Le processus de création publicitaire
La thématique de la publicité, les images qu’elle donne de la réalité (femme, famille,
homme, travail, nature, etc.) sont souvent considérées comme représentatives des
tendances de l’époque. Mais est-ce la réalité qui est montrée ou un désir qui est
projeté? C’est toute l’ambiguïté du discours de la publicité, et la plupart des critiques qui
lui sont adressées dénoncent précisément cet aspect irréel des représentations qu’elle
suggère. Réductrice par nature (le message publicitaire est court et frappant), elle
provoquerait un affadissement, une banalisation des valeurs. Elle véhiculerait une
mythologie frustrante de paradis inaccessibles (F. Brune, 1981). Vendant du rêve, elle
produirait frustration et aliénation, et conforterait les conditionnements sociaux, et en
particulier les rôles féminins. Sous couvert de libérer les femmes en transformant les
tâches ménagères quotidiennes en parties de plaisir, et en leur permettant d’accéder à
tout ce qui peut accroître leur charme, elle contribuerait à maintenir les stéréotypes
sociaux: à l’homme l’action, le dynamisme, la puissance, la technologie, à la femme le
ménage, la cuisine, la nécessité d’être parfaite en toutes circonstances. D’autres voient
dans la publicité un dérivatif, une nouvelle forme d’expression, souvent admirée pour
son esthétique, son originalité, sa poésie ou son charme, etc.
Sa rhétorique est donc adaptée, d’une part, aux objectifs qu’elle s’assigne, d’autre part,
aux conditions de sa visibilité: taille de l’annonce, durée, rapports de l’image et du texte,
du texte et du son. Subjective, elle va jouer sur les sentiments, l’affectif, voire
l’irrationnel. «La véritable nature de la publicité est la séduction, son domaine premier
celui des objets, son système celui de la compétition...» (B. Brochant, 1989).
Sur le plan de l’argumentaire, le message publicitaire repose sur trois éléments.
L’apprentissage, d’abord (étape cognitive): le consommateur potentiel doit savoir de
quoi il est question; l’intérêt, ensuite (étape affective): le futur consommateur doit s’y
intéresser; l’action, enfin (étape comportementale): il doit acheter le produit. Mais le
message, quand il est reçu, est aussi très vite oublié. Le produit lui-même peut être
victime de l’oubli, d’où la répétition des messages et l’importance accordée au choix de
la durée d’exposition, donc à celle de la campagne de publicité: il faut que le plus rétif
apprenne malgré lui.
Il semble qu’aujourd’hui le problème soit moins d’être favorable ou hostile à la publicité
que de porter une attention particulière à ses contenus, aux messages qu’elle véhicule,
aux dérives de ses discours qui pénètrent désormais des secteurs de plus en plus
larges de la vie sociale et surtout de la vie politique. Il est vrai qu’il ne s’agit plus ici de
publicité, mais de communication ; mais ce sont pourtant les mêmes agences qui créent
les messages publicitaires des lessives et qui prennent en charge les campagnes
électorales des hommes politiques, même si interviennent dans le second cas des
spécialistes de la communication politique! Le champ ouvert à ces derniers est en effet
devenu particulièrement vaste en raison du rythme des échéances électorales et,
surtout, des lois de décentralisation qui, en transférant aux collectivités locales et
territoriales une partie des compétences de l’État, ont amené les équipes dirigeantes à
utiliser médias et techniques de communication pour faire connaître aussi bien leurs
décisions, leurs réalisations que leurs opinions.
Pour répondre aux critiques et marquer son ancrage dans la vie sociale et culturelle, la
publicité organise sa propre promotion. Elle tient sur elle-même un discours de
légitimation dans le but de faire oublier sa fonction commerciale. Les publicitaires