Sur le plan internationale, il est possible de mettre en évidence une certaine corrélation entre le
degré de flexibilité du travail et le taux de chômage. Ce sont surtout des pays comme la Grande-
Bretagne et les Etats-Unis qui ont développé ce type de politique mettant l’accent sur le rôle accru des
mécanismes du marché. Depuis deux décennies, on peut considérer que cette politique a été efficace
dans le cas américain et britannique. Aux Etats-Unis, le taux de chômage est inférieur à 5 % au début
de l’année 2006 et il est même inférieur à 3 % de la population active en Grande-Bretagne ; à
l’inverse, des économies où la flexibilité du travail est relativement faible enregistrent des résultats en
matière de chômage peu favorables (Belgique, Grèce, Italie..). (doc.4)
Le cas de la France vient également confirmer cette relation ; effectivement, de multiples
emplois flexibles ont été créés depuis le milieu des années 1990 et cette flexibilisation accrue du
marché du travail semble coïncider avec une situation en matière de chômage qui cesse de se dégrader
et qui paraît même engager une légère amélioration (doc.1). Il est également possible de constater que
la flexibilisation des emplois permet bien d’enregistrer des créations nettes d’emplois malgré une
croissance économique relativement molle.
Toutefois, le recours systématique à une intensification de la flexibilité n’est pas toujours synonyme
d’une dynamique plus importante de la croissance économique et de l’emploi. De nombreux faits
invitent à considérer d’autres hypothèses. Par exemple, la Suède a aujourd’hui un coût du travail
supérieur à celui de la France (25,8 euros de l’heure) et pourtant un taux de chômage plus faible (à
peine plus de 6 % des actifs sont au chômage en Suède en janvier 2006). La situation des nouveaux
pays qui ont adhéré à l’Union européenne en juin 2004 amène au même type de commentaire : la
plupart d’entre eux connaissent un taux de chômage très élevé (plus de 17 % des actifs en Pologne par
exemple) alors que leur marché du travail est particulièrement flexible avec un faible coût du travail
notamment. On peut ainsi montrer que les politiques de l’emploi fondées sur une flexibilité accrue du
travail, loin de stimuler la création d’emplois, peuvent au contraire en constituer un obstacle.
2. Cependant, la flexibilité du travail peut générer des effets pervers et être parfois
défavorable à l’emploi
Le salaire ne constitue pas seulement un coût pour l’entreprise (vision néoclassique) mais constitue
également un pouvoir d’achat qui va stimuler la demande effective (demande de biens de
consommation et de biens de production anticipée par les entreprises
. Dans cette optique, la
flexibilisation des salaires et le recours à des emplois précaires faiblement rémunérés peuvent nuire, in
fine, à la croissance et donc à l’emploi. Par ailleurs, la flexibilité du travail peut également aggraver le
chômage. Enfin, les observations empiriques permettent de confirmer que la flexibilité du travail n’est
pas toujours favorable à l’emploi.
2.1 La flexibilité du travail peut nuire à la croissance et donc à l’emploi.
Dans les années 1930, l’analyse de J. Rueff sur les causes du chômage permanent avait fait
l’objet de critiques radicales de la part de l’économiste anglais J. M. Keynes. Celui-ci considère
notamment qu’avant d’être un prix sur le marché du travail, le salaire est un revenu qui tient une place
essentielle dans la dynamique de l’activité économique. Ainsi, si on inscrit dans une perspective
keynésienne, la flexibilité salariale (réduction des salaires et plus globalement du coût du travail) tout
comme la flexibilité dans la gestion de la main d’œuvre (flexibilité quantitative externe) avec le
développement des emplois précaires, pénalisent le niveau de revenus des actifs, donc le niveau de la
production et celui de l’emploi.
En effet, même si les titulaires d’emplois atypiques occupent une place relativement faible dans
l’ensemble des actifs salariés (autour de 13 % en France si on tient compte des embauches de l’Etat et
des collectivités locales), leur progression a été importante depuis le début des années 1980 (il
représentaient moins de 4 % de l’ensemble des salariés en 1985). Or, une part importante de ces types
de contrats conduit à des niveaux de rémunérations plus faibles (c’est notamment le cas du temps
partiel subi, des emplois intérimaires et surtout des stages en entreprises). Toutes choses égales par
Enfin, il convient de préciser que les « charges » (c’est à dire en fait les prélèvements obligatoires liés au travail)) qui
« pèsent » sur les entreprises sont également un déterminant de la compétitivité à long terme. Elles génèrent des externalités
positives (les cotisations d’aujourd’hui augmentent la productivité future des salariés de l’ensemble de l’économie
puisqu’elles donnent lieu à des revenus de transferts et/ou à des services collectifs publics tels que la santé ou l’éducation).