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Mardi 6 janvier 2009
Note au BN
de Mireille LE CORRE, Secrétaire nationale à la santé et à la sécurité sociale
Hôpitaux : situation et réponses politiques
Les deux semaines passées correspondant à la période des fêtes ont été marquées par
plusieurs événements dramatiques à l’hôpital. Sous réserve des éléments qu’apporteront
les différentes enquêtes en cours, la veille de Noël, un petit garçon âgé de trois ans est décédé
à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris : soigné pour une angine, une infirmière lui administre
par erreur du chlorure de magnésium. Deux jours plus tard, un patient de 57 ans en arrêt
cardiaque meurt après une longue recherche d'un lit en réanimation. Un bébé de six mois est
décédé vendredi 2 janvier 2009 à l'hôpital Necker à Paris, après une erreur humaine de réglage
de perfusion. Hier encore, une femme âgée de 82 ans est décédée, apparemment faute de
soins, à Metz.
Pendant cette période, le Parti socialiste - qui avait interpellé le gouvernement avant les
fêtes sur le risque de saturation des urgences - a réagi et communiqué à plusieurs
reprises, notamment sur trois points :
- le soutien aux familles et aux personnels concernés,
- la demande d’enquêtes visant à établir toute la lumière sur ces drames,
- la demande d’une concertation de la Ministre avec les acteurs de la santé et la suspension de
son projet de loi (Hôpital, Patients, Santé, Territoires, HPST).
Il s’agissait de ne pas instrumentaliser de tels drames à des fins qui auraient été perçues
comme politiciennes. Mais nous refusons tout autant que la ministre fasse porter la
responsabilité de ces drames à des seules fautes individuelles ou problèmes
organisationnels avant même de connaître les sultats des enquêtes en cours et en
faisant comme si tout allait très bien par ailleurs dans le meilleur des mondes.
A court terme, suite à la succession des drames récents, et dans une perspective de
grands froids, le Parti socialiste demande que des lits médicaux soient ouverts en
nombre suffisant sur l'ensemble du territoire pour faire face à une éventuelle urgence
sanitaire des plus démunis face au froid. La ministre a la responsabilité d’anticiper cette
situation.
Il convient de porter le débat sur la situation plus globale de crise de l’hôpital public. La
médiatisation récente de ces événements ne doit pas tourner à la remise en cause du rôle
majeur de l’hôpital public, la colonne vertébrale de notre système de santé. Celui-ci assure les
grandes missions de service public (urgences, action sociale, formation, recherche, etc.) et
représente à ce titre une part importante de l’effort de santé. Le Parti socialiste itère son
attachement à l’hôpital public au cœur du système de santé, comme élément
indispensable pour l’égalité d’accès aux soins et pour l’excellence du système de santé.
Il réaffirme sa confiance dans l’efficacité et la qualité de ses personnels.
I - La crise de l’Hôpital est la conséquence des choix politiques de la droite depuis 6 ans.
- La droite a organisé le déficit budgétaire des hôpitaux
La droite n’a de cesse depuis plus de six ans de pénaliser financièrement les établissements
hospitaliers, cherchant à aligner leur gestion et leur méthode de fonctionnement sur ceux des
cliniques privées. C’est ainsi qu’en 2009, l’hôpital va finir l’année comme en 2008, avec un
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déficit de près d’un milliard d’euros. Nous avons affaire à une logique d’étranglement du
service public hospitalier comme en témoigne le contenu même du PLFSS 2009. La droite
organise un plan social déguisé. Le pouvoir fait le choix d’un ONDAM insuffisant pour l’hôpital :
alors qu’entre 1997 et 2002 l’ONDAM pour l’hôpital avait progressé de 3 à 4 % par an avec une
inflation limitée à 1%, aujourd’hui il est de 1 à 2% pour une inflation supérieure.
En conséquence des prévisions de l’ONDAM, 20 000 emplois hospitaliers sont menacés en
2009. C’est presque autant que dans la fonction publique d’Etat. La droite se situe dans sa
logique du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, alors qu’elle avait annoncé que le
secteur de la santé devait être épargné. Cette tendance s’appuie sur des fermetures de lit, des
suppressions d’établissement et une précarité salariale fondée sur le recours systématique aux
emplois contractuels. Il appartient localement à tous les élus socialistes d’envisager les
coordinations nécessaires et les concertations utiles pour faire face à cette logique de
suppression d’emplois publics. Une réflexion en ce sens sera menée. Ce plan social déguisé
est une faute au regard de la santé publique et une erreur majeure de politique économique.
- Un mode de financement de l’activité aux effets pervers manifestes
La réforme de la tarification hospitalière est fondée sur l’activité. Si elle était fondée sur une
meilleure connaissance et transparence de l’activité des établissements, elle a cependant
montré dans son application l’étendue de ses effets pervers : inflation de certains actes,
sélection des malades et des pathologies sur des critères de rentabilité financière, pénalisation
du secteur public par rapport aux cliniques privées, mauvaise rémunération des missions
propres de l’hôpital public (missions d’intérêt général, prise en compte de tous les patients y
compris les plus précaires, rôle de continuité des soins dans certains territoires, spécificités des
CHU, prise en charge globale du patient, etc.).
- Une absence de gestion des ressources humaines et du temps de travail
Il faut rappeler que l’application des 35h à l’hôpital est intervenue concomitamment avec la
directive européenne sur les temps de garde des médecins, ce qui - bien que légitime - a
engendré des difficultés. Concernant les heures supplémentaires à l’hôpital, en 2007, on
compte 23 millions d'heures supplémentaires impayées et 3,5 millions de jours de congés
accumulés dans des Comptes Epargne Temps (CET) par l'ensemble des salariés de l'hôpital.
Les personnels hospitaliers ne sont pas rémunérés pour l’intégralité des heures travaillées. En
sous-effectifs, ils doivent accumuler les heures pour répondre au devoir de service public et ne
peuvent pas prendre les congés dus et mérités. En janvier 2008, le gouvernement a déclaré
pouvoir prélever 348,5 millions d’euros au Fond pour l'emploi hospitalier, et a demandé aux
hôpitaux un effort de 324 millions. Le compte n’y était absolument pas. Le pouvoir semble
méconnaître la détresse financière des hôpitaux publics qui sont incapables d’exécuter cette
injonction, et connaissent un déficit de près d’un milliard d’euros au terme de l’année 2008.
- Les problèmes de démographie médicale ne sont pas traités avec anticipation.
Il existe un manque de personnel médical, auquel on remédie par l’emploi de médecins
étrangers sous-payés, alors qu’il s’agit souvent de médecins confirmés dans leur pays et qu’ils
contribuent grandement au fonctionnement de nos hôpitaux. A court terme, un grand nombre
de médecins va partir à la retraite et on peut craindre une période creuse que l’augmentation du
numerus clausus ne comble pas. Le manque de personnels se vérifie à tous les niveaux, en
particulier pour les infirmiers. De 1997 à 2002, le nombre de postes infirmiers a été augmenté
de 70% alors qu’il était en baisse sur la période antérieure.
- Une remise en cause de la permanence des soins
La droite semble s’étonner aujourd’hui des problèmes de permanence des soins alors que c’est
elle qui a supprimé les obligations des médecins en la matière avec la réforme Mattei de 2003,
sans prévoir de système de substitution.
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Les missions dévolues à la médecine de ville ont été abandonnées, avec la mauvaise
coordination des soins, les dépassements d’honoraires et la faiblesse des moyens humains et
financiers. Les dépassements d’honoraires ont flambé ces dernières années (2 milliards d’euros
en 2007). Il est impossible d’accéder à certaines spécialités en secteur 1 dans de nombreux
endroits. Le libre choix, principe de la médecine libérale, n’est plus possible sur une partie du
territoire français car la médecine à honoraires strictement conventionnels a disparu. Les
dépassements d’honoraires autorisés ou sauvages minent le principe de l’accès aux soins pour
tous.
- Une carte hospitalière masquée
De deux choses l’une : soit la ministre a une carte hospitalière dans ses tiroirs et elle doit alors
la dévoiler par transparence vis-à-vis de la population et des élus, soit elle n’en pas et navigue
donc à vue. Pour les socialistes, les principes d’égalité territoriale et de péréquation doivent
êtres scrupuleusement respectés.
II - Le projet de loi Bachelot - HPST va aggraver la situation de l’hôpital
La réforme hospitalière présente le risque majeur de dérive vers un hôpital
« entreprise ». Les objectifs économiques, s’ils ne doivent pas être négligés, ne peuvent
prévaloir sur les objectifs de santé publique et d’égalité d’accès aux soins.
Dans une période de juste et nécessaire retour de la puissance publique dans la vie
économique et sociale, il serait pour le moins paradoxal d’assister à une privatisation rampante
de l’hôpital public. L’Etat doit au contraire conforter son rôle de service public indispensable et
de pôle d’excellence. Nos inquiétudes sont d’autant plus fortes que la politique suivie depuis 18
mois par la droite est marquée par de nombreuses attaques contre la santé, avec notamment
l’instauration des franchises médicales, une tentative de destruction de l’hôpital psychiatrique et
le désengagement de l’Etat dans la prise en charge des personnes âgées et en matière de
santé publique.
Très concrètement, s’agissant de l’hôpital, cette logique de privatisation se traduit dans le projet
de loi HPST par notamment :
- la redéfinition des missions de service public hospitalier avec la participation indifférenciée des
cliniques privées
- une gouvernance de l’hôpital calquée sur le modèle de l’entreprise (directeur, directoire,
conseil de surveillance) et ce sans démocratie sociale, sanitaire et locale (place des élus, des
professionnels et syndicats remise en cause)
- le développement de la rémunération individualisée des praticiens hospitaliers
- le regroupement des établissements dans une logique purement économique
- aucune recette budgétaire nouvelle pour financer les besoins du service public.
III - Propositions : une alternative de gauche pour l’hôpital
- Le Parti socialiste refuse le plan social engagé par le gouvernement et ses déclinaisons
sur les territoires. Nous devons exiger le retrait du projet de loi et une concertation réelle
avec les professionnels pour tirer les conséquences de la situation de crise actuelle vécue très
difficilement par les personnels et plus globalement par la population.
- Le Parti socialiste prendra l’initiative d’une concertation avec tous les acteurs soucieux de
l’avenir de notre hôpital public et proposera un plan de sauvegarde de l’hôpital, alternatif au
projet de loi HPST, en poursuivant les objectifs fondamentaux de l’égal accès aux soins pour
tous et de la préservation et l’amélioration de l’hôpital public au cœur de l’excellence du
système de santé.
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- D’ores et déjà, les pistes suivantes existent et doivent être soulignées :
1 - Des marges de financements existent pour la santé (sécurité sociale et assurance
maladie) :
- Les niches sociales représentent, en 2008, 41 milliards d’euros : un réexamen de leur bien-
fondé s’impose. Par ailleurs, les niches fiscales représentent 75 milliards d’euros, soit au total
près de 115 milliards d’euros.
- La loi TEPA concernant les heures supplémentaires coûte aux finances publiques 5,5 milliards
d’euros ; elle détruit en outre des emplois au moment le chômage s’accroît et contribue ainsi
à la décélération de la masse salariale globale.
- La Cour des Comptes a souligné que la non-taxation des stock-options et des parachutes
dorés représente un manque à gagner de 3,5 milliards.
- Le dossier de la progressivité des cotisations sociales au travers notamment de l’éventuelle
fusion impôt sur le revenu / CSG doit être réouvert.
2 - Un autre financement de l’hôpital est à rechercher :
- Il manque 800 millions d’euros aux hôpitaux publics alors que les restitutions liées à
l’application du bouclier fiscal, qui ne concernent que les plus fortunés des Français,
représentent plus de 500 millions d’euros. Il faut envisager un plan d’apurement de la dette
des hôpitaux publics.
- Il convient par ailleurs d’envisager un mode de financement plus intelligent des
hôpitaux, afin de revenir sur les effets pervers de la tarification à l’activité et des critères
conduisant à une recherche systématique de rentabilité.
3 - Il faut conforter le rôle de l’hôpital public avec une organisation adaptée aux besoins,
et non pas dictée par la pénurie supposée et organisée des moyens.
En réponse tant au contenu du projet de loi qu’aux problèmes mis en exergue par les
événements dramatiques, le Parti socialiste propose de :
- Renforcer la démocratie sanitaire et sociale (élus, professionnels, associations de patients)
- Respecter les droits des malades, notamment en termes d’information
- Maintenir et améliorer le maillage territorial : nous devons refuser de déshabiller l’hôpital public
sous prétexte - souvent plus supposé qu’avéré - de sécurité sanitaire, et organiser la
coopération plutôt que la concurrence entre établissements
- Reconnaître et valoriser le travail des professionnels (autre mode de rémunération des
praticiens hospitaliers, tenant compte de la pénibilité et des conditions de travail ;
reconnaissance du travail des infirmières en commençant par l’équivalence légitime de leur
diplôme à bac+3.)
- Mettre en place une vraie politique de formation continue, sans laquelle les erreurs peuvent se
multiplier
- Maintenir le réseau des SAMU et SMUR au plus près des patients, en refusant l’idée implicite
de la ministre sur une régionalisation des SAMU.
-Rechercher des solutions relatives à l’organisation globale des soins et à la coopération avec
la médecine de ville.
Ce plan de sauvegarde poursuivra les objectifs de l’égal accès aux soins pour tous et de la
préservation de l’hôpital public au cœur de l’excellence du système de santé. Il s’inscrira aussi
pleinement dans nos réflexions sur le plan de relance dans son volet relatif aux services
publics.
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