Le tableau était projeté sur un écran d’ordinateur pendant 30 secondes et les mouvements
des yeux de chaque enfant étaient enregistrés.
Cette expérience a révélé une dyscoordination des saccades, une différence notable entre
les deux yeux de l’ordre de 22% (par rapport à la moyenne de l’amplitude des saccades des
deux yeux). Par ailleurs, pendant la fixation qui suit la saccade, on observe une instabilité de
l’angle des axes optiques (vergence) d’environ 10%.
Pendant une tâche de lecture de mots isolés, ces performances étaient un peu meilleures
chez ces enfants (décalage des saccades des deux yeux de l’ordre de 10% et instabilité de
la vergence autour de 9%). Mais chez les adultes ces deux valeurs ne dépassent pas 5%,
quelle que soit la tâche.
Ainsi, le travail visuo-attentionnel et moteur lors de chaque fixation de la lecture peut être
une épreuve ingrate.
Actuellement, il est possible d’augmenter artificiellement la disparité entre les deux yeux, le
moment où la vergence commence, et après une ou deux heures d’un tel entraînement
dynamique, le sujet apprend à effectuer des vergences plus amples et plus rapides.
L’enregistrement des mouvements des yeux pourrait donc apporter beaucoup à la
rééducation des dyslexiques.
D’autres études (Galaburda et Livingston, 1993) suggèrent que des changements
dans les voies sensorielles des patients pourraient être responsables de leurs difficultés à
lire. Des examens post mortem ont montré que les neurones des dyslexiques étaient plus
petits que ceux des témoins dans les aires magnocellulaires du corps genouillé latéral où les
neurones étaient à la fois plus petits et agencés de façon désorganisée (le système
parvocellulaire serait, lui, intact). La caractéristique de ces cellules, et par voie de
conséquence tout le système magno, est de répondre spécifiquement à des stimuli brefs et à
changement rapide.
Il se pourrait que ces anomalies nuisent au traitement rapide qu’exigent des signaux
changeants comme ceux impliqués dans la lecture.
Les preuves d’une atteinte de ce système dans la dyslexie reposent sur un ensemble
d’arguments expérimentaux :
Un trouble de la vision des contrastes
Une anomalie de la persistance visuelle
Un défaut de détection du mouvement
D’autres études chez des dyslexiques, en imagerie cérébrale celles-là, ont pour leur part
montré une activation moindre dans l’aire visuelle V5/MT responsable de la détection du
mouvement ou dans la partie inférieure du lobe temporal gauche.
Récemment cette hypothèse a été violemment contestée (travaux de Kruk et Willows,
2001 et Ben Yehudah et al.,2001) qui démontrent que les mêmes tâches réputées sensibles
à la dysfonction magnocellulaire sont réalisées de manière déficitaire par les dyslexiques si
la consigne donnée au sujet de faire un choix entre deux patterns présentés
successivement, alors que leur performance est tout à fait normale si les deux stimuli sont
présentés simultanément à deux emplacements différents d’un même écran.
Par conséquent, c’est bien la caractéristique temporelle de la tâche et non son
contenu perceptif qui serait déterminant dans la dysfonction.