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4. Systématique des microorganismes
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MICROBIOLOGIE
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Chapitre n°4 : Systématique des microorganismes
La systématique a pour but de classer les êtres vivants de manière rationnelle en se basant sur les
ressemblances et sur les relations qui existent entre eux. Elle repose sur deux disciplines, la taxonomie
(ou taxinomie) et la nomenclature :
- la taxonomie est la science qui permet de classer les organismes en taxons ;
- la nomenclature est l'ensemble des règles utilisées pour donner un nom à chaque taxon.
Les principales règles à connaître :
La nomenclature bactérienne utilise des mots latins ou latinisés qui sont traditionnellement écrits
en italiques ou ils sont soulignés dans un manuscrit.
Aucun signe diacritique (á, à, â, ä, ã, é, è, ê, ë, í, î, ï, ñ, ó, ò, ô, ö, õ, ú, ù, û, ü, ø, æ...) n'est toléré
et les mots ne doivent pas contenir de trait d'union. Par exemple, on doit écrire
Bacteroides et non Bacteroïdes.
Les noms de famille et de genre s’écrivent avec une majuscule.
Les noms des espèces sont formés d'une combinaison binaire dont le premier terme est le nom de
genre et d’un deuxième terme (« une épithète »). Le premier terme prend une majuscule
et le deuxième terme commence par une minuscule (exemple : Streptococcus equi).
Après une première citation, l’utilisation de la première lettre du nom de genre suivie
d’un point puis de l’épithète est tolérée (exemple : S. equi).
Les noms des sous-espèces sont formés d'une combinaison ternaire commençant par le nom
d’espèce suivi par l'abréviation « subsp. » et d’un troisième terme propre à la sous-espèce
(exemple : Streptococcus equi subsp. equi).
Les principaux échelons hiérarchiques sont les suivants :
TAXON
Exemple 1
Exemple 3
Exemple 3
Domaine
Bacteria
Bacteria
Bacteria
Phylum
Protebacteria
Protebacteria
Firmicutes
Classe
Gammaprotebacteria
Gammaprotebacteria
Bacilli
Ordre
Enterobacteriales
Vibrionales
Bacillales
Famille
Enterobacteriaceae
Vibrionaceae
Listeriaceae
Genre
Escherichia
Vibrio
Listeria
Espèce
Escherichia coli
Vibrio cholerae
Listeria monocytogenes
Sérovar
Escherichia coli O157:H7
Vibrio cholerae O1
Listeria monocytogenes 4b
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1. Principes et méthodes de la taxonomie bactérienne
1.1. Classification phénotypique
De nombreuses manipulations au laboratoire mettent en évidence les différences phénotypiques entre les
bactéries :
aspect macroscopique des colonies ;
morphologie et structure de la cellule (forme, Gram, flagelle, capsule, spore…) ;
conditions de culture (type trophique, type respiratoire, température optimale, pH optimal,
concentration en dioxygène, exigences nutritionnelles particulières…) ;
caractères biochimiques (ONPG, mannitol, indole, TDA…) ;
Sérotypie (antigènes O et H des entérobactéries, antigènes des streptocoques…) ;
Lysotypie (sensibilité aux phages) ;
Antibiotypie (sensibilité aux antibiotiques).
Ainsi, le placement d'une souche bactérienne dans la famille des Enterobacteriaceae nécessite que cette
souche soit constituée de bacilles à Gram négatif, non sporulés, AAF, oxydase négative… Cette méthode
de classement a ses limites : la forme peut varier en fonction du milieu de culture et peut être parfois
difficile à définir (bacilles coccoïdes et coques cocco-bacillaires…), une activité enzymatique donnée
peut ne pas être détectée lors de l’utilisation d’un substrat synthétique, deux bactéries éloignées peuvent
présenter des antigènes en commun…
Dans cette classification, les caractères phénotypiques utilisés sont peu nombreux (une centaine au
maximum) par rapport au nombre de gènes habituellement présents chez les bactéries (5 000 environ).
De plus, ces caractères sont hiérarchisés les uns par rapport aux d’autres. Par exemple, le résultat de la
coloration de Gram est considéré comme beaucoup plus significatif que l’utilisation du sorbitol. Une telle
conception facilite l’identification bactérienne, mais elle est néanmoins subjective (car elle attribue une
« valeur » différente aux caractères utilisés).
1.2. Classification génotypique
Les progrès de la biologie moléculaire ont permis de comparer les bactéries entre elles d’une manière plus
rigoureuse. La classification est obtenue par la comparaison molécules d’ADN des bactéries.
1.2.1. Le GC% (ou coefficient de Chargaff)
Chaque base azotée est présente dans une certaine concentration molaire dans une molécule d’ADN
donnée. Cette molécule d’ADN peut être caractérisée par le rapport molaire des bases :
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Ce rapport est mesurable grâce à une caractéristique particulière de l’ADN bicaténaire,
l’hypochromicité. En effet, l’ADN double-brin absorbe faiblement à 260 nm, car les bases se font face
dans la double hélice. La rupture des liaisons hydrogènes entre les bases, par action d’un agent
dénaturant (la chaleur par exemple), entraîne la séparation des deux brins (dénaturation) et une forte
augmentation de l’absorbance à 260 nm, appelée effet hyperchromique. Lorsque l’agent naturant
est la chaleur, la température permettant d’obtenir une augmentation de l’absorbance de 50 % par rapport
à l’absorbance maximale est appelée température de transition Tm (pour temperature melting). Cette
température est d’autant plus élevée que le nombre de paires GC est élevé, car il y a trois liaisons
hydrogènes entre G et C, contre deux entre A et T (les forces de cohésion des deux brins sont donc
d’autant plus importantes que les paires GC sont fréquentes).
Figure 1
Le GC% varie selon les espèces, il est donc intéressant du point de vue taxonomique :
deux bactéries appartenant à la même espèce possèdent des GC% identiques (à 2,5 % près) ;
deux bactéries ayant des GC% différents n’appartiennent pas à la même communauté génétique ;
deux bactéries qui ont un GC% identique ne présentent pas obligatoirement les mêmes séquences
nucléotidiques, et peuvent donc être éloignées génétiquement.
Le GC% ne peut être qu’un critère d’exclusion : il permet seulement d’affirmer que deux individus sont
éloignés du point de vue génétique. Il permet, par exemple, d’affirmer que deux souches n’appartiennent
pas au même genre. Ainsi, l’espèce Proteus morganii, dont le GC% est égal à 50 %, est devenue
Morganella morganii, car les autres bactéries du genre Proteus ont un GC% compris entre 38 et 42 %.
Autre exemple, le GC% de Staphylococcus aureus est d’environ 30 %, tandis qu’il est compris entre 62 et
70 % pour le genre Micrococcus ! Il est donc inconcevable que les staphylocoques appartiennent à la
famille Micrococcaceae
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Espèce
taille du génome (pb)
fraction codante
Bacillus subtilis
4.214.810
97%
Borrelia burgdorferi
910.725
93%
Campylobacter jejuni
1.641.481
94%
Chlamydia trachomatis
1.042.519
nd
Escherichia coli
4.639.221
88%
Fusobacterium nucleatum
2.174.500
90%
Haemophilus influenzae
1.830.127
87%
Helicobacter pylori
1.667.867
91%
Lactococcus lactis
2.365.589
87%
Mycobacterium tuberculosis
4.411.529
91%
Mycoplasma pneumoniae
816.394
89%
Neisseria meningitidis
2.272.351
83%
Pseudomonas aeruginosa
6.264.403
89%
Rickettsia prowazekii
1.111.523
76%
Shigella flexneri
4.607.203
80%
Streptomyces coelicolor
8.667.507
89%
Streptococcus pneumoniae
2.160.837
nd
Treponema pallidum
1.138.006
93%
Vibrio cholerae
4.033.460
88%
Xanthomonas campestris
5.076.187
84%
Yersinia pestis
4.653.728
84%
Tableau des génomes procaryotes totalement séquencés.
1.2.2. Hybridation ADN / ADN
Cette méthode permet la comparaison de la totalité du génome de deux bactéries par la mesure du degré
d’homologie des deux ADN. Les différentes techniques reposent sur le même principe : la renaturation
in vitro de deux brins d’ADN hétérologues (chaque brin provenant de deux bactéries comparées) conduit
à la formation d’un hétéroduplex. Le degré d’homologie est le pourcentage de séquences
complémentaires par rapport aux séquences totales. Ces techniques d’hybridation ont bouleversé la
classification bactérienne.
L’ADN chromosomique de chaque souche est extrait, purifié et fragmenté avant d’être dénaturé puis
renaturé en présence d’ADN marqué. La technique la plus utilisée est le marquage radioactif : le
« marqueur » permet de repérer les hybrides formés entre l’ADN de la souche cible (C) et celui de la
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souche de référence (R) :
dénaturation renaturation
RR + *R R + R + *R RR + *RR + R
CC + *R C + C + *R CC + *RC + C + *R
Figure 2
Le marquage spécifique (exprimé en quantité de radioactivité) des duplex homologues (*RR) et
hétérologues (*RC) est mesuré puis le rapport [*RR] / [*RC] est déterminé. Cette méthode d’hybridation
peut être réalisée sur filtre de nitrocellulose ou dans une colonne d’hydroxyapatite.
On considère que deux souches appartiennent à la même espèce si le taux d’hybridation entre les deux
ADN est supérieur ou égal à 70 %. On prend également en compte la stabilité thermique des hybrides.
Ces études permettent de définir des « genomospecies », c’est à dire des espèces génomiques.
Par exemple, en 1980, Brenner et al. ont réalisé des études d'homologie ADN - ADN sur 175 souches de
Yersinia enterocolitica. Leurs résultats ont permis d'identifier quatre genomospecies : Yersinia
enterocolitica sensu stricto, Yersinia intermedia, Yersinia kristensenii et Yersinia frederiksenii. Au
contraire, Les Shigella sp. et les souches de Escherichia coli appartiennent à une même genomospecies.
1.2.3. Etude des ARN ribosomaux (ARNr)
Les ARNr sont considérés comme des « chronomètres moléculaires » :
ils sont présents dans les cellules procaryotes et eucaryotes,
ils ont une structure bien conservée chez tous les êtres-vivants,
des portions d'ARNr ont une séquence identique chez tous les êtres vivants.
Ils sont abondants dans la cellule, faciles à purifier et à séquencer (utilisation d’une reverse
transcriptase).
Les ARNr s'associent à des protéines pour former les ribosomes. La sous-unité 30S d'un ribosome
contient de l'ARNr 16S et la sous-unité 50S contient de l'ARNr 5S et de l'ARNr 23S. L'ARNr 5S est
formé d'environ 120 nucléotides, l'ARNr 16S de 1 500 nucléotides et l'ARNr 23S comprend environ 2900
nucléotides. Le plus utilisé pour les études taxonomiques est l'ARNr 16S.
Les travaux sur ces ARNr 16S ont permis de distinguer les Eubactéries (« bactéries vraies ») des
Archébactéries (ou Archéobacteries).
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