Poly L2
Cours de Drina Candilis
L 2 cours II
LE NORMAL ET LE PATHOLOGIQUE CHEZ L’ENFANT
De la souffrance psychique à l’évaluation du normal et du pathologique
selon M.Klein et A. Freud
La souffrance psychique de l’enfant
Pas de prise en compte de la souffrance psychique de l'enfant avant le début du XXe
siècle.
Quelques précurseurs s'intéressent au XVIIIe siècle à la pédagogie des enfants
déficients : Pereire, Itard (voir victor de l’aveyron, l’enfant sauvage), l'Abbé de l'Epée
pour les enfants sourds, Seguin pour le traitement moral des idiots.
Au XIXe siècle, le souci d'éducation ou de rééducation domine les préoccupations des
premiers psychiatres d'enfants. Par exemple Moreau de Tours, Bourneville ou Claparède
fondent des instituts spécialisés où le dépistage des débilités est une activité importante.
Finalement la souffrance des enfants se conçoit longtemps sous deux catégories
principales : les débiles et les caractériels.
Certains psychiatres comme Kraepelin s'interrogent pour savoir si les formes
psychopathologiques qu'ils observent chez l'adulte pourraient avoir quelques
antécédents dans l'enfance des patients. Mais pour eux, cela ne concerne pas la majorité
des cas dans la mesure où ils repèrent essentiellement la sémiologie
psychopathologique au moment des crises et que les suivis au long cours n'existent
pratiquement pas.
Certains commencent à identifier chez l'enfant les mêmes troubles mentaux que chez
l'adulte (démence précoce, avec hallucination ou délire décrit en 1910 par Sancte De
Sanctis) mais pas de spécificité des troubles de l'enfant.
Tournant au début du XXe siècle avec les débuts de la psychiatrie infantile et avec la
psychanalyse. Clinique de Georges Heuyer à la Salpetrière où dès 1925, où seront formés
tous ceux que la psychiatrie et la psychanalyse d'enfants comptent d'importants :
Eugénie Sokolnika, S.Morgenstern ou Françoise Dolto, J.Aubry ou S.Lebovici. Tous ont
été sensibles à la révolution apportée par la psychanalyse selon laquelle la névrose de
l’adulte tire sa source de dispositions acquises pendant l’enfance voire la petite enfance
du sujet.
Bouleversement de perspective à partir de trois sources :
les cures d'adultes,
l'observation directe
et les cures d'enfant.
On peut d'emblée préciser que ces trois sources ne sont pas prises en compte de la
même manière par tous les auteurs et par toutes les écoles.
Pour ce qui concerne la découverte proprement freudienne, deux idées force modifient
radicalement l'approche de l'enfant :
a) la théorie du traumatisme. Il faut d'ailleurs parler des théories du traumatisme
b) l'importance reconnue des fantasmes chez l'enfant et de la sexualité infantile (voir
chez Freud l’évolution de sa position sur la réalité des scènes traumatiques décrites par
ses patientes hystériques).
C’est à dire ce qu’il en est de la réalité de l’événement vécu, et ce qu’il en est de sa
construction ou de sa reconstruction par l’enfant lui-même.
L’affaire d’Outreau constitue un exemple dramatique vu sous cet angle. Entre ceux qui disent les enfants
disent toujours la vérité, et ceux qui pensent que si traumatisme il y a eu ce n’est pas seulement dans les
rapports peut-être ambigüs entre certains adultes et des enfants mais plutôt du fait des spérations forcées et
arbitraires que les soupçons de la justice et de la police ont entrainé
Place du symptôme dans l’économie psychique de l’enfant.
L'enfant est un être en développement, d'où la difficulté de situer la valeur d’une
désorganisation symptomatique.
La maladie prend des formes très différentes selon les individus. Tantôt arrêt précoce et
désorganisation massive entraînent rupture des relations et impossibilité des
acquisitions (psychose, autisme) ; tantôt l'arrêt produit une incapacité ou un
ralentissement des acquisitions mais pas de rupture relationnelle (névrose). Bref, on
peut avoir des arrêts fixes ou des progressions retardées sur tous les domaines ou par
secteurs. Par ailleurs, la même cause peut agir différemment selon le moment où elle se
produit : possibilités de compensation ou de dépassement différent selon l'âge ou même
selon la structure de la famille à un moment donné.
Les premières études suivies au long cours du développement de l'enfant ont
montré que les crises et les conflits surgissaient inévitablement dans le processus de
développement, certaines sont à l'origine d'aptitudes nouvelles, d'autres au contraire
entraînent des fragilisations.
Exemple 1: Les séparations transitoires
Elles peuvent entraîner un arrêt de développement ou stimuler au contraire des
mécanismes de restitution qui vont entraîner de meilleures adaptations ultérieures.
Exemple 2 : l’arrivée d’un autre enfant à la maison.
Une phase régressive peut dans certains cas constituer une approche adaptative à cette
situation alors qu’elle prend des allures de retrait dans d’autres cas.
La place du symptôme doit par conséquent être abordé de façon très différente
de celle qu'il occupe dans la pathologie adulte. Il n'a pas forcément de valeur en tant que
telle, mais il doit toujours être interrogé par rapport à la fonction qu'il occupe au cours
du développement avant de pouvoir statuer sur son éventuelle valeur pathologique
(d'où l'ambiguïté des approches entièrement symptomatiques).
Mélanie Klein et Anna Freud : les Controverses
Elles sont les premières à montrer la difficulté de classer certaines conduites dans le
cadre du comportement normal ou pathologique. On va retrouver chez l'une et l'autre
deux démarches néanmoins très différentes.
La première est une pionnière de la psychanalyse de l'enfant et elle défend l'idée que dès
la naissance, la vie psychique d'un enfant est habitée par le monde des conflits et des
fantasmes qui s'y rattachent. Elle fait du jeu la voie royale de l’expression de
l’inconscient de l’enfant. Elle ouvre l’histoire de la psychanlyse à la théorie de la relation
d’objet
L'autre est davantage marquée par sa formation de pédagogue et le souci préventif du
devenir de l'enfant lui tient à cœur. Aussi propose-t-elle d'intégrer la réflexion sur le
normal et le pathologique à l'intérieur d'une démarche de prévention.Elle reste
cependant fidèle à l’héritage freudien en maintenant la tradition d’une théorie des
pulsions, et de la théorie qui ferait évoluer l’individu d’une phase de narcissisme
primaire à une phse d’amour hétérosexuel pour l’objet.
(Voir les Controverses de Steiner et King).
Finalement l’une et l’autre sont fidèles à l’héritage de Freud mais en insistant sur deux
données différentes : pour Mélanie Klein, parler d’une vie psychique dès le départ c’est
affirmer que l’inconscient se confond avec les expériences infantiles du tout début de la
vie, elle ouvre ainsi la voie à une compréhension de modèles psychopathologiques que
Freud n’avait pas exploré : celui de la psychose en particulier. Dans cette optique elle
pense que l’enfant est d’emblée capable de transfert, et donc que le travail
d’interprétation est immédiatement possible.
Quant à Anna Freud, elle pense que la vie psychique de l’enfant ne s’exprime que dans
un deuxième temps, lorsque à la sortie de la phase narcissique primaire l’enfant s’ouvre
petit à petit à la complexité des relations objectales. La mère a dans ce cas de figure une
importance très grande puisque c’est à elle que revient le rôle de pare-excitation que le
moi immature de l’enfant ne peut remplir pour lui-même, c’est en ce sens qu’on peut
comprendre l’importance du rôle maternel à ses yeux et plus encore aux yeux de ses
continuateurs (comme Spitz par exemple). Freud lui-même n’insistait-il pas sur
l’importance des soins maternels pour le développement psychique de l’enfant ? Pour
Anna Freud le travail de l’analyste entre directement en concurrence avec l’amour que
porte l’enfant à ses parents, d’où la nécessité de travailler longuement à la possibilité
d’une cure avant de l’entreprendre.
Les controverses qui les ont opposées tenaient finalement à la difficulté de tenir
ensemble deux positions souvent opposées dans la prise en charge des enfants : ne
s’intéresser qu’à la vie psychique de l’enfant en tant que telle ou tenir compte de sa
place dans une famille.
Le concept de position chez Mélanie Klein
Mélanie Klein, qui s’intéresse à la vie psychique dans ses expressions les plus précoces,
décrit le mouvement qui pousse l’enfant d’un état de dépendance absolue à l’objet (objet
tout d’abord partiel : le sein) à un état de reconnaissance de l’objet comme différent de
soi. Pour cela, elle emprunte à la pathologie des termes destinés à qualifier selon elle des
moments évolutifs du bébé, elle parlera ainsi de position schizo-paranoïde et de
position dépressive. Elle admet que tous les enfants passent par une névrose qui ne
diffère chez les uns ou chez les autres que par son intensité. Mais les enfants les moins
névrosés ne sont pas forcément ceux qui se rapprochent le plus des adultes les moins
névrosés.
Par exemple : l'enfant hyper adapté à la réalité et qui se conforme à toutes les exigences de son éducation ou
qui manifeste peu d'angoisse n'est pas seulement vieillot et dépourvu de charme mais anormal au sens plein
du terme.
L'enfant "normal » n'est pas toujours "facile" mais si son angoisse, son ambivalence et
les obstacles qu'il oppose dans son adaptation à la réalité dépassent une certaine limite,
si les difficultés dont il souffre et fait souffrir son entourage sont trop grandes alors on
doit le considérer comme un enfant incontestablement névrosé. Ce qui distingue l'enfant
névrosé de celui qui ne l'est pas, ce n'est pas seulement une question d'intensité mais
cela dépend aussi de son comportement à l'égard de ses difficultés. Les formes
d'expression de l'angoisse sont très variées et peuvent être passagères ou se
transformer en manifestations psychopathologiques plus ou moins discrètes ou
bruyantes.
Trois exemples montrent la difficulté d'établir un lien entre le symptôme et l'angoisse
sous-jacente :
-Les frayeurs nocturnes, les troubles de l'endormissement, le sommeil agité avec des
réveils fréquents ou les rituels d'endormissement.
-Les difficultés alimentaires, appétit capricieux, manque d'appétit, lenteur de
l'alimentation ou troubles du comportement à table.
-La vitalité excessive, marque d'un "tempérament", signe de désobéissance ou moyen de
surcompensation de l'angoisse qui peut ainsi être évitée (dans une approche plus
symptomatique on soulignera la dimension d'hyperactivité).
Les enfants dissimulent leur intolérance première à la frustration sous une adaptation
générale aux exigences de l'éducation : ils deviennent très tôt des enfants "sages",
"éveillés", l'objectif principal consistant à juguler angoisse et culpabilité en cherchant
dans leur entourage protection et secours d'où l'augmentation de leur dépendance vis-à-
vis de l'objet. Pour Mélanie Klein, ce qui est important c'est le repérage des moyens
souvent obscurs par lesquels l'enfant a modifié son angoisse tout autant que son attitude
fondamentale
Par exemple, si un enfant n'aime ni le théâtre, ni le cinéma, ni aucune autre sorte de
spectacle, s'il ne prend aucun plaisir à poser des questions et se montre inhibé au jeu,
incapable de faire appel à son imagination, alors on peut admettre que cet enfant souffre
d’une profonde inhibition de ses besoins épistémophiliques et d'un refoulement
considérable de sa vie imaginative, quoiqu'il puisse être par ailleurs adapté et ne
présenter aucun trouble bien défini.
Le désir de savoir, s'il trouve une issue de manière très obsessionnelle, peut aussi
conduire à des formes d'organisation très névrotique.
Pour MK, il est de bon augure que les enfants prennent plaisir au jeu et donnent libre
cours à leur imagination tout en étant bien adaptés à la réalité et qu'ils montrent un
attachement réel mais non excessif à leurs objets (parents). Il est aussi bon signe de voir
leurs tendances épistémophiliques se développer en dehors de trop grandes
perturbations et s'orienter dans diverses voies sans avoir par ailleurs le caractère et
l'intensité propre à la névrose obsessionnelle (Hans). Quelques manifestations
d'émotivité et d'angoisse constituent une condition préalable à un heureux
développement. Le normal n'est donc pas une structure mentale particulière, mais
il se définit par un certain équilibre de fonctionnement.
Le concept de ligne de développement chez Anna Freud
Pour A.F c'est la tâche du clinicien de rassembler les éléments et de les articuler afin
d'établir une évaluation pertinente. Il lui faut alors distinguer :
-Les variantes de la normale
-Les formations pathologiques transitoires
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