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INTRODUCTION
« Ma femme est morte, je suis libre !
Je puis donc boire tout mon soûl. »
Depuis longtemps, l’alcool joue un rôle considérable dans notre société, mais la place
plus spécifique de l’alcoolisme demeure plus délicate à définir. En effet, l’alcoolisme est un
sujet difficile à appréhender compte tenu de la complexité de ce phénomène concernant
notamment sa définition, son origine et ses conséquences tant sur le plan médical que social
et criminogène.
L’alcoolisme demeure l’addiction la plus anciennement repérée. Le terme « alcool »
trouve son origine dans le radical arabe Al Kho. Celui-ci a été introduit en occident lors du
retour des croisades. Au XVIème siècle, il désignera dans les breuvages, ce qui est « subtil »
au sens alchimique du terme, alors qu’au XIXème siècle, la pathologie sera nommée :
l’alcoolisme désigne la manifestation pathologique de l’intoxication due à l’alcool. Jusqu’à la
fin du XIXème siècle, l’alcoolique sera considéré comme un « ivrogne »
. Puis, la notion de
malade remplacera celle d’ivrogne, le lien étant progressivement fait entre la consommation
excessive d’alcool et certaines maladies du buveur. Depuis une vingtaine d’années seulement,
la notion de conduite pathologique complexe est venue remplacer le concept de maladie. Bien
que cette notion désigne une conduite variable selon les individus et les environnements,
celle-ci se traduit généralement par une consommation excessive et répétée d’alcool. Mais,
pour autant, elle ne peut être identifiée comme une maladie homogène et autonome.
Mais quelle est la place de l’alcoolisme en France ? Bien que l’on enregistre une baisse
régulière depuis les années 1960, la France se distingue par son importante consommation
d’alcool par habitant et par an
. Suite à ces constations, de nombreuses mesures sont mises en
place avec, notamment, en 1954, la création du Haut Comité d’Etudes et d’Informations sur
l’Alcoolisme. En 1956, la loi dite de Ledermann démontre que la consommation moyenne
d’alcool d’une population détermine la proportion de buveurs excessifs dans cette population.
Cette hypothèse de corrélation entre la consommation moyenne et la consommation des
buveurs excessifs a sous-tendu en partie la politique de prévention contre l’alcoolisme, mais
la validité scientifique de celle-ci fait l’objet de polémique 4.
Quoiqu’il en soit, l’alcool est désormais reconnu comme une priorité de santé publique5
et fait l’objet de plus amples études. Depuis 1995, l’Observatoire français des drogues et des
toxicomanies a pour mission de publier régulièrement un rapport sur l’état du phénomène des
drogues et des dépendances. Les différents rapports constatent que l’alcool demeure le produit
psychoactif le plus ancré dans la société. Environ 10% de la population adulte consomme de
l’alcool en quantité excessive et 3,5% à 5% de la population adulte est alcoolo-dépendante 6 .
« Le vin de l’assassin », Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, 1848.
Ivrognerie : habitude de s’enivrer avec du vin.
En 1998, la France se situe au troisième rang des pays européens avec 10,8 litres d’alcool par habitant, derrière
le Portugal avec 11,2 litres et le Luxembourg avec 11,3 litres.
4 Par exemple, le professeur Weill, s’il reconnaît qu’un lien peut exister à moyen ou long terme entre
consommation moyenne et consommation excessive, considère qu’on ne peut pas conlcure qu’une baisse de la
consommation moyenne d’alcool permet de lutter efficacement contre les méfaits de l’alcoolisme.
5 Par le rapport sur la santé du Haut comité de santé publique de 1994.
6 Rapport d’évaluation sur la loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, présidé par Guy Berger,
octobre 1999.