Le physicien qui rêvait d’être skieur – Conte de Noël Données : g 10 m.s-2 Les cinq questions sont indépendantes et peuvent être résolues dans un ordre différent de celui du… conte. Il était une fois, il y a bien longtemps, un petit physicien qui rêvait de devenir… un grand skieur. Dans son esprit de physicien naquit l’idée d’une discipline qui n’existait pas encore, et que nous nommerions, aujourd’hui, le « saut à ski ». Le petit physicien connaissait bien les lois de Newton et autres théorèmes de la mécanique, et il entreprit de calculer la distance qu’il pourrait franchir avec suffisamment d’élan. Sur un bout de papier, il griffonna rapidement la piste d’envol vers ses rêves, qui ressemblait à ceci : Bien que son dessin ne fût pas d’une grande précision, il y fit figurer trois points : A, le départ de sa course, à l’arrêt ; B, l’amorce de l’arc de cercle, et C, enfin, le point de décollage où il s’imaginait quitter la piste pour… commencer son vol. Il décida que les altitudes des points B et C seraient identiques, puis nota l’angle entre la droite (AB) et l’horizontale, et l’angle entre la tangente à l’arc de cercle en C et l’horizontale. Enfin, il nomma l la longueur du segment [AB]. Le physicien espérait atteindre au point C une vitesse équivalant à une fois et demi celle d’un cheval au galop, c'est-à-dire, en termes modernes, une vitesse voisine de 100 Km/h. Nous noterons VC cette vitesse, et VC le vecteur associé. 1. En négligeant les frottements de la piste et de l’air sur le skieur, et en ramenant le corps de celui-ci à un simple point, exprimez, comme le fit notre physicien, la longueur l nécessaire pour que la valeur de la vitesse, VC, soit atteinte (on attend une expression littérale en fonction de VC et d’autres paramètres éventuels). Calculez, ensuite, la valeur numérique de l , avec = 45°. Le physicien décida que le point C se trouverait à une hauteur H = 5,0 m du sol. Il détermina les équations de la trajectoire, et en déduisit l’expression de la distance D entre la verticale du point C et celle du point où il toucherait le sol. 2. A vous de jouer ! Reproduisez le long travail du physicien, et calculez, vous aussi, la distance D, en supposant que est égal, comme , à 45°. Le physicien se réjouit du résultat, bien qu’il ignorât s’il était capable de survivre à un tel vol. En effet, qu’adviendrait-t-il lors de l’impact avec le sol ? Il calcula, en utilisant les équations horaires qu’il avait déterminées précédemment, l’angle de l’impact, c'est-à-dire l’angle entre le vecteur vitesse et l’horizontale, lorsqu’il toucherait le sol. Il jugea cet angle de grande valeur, et en fut tourmenté. Il entreprit aussi de calculer la valeur de la vitesse qu’il possèderait, lors de l’impact. Car il avait compris que de ce paramètre dépendait sa survie. 3. Exprimez, vous aussi, en utilisant la méthode la plus simple qui soit, la vitesse lors de l’impact en fonction des autres paramètres. Puis calculez sa valeur. Jugezvous que cela représente un danger pour notre physicien ? (Notez que l’on ne vous demande pas de déterminer l’angle d’impact) Le physicien reprit sa rêverie, et ses idées de grandeur. Il souhaitait franchir une grande distance, c’est vrai, mais il songea aussi à l’altitude (par rapport au sol) qu’il atteindrait au sommet de sa trajectoire. Serait-elle importante ? Pourrait-il contempler la campagne environnante, avant d’entamer sa dangereuse descente ? Il se mit à raisonner en terme d’énergie et de travail. 4. Que pouvez-vous dire de l’énergie de mouvement du physicien-skieur (autrement dit, son énergie cinétique) au sommet de sa trajectoire ? Est-elle négative ? nulle ? positive ? En conséquence, l’altitude au sommet de la trajectoire sera-t-elle inférieure, égale ou supérieure à celle du point A ? Ainsi, le physicien pourra-t-il contempler de nouveaux paysages lors de son vol ? Justifiez chacune de vos affirmations. 5. Vous savez que, de nos jours, le saut à ski représente une discipline sportive à part entière, et notre physicien serait surpris de voir quelle précision apportent les athlètes à leur préparation. Pensez-vous que ceux-ci, s’ils s’élançaient du point C avec une vitesse de 100 Km/h, franchiraient une distance plus grande que celle que calcula le physicien ? ou moindre ? Raisonnez en négligeant les frottements de l’air, puis, ensuite, en les prenant en compte. Pour finir, vous pouvez proposer une morale à ce conte de Noël, mais celle-ci n’entrera pas dans le barème. Eléments de correction 1) Système : le physicien-skieur, ramené à un point Référentiel : le référentiel terrestre, supposé galiléen. Inventaire des forces lors du mouvement du skieur entre A et C : le poids du skieur P , vertical et dirigé vers le bas ; la réaction du sol R , de direction perpendiculaire au mouvement, et dirigée vers le haut ; quant aux frottements, ils seront négligés. Comme le référentiel est considéré comme galiléen, on peut appliquer le théorème de l’énergie cinétique à notre physicien-skieur entre A et C. Ainsi, la variation d’énergie cinétique du physicien-skieur entre A et C est égale au travail des forces qui lui sont appliquées sur ce même trajet. On remarque que le travail de R est nul entre A et C, puisque R reste constamment perpendiculaire au mouvement. 1 1 Il vient donc m VC2 m VA2 WP A C . 2 2 Or VA = 0, et WP A C mgh (où h est égale à la dénivellation entre A et C, c'est-à-dire entre A et B, d’où h l sin ), soit WP A C mg l sin Ainsi, 1 m VC2 m g l sin , c'est-à-dire 2 l= VC2 . 2 gsin 2 100.103 3600 A.N. : l = 54,6 m. 2 10 sin 45 La distance nécessaire à laquelle le physicien-skieur devra s’élancer du point B est environ égale à 54,6 m. A t = 0, le physicien-skieur occupe le point C initiale est VC VC cos VC sin 0 0 . La vitesse . Comme l’on se trouve dans un référentiel galiléen, on peut appliquer le théorème du centre d’inertie à notre système : P m a . Soit, en projetant dans notre repère : x t 0 . y t g x t cste1 On « intègre » ces relations : et on y t gt cste2 utilise les conditions initiales pour déterminer les constantes (cste1 = x 0 = VC cos ; cste2 = y 0 = VC sin ), soit x t VC cos y t gt VC sin On « intègre » à nouveau ces relations, ce qui donne x t VC cos t cste3 g t2 VC sin t cste 4 y t 2 Les constantes sont à nouveau données par les conditions initiales (cste3 = x(0) = 0 ; cste4 = y(0) = 0), x t VC cos t soit : g t2 VC sin t y t 2 On élimine le temps entre les deux équations pour obtenir l’équation de la trajectoire : x t , donc VC cos 2 j g x x , ce qui donne y VC sin 2 VC cos VC cos y i 2) Par la suite, on travaillera dans le repère mathématique {C ; i ; j }. Système : l’éternel physicien-skieur Référentiel : le référentiel terrestre, supposé galiléen, comme précédemment Inventaire des forces lors du « vol » : le poids du 0 physicien-skieur P ; quant aux frottements, ils seront mg encore négligés. g x2 tan x . 2 VC2 cos2 En fonction des valeurs de l’énoncé, on peut donner la forme numérique de cette équation : 10 x2 y tan 45 x , c'est-à-dire 2 100.103 2 2 cos 45 3600 y 1,296.102 x2 x On cherche à exprimer la valeur particulière de l’abscisse D pour laquelle le skieur passe par le point d’ordonnée égale à –H. D est donc solution de l’équation du second degré H 1,296.102 x2 x , c'est-à-dire 1,296.102 x2 x 5 0 Le discriminant du polynôme est = 1 + 4 5 1,296.10-2 (on remarque que est strictement positif). Les racines du polynôme sont donc 1 1 4 5 1,296.102 , c'est-à-dire environ 2 1,296.102 -4,7 m (incohérent) et 82 m (c’est la valeur de D recherchée). Le physicien espère donc atteindre la distance D = 82 m. 3) On appelle Vimpact la norme de la vitesse lors de l’impact. Comme le référentiel est considéré comme galiléen, on peut appliquer le théorème de l’énergie cinétique à notre skieur entre C et l’endroit de l’impact avec le sol. C’est la méthode la plus simple. Mais notez que l’on pouvait aussi trouver le résultat en calculant l’instant t de l’impact et en injectant sa valeur dans les équations horaires des composantes de la vitesse. Ainsi, la variation d’énergie cinétique du skieur lors du « vol » est égale au travail du poids sur ce même trajet. 1 1 2 m VC2 WP . Il vient donc m Vimpact 2 2 Puisque WP est égal à m g H, il vient : du poids entre A et S est strictement positif, et donc… que l’altitude de S est strictement inférieure à celle de A ! (le travail est moteur) Le skieur n’atteindra donc pas, lors de son vol, une altitude supérieure à celle de A. Tant pis pour la vue ! 5) Si l’on néglige les frottements de l’air, il y a fort à parier que les skieurs modernes franchiraient exactement la distance théorique. Leur équipement ne changerait en rien les équations du mouvement que nous avons déterminées. Cependant, si l’on prend en compte les frottements de l’air, que se passe-t-il ? On pourrait penser que, ces frottement empêchant le mouvement, les skieurs retomberaient en réalité moins loin que ce que notre physicien-skieur a prévu dans ses calculs. En fait, ce n’est pas le cas ! Pensez aux compétitions de saut à ski : les skieurs utilisent les frottements pour « planer », et allongent ainsi la longueur de leur vol. Les frottements de l’air, de par l’inclinaison des skis, sont en effet dirigés principalement vers le haut, et ainsi, compensent quelque peu le poids des athlètes. 1 1 2 m Vimpact m VC2 m gH , c'est-à-dire 2 2 Quelle serait alors la morale de ce conte (que l’on pourrait alors qualifier de fable) ? Nous vous proposons celle-ci (rédigée à la hâte, il est vrai) : Vimpact VC2 2gH ; A rêver de grandeur, on est assez souvent 100.10 A.N. : Vimpact 3600 soit environ 106 Km/h légèrement augmenté). 3 2 2 10 5,0 29,5 m/s, (la norme de la vitesse a A titre d’information, l’angle d’impact est voisin de 42° (on le déterminerait à l’aide des équations horaires des composantes de la vitesse). Le pauvre physicien risquait donc de se faire très mal lors de l’atterrissage. 4) Soit S le point représentant le sommet de la trajectoire. Lorsque le physicien-skieur atteint le point S, son énergie cinétique n’est pas nulle ! elle est vérité strictement positive, puisque la norme de sa vitesse est, elle aussi, strictement positive (sa composante suivant l’axe des ordonnées est nulle, mais pas sa composante selon l’axe des abscisses). Ainsi, entre A et C, la variation de l’énergie cinétique est strictement positive (car l’énergie cinétique est nulle en A). En appliquant le théorème de l’énergie cinétique à notre physicien-skieur entre A et S, on en déduit que le travail Largement en deçà de ce qu’on réalise, Après. Mais… sachez-le, dans leurs pensées, pourtant, Les physiciens-rêveurs planent plus qu’ils le disent.