Le premier mouvement du texte est donc un dialogue disproportionné entre Silvia et
Dorante. Mais on peut remarquer que si les répliques de Silvia sont très longues, elles
témoignent en même temps d’une grande confusion de son esprit alors que celles de Dorante
qui se résument à peu de mots sont au contraire très claires. Il ne se cache pas derrière un flot
de paroles, il affirme la souffrance que lui procure ses sentiments pour Silvia.
Dans le 2ème mouvement, Silvia refuse de s’arrêter au message que Dorante tente de
lui transmettre. Elle essaye de clore le plan des états d’âme par « venons à ce que tu voulais
me dire » (l.26) . En changeant de sujet , elle s’éloigne du danger que représente son combat
intérieur. Elle s'efforce d’effacer ce qui vient de se passer en ramenant le dialogue à la 1ère
réplique de la scène en formant une boucle, pour revenir à 0. On voit là aussi le manque de
cohérence de Silvia car elle demande à Dorante de lui parler de quelque chose qu’elle avait
tenté d’éluder par des digressions dans la 1ère partie de la scène ; mais surtout elle avait
exprimer le souhait qu’il ne lui parle plus dans sa dernière tirade.
Dorante ne répond pas à ses attentes, il ne veut pas revenir à la raison et il continue à
se déclarer sans vraiment le faire. « un rien, une bagatelle » (l.28) à l’initiale de la réplique
suivi « d’un prétexte » (l.29) à la fin mettent en relief « l’envie » (l.28) . Cette envie est plus
forte que tout, incontrôlable puisqu’elle utilise des subterfuges pour parvenir à ses fins. En
même temps, Dorante met en parallèle ce « rien , cette bagatelle » avec « l’envie de te voir »
(l.28) comme pour minimiser ce besoin. Et il continue dans cette voie en se mettant à parler
de leurs maîtres respectifs comme pour mieux relativiser la portée de ses sentiments.
Pendant ce temps, en aparté, Silvia fait un aveu de son impuissance en s’avouant pour
elle-même et malgré elle ses sentiments pour Dorante. En effet, « quand je m’en fâcherais, il
n’en serait ni plus ni moins » (l.30) nous dit-elle. Elle est consciente que quoiqu’elle dise ou
fasse, elle n’est pas maîtresse de ses sentiments et encore moins de ceux de Dorante.
En insistant sur le « ta maîtresse » (l.32) à l’initiale de sa réplique celui-ci met, ou
croit mettre une certaine distance entre eux.
Silvia profite du prétexte qu’ il lui fournit en parlant de leurs pseudo maîtres
respectifs pour répliquer.
Dans ces deux répliques on note que leur discours est équilibré ; ceci est du au fait
qu’il est moins empreint de subjectivité.
Dorante se moque bien de leurs pseudo maîtres respectifs. Il le dit à la fois dans sa
réplique : « ce n’est pas cela qui m’occupe » (l.36) mais le terme même « occupe » interpelle
car le travail d’un valet n’est-il pas de s’occuper de son maître ?