-0- EN PARTENARIAT U.F.R. Psychologie, Sciences de L’éducation Institut de Formation des Cadres de Santé Département des Sciences de l’Éducation Section Rééducation Université De Provence Centre Hospitalier Bellevue Aix-Marseille 1 Montpellier Diplôme de Cadre de santé Et MASTER Professionnel Éducation et formation 1ère Année Année universitaire 2007 – 2008 Du conflit… aux relations de qualité : Le rôle du cadre de santé LAUWERIER Amélie Sous la direction de Franck GATTO -0- -1- SOMMAIRE 1 2 CONTEXTE ...................................................................................................................... 1 1.1 Histoire professionnelle .............................................................................................. 1 1.2 Questionnement .......................................................................................................... 1 PROBLEMATIQUE PRATIQUE .................................................................................. 3 2.1 Le cadre de santé ........................................................................................................ 3 2.1.1 Historique de la fonction cadre de santé ............................................................. 3 2.1.2 Cadre législatif.................................................................................................... 5 2.1.3 Les rôles du cadre de santé ................................................................................. 5 2.1.4 La posture du cadre de santé............................................................................... 8 2.2 Le conflit .................................................................................................................... 9 2.2.1 Définition ............................................................................................................ 9 2.2.2 Les différentes formes de conflits et pourquoi naissent-ils ? ........................... 10 2.3 3 Le rôle du cadre de santé dans la gestion du conflit ................................................. 13 ENQUETE EXPLORATOIRE ..................................................................................... 14 3.1 Objectif de l’enquête exploratoire ............................................................................ 14 3.2 Population ................................................................................................................. 14 3.3 Choix de l’outil d’enquête ........................................................................................ 15 3.4 Protocole ................................................................................................................... 17 3.5 Traitement des données ............................................................................................ 17 3.6 Résultats ................................................................................................................... 18 3.7 Réponse à la question de l’enquête exploratoire ...................................................... 28 4 QUESTION DE RECHERCHE .................................................................................... 29 5 PROBLEMATIQUE THEORIQUE ............................................................................ 29 5.1 Le management......................................................................................................... 29 5.1.1 Historique du management ............................................................................... 29 5.1.2 Définition du management ............................................................................... 35 5.1.3 Les différents styles de management ................................................................ 35 5.2 5.2.1 La théorie de la communication ............................................................................... 37 Définitions ........................................................................................................ 37 -2- 5.2.2 La transmission des messages .......................................................................... 38 5.2.3 L’interaction ..................................................................................................... 40 5.3 5.3.1 Définitions ........................................................................................................ 43 5.3.2 Négociation, communication et interaction ...................................................... 44 5.3.3 Typologie des négociations .............................................................................. 45 5.3.4 Les clés d’une négociation constructive ........................................................... 46 5.4 6 La théorie de la négociation...................................................................................... 43 La matrice théorique ................................................................................................. 48 METHODOLOGIE DE RECHERCHE ...................................................................... 52 6.1 Méthode de recherche ............................................................................................... 52 6.2 Population ................................................................................................................. 53 6.3 L’outil d’enquête théorisé ......................................................................................... 53 6.4 Protocole de recueil des données .............................................................................. 54 6.5 Traitement des données ............................................................................................ 54 6.6 Résultats scientifiques .............................................................................................. 55 6.7 Synthèse des résultats et réponses à la question de recherche .................................. 62 7 DISCUSSION ET PERSPECTIVES ............................................................................ 64 8 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..................................................................... 65 9 ANNEXES ....................................................................................................................... 68 -1- 1 1.1 CONTEXTE HISTOIRE PROFESSIONNELLE Après l’obtention de mon diplôme d’état d’ergothérapeute en juin 2000, j’ai débuté ma carrière dans le secteur associatif, à l’Association Familiale d’Aide et de Protection de l’Enfance Inadaptée (AFAPEI), dans un foyer occupationnel pour personnes déficientes intellectuelles adultes. Là, j’ai découvert le travail d’équipe, en même temps que la hiérarchie et les relations complexes d’une grande organisation. Puis, à l’issue de ce contrat à durée déterminée, j’ai intégré une structure plus petite. En effet, j’ai alors travaillé dans un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD), dans une région rurale. Enfin, depuis août 2002 et jusqu’à mon entrée à l’Institut de Formation des Cadres de Santé (IFCS) de Montpellier, j’ai à nouveau rejoint le secteur associatif, plus particulièrement l’Association Pour Adultes et Jeunes Handicapés (APAJH) en exerçant dans un Etablissement de Services et d’Aide par le Travail (ESAT). C’est dans ce contexte que j’ai pu développer et acquérir de nouvelles compétences tant techniques que relationnelles. J’ai également découvert la richesse et la mise en commun des savoirs et des pratiques de professionnels différents, issus du secteur médical, paramédical, éducatif et social. J’y ai aussi constaté la complexité des relations et les difficultés dans l’accompagnement interdisciplinaire de l’usager en situation de handicap et dans la mise en œuvre d’une bonne coordination des interventions de chaque professionnel. 1.2 QUESTIONNEMENT De par la taille de l’établissement dans lequel j’ai exercé jusqu’à ce jour, de par son organisation complexe, sa hiérarchie très présente ainsi que les différentes professions représentées autour de l’usager, j’ai pu observer de nombreuses difficultés de communication, de cohérence dans les pratiques professionnelles, d’atteinte des objectifs de chacun… -2- De plus, le modèle de management utilisé dans cette structure est un management presque exclusivement de type directif, laissant peu de place à la communication ascendante, à l’autonomie et à la prise d’initiatives de la part des professionnels soignants, éducatifs et sociaux. Sans y être forcément confrontée, j’y ai vu l’émergence de conflits d’intérêts, de valeurs, d’idées mais aussi de personnes. Ces considérations m’ont, petit à petit, amenée à me questionner. D’une part sur les relations humaines et interprofessionnelles, la communication, les conflits et leurs enjeux, comment les éviter et la manière de les gérer. D’autre part sur la manière qu’un cadre de santé utilise pour gérer un conflit dans son équipe : provient-elle de ses compétences en management acquises durant sa formation de cadre ou existe-t-il des « compétences cachées » propres à chaque individu et utilisées dans la gestion des conflits ? Et une fois le conflit installé, peut-on en retirer certains bénéfices ? Enfin, au moment où je préparais le concours d’entrée à l’IFCS, j’ai lu l’ouvrage « résoudre les conflits dans les établissements sanitaires et sociaux » de Jean René Loubat, psychosociologue, paru en novembre 1999. Cette lecture a renforcé mon questionnement sur le conflit. Ce thème m’intéresse d’autant plus que l’optimisation des relations humaines et le maintien de la cohésion de l’équipe sont des missions attribuées au cadre de santé dans sa pratique de management. « L’harmonie n’est pas naturelle dans les organisations. L’entreprise est un lieu de tensions, de conflits, de contradictions et d’intérêts divergents » (Marsan, 2005). Le cadre de santé doit donc pouvoir faire face à ces tensions et être à même de gérer les conflits. -3- 2 2.1 PROBLEMATIQUE PRATIQUE LE CADRE DE SANTE 2.1.1 Historique de la fonction cadre de santé La catégorie « cadre de santé » est issue de la transformation de la catégorie « surveillante des hôpitaux ». Avec l’effondrement de l’Empire Romain, l’église devient le tuteur de l’institution hospitalière. Elle en contrôle le fonctionnement par ses ordres religieux. Dès le Vème siècle, de nombreux établissements sont créés pour accueillir les pauvres, les malades et les déshérités. L’hôpital est conçu comme lieu d’hébergement des exclus, la vie y est rythmée par la vie monastique. Au Moyen Âge, la médecine perd beaucoup de l’aspect scientifique, « L’art médical est censuré de tabous religieux. La médecine ne sait pas prévenir ou guérir la maladie, elle s’en remet au hasard ou à la grâce de Dieu. » (Bourret, 2006, p. 20). Dans cet esprit religieux, se constitue petit à petit la fonction du personnel soignant. Dès la création des premiers hôpitaux, le rôle des sœurs est de s’occuper de l’intendance et de la vérification du respect d’un certain nombre de normes. Les soins et les tâches annexes sont donc sous la surveillance des religieuses. L’origine de la profession de cadre remonte donc aux occupations de ces religieuses. Elles contribuent à la gestion de tous les services de ces établissements : les soins mais aussi la cuisine, la buanderie… A partir de 1873, l’hôpital est géré par une commission administrative municipale. Il devient un établissement public communal soumis à la tutelle de l’état. Les religieuses continuent leur travail de surveillance et de gestion des hôpitaux, les soins deviennent à la charge d’un personnel féminin laïque et sans formation. Puis, avec l’évolution des missions de l’hôpital, les progrès de la médecine et surtout de l’hygiène, le rôle des médecins devient de plus en plus important. Il existe une volonté de -4- laïcisation des hôpitaux, accompagnée de l’ouverture d’écoles d’infirmières. Le remplacement des religieuses suppose en effet l’existence d’un personnel nouveau qu’il est nécessaire de former. Dans la première moitié du XXème siècle, l’hôpital, lieu d’hébergement des indigents, se transforme en « lieu de soins pour tous » (Loi du 21 décembre 1941 et son décret d’application du 17 avril 1943). Il apparaît, dans ce contexte, une forte augmentation des besoins en personnel. A partir des années 1950, on assiste à une transformation radicale de l’hôpital. Le passage par des cursus de formation et l’obtention de diplômes deviennent obligatoires pour accéder aux professions paramédicales réglementées par le Code de la Santé publique. Une diversification des métiers s’opère et le nombre des personnels augmente. Dans les années 1960, les religieuses disparaissent progressivement des hôpitaux. Les laïques qui les remplacent doivent obligatoirement être infirmières diplômées. Dès 1958, une formation est proposée aux surveillantes. Le décret n°58-1104 du 14 novembre 1958 crée le Certificat d’Aptitude aux Fonctions d’Infirmière Surveillante et d’infirmier surveillant (CAFIS). C’est aussi l’époque de la mise en place de plateaux techniques médicaux et d’une logistique d’intendance et d’administration. On observe une évolution de la fonction d’encadrement des années 1950 à 1990. « Cette évolution de la fonction de surveillante est liée à la rationalisation gestionnaire. La réforme hospitalière de 1991 fixe un cadre réglementaire de gestion par objectifs. La régulation des coûts de santé est devenue prioritaire. Elle suppose une rationalisation de la prise en charge des malades qui reconfigure le travail des médecins et de l’ensemble des personnels » (Bourret, 2006, p. 37). Un nouveau programme de formation des cadres est adopté en 1995. Il s’agit du décret n°95926 du 18 août 1995, créant un diplôme de cadre de santé commun à 13 professions paramédicales et remplaçant les certificats cadre infirmier, moniteur cadre de massokinésithérapie, moniteur cadre d’ergothérapie, moniteur cadre d’électroradiologie, cadre de laboratoire d’analyses de biologie médicale. manipulateur -5- Le contenu de ce nouveau programme de formation viserait à dépasser les logiques de métier pour intégrer les exigences de la gestion. 2.1.2 Cadre législatif Le décret n°95-926 du 18 août 1995 a pour objet la création du diplôme de cadre de santé, commun à 13 professions paramédicales. Profond bouleversement, cette volonté d’uniformiser la formation des cadres de santé est le début d’une coopération dans les pratiques managériales, dans le partage des valeurs, et dans la réflexion sur le sens du travail du cadre. « La formation conduisant au diplôme de cadre de santé a pour ambition de favoriser l’acquisition d’une culture et d’un langage commun à l’ensemble des cadres de santé afin d’enrichir les relations de travail et les coopérations entre les nombreuses catégories professionnelles, indispensables à la cohérence des prestations » (Arrêté du 18 août 1995). 2.1.3 Les rôles du cadre de santé Le cadre de santé se trouve inséré dans un contexte en perpétuelle évolution. Son rôle est complexe, il se trouve à l’articulation des logiques administratives, médicales, soignantes et de la logique des patients. Le cadre doit veiller à l’harmonie entre le management et les soins. Concernant ce qui est prescrit et une partie des attendus, la circulaire Gérard Vincent du 20 février 1990 (Circulaire DH/8A/PK/CT n° 00030 du 20 février 1990 portant mission et rôle des surveillant(e)s et surveillant(e)s chefs hospitaliers) clarifie ses missions et ses fonctions : « Le cadre de santé est responsable de la gestion de l’unité, il organise la prise en charge globale de la personne soignée pour apporter des réponses adaptées à ses besoins de santé. Il a un rôle d’encadrement et d’animation des personnels de l’unité, de formation, de coordination et de recherche. Il est responsable du soin dans le domaine de compétence propre à sa fonction, de l’organisation, de l’application de la prescription médicale, de la gestion administrative de l’unité. » -6- Thuillier et Vial nous parlent des fonctions qui définissent l’action du cadre, qui n’est pas un simple administratif ou gestionnaire. « En position de diriger, de gouverner, sans participation réelle au commandement, l’essentiel du travail du cadre est d’assurer une fonction de formation. » (Thuillier & Vial, 2003, p. 160). Le cadre de santé est donc aussi un formateur des membres de son équipe, des étudiants et de toutes les personnes avec qui il est en contact au cours de son travail. Le rôle du cadre de santé se définit à travers des missions qui le rendent responsable de la qualité des soins, de la place du patient, du travail en équipe. Nous pouvons noter, toujours dans la circulaire Gérard Vincent du 20 février 1990, que le cadre de santé « … élabore en équipe un projet de soins […] Il propose une organisation évolutive de soins […] Il s’assure d’une répartition judicieuse des tâches en fonction des compétences et de la charge de travail de chacun […] Il est responsable de la qualité du soin […] Il est l’animateur de l’équipe placée sous sa responsabilité […] Il évalue l’organisation du travail et introduit les procédures adaptées aux changements… » Mintzberg définit le rôle comme étant « un ensemble organisé de comportements appartenant à un poste de travail ou à une position identifiable ». Il rajoute « qu’il y a des caractéristiques communes à tous les postes de cadres, et que chaque poste a des aspects qui le distinguent de tous les autres » (Mintzberg, 2006). Ainsi, lorsqu’on parle de rôles du cadre, il s’agit d’énoncer une suite de qualificatifs. C’est l’observation de cadres en milieux organisationnels complexes, qui a permis à Mintzberg de définir dix rôles classés en trois sous-ensembles : Rôles interpersonnels : ces trois rôles le définissent comme responsable d’une unité de l’organisation. Rôle de symbole Rôle d’agent de liaison Rôle de leader. -7- Rôles liés à l’information : ces trois rôles le définissent comme le garant de la circulation de l’information. Rôle d’observateur actif Rôle de diffuseur Rôle de porte-parole. Rôles décisionnels : ces quatre rôles le placent dans les champs de la stratégie, de l’innovation et de la décision. Rôle de négociateur Rôle de répartiteur des ressources Rôle de régulateur Rôle d’entrepreneur. Dans la description des différents rôles du cadre proposée par Mintzberg, la notion de communication a une importance majeure : la plupart des items proposés ont un rapport direct avec cette dimension. En effet, la première aptitude du cadre est de communiquer. En situation conflictuelle, communiquer, c’est avant tout savoir écouter, entendre, et très souvent décrypter les messages. « Le malaise dans une équipe se ressent, mais il n’est pas toujours exprimé en "mots" mais plutôt en "maux". Ces "maux" sont à prendre en compte et doivent alerter le cadre. Le mal de dos, les maux de tête, la mauvaise humeur permanente, l’absentéisme pour maladie… peuvent en effet constituer des indicateurs du fonctionnement de l’équipe. Lorsque le malaise est mis en "mots", il faut être vigilant, le malaise peut être tout autre que celui qui est exprimé » (Hasley, Rufin, Catanas & Carré, 2003). Il est alors important de repérer toutes les interactions qui existent au sein de l’équipe (les alliances, les enjeux, …) et de prendre du temps avant de poser un diagnostic de la situation. En 1973, à l’époque où Mintzberg écrit l’ouvrage Le manager au quotidien. Les 10 rôles du cadre, il considère qu’hormis la description de ces rôles, comprendre le travail du cadre reste difficile, dénonçant ainsi les insuffisances de l’enseignement délivré aux écoles de cadres. -8- Aujourd’hui, en regard de l’arrêté du 18 août 1995, la formation des cadres de santé évolue et devient une priorité : « C'est pourquoi la formation des cadres de santé est une priorité essentielle pour garantir la qualité de l'encadrement. Elle contribue en effet à assurer l'efficacité et la pertinence du rôle de l'encadrement dans l'exercice de ses responsabilités en matière de formation des personnels et de gestion des équipes et des activités. » Non seulement la formation évolue mais elle s’adapte à l’évolution des institutions. « L’adaptation régulière de cette formation est une nécessité pour préparer et accompagner l’évolution rapide des établissements de santé et des pratiques professionnelles » (Arrêté du 18 août 1995). En partenariat avec les universités, la formation amène les futurs cadres de santé à se questionner sur le sens de leur action. De cette formation émerge une nouvelle culture de la fonction cadre : « Il s’agit désormais de donner du sens à ses pratiques dans un monde hospitalier mouvant, où de plus en plus de logiques, parfois opposées, et en apparence inconciliables, se confrontent ». (Tramoni & Renaud, 2000, p. 18). Ce qui est désormais attendu du cadre de santé repose plus sur les connaissances d’une culture hospitalière et médicale, sur la capacité à faire travailler les gens ensemble et à conduire des projets communs, que sur la maîtrise technique, voire, l’expertise d’un métier. Enfin, chaque cadre de santé construit ses rôles en fonction de sa personnalité, de son expérience passée mais également en tenant compte du contexte. Le cadre de santé est amené à se positionner. 2.1.4 La posture du cadre de santé « La posture n’est pas une position choisie et qu’on voudrait conserver, c’est bien davantage une façon d’être, une attitude c'est-à-dire une façon d’aborder la chose, dans tel ou tel état d’esprit et qui va donner lieu à une série de variantes, de figures possibles, de variations dans les aléas de la temporalité. » (Donnadieu, Genthon & Vial, 1998, p.126). C’est à travers cette posture que le cadre de santé peut amener son originalité, son pouvoir créatif et influer sur la manière de travailler d’une équipe. -9- Ardoino (1993) définit la façon dont un individu s’inscrit dans une situation selon trois types de postures Agent/Acteur/Auteur : « Il s’agit d’une élucidation psychologique des comportements d’un sujet agi par des déterminismes sociaux et psychosociaux, par son histoire et sa structure personnelle ». Il n’existe aucune hiérarchisation entre elles. Le cadre de santé n’est pas qu’un agent de la réalisation de la prescription, il est aussi acteur et possède une certaine marge de manœuvre et d’initiative. « Il ajoute donc certainement plus ou moins au livret initial ». Il peut être auteur, il crée, invente et innove « … devenir, soi même, son propre co-auteur, de vouloir se situer explicitement à l'origine de ses actes » Le cadre de santé se positionne alors en tant que sujet, il se situe à la fois en référence à des valeurs et en réponse à un contexte. Il occupe une position hiérarchique et tout en se faisant reconnaître comme ayant de l’autorité, il doit rester semblable aux autres avec qui il travaille. Pour cela, nous disent Thuillier et Vial, il doit : « Se montrer humain dans les relations professionnelles… » (Thuillier & Vial, 2003). 2.2 LE CONFLIT 2.2.1 Définition D’après le dictionnaire historique de la langue française, le mot conflit est emprunté au latin impérial conflictus et signifie choc, lutte, combat. C’est pourquoi l’essentiel des recherches a d’abord été réalisé dans le domaine de la guerre. A partir du XVIIe siècle, le mot conflit est appliqué aux relations interpersonnelles, il est aussi envisagé comme « dualisme intérieur » et par extension, il désigne alors l’antagonisme possible dans les champs intellectuel, moral, affectif ou social, voire juridique et psychologique. Pour Hellriegel, Soclum et Woodmann (1992), « Le conflit correspond à une situation dans laquelle se trouvent des individus dont les objectifs, les cognitions ou les émotions sont incompatibles et les conduisent à s’opposer ». Mais plus encore que l’antagonisme, il ne peut y avoir de conflit que pour autant qu’une relation entre deux individus existe. Deux personnes peuvent être en désaccord sur un point, mais il n’y aura pas forcément de conflit. Celui-ci ne se produit que si les deux protagonistes de la situation ont un intérêt en commun qui fait l’objet du désaccord. -10- C’est pourquoi nous retiendrons que, pour qu’il y ait conflit, cela suppose trois conditions : - des acteurs - une relation entre ces acteurs - des enjeux pour chacun des acteurs. 2.2.2 Les différentes formes de conflits et pourquoi naissent-ils ? Le conflit interpersonnel Pour Marsan (2005), il s’agit d’un conflit impliquant deux individus au moins et qui peuvent se sentir en opposition sur des questions d’objectifs, de valeurs, de comportements ou de manières d’accéder à un objectif. Lorsqu’un conflit survient entre deux personnes, chacun est co-responsable tant du différend que de sa résolution. « L’être humain prend toute la mesure de son humanité dans l’interaction » (Marsan, 2005, p. 48). C’est la rencontre avec l’altérité, le regard de l’autre, ses manifestations d’affection comme ses critiques, qui permettent à l’homme de se structurer et de se forger une image, une identité, une personnalité. La rencontre avec l’autre est donc essentielle et vitale. Elle est une occasion de « croissance individuelle » (Marsan, 2005, p. 48), et elle est en même temps source de difficultés, d’oppositions de points de vue, d’incompréhensions, de malentendus, de tensions, finalement de conflits et parfois de violence. La personnalité joue une part importante dans la situation relationnelle comme dans la capacité à gérer des conflits. En fonction de notre psychologie, de notre éducation, de l’encouragement que nous avons eu à développer telle ou telle attitude, nous fuyons les conflits ou au contraire, nous prenons du plaisir dans le défi, la confrontation ou la compétition ou bien encore nous choisissons d’autres modes de résolution. Le conflit interpersonnel est basé sur l’agressivité. L’agressivité est un processus naturel chez l’homme, de par ses inscriptions biologiques et animales qui parfois, le poussent à user davantage de réflexes innés que de ses capacités de raisonnement et de distanciation face à ses émotions. L’agressivité serait alors présente chez l’homme afin d’assurer la survie de -11- l’individu et de l’espèce. Un individu emploie l’agressivité lorsqu’il se sent démuni devant une difficulté ou un danger réel, imagé ou grossi. Une attaque, une réponse dure ou agressive dans la vie professionnelle est souvent une réponse maladroite à un sentiment d’impuissance. Lorsque nous nous énervons, quand nous réagissons vivement, c’est souvent parce que nous ne savons plus quoi faire d’autre. D’ailleurs, il peut nous arriver de regretter assez vite notre violence et nous entrons ainsi dans le cycle de la culpabilité. Ainsi l’agressivité s’ancre dans un comportement naturel car, comme les animaux, nous avons besoin de défendre notre territoire, nos ressources et notre structuration sociale. Ce qui signifie que, sans prise en compte pour son équipe : - des rôles, - des fonctions, - de la délimitation des statuts, - des territoires, tant physiques que symboliques, - des pouvoirs, - des ressources disponibles pour exercer correctement son métier, - du respect des structures et organisations établies et annoncées…, le cadre risque de voir surgir des conflits entre les personnes sur l’un de ces paramètres. L’intensité de la violence manifestée sera proportionnelle à ce besoin de survie, de cette nécessité de préserver ses ressources et territoire. Le conflit intragroupe Selon Marsan (2005), le conflit intragroupe se traduit par les tensions qui surgissent au sein d’un groupe et qui peuvent affecter son fonctionnement. La plupart du temps, les causes du conflit réside dans la nature des tâches assignées, dans les rôles alloués aux acteurs ou encore dans les processus relationnels. Les conflits dans une équipe peuvent survenir pour de nombreuses raisons, comme, suite à des différends entre individus, des incompatibilités de caractère… Mais cela peut également être du au modèle de management utilisé par le cadre du service. -12- Une équipe est, rappelons-le, un groupe d’individus qui utilise de manière complémentaire ses compétences et ceci dans la poursuite d’un objectif commun. Selon Allard-Poesi, l’équipe est un système complexe et dynamique, « Comme tout groupe, une équipe est un ensemble d’éléments interdépendants, influencé par le contexte dans lequel l’équipe prend place (l’organisation, les autres groupes…), le contexte idéologique notamment. La modification d’un seul des éléments constitutifs ou caractéristiques de l’équipe a ainsi un impact sur les autres éléments ou caractéristiques » (Allard-Poesi, 2003). Les conflits peuvent intervenir au sein d’une même équipe pour des raisons différentes, que nous pouvons classer en deux grandes catégories : Des causes relationnelles ou personnelles : - incompatibilité d’humeur - divergence de point de vue - objectifs personnels divergents. Des causes factuelles : - rôles, missions ou tâches pas suffisamment clarifiés - règles du jeu et procédures peu claires - objectifs flous - territoires mal définis. Le conflit organisationnel Selon Marsan (2005), le conflit organisationnel provient de l’opposition et des heurts suscités principalement par l’organisation de l’entreprise ou de l’établissement (définition des postes de travail et de la responsabilité, autorité, hiérarchie, rôles et fonctions, circulation de l’information, définition claire des frontières entre les individus, les départements et les services, principes de rémunération, jeu des acteurs…). La concurrence pousse les entreprises à se différencier. Cela se traduit par des changements d’organisation. S’ils ne sont pas réfléchis de manière globale, ils peuvent être déclinés différemment d’un service à l’autre. Ce qui peut alors entraîner des dysfonctionnements par manque d’homogénéité des modifications organisationnelles et aboutir à des conflits entre -13- services, équipes et individus. Les conflits peuvent ainsi résulter d’une différence entre d’une part, l’organisation officielle caractérisée par un organigramme affiché et les divisions d’activités en différents services, et d’autre part, l’organisation informelle qui utilise en fait différents flux d’informations et circuits de pouvoir que ceux officiellement affichés. C’est bien de la réalité du fonctionnement de l’organisation dont il va être question ici, afin d’examiner les différentes composantes du travail quotidien. Les tensions peuvent en effet se porter sur l’organisation du travail, à savoir la répartition des tâches, les frontières entre les différentes activités et services, les rôles, les partages de ressources et de responsabilités. Les conflits peuvent également être causés par la manière d’encadrer les salariés et notamment les différences de traitement entre les individus. 2.3 LE ROLE DU CADRE DE SANTE DANS LA GESTION DU CONFLIT La mission essentielle du cadre de santé est de gérer. Gérer doit être vu ici dans son sens premier, à savoir « gerare » en latin qui signifie tourner. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour que les patients bénéficient de la meilleure prise en charge possible. Pour ce faire, le cadre doit développer des qualités et aptitudes dans la gestion des équipes, puisqu’il se situe au carrefour de logiques différentes axées vers le patient. La première aptitude du cadre de santé est de communiquer. Communiquer, c’est avant tout savoir écouter, entendre et très souvent décrypter les messages. Certains indicateurs doivent alerter le cadre de santé, comme les maux de tête, la mauvaise humeur permanente, l’absentéisme pour maladie… Ces indicateurs reflètent souvent le fonctionnement de l’équipe et il appartient au cadre de santé d’être vigilant. Il est également important de repérer toutes les interactions qui existent au sein de l’équipe (les alliances, les enjeux,…) et de prendre du temps avant de poser un diagnostic de la situation. Pour gérer le conflit, il est essentiel de se distancier face aux événements et aux émotions, d’une part pour les reconnaître et d’autre part pour les dépasser. C’est « distinguer l’émotionnel du rationnel » (Marsan, 2005, p. 75). -14- Etablir un contrat avec une personne ou une équipe, en fixant le cadre et les règles de fonctionnement explicites, facilite le rôle du manager s’il doit faire constater le non respect de l’une d’entres-elles. Il sera alors plus facile de trouver des actions correctives qui seront acceptées par tous. « Définir les règles du jeu avec l’équipe, c’est lui donner des repères, des impératifs, des priorités, c’est préciser les critères de la réussite individuelle et collective ». Il s’agit pour le cadre de santé d’accompagner la création de l’identité de son équipe, en lui donnant de la cohésion et des valeurs. Enfin, le cadre de santé doit agir rapidement sur les conflits qui perturbent l’ambiance de travail et/ou la qualité des prestations. Son rôle est donc d’imposer qu’un processus structuré et efficace de solution de conflit soit entrepris par les personnes concernées. Mais aussi de s’assurer que son objet d’intervention n’est pas forcément la cause du conflit mais bien ses effets. Bien sûr, dans la réalité, les conflits ne sont pas toujours tous dissous complètement, ils ne doivent pas non plus être ignorés. De ce fait, « l’efficacité d’une équipe de travail dépend, du moins en bonne partie, de la façon dont ses membres communiquent et gèrent leurs conflits » (Hasley, Rufin, Catanas & Carré, 2003). 3 3.1 ENQUETE EXPLORATOIRE OBJECTIF DE L’ENQUETE EXPLORATOIRE L’objectif de cette enquête exploratoire est, d’une part de savoir si le conflit est quelque chose de fréquent dans le monde de la santé, et d’autre part de voir comment les professionnels soignants le perçoivent et le ressentent. 3.2 POPULATION La population visée est constituée par le personnel soignant d’un centre hospitalier universitaire (CHU), toutes catégories confondues. Tous les professionnels de santé de quatre services différents, aussi bien les agents que les cadres, ont été invités à participer à cette enquête. -15- 3.3 CHOIX DE L’OUTIL D’ENQUETE Afin de mener à bien l’enquête exploratoire, il a fallu tout d’abord choisir l’outil d’enquête et c’est le questionnaire qui a été retenu. Selon Eymard, Thuillier et Vial, (2004) « Il (le questionnaire) n’a pas pour but de renseigner sur ce que les gens font, mais plutôt sur ce qu’ils déclarent faire dans telle ou telle situation ou sur leur conception, leur point de vue sur un phénomène ». Il ne permet donc pas d’appréhender le « faire » mais la perception des sujets sur leur « faire ». L’outil d’enquête choisi est un questionnaire anonyme comportant 12 questions : 9 questions fermées et 3 questions ouvertes. Un rappel en en-tête a été effectué, rappelant le caractère anonyme du questionnaire et désignant le contexte et l’objectif de cette étude. Les 4 premières questions (de 1 à 4) décrivent le profil du personnel soignant questionné. Les 5 suivantes (de 5 à 9) sont en rapport avec un éventuel conflit auquel la personne aurait été confrontée. Enfin, les 3 dernières questions (de 10 à 12) tentent de voir comment la personne perçoit le conflit d’une façon générale. -16- Le questionnaire : 1) Sexe : Masculin Féminin 2) Votre profession : 3) Votre ancienneté dans la profession : 4) Travaillez-vous en équipe ? Oui Non 5) Avez-vous déjà été confronté à un conflit dans votre équipe, service et/ou établissement ? Oui Non 6) Si oui, de quel type de conflit s’agissait-il ? conflit d’intérêts conflit de valeurs (morale) conflit d’idées (point de vue) conflit de personnes 7) Quelle a été votre position ? Exclu Neutre Impliqué 8) Ce conflit a-t-il eu un impact : Plutôt positif Plutôt négatif -17- 9) Quel a été cet impact ? 10) Selon vous, un conflit peut-il changer quelque chose dans vos pratiques professionnelles ? Oui Non 11) Si oui, quels sont/seraient ces changements dans vos pratiques professionnelles ? 12) Selon vous, quels sont les moyens essentiels que votre supérieur hiérarchique a mis/devrait mettre en place pour gérer le conflit ? 3.4 PROTOCOLE Le questionnaire est envoyé par mail à quatre cadres de santé de ce CHU qui le diffuseront dans leur service respectif. Le retour des questionnaires s’est effectué par la Poste®. 3.5 TRAITEMENT DES DONNEES 23 questionnaires m’ont été retournés. Sur ces 23 questionnaires, 22 sont exploitables. Les données des questionnaires ont été traitées à plat, à l’aide d’un logiciel informatique (Microsoft-Excel®). -18- 3.6 RESULTATS Je vais analyser les résultats question par question. Question n°1 : Le sexe des personnes interrogées SEXE DES PERSONNES INTERROGEES Hommes 4 18 Femmes Figure 1 : Le sexe des personnes interrogées La question n°1 concerne la répartition des sexes. Notre population se répartit en 82% de femmes (soit 18 femmes) et 18% d’hommes (soit 4 hommes). La population cible est donc essentiellement féminine, ce qui correspond à la moyenne nationale pour les établissements de santé. Selon Bourdieu, les fonctions de soin se situent « comme prolongement de l’activité domestique dans l’imaginaire collectif, où la reproduction de schèmes sociaux anciens laisse ce champ libre aux femmes, notamment pour des tâches subalternes (infirmières, assistantes, secrétaires) ainsi encouragées à un investissement intense, parfois pathologique dans l’institution … où le chef de service est presque toujours un homme… » (Bourdieu, 1998). Remarquons toutefois que les deux médecins ayant répondu au questionnaire sont des femmes, signe que la profession médicale se féminise beaucoup. -19- Question n°2 : La profession des personnes interrogées POPULATION INTERROGEE 8 7 7 infirmiers aides soignants 7 6 Effectif 5 4 4 3 2 2 1 1 1 0 médecins cadre de santé kiné ergos Profession Figure 2 : La profession des personnes interrogées Sur les 22 questionnaires recueillis, 6 professions de santé sont représentées. Le groupe des rééducateurs (kinésithérapeutes et ergothérapeutes) est de 5 personnes, le groupe des soignants (infirmiers et aides soignants) est de 14 personnes ; ce qui correspond assez à la représentation de ces personnels dans les établissements de santé en France. -20- Question n°3 : L’ancienneté dans la profession des personnes interrogées ANCIENNETE MOYENNE PAR PROFESSION 30 26 27 25 18,9 Années 20 17,4 13,8 15 10 5 4,5 0 médecin cadre santé kiné Profession ergo IDE AS Figure 3 : L'ancienneté moyenne par profession Au regard des données, on remarque qu’il n’existe pas de lien évident entre la position hiérarchique dans l’établissement et l’ancienneté dans la profession de la personne interrogée. Question n°4 : Travaillez-vous en équipe ? Toutes les personnes interrogées ont déclaré travailler en équipe. Cette question ne semble pas pertinente étant donné que les personnes interrogées travaillent toutes dans un même établissement. Ce sont des professionnels soignants travaillant généralement et par définition en équipe pluridisciplinaire. -21- Question n° 5 : Avez-vous déjà été confronté à un conflit dans votre équipe, service et/ou établissement ? Avez-vous déjà été confronté à un conflit ? non 32% oui 68% Figure 4 : Confrontation ou non à un conflit Parmi la population interrogée, on s’aperçoit que de nombreux professionnels soignants ont été confrontés à un conflit durant leur carrière. En effet, sur les 22 personnes interrogées, 15 affirment avoir déjà été confronté à un conflit, soit plus des deux tiers des personnes. -22- Question n° 6 : De quel type de conflit s’agissait-il ? TYPE DE CONFLIT 8 8 7 6 5 4 4 4 3 3 2 1 0 conflit d'intérêts conflit de valeurs conflit d'idées conflit de personnes Figure 5 : Les types de conflits Au regard de ces données, il semblerait qu’un même professionnel soignant ait été confronté à plusieurs conflits. En effet, 19 conflits ont été mis en évidence pour 15 personnes ayant déclaré avoir été confronté à un conflit. Le conflit de personnes est de loin le type de conflit le plus rencontré au sein de la population interrogée. -23- Question n°7 : Quelle a été votre position dans ce conflit ? Quelle a été votre position ? 11 12 10 8 Effectif 6 4 4 2 0 0 exclu neutre impliqué Position Figure 6 : La position dans le conflit La plupart des personnes ayant été confrontées à un conflit dans leur établissement se sont positionnées de façon impliquée dans ce conflit (11 personnes sur 15). Ces personnes ne se sentent pas indifférentes dans de telles situations et prennent parti ; elles ne sont pour la majorité d’entres-elles ni exclues ni neutres à l’égard du conflit. -24- Question n° 8 : Ce conflit a-t-il eu un impact plutôt positif ou plutôt négatif ? Nature de l'impact 6 impact positif impact négatif 9 Figure 7 : Nature de l'impact du conflit Sur les 15 professionnels soignants ayant été confrontés à un conflit, 9 ont déclaré que ce dernier a eu un impact plutôt positif, contre 6 pour un impact plutôt négatif. Néanmoins, quelque soit cet impact, positif ou négatif, un conflit semble donc toujours avoir des conséquences. -25- Question n° 9 : Quel a été cet impact ? CRITERES IMPACT POSITIF UNITES DE SENS - - « ça aide à se forger une opinion » « maintenant, on discute plus avant d’agir » « on exprime ses propres valeurs » « on a pu faire une mise à plat de tous les éléments du conflit et on s’est remis en question » « le conflit a permis de confronter mes idées avec mes collègues » « après, j’ai pu me remettre en question » « entre nous, il y a maintenant plus de communication et on arrive à éviter les récidives » « c’est une vraie remise en question ». - « ça a fait des clans » « il y a eu maltraitance d’un patient suite à un conflit d’idées » « il y a toujours un malaise important dans l’équipe » « j’ai reçu des insultes verbales de la part d’un autre agent » « on travaille souvent dans une mauvaise ambiance ». - IMPACT NEGATIF Figure 8 : Les impacts conséquents aux conflits Suite au conflit, le principal impact positif mis en évidence est qu’il permet aux personnes impliquées de se remettre en question. Ceci a été cité pas moins de quatre fois. La notion de communication, de dialogue est un autre impact positif du conflit. Selon certaines personnes interviewées, il semblerait que la communication s’améliore suite à un conflit. Le conflit permettrait également pour certains professionnels soignants de confronter leurs idées avec celles de leurs collègues, d’exprimer leurs valeurs et leurs opinions. Quant à l’impact négatif, une personne sur les 22 interrogées a évoqué un fait grave de maltraitance d’un patient suite à un conflit. Une autre amène la notion de violences verbales dans l’équipe. Le conflit aurait également des conséquences néfastes sur le travail en équipe, il génèrerait des clans et une mauvaise ambiance. -26- Question n° 10 : Un conflit peut-il changer quelque chose dans vos pratiques professionnelles ? Selon vous, un conflit peut-il changer quelque chose dans vos pratiques professionnelles ? 8 OUI NON 14 Figure 9 : Changement ou non dans les pratiques professionnelles Pour 14 personnes interrogées sur 22, soit environ deux tiers, le conflit impliquerait un changement dans leurs pratiques professionnelles. Le conflit serait-il alors un facteur de changement ? -27- Question n° 11 : Quels sont ou seraient ces changements ? Changements dans les pratiques professionnelles suite à un conflit 3 8 3 2 6 3 Amélioration de la communication Modification de la prise en charge Meilleure implication dans les projets Réflexion et remise en question Baisse de la motivation au travail augmentation du stress dans les pratiques Figure 10 : Les changements dans les pratiques professionnelles suite à un conflit Les principaux changements des pratiques professionnelles conséquents à un conflit ayant été relevés sont l’amélioration de la communication (citée 8 fois) et la réflexion et la remise en question de ses pratiques (citées 6 fois). Certaines personnes ont précisé que l’amélioration de la communication favorise une meilleure collaboration, leur travail en équipe, et donc de ce fait la qualité des soins apportés aux patients. -28- Question n° 12 : Quels sont les moyens essentiels que votre supérieur hiérarchique a mis ou devrait mettre en place pour gérer le conflit ? Moyens mis ou à mettre en place par le supérieur hiérarchique pour gérer le conflit 2 3 5 2 8 2 Augmenter la fréquence des réunions de service Instaurer des groupes de parole Augmenter le personnel Effectuer des changements d'équipe Avoir des entretiens individuels Avoir plus d'autorité Figure 11 : Moyens mis en place pour gérer le conflit D’après ce graphique, on constate que plusieurs moyens de gestion des conflits ont été mis en évidence par les 22 personnes interrogées. Trois d’entre eux et les plus fréquemment cités ont un rapport direct avec la communication (réunions de service, citées 3 fois, les groupes de parole, cités 8 fois et les entretiens individuels, cités 5 fois). L’augmentation du personnel, citée 2 fois, serait plutôt, à mon sens, un moyen d’éviter le conflit et non de le gérer. Quant à l’autorité du supérieur hiérarchique, citée 2 fois, elle est caractéristique d’un management directif dans la gestion des conflits. 3.7 REPONSE A LA QUESTION DE L’ENQUETE EXPLORATOIRE Cette enquête tentait de savoir si le conflit était un concept fréquemment rencontré dans le monde de la santé. Il semblerait que oui. Nous avons vu que plus des deux tiers des personnes interrogées y ont déjà été confrontées. Le conflit est peut-être également fréquent dans les autres secteurs d’emploi et dans la société en général. En effet, étant donné l’individualisme croissant et l’évolution de notre société (augmentation du chômage, changements dans les -29- modes de vie, augmentation du stress au travail…), les hommes se sentent peut-être de plus en plus exposés à ce type d’événement. Dans tous les cas, le conflit ne semble jamais être sans conséquence, bénéfique ou néfaste, pour les protagonistes. Il en serait de même pour la cohésion et le travail en équipe et donc par conséquent pour la qualité des soins. 4 QUESTION DE RECHERCHE Au terme de cette enquête exploratoire, je m’interroge sur la place et le rôle du cadre de santé dans l’optimisation de la qualité des relations interprofessionnelles dans l’équipe qu’il encadre, ainsi que dans la prévention et la gestion des conflits. Cette enquête nous permet d’avancer dans notre réflexion et d’orienter la suite de notre recherche, en posant désormais la question centrale : Comprendre quels sont les processus et procédures qu’un cadre de santé ou directeur utilise pour optimiser la qualité des relations humaines et interprofessionnelles, et tendre vers les objectifs du service et de l’établissement. Nous allons poursuivre notre travail grâce à l’éclairage des théories sur les modèles du management, sur la communication ainsi que sur la négociation pour nous permettre de prendre de la hauteur par rapport à la problématique de départ, de conceptualiser et de faire évoluer notre pensée vers une démarche plus scientifique. 5 5.1 PROBLEMATIQUE THEORIQUE LE MANAGEMENT 5.1.1 Historique du management Le management est une discipline relativement récente. Son apparition naît à l’ère industrielle avec la nécessité de réorganiser le travail, puis avec la volonté croissante des Hommes à participer aux décisions et à avoir plus de reconnaissance dans le travail. -30- L’évolution des organisations est rapide. Elle suit les tendances politiques, économiques et sociales de notre société. Le management suit ces mêmes mutations, et il semble intéressant de l’analyser au travers de son histoire. Mouvement de la théorie administrative L’origine du management remonte au début du vingtième siècle. A l’époque, ses fondements s’appuient sur les modèles de Weber (1864-1920) et Fayol (1841-1925) qui prônent la division du travail, la répartition des tâches, la centralisation de prise de décision. Ces auteurs partent de l’hypothèse qu’il existe une manière idéale pour organiser le travail. C’est l’ère de la productivité et de l’optimisation avec la naissance d’un travail planifié soumis aux procédures. (in Thiétart, 2004) La gestion scientifique Fondée sur les travaux de Taylor (1856-1915), la gestion scientifique définit de façon précise la manière selon laquelle les tâches doivent être organisées. Dans cette approche, on ne considère pas le facteur humain, car seule compte l’efficacité de l’employé. Dans ce modèle, la satisfaction des besoins économiques de l’homme est la seule source de motivation, et l’incitation financière la seule récompense. (in Thiétart, 2004) Pour Taylor, cité par Bernoux (1990), « Il est possible d’isoler les individus en faisant appel à leur motivation essentielle sinon unique : l’argent. » Le modèle Taylorien se fonde donc sur la division du travail, la répartition des tâches, la spécialisation de chacun, avec une séparation des fonctions : le sommet pense, et la base exécute. « Il est l’antithèse d’une collaboration,… Un des objectifs de son système est de supprimer la négociation ». (Bernoux, 1990) Ces deux modèles constituent l’approche du management directif, avec une vision très mécaniste de l’homme dans son cadre de travail. Le mouvement des relations humaines Fondé sur les travaux d’Elton Mayo (1880-1949), cette approche prend en compte le facteur humain, considérant son effet prépondérant sur la productivité. L’homme est au cœur de -31- l’entreprise. D’après cet auteur, la satisfaction de l’individu et son désir d’accomplissement deviennent des facteurs importants à prendre en considération. On prend désormais conscience de ses motivations complexes, de ses besoins de valorisation et de reconnaissance. Mais, ce mouvement s’inscrit dans une approche idéaliste de l’individu occultant les relations entre ce dernier, l’organisation et les pratiques de management. Ce modèle constitue le début d’une approche d’un management plus participatif, avec la volonté de mieux comprendre l’homme. Parmi les auteurs du courant humaniste, Douglas Mac Gregor (1960) pensait qu’en introduisant dans le management, des concepts comme le progrès humain et l’évolution sociale, le travailleur pourrait aller vers plus d’autonomie, d’indépendance et donc de liberté. Dans son ouvrage de référence, il évoque deux théories : la théorie du X et la théorie du Y. La théorie du X : Douglas McGregor suggère le nom de théorie du X pour définir l’ensemble des postulats ayant prévalu dans les théories classiques du management depuis Henri Fayol. En ce qui concerne les modes de management et les systèmes de contrôle, la théorie du X admet les suppositions implicites suivantes : - L’individu moyen éprouve une aversion innée pour le travail, qu’il fera tout pour éviter. Selon les dirigeants, l’homme ressent de la pénibilité au travail et celui-ci est dans ce cas vécu comme une contrainte. - Les individus doivent être contraints, contrôlés, dirigés, menacés de sanction, si l’on veut qu’ils fournissent les efforts à la réalisation des objectifs organisationnels. Dans ce cas, il est considéré que les individus ne travaillent que sous la contrainte extérieure et le contrôle, nécessitant la mise en place d’un système de sanctions et de menaces. - L’individu moyen préfère être dirigé, désire éviter les responsabilités, a relativement peu d’ambition et recherche la sécurité avant tout. Ici, le travailleur répond à l’accomplissement de ses besoins primaires, physiologiques mais également de -32- protection et de sécurité1. Le comportement paternaliste des dirigeants est mis en évidence face à des salariés qui ne savent pas se prendre en charge. Théorie X Il en résulte Confirme Prescriptions et contrôles sévères Peur des responsabilités Pas d’initiative Conduit à Passivité au travail Conduit à Figure 12 : Schéma illustrant la théorie du X, proposé par Céline Wynne (2001), fiche de lecture du CNAM, La dimension humaine de l’entreprise, Douglas McGregor, 1960. La théorie du Y : Selon McGregor, dans les années 70, la dimension humaine de l’entreprise s’est incroyablement renforcée, comparée aux années 20. Les pratiques des dirigeants reposent sur un ensemble de valeurs beaucoup plus humaines, devenant ainsi une des préoccupations de première importance pour la fonction de management. 1 Hiérarchie des besoins développée par Abraham Maslow en 1954. -33- Il propose alors la théorie du Y comme nouvelle théorie de mise en valeur des ressources humaines, dont les caractéristiques sont les suivantes : - L’effort au travail est aussi naturel que le jeu ou le repos. L’individu n’éprouve pas de répugnance pour le travail. Ce dernier peut même être perçu comme une source d’épanouissement et de satisfaction. - Le contrôle externe et la menace de punition ne sont pas les seuls moyens pour obtenir un travail utile. L’homme peut se diriger lui-même s’il accepte les objectifs de son travail. - Le système de récompense associé à l’atteinte d’un objectif permet de responsabiliser l’individu. La plus importante de ces récompenses est celle de la satisfaction de l’ego et du besoin de réalisation de soi2, qui peut s’obtenir directement au travers de l’atteinte de ces objectifs. - L’individu peut apprendre, dans des conditions appropriées, non seulement à accepter, mais également à rechercher des responsabilités. - Beaucoup d’hommes sont capables de faire preuve de créativité dans une organisation. - Il est rare que toutes les potentialités intellectuelles d’un individu soient totalement utilisées. 2 Op cit p. 32 -34- Théorie Y Il en résulte Renforce Liberté d’action, contrôle de soi Initiative et sens des responsabilités Conduit à Application au travail Permet Figure 13 : Schéma illustrant la théorie du Y, proposé par Céline Wynne (2001), fiche de lecture du CNAM, La dimension humaine de l’entreprise, Douglas McGregor, 1960. La théorie de la contingence Fondée sur les travaux de Stalker, Urdy, Hall et WoodWard, cette théorie tente de définir une correspondance entre le type de management, le type d’organisation, et le type de production. Mais cette approche mécanique et trop réductionniste fut vivement critiquée. (in Thiétart, 2004) La théorie actionniste des individus Crozier, Friedberg, Argyris et Child, proposent l’idée d’une interaction entre le management et le contexte environnemental. Ils pensent que l’adaptation des acteurs à la structure organisationnelle et l’adaptation de l’organisation aux variations de l’environnement, passent par des jeux de pouvoir et de négociation. L’organisation et les acteurs n’existent pas l’un sans l’autre. Ils partent de l’hypothèse que l’action collective n’est pas naturelle, mais qu’elle est un construit social. (in Thiétart, 2004) -35- 5.1.2 Définition du management Au niveau sémantique, le management est le fait de faire tourner un cheval dans un manège. Conduire, diriger, tenir, enseigner, conditionner, sont les maîtres mots de l’homme qui procède au management de l’animal. Côté entreprise, diriger, animer, adapter, planifier, organiser, contrôler, deviennent les mots clefs qui définissent les fonctions du manager. Aux origines du management, Fayol définissait déjà le manager comme seul responsable, lui attribuant cinq missions fondamentales : planifier, organiser, contrôler, coordonner et commander. De nos jours, Thiétart, parle de quatre activités principales : planifier, organiser, activer (au sens d’animer) et contrôler. « Le management, action ou art ou manière de conduire une organisation, de la diriger, de planifier son développement, de la contrôler, s’applique à tous les domaines d’activité de l’entreprise. » (Thiétart, 2004). « Aujourd’hui, gérer reste un art, et non une profession fondée sur une discipline scientifique. » (Mintzberg, 2006). Si le management est un art, c’est que derrière ces verbes d’action qui le qualifient, se profilent différentes manières de faire. Il y a par exemple plusieurs façons de faire pour commander : soit par l’instruction, soit par la valorisation, soit par la responsabilisation ou encore par la conviction. Poursuivant notre recherche, il semble pertinent d’interroger les styles de management pour mieux le comprendre. 5.1.3 Les différents styles de management Un style de management, « c’est l’ensemble des comportements utilisés par un manager dans une situation donnée avec un ou plusieurs de ses collaborateurs. » (Tissier, 2001). « Le style est un outil de repérage et d’identification des comportements des managers. Il indique dans quelle direction ceux-ci investissent leur temps et leur énergie. » (Tissier, 2001). -36- Steiner (2004), quant à lui, décrit le management en déclinant quatre styles : « - le manager directif donne des instructions, précise et explique comment réaliser la mission, sans prendre en compte la dimension relationnelle. - le manager persuasif explique ses choix et sollicite des suggestions. Il conserve la décision et encourage. - le manager participatif facilite le processus de décision, il demande les idées de ses collaborateurs, encourage, écoute, valorise. - le manager délégatif, délègue la responsabilité de la réalisation de la tâche ». Ces quatre modèles sont les plus représentatifs pour définir le management. Nous éviterons l’analyse complète des styles, trop longue et sans intérêt, pour nous centrer davantage sur deux styles : le style directif et le style participatif. Le style directif Le manager intervient ici en donnant de nombreuses consignes ou instructions, détaillées et claires avec toutefois peu d’explication, il commande. De ce fait, les soignants auront peu d’occasion pour participer à des réunions de service et encore moins pour s’exprimer autour de projet commun. Le cadre définit lui-même les missions et les objectifs à atteindre, il prend seul les décisions. Le rôle principal du manager est de structurer et de planifier les tâches. Les pratiques soignantes s’inscrivent alors dans une juxtaposition des tâches avec peu de possibilités d’interaction. Le soignant est maintenu dans une posture d’agent, ne prenant pas d’initiative. L’autonomie des professionnels n’est pas recherchée dans le style directif. Selon Tissier (2001), « le rôle du manager est ici de structurer l’environnement de travail de ses collaborateurs en définissant par une série de comportements directifs, des objectifs et des règles de fonctionnement. ». Dans ce cas, lors d’un conflit dans l’équipe, le cadre de santé laisse peu de place à la communication, au dialogue et à la négociation. C’est très souvent lui qui impose son point de vue et prend la décision de trancher, sans chercher à obtenir le consensus des protagonistes. -37- Le style participatif Il s’agit d’un modèle où le manager suscite l’engagement du personnel dans l’action et le partage des tâches. Le principal outil mis en place dans ce style est le projet. En effet, le rôle principal du manager est d’associer le personnel aux projets du service, au projet d’établissement, aux décisions, aux groupes de travail et à la vie de l’équipe. Les espaces de communication, les échanges formatifs et les formations interprofessionnelles sont les outils utilisés par le cadre, qui cherche à privilégier l’aspect relationnel et communicatif dans l’organisation du service. C’est un management qui laisse place à l’initiative, qui donne à chaque collaborateur les conditions d’agir efficacement dans un certain degré d’autonomie. Le manager se situe dans l’écoute et la valorisation de l’individu. Il respecte l’individualité de chacun tout en donnant du sens à l’action collective. Le soignant peut développer son savoirêtre et son savoir-faire. Il a l’opportunité de passer d’une posture d’agent à une posture d’auteur/acteur. C’est un management, qui fait naître un climat de confiance et de reconnaissance mutuelle. « Il n’est efficace que si les décisions sont effectivement partagées. » (Lesire, 2001). Dans ce cas, lors d’un conflit, le cadre de santé est à l’écoute des personnes engagées dans ce conflit. Des temps de dialogue, de négociation sont mis en place où le rôle du cadre est un rôle d’accompagnement et de médiation, pour que chacun puisse s’exprimer, se sente reconnu et se retrouve dans une logique de gagnant-gagnant. 5.2 LA THEORIE DE LA COMMUNICATION Si certains résument la communication à un simple échange entre un émetteur et un récepteur, d’autres la qualifient comme étant plus complexe et l’abordent à travers un modèle systémique. 5.2.1 Définitions D’après le dictionnaire historique de la langue française, le mot communication est emprunté au dérivé latin communicatio « mise en commun, échange de propos, action de faire part ». Il -38- a été introduit en français avec le sens général de « manière d’être ensemble » et envisagé dès l’ancien français comme un mode privilégié de relations sociales. Le mot, comme le verbe communiquer, a connu un essor particulier dans le domaine de la publicité et des médias (techniques de communication). Dans l’entreprise, le mot concerne aussi la transmission d’information entre services (Rey, 2004). Il peut y intervenir alors des jeux d’intérêts et de pouvoir, en fonction de la position des acteurs les uns par rapport aux autres dans le réseau organisationnel formel ; et des qualités « multidimensionnelle et multiréférentielle » de la communication qui donnent une pluralité des regards et des optiques pour l’analyser (Ardoino, 2000). Ainsi, selon ce même auteur, la communication est du domaine du processus, de la mise en commun et de l’échange d’informations, ce qui suppose une hétérogénéité et une légitimité des différences entre les partenaires, concernant leurs histoires, leurs formations et leurs expériences, révélées par tout un jeu d’intérêts. Pour Ardoino, « il ne peut être question de pratiques, de situations, de management, d’animation, de coopération, de travail social (…) sans se référer explicitement à la notion de communication » (Ardoino, 2000). 5.2.2 La transmission des messages Les premières théories ayant décrit la communication, la définissent comme une activité de transmission d’un message, d’un émetteur à un récepteur. Il s’agit des travaux de Shannon et Weaver en 1949 qui sont à l’origine de cette conception. Le message transmis est un ensemble de signaux, de signes ou de symboles assemblés selon un code qui rassemble des savoirs communs aux acteurs de la communication comme par exemple la connaissance des lettres de l’alphabet (Reix, 2005, p. 190). Dans ce modèle : L’émetteur est celui qui décide de communiquer pour atteindre certains de ses objectifs. Il a un système de référence. Le récepteur est celui qui reçoit le message et qui peut, à son tour, devenir l’émetteur d’un message de réaction au message initial. Il a également son propre système de référence. -39- Le canal ou média correspond au moyen de transmission du message choisi par l’émetteur. Les bruits sont définis par des distorsions entre le message émis et le message reçu. Il existe des parasites le long du canal de transmission du message. Dans ce modèle, l’information est décrite comme une grandeur objective et mesurable. « La quantité d’informations est la mesure quantitative de l’incertitude d’un message en fonction du degré de probabilité de chaque signal composant le message » (Reix, 2005, p. 191). L’efficacité de la communication se mesure alors par la quantité d’informations transmises. Le linguiste Jakobson propose une adaptation du modèle de Shannon et Weaver dans son schéma de la communication décliné en six pôles : « un émetteur envoie un message à un récepteur grâce à un code linguistique, gestuel, graphique ou autre, par le biais d’un canal auditif, tactile, visuel, dans un contexte donné » (Dortier, 2004, p. 496). A ce schéma, Jakobson ajoute six fonctions du langage : Une fonction référentielle permettant de délivrer des informations. Une fonction émotive ou expressive centrée sur l’émetteur. Une fonction conative par laquelle le langage permet d’agir sur autrui, elle est centrée sur le récepteur. Une fonction phatique ou de contact centrée sur le canal. Elle permet d’établir, de prolonger ou d’interrompre une communication. Une fonction poétique centrée sur le message. Elle exprime les effets de style, la puissance du discours. Une fonction métalinguistique centrée sur le code. Elle consiste à réguler son propre discours. Cette approche de la communication a été critiquée du fait qu’elle ne décrit pas la complexité des situations de communication observées dans les organisations. Un nouveau paradigme communicationnel reposant sur les théories systémique et constructiviste de la communication apparaît. « Il se situe dans le positionnement épistémologique dit interprétatif s’opposant au positionnement positiviste » (Mucchielli, 2005, p. 182). -40- Pour le constructivisme, le sens de la communication n’est pas une donnée inscrite dans le contenu de l’échange, mais une construction sociale faite à travers cet échange. Ceci contribue à une nouvelle contextualisation de l’échange. Pour le systémisme, une communication n’existe jamais en dehors d’un ensemble de communications dans lequel elle s’insère et prend son sens. Il en est de même pour les procédures de communication qui n’existent pas seules ; elles s’insèrent dans un ensemble d’autres communications. 5.2.3 L’interaction L’école de Palo Alto, avec les auteurs Bateson, Watzlawick et Jackson entre autres, est à l’origine de la notion de communication élargie prenant en compte divers paramètres. Cette école a critiqué le schéma de la communication, proposé par Shannon, Weaver et Jakobson, le jugeant trop linéaire, allant de l’émetteur au récepteur. C’est Gregory Bateson (1904-1980), anthropologue et ethnologue spécialiste de la communication animale qui en est le fondateur. En ayant découvert la cybernétique et l’approche systémique, Bateson cherche à appliquer les règles de la systémique, interdépendances des éléments au sein d’un système, aux relations interpersonnelles. Il applique la démarche systémique aux sciences sociales et à l’étude des communications interpersonnelles. Pour l’école de Palo Alto, la conception de la communication est centrée autour des notions de systèmes et d’interaction ou de feed-back. En effet, un locuteur peut être influencé par l’auditoire soit verbalement soit au travers de mimiques telles qu’un froncement de sourcils. L’interlocuteur n’est donc pas un simple récepteur passif mais, par une action en retour (feedback), il a un effet sur le message émis. « La communication doit être pensée en dehors du modèle émetteur-récepteur et considérée comme un processus social permanent intégrant de multiples modes de comportement : la parole, le geste, le regard, la mimique, l’espace interindividuel […] Lorsque plusieurs acteurs sont réunis, tout comportement a valeur de communication : chaque individu vit dans un ensemble de règles et les utilise obligatoirement dans sa communication » (Reix, 2005, p. 191). La communication est alors décrite comme un comportement, pour la comprendre, il est nécessaire de l’examiner dans sa totalité et ne pas se limiter au seul message verbal exprimé. -41- « On ne peut pas ne pas avoir de comportement ; et tout comportement a la valeur d’un message, c’est à dire qu’il est une communication […] On ne peut ne pas communiquer » (Watzlawick, 1972, p. 46). L’école de Palo Alto a distingué deux grandes catégories de signaux : Les signaux de forme digitale, définis par des conventions arbitraires entre signifié et signifiant, traduisant le contenu du message. Les signaux de forme analogique, qui correspondent au domaine de l’expression corporelle, qui sont motivés et qui traduisent la relation entre les acteurs. Lorsqu’il y a un décalage entre la communication digitale et la communication analogique, il y aura alors un paradoxe sur le plan de la compréhension du message. Une communication ne se limite pas à transmettre une information, mais induit en même temps un comportement. Selon Bateson, ces deux opérations représentent l’aspect « indice » et l’aspect « ordre » de toute communication (Watzlawick, 1972, p. 48). L’aspect « indice » transmet une information : c’est le contenu. L’aspect « ordre » se définit comme la manière dont on doit entendre le message : c’est la relation. Contenu et relation sont donc deux aspects de la communication qui coexistent et se complètent. Le contenu sera transmis sous le mode digital et la relation sera surtout de nature analogique. « Le langage digital possède une syntaxe logique très complexe et très commode mais manque d’une sémantique appropriée à la relation. Le langage analogique possède bien la sémantique, mais non la syntaxe appropriée à une définition non équivoque de la nature des relations. » (Watzlawick, 1972, p. 65). L’étude de la communication humaine décrite par Watzlawick et ses collaborateurs se divise en trois parties interdépendantes : la syntaxe, la sémantique et la pragmatique. La syntaxe recouvre les problèmes de transmission de l’information mais c’est d’un point de vue sémantique qu’a lieu la réflexion. En effet, on peut transmettre des séquences de symboles, mais il est nécessaire que l’émetteur et le récepteur se soient mis d’accord sur leur signification. Il existe donc une notion de convention sémantique. La communication affecte le comportement et c’est là son aspect pragmatique. « Ne pas pouvoir saisir la complexité des -42- relations entre un fait et le cadre dans lequel il s’insère, entre un organisme et son milieu, fait que l’observateur bute sur quelque chose de « mystérieux » et se trouve conduit à attribuer à l’objet de son étude des propriétés que peut-être il ne possède pas. » (Watzlawick, 1972, p. 15). La communication est donc un tout, elle n’est pas que langage. Ainsi, dans une interaction, tout comportement (parole, silence, activité, inactivité…) a valeur de message. Ces comportements influencent les autres qui vont à leur tour réagir à ces communications et donc communiquer. De ce fait, « toute communication suppose un engagement et définit par la suite la relation. » (Watzlawick, 1972, p. 49). Pour Mucchielli (2005), la communication est avant tout une activité de construction de sens qui émerge d’un contexte caractérisé par des dimensions multiples : Un contexte spatial : en fonction du lieu, le sens varie. Un contexte temporel : ce qui est dit à un instant donné n’aura pas forcément la même signification à un autre instant. Un contexte par rapport au positionnement des acteurs entre eux ; comme par exemple dans le cas d’un supérieur et de son subordonné. Un contexte culturel de référence aux normes partagées. Un contexte de l’identité des acteurs. « Le processus d’interaction entre les acteurs, dans un certain contexte, va faire émerger du sens et c’est cette émergence de sens qui caractérise la véritable communication. Dans ce cas, la communication n’aboutit pas seulement à une réduction d’incertitude mais également à une réduction équivoque, d’ambiguïté. » (Reix, 2005, p. 193). Il s’agit alors de savoir si le sens compris par le destinataire est le même que celui voulu par l’émetteur. Si ce n’est le cas, certaines communications pourraient alors créer des incompréhensions, des tensions, voire même des conflits. Si au départ, la communication se résumait à une simple transmission de signaux via un canal, d’un émetteur à un récepteur, il en résulte qu’elle apparaît désormais comme un acte social engageant des acteurs dans un certain contexte. La communication aboutit alors à des échanges d’informations et à la construction de sens partagé, nécessaire aux relations interprofessionnelles de qualité et à la négociation dans la résolution des conflits. -43- 5.3 LA THEORIE DE LA NEGOCIATION La négociation est une des méthodes utilisées dans la résolution des conflits, par les cadres, managers et autres dirigeants. 5.3.1 Définitions D’après le dictionnaire historique de la langue française, le mot négociation représente le latin negociatio, -onis « commerce ». Anciennement, il désigne une activité commerciale et, dans un cadre plus vaste, se dit d’une affaire, d’une occupation, sous l’influence de négoce. L’usage moderne l’emploie essentiellement pour l’activité déployée en vue de parvenir à un accord concernant les activités publiques ou privées. Depuis le milieu du XIXème siècle, c’est aussi un terme de bourse désignant le marché passé dans les bourses de commerce ou des valeurs. Ardoino définit la négociation comme « la démarche consentie, organisée, concertée, de part et d’autre, se référant toujours explicitement ou implicitement à un ordre institutionnel des choses en vue de rechercher, sinon de réaliser une économie optimale des convergences et des divergences pour reconnaître, expliciter, et, si possible, dénouer par l’invention commune, un conflit opposant des partenaires-adversaires constituant des rapports de force à propos d’un enjeu déterminé. » (Ardoino, 2000, p. 30). Cette définition, certes quelque peu complexe, nous livre les différentes caractéristiques et composantes du processus de la négociation : Un ordre institutionnel : La négociation est toujours sous-tendue par la dimension collective, même si elle ne met en jeu que quelques acteurs. Une économie optimale des convergences et des divergences : Le produit d’une négociation, d’un accord ou d’un compromis peut être considéré comme un bien, au sens économique, ayant une valeur en soi. Rappelons la présence des convergences et des divergences : aucune négociation n’est nécessaire dans le cas limite où il n’y a que des convergences, aucune négociation n’est possible tant qu’il n’y a que des divergences. Une démarche consentie : Le fait qu’elle soit une démarche souligne son caractère éminemment temporel, inscrit dans la durée, qui doit arriver ni trop tôt, ni trop tard et -44- se doit d’être préparée. Le caractère consenti souligne l’importance de l’acceptation de se rencontrer, l’engagement et l’implication dans le processus. Une invention commune : L’auteur fait allusion ici aux propositions, aux concessions et aux compromis faits par les protagonistes pour permettre un accord. Des partenaires-adversaires : Partenaires dans le sens de la recherche d’un accord commun, autour de la même table, mais adversaires parce qu’exprimant et représentant des intérêts différents. Un enjeu déterminé : Il n’y a pas de négociation sans enjeu réel pour chacune des parties. L’explication de cet ou ces enjeux est primordiale dans toute négociation. Des rapports de force : Dans une telle démarche, des facteurs psychologiques et sociologiques jouent un rôle plus ou moins exprimé tels l’autorité ou le pouvoir. Les rapports de force varient également en fonction des réserves énergétiques, de l’état des résistances, de la fatigue, de l’usure de l’adversaire, des pressions subies… 5.3.2 Négociation, communication et interaction Qui dit négociation dit absolument communication et interaction. C’est Anzieu, en 1974, qui soulignait le caractère spécifiquement humain de la négociation : « La négociation est un fait typiquement humain – on ne l’observe pas chez les animaux – peut-être parce qu’elle requiert le recours au langage, peut-être parce que la résolution des conflits entre les personnes et les groupes appelle le remplacement de certaines lois de la nature par les règles de la culture ». La négociation est fondamentalement un acte de communication. Elle est une communication spécifique en ce sens qu’elle est une épreuve dans laquelle chaque partie s’engage à discuter tout en acceptant une dépendance mutuelle vis-à-vis d’une décision devant se construire progressivement ou devant intervenir plus ou moins brutalement à l’issue de la confrontation. La négociation n’est ni un simple débat, ni une conversation à bâtons rompus. Par les divergences et les arrangements, c’est construire quelque chose, faire des concessions réciproques. Le produit d’une négociation se formalise en termes de compromis. Comme le dit Launay, « négocier, c’est jouer du conflit dans la coopération » (Launay, 1982). Cependant, dans une négociation, l’interaction peut parfois être synonyme de stratagème, de manipulation. Manipuler est proche du sens de « tirer les ficelles ». L’un des protagonistes (le -45- manipulé) est ignorant de ce qui se passe, alors que l’autre (le manipulateur) se caractérise par « le désir de dissimuler ou de travestir son acte » selon l’expression de Todorov (1982). Il y a manipulation dans la relation quand il y a ruse, machination, trucage, dissimulation ou calcul. Ce qui fait craindre à certains la pratique de la négociation, c’est son éventuel glissement dans le monde de la manipulation : « se faire tromper, se faire avoir en beauté, se faire piéger… » La manipulation dans la négociation induit des comportements défensifs chez les protagonistes ; le climat de la négociation devient malsain. 5.3.3 Typologie des négociations Deux modèles de la négociation ont fait l’objet d’une investigation par les théoriciens, travaux de M. Hamon et J.-C. Fauvet, de 1973 à 1975, appartenant à l’école de la sociodynamique : La négociation dite « conflictuelle » ou « distributive », basée sur l’affrontement ; La négociation dite « coopérative » ou « intégrative », basée sur l’entente. Mais la réalité de la négociation est souvent mixte, conflit et coopération, affrontement et entente, sont toujours intimement imbriqués dans bon nombre de négociations. La négociation à dominante conflictuelle Elle présente d’abord des symptômes qui sont la rivalité, la compétition et la méfiance. Les protagonistes vivent une situation d’antagonisme et se perçoivent comme des adversaires : ils ont le sentiment de poursuivre des objectifs opposés. Leur mode d’interaction est nettement « oppositionnel ». La négociation conflictuelle entretient des rapports de proximité avec l’affrontement. « Les protagonistes sont prisonniers de leur intérêt propre et ne craignent pas d’agir au détriment de leurs adversaires » (Bellenger, 2004, p. 40). Ils agissent donc comme des « blocs » et leurs délibérations relèvent plutôt de l’épreuve de force. Les manifestations de coopération et d’interdépendance sont faibles, voire niées. Il existe dans ce cas des rapports de domination, dans un contexte de relation agressive. La ruse, l’irrespect et même la méchanceté ne sont pas souvent absentes des négociations conflictuelles. -46- La négociation à dominante coopérative La négociation dite « intégrative » ou coopérative se situe dans la zone du consensus voire de l’entente. Sa spécificité est qu’elle se base sur un fond de confiance. « Elle est appelée « intégrative » pour respecter la formulation des théoriciens des jeux qui voyaient dans la pratique des acteurs des « jeux à somme croissante » la volonté d’augmenter la « ressource » initiale, objet du jeu » (Bellenger, 2004, p. 47). Dans ce type de négociation, il existe un fort sentiment de coopération qui lui donne sa véritable orientation constructive. Ici, les protagonistes se perçoivent comme des partenaires ; cette notion de partenariat tient essentiellement à deux faits : L’existence d’un projet, d’une œuvre à réaliser dans le temps, en commun La volonté de maintenir un fort lien à long terme de collaboration (par exemple, pouvoir continuer à travailler en équipe) Le désir de gain mutuel est dans ce cas prééminent : chaque partie cherche à satisfaire ses intérêts propres en même temps qu’elle marque son appartenance à une œuvre commune. Une des significations les plus intéressantes dans l’instauration d’une dominante coopérative dans les négociations entre des parties ou des protagonistes tient donc à la mise en évidence d’une bonne qualité de relation. La communication est dans ce cas saine, dans un climat de confiance mutuelle. La négociation coopérative n’est pas à l’abri d’un dérapage, ou bien par incompétence d’une ou des parties en matière de communication de groupe, ou bien par revirement stratégique de l’un des protagonistes qui réoriente la négociation vers la pôle « affrontement ». 5.3.4 Les clés d’une négociation constructive Bellenger emploie cette expression de négociation constructive « pour couvrir toutes les conceptions de la négociation qui fixent un cadre, des règles, une déclaration d’intention visant à faire reculer les interactions biaisées, fondées sur la force, l’agressivité ou une dominante perverse » (Bellenger, 2004, p. 77). -47- Selon Bellenger (2004), la négociation constructive s’articule autour de sept points : Créer le contact : Il s’agit de l’ouverture de la négociation. Elle précise l’objet de la négociation et la situe dans un cadre général. Le questionnement et la consultation : Ici, se déclenche une conversation sur les divergences et les positions des protagonistes. Cela permet également aux parties de mettre en commun leurs informations et de préciser leurs opinions, de « jouer cartes sur table » et de comprendre ensemble. Cette phase, quand elle est bien menée, confirme l’existence d’une confiance mutuelle. La reformulation : C’est reprendre tout ou partie, en résumant, des réponses énoncées pendant la phase précédente. Elle permet d’établir un bilan partiel, accepté réciproquement, des éléments du conflit. Les propositions : Il s’agit d’énoncer de façon claire et sobre ce que l’on souhaite, si possible avec confiance et netteté. Les manipulations ou autres coups de bluff ne sont pas rares dans cette phase. Les propositions doivent être définies de façon réaliste. La discussion : Elle est la phase où les acteurs produisent des arguments pour soutenir leurs propositions. Cette phase de confrontation est considérée comme le temps fort de la négociation, où chaque partie argumente, amène des solutions et tente de persuader, de convaincre l’autre partie. L’ajustement : C’est énoncer de nouvelles propositions en tenant compte des objections de chaque partie. C’est faire des concessions, trouver un compromis, un arrangement, sans oublier la marge que l’on s’est donnée, pour tenter d’aboutir à un accord mutuel. La décompression : Cette dernière phase de la négociation a pour but de restituer dans la relation une dimension plus humaine. C’est un échange plus informel où chacun peut s’exprimer, dire ce qu’il a ressenti pendant la négociation. Cette phase sera différente selon la présence ou non d’un arrangement, d’un accord mutuel entre les parties en négociation. -48- Selon Gordon, le malentendu dans les négociations vient du fait de la confusion entre trois formes d’autorité : l’autorité de compétence, l’autorité de fonction, et l’autorité qui confère le pouvoir de punir ou récompenser et de se faire obéir. Pour lui, c’est l’usage de l’autorité de se faire obéir, de punir ou récompenser qui nuit à l’efficacité des deux autres : « elle amène les détenteurs du pouvoir (cadres, dirigeants, enseignants, parents…) à vouloir décider, trancher, juger au lieu d’écouter et de négocier » (Gordon, 1980). En effet, l’écoute est très importante dans toute négociation. Les théoriciens font de l’écoute active un principe essentiel pour une relation sans perdant. L’écoute active, inspirée des travaux de Carl Rogers, consiste à manifester acceptation et empathie vis-à-vis des négociateurs. 5.4 LA MATRICE THEORIQUE Afin de m’aider dans ma recherche, je me propose d’élaborer une matrice qui me permettra de classer les éléments pertinents sur les différentes théories du management, de la communication et de la négociation. Cette grille critérisée me servira de guide et permettra une lecture et une analyse plus détaillées des résultats de ma recherche. -49- THEORIE CRITERES INDICATEURS Planification INDICES Des tâches et des personnes Le professionnel est un agent DIRECTIF Organisation Les actions sont à exécuter suivant des processus (précision et exactitude) Peu de communication Commandement Le cadre décide seul Pas de concertation, ni de négociation M A N A G E M E N T Hiérarchie très présente Contrôle Vérification permanente L’erreur est une faute Ecoute PARTICIPATIF Conseil Sanctions Le cadre prend en considération les avis et idées des agents Disponibilité du cadre Relation d’aide Arbitrage Le cadre est présent en tant que tiers extérieur dans la gestion des conflits Partenariat Implication de l’équipe Décisions partagées Négociation Communication, discussions, échanges... Climat de confiance UNITES DE SENS -50- THEORIE CRITERES INDICATEURS Ecoute INDICES Laisser parler l’autre Etre disponible Accepter le point de vue de l’autre DE BONNE QUALITE C O M M U N I C A T I O N Empathie Etre authentique, honnête Ne pas juger l’autre Reformulation Irrespect DE MAUVAISE QUALITE Feed-back Monter à l’autre qu’il a été compris Rejeter l’avis, les idées de l’autre Ne pas respecter les temps de parole de l’autre Domination Monopoliser la discussion Esprit de rivalité, de compétition Jugement L’autre est jugé, se sent attaqué et blessé UNITES DE SENS -51- Confrontation et débat Dialogue Equité et tolérance Communication saine Exposition des idées, points de vue et divergences REUSSIE Délibération pacifique Surmonter les difficultés Interaction constructive Franchise, loyauté et courtoisie Recherche de cohérence N E G O C I A T I O N Consensus Faire des compromis, des concessions Arrangements Confiance mutuelle Accroissement des inégalités Esprit de concertation Rivalité, compétition et méfiance Dissimulation des informations NON REUSSIE Domination et puissance Manipulation, chantage Calcul, tactique et stratagème Menace Perversité des acteurs Impossibilité d’aboutir à un accord Mauvaise foi Scandale -52- 6 METHODOLOGIE DE RECHERCHE La méthodologie ne doit pas être confondue avec la méthode. D’après le dictionnaire historique de la langue française, le terme « méthode » est un emprunt au bas latin « methodus » et au grec « methodos » signifiant « direction qui mène au but, cheminement, poursuite ». La méthode relève donc davantage des procédures que des processus. « Elle ne relève pas uniquement ou obligatoirement du programme ; elle est aussi une façon de raisonner, d’appréhender une question ou un problème » (Eymard, 2003, p. 12). La méthodologie est alors réservée au discours sur la méthode. « La méthodologie tente d’expliciter, de justifier, de communiquer les choix, les orientations, la démarche anticipée et entreprise tout au long du chemin, la ou les postures des auteurs ou coauteurs de l’action concernée par la méthode » (Eymard, 2003, p. 13). 6.1 METHODE DE RECHERCHE Plusieurs méthodes de recherche sont proposées et c’est la méthode clinique qui a été retenue. En effet, le thème de mon travail m’a davantage orientée vers cette méthode fondée sur l’écoute et l’analyse des signes recueillis auprès d’un sujet. C’est cette situation de rencontre qui m’a intéressée. Tout comme l’interview, l’entretien est un tête-à-tête, un rapport entre deux personnes avec la transmission d’informations de l’une à l’autre. Le sujet de ma recherche est basé sur les relations interprofessionnelles, la prévention et la gestion des conflits. De ce fait, la communication y a toute sa place et c’est en ce sens que j’ai retenu la méthode clinique ; la notion de rencontre et d’échange m’ont séduite. L’entretien requiert une écoute de la part de celui qui le mène, mais également de l’observation car il est à considérer à la fois le langage verbal mais aussi le langage non verbal. Toutefois, dans l’analyse des résultats, seul le discours de la personne interrogée est pris en compte. -53- 6.2 POPULATION J’ai réalisé l’entretien de ma recherche auprès d’un cadre de santé, actuellement Directeur d’un institut de formation en masso-kinésithérapie. Sa double fonction de cadre de santé, en service et en institut de formation, lui a donné une riche expérience dans l’encadrement d’équipes différentes (soignants et formateurs) et dans la gestion de conflits nés de problématiques différentes également. De par cette expérience, ce cadre de santé a le recul nécessaire pour permettre une meilleure analyse des situations professionnelles vécues. L’OUTIL D’ENQUETE THEORISE 6.3 Il existe plusieurs types d’entretiens. C’est l’entretien semi-directif qui a été retenu et il est guidé par un questionnaire comprenant huit questions ouvertes. Il ne s’agit pas ici de tester une hypothèse, ni de recueillir des données qui viendront confirmer les théories décrites cidessus. C’est la recherche de l’imprévisible qui est attendue. « Dans la méthode clinique, la quête du chercheur n’est pas d’obtenir du sujet qu’il lui livre des données en vue de confirmer ou infirmer une théorie, mais de découvrir dans le récit du sujet d’imprévisibles éléments qui lui permettront de construire un cas clinique […] l’imprévisible est donc ce qui sort des attendus théoriques » (Eymard, 2003, p. 52). Les questions retenues pour la conduite de l’entretien sont les suivantes : Question 1 : Quels moyens utilisez-vous afin de préserver les relations humaines dans votre établissement ? Question 2 : Selon vous, quelle politique de communication doit être mise en place par le cadre de santé ou directeur pour optimiser la cohésion de l’équipe ? Question 3 : Comment définissez-vous la négociation et quels sont les points forts d’une négociation réussie ? Question 4 : Pensez-vous que la qualité des relations humaines dans un service ou établissement dépende du modèle de management utilisé par le cadre de santé ou directeur ? Pourquoi ? Question 5 : Comment concilier les relations humaines de qualité et l’atteinte des objectifs des agents ? -54- Question 6 : Quels sont les intérêts et les limites du management directif et du management participatif ? Question 7 : Quand il y a un conflit entre deux agents ou entre un agent et vous, racontez-moi la façon dont vous vous y prenez pour gérer cela au mieux. Question 8 : Comment procédez-vous pour favoriser l’autonomie des agents dans leur travail ? 6.4 PROTOCOLE DE RECUEIL DES DONNEES Un premier contact s’est fait par mail pour demander au cadre de santé s’il acceptait de participer à ma recherche. Puis, j’ai contacté cette personne afin de lui fixer un rendez-vous pour réaliser l’entretien. Avec son accord, l’entretien a été enregistré et sera retranscrit dans sa totalité en annexe. L’anonymat a été respecté. Au préalable, il a été nécessaire de définir le thème de mon travail. L’entretien a duré 25 minutes et s’est déroulé à l’institut de formation en masso-kinésithérapie où le cadre de santé interrogé à une fonction de Directeur. 6.5 TRAITEMENT DES DONNEES L’analyse de contenu « est une technique de recherche pour la description objective, systématique et quantitative, du contenu manifeste des communications, ayant pour but de les interpréter » (Grawitz, 2001, p. 606). L’analyse de contenu consiste donc à repérer la fréquence d’apparition de certains thèmes, certains mots ou certaines idées au sein d’un corpus de texte. L’analyse de l’entretien va donc se faire en trois étapes : D’une part, la catégorisation des données contextuelles par le recueil des unités de sens en rapport avec la matrice théorique. Il est à noter que l’absence d’unités de sens, dans certaines colonnes de la matrice, peuvent être soit le reflet d’une non -55- compréhension de la question, soit au contraire, les éléments du discours viennent infirmer la matrice. D’autre part, avec un traitement quantitatif des données en utilisant le logiciel Dico® qui permet d’extraire le lexique des formes apparaissant dans un fichier texte, sous forme de tableau. Et enfin, une analyse des résultats prenant en compte le discours de la personne interrogée. 6.6 RESULTATS SCIENTIFIQUES Le recueil des unités de sens Dans cette étape, j’ai classé les différentes unités de sens de l’entretien en rapport avec les théories, critères, indicateurs et indices de la matrice théorique. -56- THEORIE CRITERES INDICATEURS Planification INDICES Des tâches et des personnes UNITES DE SENS « Je répartis les vacations entre les vacataires » Le professionnel est un agent Organisation M A N A G E M E N T DIRECTIF Commandement Les actions sont à exécuter suivant des processus (précision et exactitude) « Le directif répond à des contraintes » Peu de communication «N’entraîne pas de discussion, on n’écoute pas les gens » Le cadre décide seul « On ne leur demande pas leur avis, celui qui Pas de concertation, manage décide, tranche ni de négociation dans le vif du sujet » Hiérarchie très présente Contrôle Vérification permanente L’erreur est une faute Sanctions « Parfois, il faut dire que c’est comme ça et pas autrement » -57- Ecoute Le cadre prend en considération les avis et idées des agents « j’essaie d’être à l’écoute le plus possible » Conseil Disponibilité du cadre « mais ça dépend du caractère du cadre » Relation d’aide Arbitrage Le cadre est présent en tant que tiers extérieur dans la gestion des conflits « écouter chacun de leur côté et après, on discute » Partenariat Implication de l’équipe « ils participent aux projets, les décisions sont prises en commun » « je leur confie des responsabilités, c’est de la délégation participative » « je leur fais entièrement confiance, je les autonomise en leur donnant des responsabilités » PARTICIPATIF Décisions partagées Négociation Communication, discussions, échanges... Climat de confiance « fonctionnement convivial, dans une ambiance sereine et correcte » -58- THEORIE CRITERES INDICATEURS Ecoute INDICES Laisser parler l’autre UNITES DE SENS « cela dépend des personnalités des agents et du cadre » Etre disponible DE BONNE QUALITE C O M M U N I C A T I O N Empathie Reformulation « ici, on est très à Accepter le point de l’écoute, il y a un vue de l’autre respect mutuel de tout le monde » Etre authentique, honnête « ça dépend du caractère du cadre » Ne pas juger l’autre Feed-back Monter à l’autre qu’il a été compris Irrespect DE MAUVAISE QUALITE Rejeter l’avis, les idées de l’autre Ne pas respecter les temps de parole de l’autre Domination Monopoliser la discussion Esprit de rivalité, de compétition Jugement L’autre est jugé, se sent attaqué et blessé « il faut leur laisser la parole, leur expliquer les décisions et répéter si nécessaire » « Le management directif entraîne peu les discussions, la communication existe peu voire parfois pas du tout » -59- Confrontation et débat Dialogue Equité et tolérance Communication saine « il faut qu’on soit en permanence dans le dialogue » « chacun doit expliquer et justifier ses choix et décisions » Exposition des idées, points de vue et divergences REUSSIE N E G O C I A T I O N Délibération pacifique Surmonter les difficultés « il faut prendre du recul et de la distance » Interaction constructive « avoir un dialogue constructif » Franchise, loyauté et courtoisie Consensus Recherche de cohérence « au final, avoir quelque chose d’abouti » Faire des compromis, des concessions « chacun doit laisser un peu de ses propositions » Arrangements « un accord entre les parties » Confiance mutuelle Esprit de concertation « tenir compte des propositions de chacun » « parfois, on n’y trouve -60- Accroissement des inégalités Rivalité, compétition et méfiance pas son compte et on n’est pas pleinement satisfait ; on se sent lésé » Dissimulation des informations Domination et puissance Manipulation, chantage Calcul, tactique et stratagème NON REUSSIE Menace Perversité des acteurs Impossibilité d’aboutir à un accord Mauvaise foi « quand les parties ne trouvent pas d’accord, faire appel à la direction. Cela peut même aller jusqu’au tribunal administratif » Scandale Le traitement quantitatif L’ensemble des formes et fréquences de cet entretien se trouve en annexe. Au préalable, l’entretien aura été débarrassé de tous les mots outils tels que les mots grammaticaux présents dans le texte et n’ayant pas d’utilité pour l’analyse du texte. Minimum Mots lus ou entendus (exemple : Je vois la voie ferrée. 418 5 occurrences et 4 formes qui sont Je, vois, la ,ferrée) Le minimum de fois où une occurrence est citée 1 Maximum Le maximum de fois où une occurrence est citée 17 Occurrences (O) Nombre total de mots 747 F/O Concentration du texte 55,96 % Hapax (H) Ensemble des mots n’apparaissant qu’une fois 287 H/F Dispersion du discours 68,66 % Formes (F) Figure 14 : Tableau du traitement quantitatif Logiciel Dico® -61- Le texte, débarrassé des mots outils tels que les mots grammaticaux, comporte au total 747 occurrences. Le rapport Formes (F) / Occurrences (O) est de 55,96 %, ce qui nous indique que le texte est relativement concentré. En effet, un texte « normal » a un rapport F/O compris entre 50 et 60 % environ. Le nombre d’hapax, c’est à dire de mots n’apparaissant qu’une seule fois dans le discours, est de 287, pour 418 formes et 747 occurrences. Le discours de la personne interrogée est donc relativement ciblé, avec un rapport Hapax (H) / Formes (F) équivalent à 68,66 % (dispersion du discours assez faible). Les seules unités de sens ne nous permettent pas de relever tous les éléments pertinents de ce corpus. Ainsi, la définition d’unités de signification (U.S) par rapport à des occurrences (O) va nous permettre d’analyser un peu plus en détail le discours de la personne interrogée. Ces unités de signification sont définies à partir des thèmes globaux se dégageant de l’entretien. Occurrences conflit(s) écoute(s) négocier relation(s) personnalité(s) dialogue(s) expliquer hostilité justifier contester comprendre relais personnalité confiance ambiance aide concilier discuter U.S. : Relations et communication 14 10 5 5 5 3 3 2 2 2 2 2 2 2 1 1 1 1 -62- Occurrences management participatif gérer expliquer négociation(s) personnalité(s) participer déléguer conseiller responsabilité(s) projet(s) autonomiser avis U.S. : Le management participatif 13 8 8 6 5 5 4 4 3 3 3 2 1 Occurrences management directif gérer décider personnalité(s) responsabilité(s) planification directivité organisation contraintes trancher 6.7 U.S. : Le management directif 13 8 8 6 5 3 2 2 2 1 1 SYNTHESE DES RESULTATS ET REPONSES A LA QUESTION DE RECHERCHE Les mots les plus souvent employés, concernant l’unité de signification relations et communication, sont « conflit » (8 fois au singulier et 6 fois au pluriel), « écoute » (10 fois), « négocier » (5 fois) et « personnalités » (5 fois également). Selon la personne interrogée, il y aurait un lien évident entre la personnalité des agents ou formateurs et la qualité des relations et de la communication dans l’équipe. Pour l’unité de signification du management participatif, les mots les plus souvent repris par la personne interrogée, sont les mots issus des verbes « gérer » (8 fois), « expliquer » (6 fois), -63- « participer » (4 fois), « déléguer » (4 fois) et « conseiller » (3 fois). Nous remarquons qu’il s’agit bien des mots constituant les critères et indicateurs de ce style de management, dans la matrice théorique. Quant à l’unité de signification du management directif, les mots les plus souvent utilisés sont les mots issus des verbes « gérer » (8 fois) et « décider » (6 fois), ainsi que les noms communs « planification » (2 fois), « directivité » (2 fois) et organisation » (2 fois). Tous ces mots se retrouvent également dans la matrice théorique du management directif. Selon la personne avec qui j’ai eu cet entretien, il y aurait un rapport significatif entre le style de management pratiqué par le cadre de santé et la qualité de la communication et des relations humaines dans l’équipe. En effet, dans son discours, on retrouve certaines unités de sens qui le montrent. A la question 4, sur la qualité des relations humaines, nous retrouvons dans sa réponse le propos suivant : « … cela dépend du modèle de management… ». De même à la question 2, sur la politique de communication pour optimiser la cohésion de l’équipe, il a tenu ce propos : « …en faisant du management participatif… ». De plus, il a ajouté à la question 6, concernant les intérêts et les limites des deux styles de management, que : « le management directif répond à des contraintes et n’entraîne pas de discussion », « …dans le directif, on n’écoute pas les gens. » et que « la directivité en permanence entraîne très vite des sentiments d’hostilité ». Selon ce directeur d’institut, le management idéal se situe « dans le va et vient entre ces deux modèles de management », en fonction des équipes à encadrer et des situations. Enfin, nous remarquons également que les mots « personnalité » et « caractère » ont été utilisés à plusieurs reprises au fil des questions, respectivement 5 fois et 2 fois. Selon la personne interviewée, les moyens mis en place par le cadre de santé pour gérer les conflits, préserver et optimiser la qualité des relations humaines dans son équipe, proviennent certes de ses compétences en management (gestion, communication et écoute, négociation…) mais varient, bien évidemment, en fonction de la personnalité et du caractère du cadre. -64- 7 DISCUSSION ET PERSPECTIVES Les relations humaines au travail, la communication, l’individualisme de plus en plus présent dans les organisations, l’apparition des conflits… Un sujet important et vaste !! Où et comment se situe le cadre de santé, pour préserver et optimiser la qualité des relations dans son équipe et ainsi garantir la sécurité et la qualité des prestations pour les patients et les usagers ? Au terme de cette recherche, les résultats confortent mon questionnement. En effet, il semblerait que la qualité des relations humaines et interprofessionnelles ainsi que la cohésion de l’équipe dépendent du modèle de management utilisé par le cadre de santé et de la politique de communication mise en place par celui-ci. Le management idéal serait de « jongler » entre les différents styles de management et de l’adapter en fonction du contexte du moment. Toutefois, comme l’a souligné la personne qui a accepté de participer à ma recherche, il est important de prendre en considération la personnalité, le caractère du cadre de santé dans la façon de manager une équipe. C’est ce à quoi je faisais allusion au début de ce travail, quand je parlais de « compétences cachées propres à chaque individu ». Le cadre de santé utiliserait peut-être des particularités comme le charisme, la séduction… pour optimiser les relations dans son équipe. Mais peut-on affirmer que ces résultats soient définitivement acquis, dans la mesure où ils ne prennent en compte que le discours d’une seule personne ? Il serait intéressant, pour approfondir ma recherche, d’élargir mon étude et de voir si les résultats seraient les mêmes en interrogeant un échantillon plus grand pour pouvoir ainsi comparer les discours. On ne s’improvise pas apprenti chercheur et j’ai pu en faire le constat tout au long de ce travail, où je me suis heurtée à une méthodologie qui m’était jusqu’alors inconnue ainsi qu’à la distanciation que doit avoir tout chercheur par rapport à son thème de recherche. Ce travail m’a permis de me rendre compte de l’utilité de la recherche en santé, dans la mesure où elle m’oblige à me questionner davantage sur mes pratiques et sur le sens que je veux donner à ma future fonction d’encadrement. Être cadre de santé ne se résume pas seulement au management. Cela signifie aussi qu’il contribue à faire évoluer les pratiques pour une efficience dans la prise en charge et l’accompagnement des patients. -65- 8 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES OUVRAGES ALLARD-POESI, F. (2003). Management d’équipe. Editions Dunod, Collection Les topos, Paris, 128 p. ANZIEU, D., (1974). La psychologie de la négociation entre les groupes. Louvain, Université de Louvain ARDOINO, J., (2000). Les avatars de l’éducation. Presses Universitaires de France, Paris, 260 p. BELLENGER, L., (2004). La négociation. Que sais-je ? n° 2187, 6ème édition, Presses universitaires de France, Paris, 127 p. BERNOUX, P., (1990). La sociologie des organisations. Editions du Seuil, 5ème édition, Paris, 382 p. BOURDIEU, P., (1998). La domination masculine. Editions du Seuil, Paris. BOURRET, P., (2006). Les cadres de santé à l’hôpital, un travail de lien invisible. Editions Seli Arslan, 288 p. DONNADIEU, B., GENTHON, M., VIAL, M., (1998). Les théories de l’apprentissage, quel usage pour les cadres de santé ? Masson, Paris, 128 p. DORTIER, J.F., (2004). Le dictionnaire des sciences humaines. Editions Sciences humaines EYMARD, C., (2003). Initiation à la recherche en soins et santé. Editions Lamarre, Paris, 243 p. EYMARD, C., THUILLIER O., VIAL M., (2004). Le travail de fin d’étude : S’initier à la recherche en soins et Santé. Editions Lamarre, Rueil-Malmaison, 124 p. -66- GORDON, T., (1980). Cadres et dirigeants efficaces. Ed. Belfond, Paris. GRAWITZ, M., (2001). Méthodes des sciences sociales. Editions Dalloz, Paris, 1017 p. HELLRIEGEL, D., SOCLUM, J.W. et WOODMANN, R.W., (1992). Management des organisations. Editions De Boeck-Wesmael, Bruxelles. LAUNAY, R., (1982). La négociation, approche psychosociologique. Co-Ed. EME/Librairies Techniques, ESF, coll. « Formation permanente en Sciences humaines », Paris. MARSAN, C., (2005). Gérer les conflits de personnes, de management, d’organisation. Editions Dunod, Paris, 232 p. MC GREGOR, D. (1960). The human side of entreprise.(La dimension humaine de l’entreprise, traduction française de J. ADOINO et M. LOBROT – 1970, Editions La bibliothèque du Management, 205 p. MINTZBERG, H., (2006). Le manager au quotidien. Les 10 rôles du cadre. Editions d’Organisation, Paris, 212 p. MUCCHIELLI, A., (2005). Etude des communications : information et communication interne. Edition A. Collin, 185 p. REIX, R. (2005). Systèmes d’information et management des organisations. Editions Vuibert, Paris, 486 p. THIETART, R-A., (2004). Le management. Collection Que sais-je ? Editions Presses Universitaires de France, 11ème édition, Paris, 127 p. THUILLIER, O., VIAL, M., (2003). L’évaluation au quotidien des cadres de santé à l’hôpital. Editions Lamarre, Rueil-Malmaison, 208 p. TISSIER, D., (2001). Management situationnel. Editions Insep Consulting, Paris, 143 p. -67- WATZLAWICK, P., BEAVIN, J.H., JACKSON, Don D., (1972). Une logique de la communication. Editions du Seuil, Paris, 276 p. ARTICLES LESIRE, L., (septembre 2001). Le management situationnel. Revue Signaux, n° 96. STEINER, B., (novembre 2004). L’attitude coach et les styles de management. Revue Soins cadres, n° 52. TRAMONI, AV. & RENAUD, MH. (3ème trimestre 2000). Être cadre en l’an 2000, quel rôle pour le cadre de santé au regard des nouveaux enjeux de santé. Revue Soins cadres, n° 35. DICTIONNAIRES Dictionnaire historique de la langue française en trois volumes, sous la direction d’Alain Rey, Dictionnaires Le Robert, Paris, 2004. INTERNET www.cadredesanté.com HASLEY F., RUFIN F., CATANAS M. et CARRE S., Travail en équipe et gestion des conflits : rôle du cadre de santé. (2003). www.sante.gouv.fr Circulaire DH/8A/PK/CT n° 00030 du 20 février 1990 portant mission et rôle des surveillant(e)s et surveillant(e)s chefs hospitaliers. -68- 9 ANNEXES Annexe 1 : Retranscription de l’entretien Annexe 2 : Formes et fréquences de l’entretien -69- RETRANSCRIPTION DE L’ENTRETIEN Q1 Bon, préserver les relations humaines, qu’est-ce que vous entendez par là ? Parce que les relations humaines euh…, tout n’est que relations humaines. Mais de bonnes relations humaines, pour éviter les conflits entre enseignants ... et entre étudiants et enseignants, euh… enfin, entre professionnels. Entre professionnels, alors ici c’est vrai qu’on fonctionne historiquement …oui je vous dis qu’historiquement, au fond, ici il y a …. Moi je suis à cette place depuis 2005 hein. Avant, j’étais enseignant et mon prédécesseur fonctionnait vraiment sur le mode de la convivialité voire de l’affectivité. Alors sans, sans rester sur ce, sur ce modèle, mais c’est vrai qu’on a un fonctionnement très, très convivial, qu’on a beaucoup d’enseignants qui sont, qui sont anciens dans la maison. Donc, qui sont habitués, qui connaissent bien le fonctionnement et c’est vrai que… il y a une ambiance qui est tout à fait, tout à fait sereine et correcte. Il y a un respect mutuel de, de tout le monde, et moi je suis à l’écoute aussi, enfin, j’essaie d’être à l’écoute le plus possible… Toutes les, les décisions pédagogiques, enfin les grandes décisions pédagogiques hein sont prises sont prises en commun. Donc, ça facilite les choses. Personne n’est mis devant le fait accompli. Enfin, il y a des choses comme ça, donc je pense que..., en faisant participer les gens bon ben, la, les relations humaines sont améliorées … même si bon tout le monde ne … ne se saute pas au coup hein, ce qui est normal hein, voilà oui ça dépend des personnalités des agents évidemment, mais aussi de la personnalité du cadre. Q2 Alors, si on parle en terme de management, bon tout le monde parle du management participatif, évidemment hein c’est sûr,… euh même si on sait que ce management, il a ses limites hein il a ses limites, parce que à un moment donné, ben, celui qui manage, il doit décider, voilà hein. Et c’est vrai qu’ici, euh je dois dire, on … moi alors, je, je … sans aucune prétention hein, j’essaie de, d’inculquer les projets visées hein vous connaissez hein ? euh et mais après on en discute et même si j’ai déjà fait une trame, avec euh quelque chose derrière la tête, après les, les enseignants y participent hein, ça c’est certain. En plus, euh, on est … ici très à l’écoute, enfin relativement à l’écoute des étudiants hein, puisque en fait maintenant, il y a un conseil pédagogique qui a succédé au conseil technique. Donc et c’est vrai que à chaque fois, euh dans les questions diverses, en fin de conseil, les étudiants donc, proposent des choses, alors qui sont tout à fait acceptables, ou au contraire qui sont irréalistes des fois, bon mais … moi je tiens compte dans la mesure du possible de…des étudiants également. On est dans une structure où les étudiants heu… paient leur scolarité, on ne fonctionne qu’avec les droits de scolarité hein, donc aucune subvention …… On ne reçoit aucune subvention de… de qui que ce soit … donc c’est vrai les étudiants, ils achètent une prestation de formation et donc il faut aussi qu’ils … qu’ils aient en retour ce qu’ils attendent. -70- Q3 Alors, définir une négociation, je sais moi que je parlerai plutôt … de, d’accord entre les parties hein, plus que de, que de négociation … Et si elle est réussie, ben c’est que chacune des deux ou des trois parties, ou des, des plusieurs parties … y ressort satisfaite, c’est à dire que chacun y ait laissé peut-être un petit peu de ses propositions hein, mais pour ….heu, pour voir finalement quand même quelque chose d’abouti. Donc, il faut que … d’une négociation personne ne sorte déçu, ce qui me paraît évident hein. … Voilà et que tout le monde y trouve son compte même si on n’est pas pleinement satisfait par, par ça …Alors je parle au niveau ici, ici ben la négociation, c’est au niveau des formations, c’est au niveau des … des horaires, j’essaie de répartir, on fonctionne avec heu, beaucoup de vacataires, donc de répartir le nombre de vacations entre les vacataires. Il ne faut pas qu’il y en ait qui se sentent lésés. Puisque après, … les gens s’organisent et c’est vrai que ce sont souvent des gens qui travaillent à côté, mais que … heu l’école constitue pour eux un, un … comment dire, un salaire supplémentaire hein. Donc il faut que tous le monde en profite et soit satisfait … Donc moi, j’essaie de … voilà, de négocier comme ça, pour… pour les enseignements hein. Q4 Bah c’est évident hein, enfin non, cela dépend et du modèle de management et de la personnalité du …du manager Hmmm ! Alors c’est vrai qu’il y des gens qui sont … quasiment tout le temps dans un management dit, dit directif. Bon ben, ou ça passe ou ça casse hein, mais bon, c’est vrai que le management directif il faut qu’il ait sa place également hein parce que, évidemment personne … ne, ne peut faire ce qu’il a envie de faire en permanence… Mais que heu …ben, il y a, il y a plus de, de gens qui sont enclin vers le participatif mais bon après, c’est, c’est très difficile de fonctionner uniquement comme ça … Parce que on peut même tomber dans un management heu affectif, heu et donc là, il y a et à écouter tout le monde et à prendre en compte tout le monde et ça c’est pas possible… hein. En particulier dans bon, dans un établissement de formation comme ici, où il y a beaucoup d’étudiants hein, puisqu’on est heu le plus gros en France donc ça fait beaucoup de… on a 400 étudiants à gérer donc heu … Maintenant, après il faut dire : ben c’est comme cela et pas autrement, que ça soit envers les étudiants ou envers les enseignants hein …. Et dans un service, bon moi j’ai géré un service pendant plusieurs années, où je gérais … et le personnel de rééducation, donc kiné, ergo … et du personnel brancardier, et ASH, tout ça donc hein …. Donc, là, je veux bien qu’on soit un petit peu dans le participatif, mais c’est peut être quand même, hein … assez limité. Q5 Ah ça, c’est un « comment concilier les relation humaines de qualité… ? » Ben c’est que … ça rejoint un petit peu la négociation. C’est à dire que … heu il faut qu’on soit en permanence dans le dialogue, … que le dialogue soit, soit constructif, c’est à dire …. alors je, je ne sais pas si, si il faut parler de démagogie, mais il faut quelquefois être directif sans donner l’impression qu’on le soit …hein ou, c’est à dire heu … faire penser, faire penser aux gens qu’on va dans leur sens et même leur dire : « oui mais c’est vrai, heu… cette demande est tout à fait heu réaliste » et tout ça, mais quand même, il y a des impératifs logistiques qui font que -71- l’on ne peut pas y répondre complètement. Mais c’est vrai que .. ben que ce soit les enseignants ou les étudiants, ils n’ont pas … heu toujours les éléments heu logistiques, financiers, heu à la disponibilité de, du personnel heu qui fait que … Et c’est pareil dans les services hein, dans les services hospitaliers, c’est la même chose hein puisque le cadre, il fait quand même le relais avec la direction hein et… Les agents ne sont pas forcément au courant heu des, de … comment dire ? de toutes ces contraintes hein, contraintes logistiques, budgétaires heu …et même les contraintes humaines. Q6 Ben, les limites du management directif, heu elles sont que si on est dans la directivité en permanence, on va se … se heurter à l’hostilité des gens, quoi, si on n’écoute jamais, jamais les gens, si on ne leur demande jamais leur avis, … heu il arrivera un moment où ça va coincer. Le management participatif, il a ses limites également. Parce qu’on ne peut pas, on ne peut pas tout écouter … et .. enfin, on peut entendre mais on peut pas forcément tout écouter et … comment dire ? répondre à toutes les … demandes. Donc, le management idéal, il me semble, qu’il est heu dans le va et vient entre les deux hein, c’est, c’est évident … hein. C’est comme pour l’apprentissage hein, on est dans le béhaviorisme, on est dans le socioconstructivisme, on passe de l’un à l’autre en permanence hein pour le … Voilà, donc je pense que c’est un petit peu, un petit peu comme ça, bon mais c’est vrai que c’est une question, un petit peu de, de paradigme hein dans lesquels les, les cadres se placent hein. Il y en a qui sont bien dans la directivité, c’est comme ça et pas autrement ; mais bon, ça c’est très, très personnel après, en fonction du caractère aussi du cadre. Ben, l’intérêt du management participatif, c’est que … c’est que les gens se sentent concernés et écoutés. Et l’intérêt du management directif, c’est que cela répond à des contraintes, heu… cela ne, n’entraîne pas de discussions … mais bon … heu le, le directif tout le temps, heu à mon avis, entraîne très vite un sentiment de, d’hostilité hein envers le cadre, c’est dangereux… Si il n’y a que du directif. … Ou alors, il faut bien faire comprendre aux agents que l’on peut être dans le participatif, mais qu’il arrive un moment ben il faut, il faut trancher quoi, décider dans le vif du sujet. Q7 Ben, tout dépend de, tout dépend de la nature du conflit hein. Des conflits entre l’agent et le cadre, c’est … bon moi, je sais, c’est ce que j’ai vécu, par exemple, c’est des, des demandes de jours de congés ou de récupération qui ne peuvent pas être donnés, parce que il y a une autre demande … Bon alors c’est sûr que le, l’agent peut rentrer en conflit, mais il suffit de lui expliquer les décisions et les choix, et … là, ça, cela ne dépend pas du cadre hein, ça dépend de, de l’effectif minimum à assurer dans un service hein donc là, il n’y a pas, enfin moi il me semble que le conflit, ce type de conflit peut être aisément heu … aisément résolu … Heu après, quand il y a des, des conflits qui sont sur heu le comment dire ? heu … sur l’incompréhension, ben il suffit d’expliquer au mieux et répéter si nécessaire, aussi pour ne pas que les agents se sentent floués ou même les étudiants hein … Quand les étudiants ne comprennent pas une note, ne comprennent pas telle ou telle chose, heu donc … il faut expliquer, il faut, … tout est dans la, comment dire ? … dans la capacité du cadre, qu’il soit cadre formateur ou cadre gestionnaire, à expliquer le pourquoi, à expliquer, à justifier -72- l’évaluation pour les étudiants, à justifier une … une décision pour un cadre gestionnaire. Enfin bon là, c’est heu … comment dire ? On, on est vraiment dans la personnalité, la personnalité des gens, des cadres qui sont plus à l’aise pour gérer le conflit hein que d’autres dans ce, dans ce type de situation …. Et puis c’est vrai qu’en tant que, en tant que cadre, il faut prendre beaucoup de recul hein … J’en parlais tout à l’heure là avec le, monsieur D., qui était cadre et qui a des chefs d’équipes avec lui qui disaient qu’il y en a qui … se noient encore. Ces personnes ne prennent pas assez de distance par rapport à la situation de conflit, elles sont trop dans, dans l’affectif avec les agents et prennent partie pour quelqu’un, heu … et là, c’est pas possible, c’est là, dans la distanciation qu’on gère au mieux … mais il faut être à l’écoute hein. Et entre deux agents, ben oui, moi ça, j’ai eu même des conflits très, très durs entre, entre brancardiers ou entre kinés,… hein même avec des violences qui, qui pouvaient aller jusqu’aux violences heu physiques hein. Alors surtout, il ne faut surtout pas agir à chaud … parce que ça alors c’est, c’est terrible. Il faut laisser passer le, l’orage un petit peu … mais moi, à chaque fois, j’ai essayé de gérer dans le … comment dire ? dans, dans l’explication, dans le dialogue, dans l’écoute de, d’abord chacun de leur côté, et après ensemble. Voilà quoi hein et après quand c’est des choses qui me dépassent vraiment ou il y a peut être même heu une sanction disciplinaire, bon à l’époque, moi, j’étais pas directeur, j’étais cadre sur le terrain … donc ben, il y a toute la hiérarchie. Voilà, le conflit, on le gère parce que en tant que cadre, il faut également se couvrir légalement, au niveau juridique … Donc il faut signaler tout conflit qui risque de, de s’envenimer, qui risque de porter atteinte aux personnes. Enfin je, je vous parle de ça parce que cela m’est arrivé … Après, il faut se protéger. Et puis on a une direction qui est là pour nous aider. Ici, c’est pas pareil puisque la direction, … quoique ici même, on a une tutelle qui est là, qui est la DDASS et la DRASS hein, donc la DDASS qui gère la scolarité, et la DRASS qui gère les examens et qui peuvent intervenir bien sûr hein si il y a un étudiant qui conteste les résultats des examens, qui conteste un jury, après moi, ce n’est plus, ce n’est plus de mon ressort hein. C’est à moi de, d’expliquer qui était le jury et les conditions, mais après c’est la DDASS ou la DRASS. Cela peut même aller plus loin, pour se retrouver au tribunal administratif hein, pour la remise en cause d’un examen, d’une heu … comment, d’un échec au diplôme d’état. Q8 Bon ben là, nous, enfin ici, les cadres formateurs, ça va quoi, ils sont autonomes. En plus, on a peu de, de jeunes enseignants hein. Ce sont des gens qui ont déjà une certaine heu une certaine expérience. Donc heu moi, j’autonomise les gens en leur confiant une partie, alors je dirai, de responsabilités, une partie du travail d’organisation et de planification du contenu de, des enseignements … hein même si c’est moi, … je vous l’ai dit tout à l’heure, qui impulse cela, qui impulse cela au départ. Et sur le terrain, j’ai toujours fait comme cela … hein. C’est à dire sectoriser les kinés, sectoriser les brancardiers, heu… rendre les brancardiers gestionnaires et responsables de leurs outils de travail, de leurs fauteuils, de l’entretien, de la désinfection, enfin de tout cela … hein. Alors, c’est de la délégation, mais de la délégation participative quoi, ce n’est pas : je délègue pour ne pas faire ce travail hein. Heu par exemple, au niveau des stages, il y a une responsable de stage, elle est référente de stage. Moi, je délègue parce que je ne peux pas m’en occuper et je leur fait entièrement confiance hein. Donc, elle gère complètement les, les planifications des stages, les changements de stages, les conflits enfin sauf si il y a des conflits graves auxquels cas là, il faut que je m’en mêle. -73- Avez-vous quelque chose à rajouter ? Non. Moi personnellement, je serais plus dans le management participatif parce que je trouve que c’est le plus intelligent mais je vous dit en jonglant en permanence entre le participatif et le directif parce que voilà … A priori, sans aucune prétention de ma part, mais il n’y a que moi qui connaît tous les impératifs, qu’ils soient financiers, logistiques, humains et que les enseignants et les étudiants n’ont pas forcément. Et quand j’étais sur le terrain, c’est vrai que c’était les cadres de proximité qui relayaient tout ça hein, parce que ce sont les cadres qui rencontrent régulièrement la direction, qui sont au courant des projets, qui participent aux projets hein. Mais c’est vrai que bon moi je n’ai vécu qu’une accréditation, l’AV1. Je n’ai pas vécu l’AV2 puisque je ne suis plus sur le terrain ; mais c’est vrai que j’avais énormément impliqué tous les agents du service, y compris tous les brancardiers, pour qu’ils comprennent ce que c’était et l’enjeu que cela pouvait avoir pour l’établissement… Et c’est vrai que cela a ressoudé l’équipe, les gens avaient des objectifs communs quoi, pour l’établissement. Donc cela a eu un retour bénéfique hein, avec une mise à plat des pratiques professionnelles. Et ça s’est accru encore avec l’arrivée de l’AV2.