Ni l`EEG ni le scanner n`ont d`intérêt en l`absence de signes

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SYNDROMES DEPRESSIFS
I DEFINITIONS :
Je reprendrai ici les termes de la CIM X, proche du DSM IV.
Le patient présente, tous les jours ou toute la journée, de manière durable,
c’est à dire plus de quinze jours :
Une humeur dépressive, pratiquement toute la journée, ou, chez l’enfant
une irritabilité.
Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir durable.
Une baisse de l’énergie avec fatigabilité importante.
D’autres symptômes sont souvent associés :
1. Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer.
2. Perte de l’estime de soi et de la confiance en soi.
3. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive, inappropriée (jusqu’au
délire).
4. Attitude morose et pessimiste face à l’avenir.
5. Pensées de mort récurrentes, idées suicidaires récurrentes.
6. Perte ou gain de poids significatif en l’absence de régime, par exemple +/- 5% en
un mois. Perte de l’appétit.
7. Insomnie ou hypersomnie.
On parle de dépression majeure si 4 au moins des symptômes parmi les sept
dessus pour la CIM X (ou 5 symptômes parmi les 9 nécessaires au diagnostic de
dépression pour le DSM IV TR sont présents pendant deux semaines).
Il faut remarquer que la dépression est un syndrome, c’est à dire une
association de symptômes mais qu’elle ne constitue pas une structure. On peut
parler de structure (ou de personnalité) névrotique ou psychotique, traduisant le
fonctionnement inconscient (ou préconscient) du sujet. Sur ces structures de base
peut se développer une dépression, mais aussi d’autres troubles psychiatriques ou…
rien du tout !
II EPIDEMIOLOGIE :
Pour D. ROUILLON, dans une méta analyse :
La prévalence des états dépressifs dans une consultation de médecine
générale serait de 15 à 25 % (GATSPAR 1979).
En psychiatrie libérale, elle atteindrait 50 à 75 % des individus consultants,
INSERM 1982.
Elle représenterait 15 % des hommes et 6 % des femmes hospitalisées en
psychiatrie (idem).
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Très grossièrement, si l’on compare des choses incomparables car
susceptibles de se superposer ou de s’associer, il s’agit du troisième plus fréquent
des troubles mentaux, derrière les troubles névrotiques et apparentés, les addictions,
mais devant la schizophrénie.
Sur le plan qualitatif il existerait une prédominance féminine marquée
(BROWN et HARRIS, 1978). On note plutôt une atteinte précoce chez la femme, plus
tardive chez l’homme (après 40 ans).
Par ailleurs le diagnostic même de dépression ne garantit pas un traitement
adapté ! Dans une étude de Myers-Thomas en 1981 auprès de populations de
médecine générale, 17,2 % à peine des patients dépressifs prennent des
antidépresseurs, 19 % des anxiolytiques, ce dernier traitement n’étant pas plus
adapté que l’abstention thérapeutique.
III NOSOGRAPHIE :
31 Classification française :
C’est la classification classique des vieux livres, elle paraît peu valide à ce
jour.
Dépressions endogènes, sans facteur déclenchant évident, auxquelles
se rattachent les dépressions dans le cadre de troubles uni- ou
bipolaires, ainsi que la dépression d’involution du sujet âgé.
Dépressions névrotiques et/ou réactionnelles : elles sont en continuité
avec une fragilité suppose de la personne, inscrite dans sa personnalité
en quelque sorte. Elles sont secondaires à des modifications de
l’environnement qui ont débordé les défenses névrotiques du sujet.
Dépressions secondaires, dans certaines addictions ou troubles
somatiques, surtout endocriniens.
32 CIM X :
Pour ce qui est de la CIM X, elle apparaît dans la rubrique « troubles de
l’humeur (affectifs) », de F30 à 39, qui comprennent :
Les épisodes maniaques (F30), étudiés en deuxième année.
Les troubles bipolaires (F31), étudiés en deuxième année.
Les épisodes dépressifs (F32) : légers (32.0), moyens (32.1) sévères
(32.2 et 32.3, selon qu’il existe ou non des symptômes psychotiques associés),
les autres épisodes dépressifs (32.8) et les troubles dépressifs non spécifiés
(32.9).
Les troubles dépressifs récurrents (F33), légers (F33.0), moyens
(F33.1), vères, (F33.2 et 33.3), en rémission (33.4), les autres épisodes
dépressifs récurrents (33.8) et les troubles dépressifs récurrents non spécifiés
(33.9).
Troubles de l’humeur persistants (F34), à savoir principalement les
cyclothymies (F34.0), étudiés l’an prochain, et les dysthymies (F34.1).
Les troubles de l’humeur dus à une affection médicale générale
(F06.32) ou à une substance (F1-.—selon les substances et le mode d’action,
intoxication aiguë, sevrage, trouble résiduel…).
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On peut remarquer que le DSM IV est, plus facile d’utilisation dans ce cas, en
particulier pour les dépressions « secondaires ». En tant que syndrome la dépression
trouve sa place légitime sur l’axe 1 du DSMIV-TR, sous le chapitre général troubles
de l’humeur .
IV DIAGNOSTIC :
41 Clinique :
Facile ! Il suffit de connaître la définition, strictement clinique, et le tour est
joué !
42 Echelles D’évaluation :
Elles visualisent un moment de la vie du déprimé mais leur intérêt diagnostic
reste limité, elles n’ont d’intérêt réel que pharmacologique ou épidémiologique.
Citons par exemple les échelles globales d’HAMILTON (1969), de MONTGOMERY
(1979), la MADRS ou la HARD (1983).
La seule échelle spécifique validée est l’échelle de ralentissement de
WILDLOCHER.
Les échelles de BECK (1978) sont des échelles utilisées dans les thérapies
cognitives afin d’apprécier la profondeur subjective de la dépression.
43 Paraclinique :
Biologie :
Plusieurs tests sont classiques, par exemple de freination à la
déxamethasone, on dose le cortisol après administration de cette substance (cf. test
à la TRH). Celui-ci reste élevé. Le test est en fait peu sensible et ne permet pas en
fait de distinguer les troubles bipolaires des dépressions majeures non liées à des
troubles bipolaires.
La sérotonine dans les plaquettes est élevée, on note par ailleurs une baisse
de la dopamine et de la noradrénaline.
En fait, il n’existe pas de marqueurs fiables, tous sont inconstants pendant la
dépression et n’ont pas de valeur prédictive chez le sujet sain, à l’exception peut-être
du dosage du 5HTIA dans le LCR, qui pourrait prédisposer pour certains passages à
l’acte, auto ou hétéro agressifs, plus que des troubles de l’humeur.
Enfin, tous ces dosages n’ont pas de valeur prédictive quant à l’efficacité
thérapeutique.
Imagerie :
Ni l’EEG ni le scanner n’ont d’intérêt en l’absence de signes neurologiques
associés. Le PET-scanner est utilisé à visée de connaissance de la maladie ou de
l’impact des traitements mais il n’est pas de pratique courante.
EN DEFINITIVE LE DIAGNOSTIC DE LA DEPRESSION EST CLINIQUE.
V FORMES CLINIQUES :
51 La Mélancolie :
511 Historique :
D’HIPPOCRATE à ESQUIROL la mélancolie recouvre un ensemble disparate
d’entités intégré depuis KRAEPPELIN dans les maladies maniaco-dépressives. Au
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cours du vingtième siècle elle a pris une importance particulière en tant que
paradigme des dépressions majeures mais a disparu dans le même temps des DSM
successifs.
512 Clinique :
Elle touche des individus de tout âge, souvent en l’absence de facteurs
déclenchant, parfois au décours d’un accès maniaque (inversion de l’humeur) et
débute très progressivement sur plusieurs semaines ou mois par une asthénie, des
céphalées, une diminution du rendement à prédominance matinale.
En phase d’état le patient est figé, immobile.
Il présente une inhibition et une aboulie chez un sujet qui s’abandonne à
l’inertie. L’idéation est lente, tout effort mental est difficile sinon impossible.
La perception du monde extérieur est perturbée, le contact avec autrui est
paralysé par un mutisme d’intensité variable.
Sa tristesse est monotone, résistante aux sollicitations externes. Il se déprécie
fortement dans tous les domaines (physique, psychique ou moral). L’asthénie est
massive avec un pessimisme diffus, des idées de ruine ou d’indignité, des
thématiques hypochondriaques et d’incurabilité. Tous ces derniers éléments peuvent
devenir franchement délirants.
Le risque suicidaire est constant la mort est vécu comme la seule issue
possible, un juste châtiment pour le patient, voire pour ses proches (suicides
altruistes, que l’on retrouve aussi dans la paranoïa).
Le suicide peut survenir dès la phase prodromique jusqu’à la convalescence,
sous une forme réfléchie ou un raptus anxieux. Il a souvent lieu au petit matin. La
mortalité étant élevée chez le sujet âgé surtout de sexe masculin (33 % des TS se
terminent par la mort) elle serait responsable du décès dans 1,6 % des mélancolies.
Il existe des troubles du sommeil avec des réveils nocturnes, en particulier en
deuxième partie de nuit, plus rarement sont décrites des hypersomnies refuge. Dans
tous les cas, le sommeil n’est pas réparateur. De manière conjointe on note une
anorexie, une baisse de libido ou des aménorrhées. Les plaintes somatiques sont
multiples, sans substratum organique patent.
En l’absence de traitement les troubles régressent en quelques mois, avec en
premier lieu le retour du sommeil et de l’appétit, enfin on assiste à un retour du poids.
Certaines évoluent vers la chronicité, surtout chez le sujet âgé, avec des éléments
délirants et une aggravation du déclin cognitif (dépression dite « d’involution »). Des
études récentes montreraient que 50 % des pressions majeures rechutent à cinq
ans et que 30 % de ces individus sont susceptibles de devenir des déprimés
chroniques (Pakriev, 2001 et Mueller, 1999).
Pour certains auteurs allemands, en particulier issus de la tradition
philosophique phénoménologique du XIXème (BINSWANGER ou TELLENBACH), il
existerait entre ces épisodes dépressifs des troubles de la personnalité, le typus
mélancolicus.
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513 Variantes sémiologiques :
La mélancolie stuporeuse avec une inhibition massive, le sujet est figé avec
une mimique imprégnée de tristesse intense, l’ mélancolique.
La mélancolie anxieuse, avec une agitation stérile, voire un état de panique
intense, le risque consiste ici en une TS non préméditée, brutale et définitive ! On
la retrouve en particulier chez le sujet âgé avec une participation confuse.
La mélancolie délirante : le délire est au premier plan, avec des thèmes
monotones à tonalité affective pénible, pauvres en constructions intellectuelles, le
sujet est pris dans une fatalité accablante, centrifuge (dans un premier temps le sujet
est « foutu », puis ses proches voire le monde entier va disparaître dans une
apocalypse). Le sujet se sent coupable et attend son châtiment, il est ruiné et est
certain de mourir, les éléments hypochondriaques vont jusqu’à la négation d’organe.
Des thèmes d’influence, de possession peuvent compléter le tableau. Il s’agit d’une
expérience délirante de l’angoisse mélancolique, avec pour mécanismes des
interprétations, des intuitions, plus rarement des hallucinations. Le lire est
constamment congruent à l’humeur. Pour information l’association damnation-délire
d’immortalité-négation d’organes forme le syndrome de COTARD.
On parle d’épisode dépressif majeur récurrent s’il existe au moins deux
épisodes séparés d’un intervalle d’au moins deux mois sans que ce diagnostic ne
puisse être porté. Il est dit saisonnier s’il existe une relation temporelle régulière entre
la survenue des épisodes dépressifs et une période particulière de l’année. Les
périodes de rémission sont alors aussi saisonnières.
On parle d’épisode dépressif du post-partum s’il survient dans les quatre
semaines qui suivent l’accouchement, il s’agit le plus souvent d’une aggravation du
post-partum blues du troisième jour.
Les états mixtes, associant dépression et manie, c’est à dire un état
d’excitation psychomotrice avec exaltation de l’humeur.
52 les dépressions névrotiques et réactionnelles (dysthymies ?) :
521 Clinique :
En règle générale elles surviennent à la suite d’une perte d’objet.
L’anxiété est intense, teintée par les éléments névrotiques sous-jacents. Le
discours dépressif paraît cohérent et rapporté à une cause apparente.
L’autoaccusation existe mais paraît sensible au réconfort d’autrui, avec une quête
affective intense. L’asthénie psychique et physique serait plutôt à prédominance
vespérale, aggravée par le moindre effort avec un sentiment d’impuissance parfois
déplacé sur l’équipe médicale. L’avidité affective peut devenir tyrannique, voire
agressive.
Le risque suicidaire existe, mais les TS sont plus nombreuses que les
suicides.
Les somatisations sont marquées.
La pathologie évolue de manière fluctuante, réfractaire souvent aux
psychotropes et classiquement plus sensible aux psychothérapies. Les améliorations
sont aussi rapides que fragiles. Après deux d’évolution continue, on parle de
dépression chronique, elle toucherait selon AKISKAL 12 à 15 % des sujets. Ces
pathologies rentrent alors dans ce que le DSM IV appelle les « dysthymies ».
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