Aude Le Coq, Claire Le Gall Le 18 /10/2010 Biochimie/le rein/Pr Guenet Diapo en ligne sur le réseau pédagogique BIOCHIMIE RENALE I- Les fonctions du rein A- Rôle du rein Le rein est un organe important et rempli donc plusieurs rôles : - La régulation du milieu intérieur. Ainsi il retient les substances essentielles à la vie en contrôlant les mouvements de l’eau et des ions (électrolytes). Il joue donc un rôle important dans l’homéostasie en maintenant la volémie (volume sanguin), le Ph et les concentrations ioniques de façon stable. - Le rein est également un organe excréteur. Tout d’abord il a pour fonction de débarrasser le sang des différents déchets issus de la combustion des substances organiques. Ces déchets sont donc des déchets métaboliques tels que l’urée, la créatinine, l’acide urique… Il participe aussi à la détoxification générale par l’élimination des toxines, médicaments ou métabolites des médicaments absorbés. Ces 2 rôles font que le rein participe à la formation de l’urine. - Il s’agit également d’un organe de synthèse avec production de diverses substances dont les hormones : La rénine, impliquée dans la régulation de la pression artérielle EPO (érythropoïétine), à l’origine d’une importante formation de GR La forme active de la vit D (ou 1,25 dihydroxy cholécalciférol), ayant un rôle dans le métabolisme minéral Les prostaglandines, permettant une bonne vascularisation rénale Les facteurs de croissance … Le rein peut également participer à la néoglucogenèse par voie directe via les AA durant la phase de jeûne prolongé. Son intervention est importante dans certains catabolismes, notamment celui des protéines de petit PM que sont les chaines légères de la globine ou les hormones polypeptidiques (insuline, glucagon…). 1/7 B- Formation d’urine Cette formation est la résultante de 3 mécanismes : - La formation glomérulaire, représentant près de 180 L de plasma filtrés quotidiennement La réabsorption tubulaire, représentant près de la totalité du liquide filtré et réabsorbé par les tubules La sécrétion tubulaire qui participe à la formation de l’urine mais de façon infime La diurèse est comprise entre 1,5 et 2 L /24h . 1- Filtration glomérulaire On considère la barrière glomérulaire comme un filtre sélectif, ce qui permet l’ultrafiltration d’une grande quantité de liquide plasmatique. Cette filtration se fait du compartiment capillaire vers l’espace urinaire. L’urine primitive (ou ultra filtrat glomérulaire) qui en résulte va avoir une composition ionique quasi identique à celle du plasma mais sera pratiquement dépourvue de protéines et de macromolécules. Cette barrière est formée de 3 couches : - L’endothélium capillaire, qui est fenêtré et anionique La membrane basale glomérulaire, riche en glycoprotéines anioniques de haut PM. Elle forme un réseau de mailles fines. Cellules épithéliales, elles aussi riches en glycoprotéines anioniques, présentant des fentes de filtration. On peut donc définir la barrière glomérulaire comme un tamis glomérulaire chargé (anionique). La capacité d’une substance à être filtrée va dépendre de sa charge et de son poids. On aura donc un passage d’autant plus facile que les molécules sont de petite taille et chargées positivement ( la membrane étant anionique elle repousse les charges -). 2- Réabsorption tubulaire Le tubule est à l’origine de la réabsorption de la quasi totalité du liquide filtré. Des mécanismes de transport sont mis en jeu. On aura des transports passifs, facilités et actifs : Les transports passifs sont représentés par la diffusion simple. Les transports facilités comprennent la notion de gradient électrochimique et les transporteurs. Ces mécanismes utilisent des transporteurs ; ils sont donc basés sur les principes de saturabilité, spécificité et compétitivité. 2/7 Les transports actifs sont quant à eux représentés par : Transport actif primaire, se faisant contre un gradient électrochimique, consommant de l’ATP, utilisant un transporteur spécifique Transport actif secondaire, nécessitant un co-transporteur spécifique (un transporteur utilise l’énergie du transporteur qui lui est couplé) Nb : les transporteurs sont des protéines transmembranaires On a également une mise en jeu des mécanismes d’internalisation : L’endocytose en phase liquide , non saturable L’endocytose absorptive, saturable, mettant en jeu des récepteurs spécifiques Ainsi peut se faire la réabsorption d’eau, d’électrolytes, de nutriments, de petites protéines filtrées… 3- Sécrétion tubulaire Cette sécrétion met en jeu des mécanismes de transport actifs et passifs. Elle permet l’élimination des substances du plasma non filtrées au glomérule ou réabsorbées passivement par le tubule. Elle permet tout autant l’élimination des ions en excès tel que le potassium (K+) et le maintien de l’équilibre acido-basique du sang (par sécrétion de H+ et d’ammoniaque). II- Protéinurie A- Composition de l’urine 1- Caractéristiques générales L’urine est composée de 95% d’eau et de 5% de solutés divers. Son pH est variable : 5 à 8 Sa densité est proche de l’eau (d H2O = 1) : 1,001 à 1,035. 2- Solutés normalement présents Les solutés retrouvés dans l’urine sont très variables : - Des sels : anions, cations - Urée : produit (déchet) du catabolisme protéique - Créatinine : produit de dégradation de la phosphocréatinine musculaire - Acide urique : provient du catabolisme des acides nucléiques - Ammoniac (NH4+) - Un certain nombre d’AA, nitrates, hormones… - Corps cétoniques, oxalates… 3/7 3- Solutés normalement absents Ne doivent en aucun cas être retrouvés dans l’urine : - - Glucides : en cas de présence on parle de glycosurie. Elle sera retrouvée en cas de diabète sucré mal équilibré Protéines en grande quantité. En conditions normales, la concentration physiologique des protéines et très faible : < 150 mg / 24h. Au-delà, on parlera de protéinurie pathologique avec parfois une albuminurie (glomérulonéphrite, hypertension grave…) Hémoglobine : une hémoglobinurie traduit une hémolyse intra vasculaire. Myoglobine : une augmentation se traduira par une myoglobinurie avec rhabdomyolyse (lyse des cellules musculaires) Pigments biliaires : leur augmentation entraine une bilirubinurie (en cas d’hépatite, cirrhose, obstruction des voies biliaires). ! Les concentrations sont toujours exprimées par 24h ; l’expression par litre n’étant pas significative car dépendante de la diurèse. B- Protéinurie physiologique La protéinurie physiologique est faible : 20 à 150 mg/24h Les protéines ont une double origine : ٠ Plasmatique pour 60% d’entre elles (dont 40% d’albumine) ٠ Rénale pour les 40% restants 1- Les protéines originaires du plasma Ces protéines sont la résultante de la filtration glomérulaire et de la réabsorption tubulaire a- Filtration glomérulaire La membrane glomérulaire est : Presque totalement perméable aux protéines de masse moléculaire (MM) inférieure à 30 Kd Imperméable aux protéines de MM supérieure à 100 Kd Pour les protéines dont la MM est comprise entre 30 et 100 Kd, la filtration dépend de leur taille, forme et charge La membrane glomérulaire étant chargée négativement, elle tend à repousser les protéines de même charge. On donne comme MM moyenne celle de l’albumine (67-68 Kd). Ainsi, beaucoup de protéines dont la MM est inférieure à celle de l’albumine pourront passer ; très peu de celles de MM supérieure passeront la membrane. 4/7 b- Réabsorption tubulaire Les cellules du tube proximal réabsorbent 95% des protéines filtrées et ce par un mécanisme d’endocytose active saturable. 2- Les protéines originaires du rein Les cellules du tube distal sécrètent des protéines parmi lesquelles : ٠ La mucoprotéine de Tamm-Horsfall ٠ L’urokinase (qui est un anti-fibrinolytique) ٠ L’IgA sécrétoire Ces protéines rénales se distinguent des plasmatiques par des MM plus élevées. 3- Résumé protéinurie physiologique Au niveau du flux sanguin on a l’ensemble des protéines en suspension dans le plasma (albumine, immunoglobuline, transferrine, microprotéine). Elles arrivent au glomérule où seules les microprotéines passent (il y a quelques traces des autres). On a alors l’urine primitive ; puis la quasi-totalité des microprotéines est réabsorbée dans le tubule. Puis la sécrétion tubulaire vient compléter la composition pour donner l’urine définitive. C- Protéinurie pathologique Il faut distinguer protéinurie permanente et intermittente qui peut se produire après un effort physique par exemple et qui n’est pas inquiétante. Toute protéinurie permanente supérieure à 150 mg/24h doit être considérée comme pathologique car c’est l’une des premières manifestations des affections rénales. 1- Origine de l’anomalie L’origine des protéinuries est variable ; il peut s’agir d’anomalie : Glomérulaire – elle résulte d’une modification de perméabilité soit par changement des charges des parois glomérulaires soit par modification de la taille des pores de la paroi capillaire. Elle se traduit par des protéines de MM relativement élevée. Tubulaire – tout se passe normalement au glomérule mais au niveau du tubule on a un défaut de réabsorption des protéines de faible MM filtrées par le glomérule. Mixte – touche à la fois le glomérule et le tubule De surcharge (ou pré-rénale) – (au moins au début ce ne sont pas les fonctions du rein qui sont en cause) Elle correspond à une hyperproduction des protéines de faible MM librement filtrées par le glomérule. Mais leur concentration est telle à l’arrivée au tubule que sa capacité de réabsorption est dépassée. L’excédent se retrouve dans les urines. 5/7 2- Résumé protéinurie pathologique Normale : les grosses protéines ne passent pas ; les petites passent et sont réabsorbées. L’urine est peu concentrée en protéines : < 0,15 g/24h Glomérulaire : les grosses molécules passent, ne sont pas réabsorbées par le tubule et vont dans l’urine. Les petites sont normalement filtrées et réabsorbées. La protéinurie est souvent de concentration importante ; elle peut-être > 1g/24h (mais ce n’est pas toujours le cas) Tubulaire : les grosses protéines ont étés arrêtées au glomérule. Les petites sont bien filtrées au glomérule mais le tubule les laisse passer. On a une protéinurie avec des protéines de faible MM de concentration généralement < 0.5g/24h Mixte : étant la résultante des précédentes, on a à la fois des protéines de petite et grande taille ainsi qu’une concentration élevée. Surcharge : au départ le rein n’est pas lésé. Les grosses protéines sont arrêtées ; les petites passent et affluent au niveau du tubule. Celui-ci sature et laisse passer l’excédent dans l’urine. Les protéines concernées sont : lysosyme, β2-immunoglobuline, les chaines légères d’Ig. Ces dernières sont souvent monoclonales et constituent la protéinurie de Bence-Jones dans laquelle on aura généralement une lésion rénale. D- Exploration protéinurie 1- Prélèvement d’urine De préférence on recueille les urines sur 24h malgré les difficultés que cela pose (en ambulatoire comme a l’hôpital, oublis, heures de début/fin non respectées …). On peut également travailler sur échantillon mais la précision est moins bonne . Pas d’ajout de conservateur. 2- Analyse quantitative Dans un 1er temps on fait une analyse semi-quantitative par recherche sur bandelettes. Ce sont des papiers buvard imprégnés d’un indicateur changeant de couleur quand il est en contact avec des protéines. Cette méthode permet de donner une fourchette de concentration en protéines. Elle est rapide mais présente de nombreux inconvénients ; par exemple, la protéinurie de Bence-Jones a un défaut de réactivité avec les bandelettes. Lorsqu’il y a positivité avec les bandelettes, on va quantifier : Dosage quantitatif des protéines urinaires totales par méthode colorimétrique (biuret qui réagit avec les liaisons peptidiques ou colorant comme le rouge de pyrogallol-molybdate réagissant avec les groupements aminés des protéines). Normale < 0.15g/24h Dosage quantitatif de l’albumine par une réaction Ag-Ac (l’Ac est dirigé contre l’albumine humaine) suivie d’une méthode turbidimétrique ou néphélémétrique. Cette mesure est importante chez le patient diabétique. On parle de micro-albuminurie quand la concentration est comprise entre 30 et 300 mg/24h. La normale est < 30mg/24h 6/7 3- Analyse qualitative Le but est de caractériser le niveau d’atteinte rénale (glomérulaire ou tubulaire). Pour cela on va chercher à apprécier la MM des protéines. Méthode : Séparation des protéines urinaires par électrophorèse. Elle se fait le plus souvent sur gel d’agarose (gel réticulé permettant la séparation sur la taille) en présence de détergent comme le SDS (Sodium Dodecyl Sulfate) qui donne aux protéines une charge négative uniforme par unité de masse et annule ainsi leur charge propre. Les protéines sont alors séparées uniquement par la taille, vont toutes de la cathode vers l’anode et ce d’autant plus vite qu’elles ont une petite MM. Puis on colore et visualise les protéines. Après coloration la différenciation de l’origine de la protéinurie est aisée : ٠ Si on a des protéines de MM > MM de l’albumine , l’origine est glomérulaire ٠ Si on a des protéines de MM < MM de l’albumine , l’origine est tubulaire ٠ Si on a uniquement de l’albumine, la protéinurie est sélective ٠ Si on a un peu de tout, c’est une protéinurie mixte ٠ Si on a une bande correspondant aux chaines légères, c’est une protéinurie de surcharge. 7/7