lien de ces groupes. Bref, c’est un sentiment de forme sociale, au lieu du seul à seul que
l’individualisme voudrait entretenir ou imposer.
En droit maintenant, si nous demandons raison au sentiment religieux de cette tendance
presque violente, nous ne serons pas embarrassés pour répondre.
Pourquoi, en général, sommes-nous des êtres sociaux? C’est, disions-nous, parce que
nous ne sommes au complet que par d’autres, et que nous ne pouvons aboutir que
par d’autres. La nature nous pousse à être et à faire plus que nous ne pouvons faire par
nous-mêmes, et cet instinct nous met en société. Or, cette raison est la même, au fond,
que celle invoquée par nous quand nous demandions pourquoi nous sommes des êtres
religieux.
Tout ce que nous avons dit des sources du fait religieux peut se résumer ainsi : nous
voulons être et nous ne sommes pas, nous voulons vivre et nous ne vivons pas, nous
voulons savoir et nous ne savons pas, nous voulons pouvoir et nous ne pouvons pas,
nous voulons être heureux et nous ne sommes pas en dehors d’un surcroît divin, et
ce surcroît nous le cherchons dans la vie religieuse.
Le raisonnement est donc le même ici et là. Notre vie sociale nous permet d’être
énormément plus que nous ne le pourrions par nous-mêmes; la vie religieuse nous permet
d’aboutir infiniment plus. Notre nature est ainsi bâtie. Nous ne pouvons vivre la vie
sociale que si elle s’achève en vie religieuse. - en quoi la «société laïque» est une
erreur anthropologique (à moins qu’on nie l’objet religieux) – ni davantage nous ne
pouvons vivre la vie religieuse sans qu’elle devienne une vie sociale.
Le cas s’éclaire d’ailleurs, quand on distingue les deux aspects fondamentaux de la vie
sociale tels que nous les rappelions il y a un instant…
Être par autrui plus que nous ne pouvons être à nous seuls : tel est le premier. Or, si
les autres hommes nous complètent aux points de vue temporels, a fortiori nous
complètent-ils en tant que nous sommes en rapport avec notre source commune.
Plus un rapport est fondamental, moins il a de chance de nous diviser, plus il doit nous
unir. Plus nous allons au fond de nous-mêmes, plus nous sentons de fraternité avant tout.
C’est pour cela que tous les hommes religieux ont requis plus ou moins, pour s’élever à
Dieu, la collaboration de la nature. Lire à cet effet la vie de nombreux saints.
Saint François demandait aux oiseaux, aux poissons, à son frère le Soleil, à sa sœur la
Lune, aux cascades des forêts et aux brises gémissantes de pleurer avec lui la Passion du
Christ, ou de prier et de louer avec lui l’Éternel.
On comprend aussi d’autant mieux que lui et tous les saints, tous les hommes religieux
dans la mesure où ils sont religieux, aient été des apôtres. Des apôtres, c’est-à-dire des
conquérants spirituels, des hommes qui ne peuvent tenir en place tant qu’ils n’ont pas