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Les sociétés qui transgressent la différence entre espèce :
sources ?
Le livre de Ford & Beach est une synthèse des données éthologiques et
ethnologiques connues en 1960. Une section est consacrée aux activités
sexuelles avec les animaux. Ce livre est une des références pour la sexualité.
Seul le chapitre sur la physiologie est trop ancien. Les données éthologiques et
ethnologiques sont toujours valables.
En français : Clellan Ford et Frank Beach,
Le comportement sexuel chez
l'homme et l'animal
, R. Laffont, 1970
En anglais, plus facile à trouver : FORD Clellan S. , BEACH Frank A. : Pat-
terns of sexual behavior Methuen & Co, London, 1965
PATHOLOGIE / CLINIQUE
Naît-on pervers ? La perversion est-elle innée ?
Il existe plusieurs définitions du terme "perversion". L'existence de la per-
version dépend en partie de la définition donnée à ce terme.
À noter que la tendance actuelle est d'abandonner le terme de "perver-
sion", moralement connoté, au profit du terme de "paraphilie" (Blachère
2007
mais voir les critiques de Blachère sur les limites de ce nouveau terme).
Définition courante
– Qui est enclin au mal, qui se plaît à faire le mal ou à l'encourager. Cor-
rompu, dépravé, méchant, vicieux. (Le Grand Robert, 2005).
– En psychologie, il existe un terme désignant une disposition psychique
assez similaire, la perversité : tendance pathologique à accomplir des
actes immoraux par la manipulation des besoins d'autrui au profit des
siens (Godefroid, Psychologie, De Boeck, 2008, p.965)
D'après les travaux de Piaget (1932), Kohlberg (1963), et Bandura (1977),
le développement moral, étroitement associé au développement cognitif,
dépend de l'environnement socioculturel (Godefroid 2008
). La moralité
sexuelle serait essentiellement apprise.
En fonction de ces données et de ces définitions, la perversion sexuelle et
la perversité sexuelle ne sont pas innées mais peuvent être acquise.
Définition psychiatrique et psychologique
– Toute relation sexuelle cherchant le plaisir en dehors des relations dites
«normales» avec un partenaire de sexe opposé et d'âge équivalent. On
remplace cette notion, chargée de connotation morale, par celle de pa-
raphilie. (Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse, 1994, p.569).
– Déviation des tendances liées à l'activité sexuelle. (Psychologie,
Godefroid, De Boeck, 2008, p.965)
Ces définitions font référence au modèle du comportement de reproduc-
tion instinctuel, présenté initialement par Krafft-Ebing, où tout comportement
non hétérosexuel est considéré comme "maladie".
Si les renforcements associés aux zones érogènes sont bien le principal
facteur à l'origine de l'apprentissage du comportement sexuel humain par
conditionnement opérant (Agmo 2007
), alors le but du comportement sexuel
est la stimulation du corps et pas la reproduction. En fonction de ces données
et de ces définitions, il n'existe pas de perversion sexuelle.
Dans ce nouveau cadre, le problème est déplacé : ce n'est plus tellement
la dynamique interne du comportement qui est important (puisqu'il n'existe
plus d' "instinct"), mais plutôt l'effet du comportement érotique. La question
serait plutôt de savoir si le comportement érotique porte atteinte, ou non, à
l'intégrité physique ou psychologique d'une personne.
Définition psychanalytique
– Expérience d'une passion humaine où le désir supporte l'idéal d'un objet
inanimé. (Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse, 1994, p.569).
Cette définition fait référence à la théorie psychanalytique, qui a été éla-
borée au début du XXe siècle. Freud, médecin neurologue, a d'abord essayé de
développer un modèle neurobiologique du psychisme. Mais, en raison à
l'époque du manque de connaissances en neurosciences, il a élaboré un mo-
dèle plus spéculatif. Plusieurs études récentes posent la question de la validité
de ce modèle psychanalytique (Grünbaum 1984
).
Manuel de sexologie, Masson, 2007 p.254
Godefroid, Psychologie, De Boeck, 2008, p.734
Anders AGMO, Functional and dysfunctional sexual behavior, Elsevier, 2007
http://www.elsevier.com/wps/find/bookdescription.cws_home/712200/description#desc
ription
Adolf Grünbaum. « Les fondements de la psychanalyse », Puf, 1984
Un enfant abusé sexuellement en bas âge va-t-il reproduire le
même phénomène à l’âge adulte, si aucune prise en charge n’a
été effectuée ?
Non, pas particulièrement. Voir les conclusions d'une thèse portant sur ce
sujet : "Les victimes d'abus sexuels recrutées dans la présente étude ne sem-
blent pas avoir développé d'intérêts pour les enfants, en tant qu'objets
sexuels, contrairement aux pédophiles incarcérés." (Grisé 1998
)
ÉPISTÉMOLOGIE / MÉTHODOLOGIE
À quel moment passez-vous de la compréhension à
l’explication ? Quelle est la légitimité des conséquences ?
Dans la présentation PowerPoint, la première grande partie "modèles
comportementaux" résulte d'un travail de recherche basé sur la synthèse de
données pluridisciplinaire. Cette recherche à permis d'identifier les facteurs
primordiaux qui seraient à l'origine du comportement sexuel chez les mammi-
fères et chez l'Homme. C'est la partie la plus étayée scientifiquement.
Puis à partir de ces facteurs primordiaux, j'ai élaboré un modèle mammi-
fère et un modèle humain, qui décrivent le développement et la dynamique du
comportement sexuel. Ces modèles sont partiellement étayés par des données
déjà existantes et par une première vérification expérimentale. Ces données
sont présentées dans la partie "Développement et dynamique" de la présenta-
tion PowerPoint.
Les données et les analyses présentées dans la partie "Perspectives cli-
niques" sont les conséquences des modèles. C'est plus spéculatif, mais j'ai
essayé d'étayer ces conséquences par les résultats d'études cliniques.
À noter que ce travail de recherche propose un modèle, c'est-à-dire tout
un ensemble d'hypothèses qui sont organisées de manière logique et cohé-
rente pour expliquer un phénomène. Il est quasiment impossible de proposer
un modèle entièrement validé scientifiquement, car cela représente des cen-
taines d'expérimentations dans des domaines différents.
Ce modèle est actuellement à son premier stade de développement, où
seules les principales caractéristiques sont présentées. Il existe maintenant
suffisamment de données valides pour passer au deuxième stade, celui de la
description complète, qui permettra une vérification à plus grande échelle.
À noter également que les modèles sont rarement entièrement validé. Par
exemple, les deux principaux modèles concurrent, "psychanalytique" et "re-
production hormonal" posent chacun des problèmes, ce qui n'empêche guère
leur adoption et leur utilisation par des personnes et des institutions. Le mo-
dèle psychanalytique pose des problèmes récurrent de validation (cf. entre
autres Grünbaum
) et le modèle "reproduction hormonal", étayé surtout par
des études sur les rongeurs, ne peut expliquer de nombreux aspects de la
sexualité humaine : la masturbation, le baiser, les caresses sensuelles, les
activités oro-génitales (fellation, cunnilingus ), les activités bi- ou homo-
sexuelles, les activités sexuelles prépubères (qui représentent chez les chim-
panzés
pan paniscus
presque 1/4 des activités sexuelles), les activités
sexuelles après la ménopause ou l'andropause, l'utilisation d'objets, les activi-
tés sexuelles entre espèces (en particulier entre primates), les activités
sexuelles potentiellement reproductrices, mais atypiques, telle la sexualité de
groupe ; ou bien la fonction et l'importance des processus de renforcement, du
plaisir, des apprentissages, etc.
En fait, il faut plutôt savoir quel est le "moins mauvais modèle", celui qui
permet de comprendre, d'expliquer et d'agir sur le plus de situations éduca-
tives, cliniques et sociales.
Un chapitre "Épistémologie / Méthodologie" est prévu (été 2009) dans la
description détaillée du modèle, pour aborder tous les problèmes scientifiques
du modèle.
http://www.theses.umontreal.ca/theses/pilote/grise/these.html
Adolf Grünbaum. « Les fondements de la psychanalyse », Puf, 1984