"toubib92" évoquait ainsi le risque de créer la confusion, voire de faire naître l’angoisse chez
certains patients. Ce praticien le signale lui-même, il fait partie de « ces médecins qui luttent
quotidiennement pour ne pas (ou ne plus) être doctes, péremptoires, affirmatifs. Au contraire
je tente d’informer, d’échanger, de rappeler les controverses, de souligner les alternatives, de
lister les complications possibles, de m’adapter au cas par cas…écouter, échanger,
m’adapter… c’est mon crédo ». Néanmoins, cette ligne remarque-t-il n’est pas sans revers. «
Nous provoquons parfois l’anxiété. Nous informons, nous donnons de nombreuses
alternatives, nous laissons le choix final au patient… mais parfois la viscosité mentale
s’installe chez notre patient, "trop d’information tue l’information ", le patient n’a pas le
temps de tout ingérer, intégrer, certains mots que nous avons utilisés sont peut être mal
compris, mal interprétés, sources d’une angoisse que nous ne pouvions soupçonner, et le
reste de notre discours médical ou de notre écrit n’est plus compris, ou n’est plus
enregistré…Que faire ? Revenir en arrière ? Redevenir autoritaire, fermer la porte à toute
discussion, pour préserver le patient d’une angoisse incontrôlable ? Heureux les simples
d’esprit ? La politique de l’autruche ? A mon avis il faut continuer à lutter contre ce
paternalisme mais il faut s’adapter au cas par cas, ne pas faire flamber une angoisse qui peut
être destructrice et contre productive, et surtout, quand c’est possible, dire ce que nous
ferions pour nous même ou pour notre famille, même si le vécu de chacun est différent.
Souvent cette proposition soulage, guide humainement le patient » estimait-il, proposant une
solution que tous sans doute ne reconnaîtront pas comme la meilleure. Certains remarqueront
par ailleurs que le défaut d’informations est plus fréquemment source d’angoisse que leur
profusion.
Explique toujours, tu ne me forces pas !
Comme l’indique le blog "toubib92" , l’une des conséquences d’une attitude "anti
paternaliste" est de redonner au patient le pouvoir de décision, qui lui a souvent été confisqué.
Mais là encore, une telle "doctrine" n’est pas sans comporter quelques effets secondaires.
C’est la blogueuse Jaddo qui le constate dans une récente note. Elle observe combien de « la
décision partagée » idéale, prenant en compte l’ensemble des incertitudes et arguments
médicaux vers une décision univoquement adoptée par le patient reposant principalement sur
des considérations non médicales, la frontière est imperceptible. Jugeant (sans doute trop)
sévèrement sa propre pratique, elle explique son attitude, qu’elle décrit majoritairement en
utilisant le terme de « gentillesse », d’une part par sa propension à « vouloir être aimée » et
d’autre part « par réaction » contre les « médecins autoritaires et paternalistes » dont elle est
« entourée ». Cependant, à la faveur du cas d’un patient qu’elle n’a pas voulu « forcer » à être
hospitalisé et qui lors d’une admission en urgence a frôlé l’amputation, mettant en évidence le
fait qu’une hospitalisation plus précoce aurait été salutaire, elle fait son introspection. « Je me
ré-entends. Avec mes "quand même" et mes "peut-être" , avec mes conditionnels, avec mon
ton de voix qui dit de toutes ses forces : " Non mais c’est vous qui décidez, personne peut
décider à votre place, dites-moi (…)." J’aurais du taper du poing sur la table. J’aurais pu
dire " Non mais là on n’a plus le choix, sinon peut-être on vous coupe le pied ". (…) J’ai pas
voulu l’embêter, et j’ai pas voulu le déranger, et j’ai pensé à sa mère dont personne ne
s’occuperait. J’ai dit "Bon ok, on va essayer les mêmes antibiotiques que la dernière fois. " Et
bien sûr Voltaire et la médecine me donnent raison. Y a neuf fois sur dix où il se trouve que le
patient a guéri tout seul, ou un peu avec moi, où ça s’est pas fini si mal que ça. Mais mon
boulot, (…) c’est d’être sûre. De peut-être hospitaliser neuf types qui en ont pas besoin (…)
pour un type à qui ça va sauver la vie. Et je le fais pas. Je m’endors sur les statistiques, je me
love dans la couette de la vie qui continue malgré moi. Pour qu’on m’aime. Pour qu’on
trouve que j’ai été gentille. (…) Parce que j’ai une idéologie un peu idiote et surtout lâche en