d’induire des pathologies tumorales. Deux virus humains ont
été identifiés :
HTLV1 qui est responsable d’une pathologie tumorale, la leucémie lymphome T de l’adulte et
d’une pathologie neurologique, la paraparésie spastique tropicale
HTLV2 dont la pathogénicité n’est pas encore clairement démontrée
Les spumavirus sont encore considérés comme non pathogènes
Les rétrovirus se caractérisent par leur mode de réplication. Ce sont des virus à ARN (acide
ribonucléique) qui nécessitent une transcription de leur matériel génétique en ADN (acide
désoxyribonucleique) par une enzyme, la reverse transcriptase, avant d’être intégré au génome de la
cellule hôte. La fabrication de nouveaux virions intervient lors de l’activation de la cellule hôte, grâce
aux mécanismes cellulaires de transcription et de synthèse protéique.
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NOTIONS DE VIROLOGIE
Structure du VIH
Le virus apparaît au microscope électronique comme une particule sphérique de 80 à 120 nm de
diamètre.
La particule virale : elle se compose (figure 1) :
D’une membrane d’origine cellulaire portant des glycoprotéines d’enveloppe (Gp 120, Gp 41).
D’une matrice protéique contenant la protéase virale.
D’une capside protéique (P 24) contenant l’ARN génomique viral et deux des principales
enzymes nécessaires aux étapes de réplication du virus, la reverse transcriptase et l’intégrase.
Gp 120 externe reconnaissance du CD4
fusion enveloppe virale -
Gp 41 transmembranaire membrane cellulaire
connection
P 17 matrice protéique enveloppe - nucléocapside
P 24 protéine interne constituant de la capside
ARN génome viral
rétrotranscription
P 51/66 reverse transcriptase ARN en ADN viral
P 32 intégrase intégration du génome VIH
P 11 protéase clivage des polyprotéines
Figure 1 : La particule virale et les fonctions principales des protéines
Le génome du virus : il est composé de deux molécules d’ARN, simple brin, identiques (figure 2) :
Deux gènes codent pour les protéines de structure :
ENV pour les glycoprotéines d’enveloppe : Gp 160 - Gp 120 - Gp 41
GAG pour les protéines de la matrice et de la capside : P 24 - P 17
Un gène POL code pour les enzymes de réplication : reverse transcriptase, intégrase, protéase
Les autres gènes sont impliqués dans la régulation de l’expression et du pouvoir infectieux du
VIH :
VIF et VPU interviennent dans l’assemblage, la stabilité et la maturation des virions
VPR favorise l’intégration de l’ADN génomique viral
TAT est un puissant activateur de la transcription de l’ADN viral
REV favorise la traduction des ARN messager d’origine virale
NEF optimise les chances d’infecter une nouvelle cellule cible et réduit les possibilités de
reconnaissance et destruction d’une cellule infectée par les lymphocytes CD8.
Dénomination
Fonction
3
Enveloppe
Groupe antigène
Polymérase rev
tat
Figure 2 : Le génome du VIH-1
Cycle de réplication
On distingue trois étapes : l’entrée du virus dans la cellule, la phase intracellulaire de transcription du
matériel génétique et de synthèse des constituants viraux, l’assemblage et la sortie des nouvelles
particules virales.
Etape précoce :
La glycoprotéine externe du VIH, la Gp 120, possède un récepteur spécifique qui est la
molécule CD4. Cette molécule antigénique est exprimée à la surface de certaines cellules
participant aux réactions immunitaires. L’interaction entre les deux induit un changement de
conformation de la Gp 120, qui se lie ensuite à un co-récepteur cellulaire. Deux co-récepteurs
principaux du VIH ont été identifiés : la molécule CCR5 qu’utilisent les souches virales à
tropisme macrophagique (M), durant les premières phases de l’infection et la molécule CXCR4
utilisée par les souches à tropisme lymphocytaire (T) durant la phase terminale de la maladie.
La non-expression de la molécule CCR5 (délétion homozygote) confère un rôle protecteur de
la contamination par le VIH.
Cette première interaction permet le démasquage de la Gp 41 et la fusion entre l’enveloppe du
virus et la membrane cellulaire, la capside du VIH pourra alors pénétrer dans le cytoplasme.
Réplication virale (figure 3) :
Phase initiale : après décapsidation, l’ARN génomique viral est libéré dans le cytoplasme
cellulaire, la reverse transcriptase virale transcrit cet ARN en ADN double brin, une autre
enzyme virale, l’intégrase, permet ensuite son intégration au génome de la cellule. L’infection
de la cellule hôte est, dès lors, persistante.
Expression du provirus (ADN viral intégré) : ce sont les enzymes cellulaires qui, sous l’influence
de facteurs d’activation environnementaux (cytokines, antigènes) et viraux propres au VIH,
réalisent la transcription de l’ADN viral. Les fonctions cellulaires sont détournées au profit du
virus. Les éléments structuraux du virion sont synthétisés sous forme de polyprotéines, la
protéase virale réalise leur clivage individualisant ainsi les éléments constitutifs du virus.
Etape finale : l’assemblage des protéines de structure, des protéines enzymatiques et de l’ARN
viral précède le bourgeonnement du néovirion en périphérie de la cellule, englobé par la
membrane cytoplasmique cellulaire. Les particules virales infectieuses sont alors libérées dans
les liquides extracellulaires.
POL
LTR
vpr
vpu
nef
LTR
GAG
ENV
vif
4
Virus molécule CD4 récepteur
Membrane cellulaire
ARN viral
Reverse transcriptase
Cytoplasme
ADN proviral
Intégrase
ADN viral circulaire
ADN ADN proviral intégré
Noyau
Transcription cellulaire
ARN messagers cellulaires
ARN viral traduction traduction
Protéase virale protéase cellulaire
∞∞ ○○○○ · · · · ◉ ⊙ ⊖ gp 120
matrice capside protéase RT int. gp 41
Figure 3 : Cycle de réplication du VIH
Particularité de la rétrotranscription
La reverse transcriptase commet continuellement des erreurs lors de la fabrication de la chaîne d’ADN
à partir de l’ARN viral, elle permet ainsi la coexistence de nombreux variants génomiques. Aucune
réparation de la chaîne d’ADN ne peut se faire, que le génome donne, par la suite, naissance à un
virus viable ou non.
La conséquence de ce phénomène est une extrême variabilité génotypique et phénotypique des
populations virales produites. Lorsqu’elles sont insuffisantes, les pressions exercées contre la
réplication du virus par le système immunitaire ou/et les molécules antirétrovirales, permettent une
sélection puis l’émergence de populations virales mutantes échappant aux mécanismes de contrôle
mis en place.
GAG
GAG POL
ENV
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PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INFECTION A VIH
Les cellules cibles du VIH :
Schématiquement deux catégories de cellules exprimant la molécule CD4 sont infectées par le VIH.
Les lymphocytes CD4+, dits lymphocytes T helper. Ils ont pour fonction de coordonner
l’ensemble des réactions immunes humorales et cellulaires. Ils sont impliqués dans un cycle
hautement réplicatif du virus.
Les cellules présentatrices d’antigènes : tels les monocytes et macrophages, les cellules de
Langhérans, les cellules folliculaires dendritiques ganglionnaires, les cellules microgliales du
système nerveux central. Elles sont impliquées dans un cycle peu réplicatifs et participent à la
diffusion et la dissémination du virus dans l’organisme, elles constituent, entre autres, un pool
réservoir du VIH.
Ces diverses cellules sont présente au sein de tout le système lymphoïde (ganglions, thymus,
intestin...) au niveau de la peau, des muqueuses génitales, du placenta, du cerveau... Leur circulation
est assurée par les voies lymphatiques et sanguines.
Dynamique de la réplication virale :
L’infection par le VIH est chronique et persistante. Grâce aux possibilités de quantification de la
réplication du virus (charge virale), il a été observé qu’après une période d’intense production virale
(primo-infection), il persistait ensuite une réplication continue du VIH, dont l’intensité était inversement
proportionnelle aux capacités de réaction immunitaire de l’hôte (en quantité et en qualité).
Plusieurs millions de particules virales sont produites et détruites chaque jour, l’intensité de cette
réplication virale (charge virale) reflète le nombre de lymphocytes CD4 infectés. En phase chronique
de la maladie, il s’établi un « état d’équilibre », variable suivant les individus, entre la production virale,
la destruction de cellules infectées et le renouvellement de la population lymphocytaire CD4.
Dans le secteur sanguin, on a estimé le taux de lymphocytes infectés à 1 / 1000 en phase
asymptomatique précoce et 1 / 100 en phase symptomatique plus tardive; mais les mesures
sanguines n’explorent que 2 % de la population lymphocytaire totale. C’est dans les organes
lymphoïdes, l’intensité de la réplication virale est 10 à 20 fois supérieure, que se passent l’essentiel
des phénomènes physiopathologiques liés à l’infection à VIH.
Selon le type de cellules infectées, on distingue (figure 4) :
un cycle de réplication rapide de nouveaux lymphocytes CD4+ naïfs activés sont infectés
en permanence, leur demi-vie est appréciée à un jour.
un cycle de réplication lente, le virus infecte des cellules présentatrices d’antigènes à
demi-vie plus longue, de 6 à 25 jours pour les macrophages.
un véritable pool cellulaire réservoir du VIH est représenté par les lymphocytes CD4+
mémoire, hébergeant le virus sous sa forme d’ ADN proviral. Leur demi vie est estimée à
plus de 120 jours pour une population d’un million de cellules ; 40 à 60 ans de blocage
complet de la réplication virale seraient nécessaires à l’élimination de cette population
cellulaire potentiellement infectieuse.
Ce dernier secteur cellulaire est d’importance capitale quant aux possibilités d’éradication du VIH. Les
antirétroviraux actuels n’agissent que sur un virus en réplication. Le système immunitaire ne peut
reconnaître une cellule non activée, n’exprimant pas les antigènes viraux à sa surface. Ces cellules
mémoire hébergent un virus qui est réduit à sa simple expression génomique mais qui conserve
pleinement, à très long terme, son potentiel infectieux.
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