L1 : 10 45 Opinion croyances et vie collective EL412 A - PENSÉE RATIONNELLE ET PENSÉE SOCIALE B - LES PRÉJUGÉS C - LES STÉRÉOTYPES D - LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES I - Organisation interne et structuration des représentations sociales II - Représentations et pratiques sociales E - DE LA LOGIQUE SOCIALE 1 - La théorie de la dissonance cognitive Forum sujet 1 : Stérétoype et préjugé Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 L1 : 10 45 L1 : 10 45 Lexique catégorie catégorisation sociale dissonance cognitive effet d'assimilation intracatégorielle effet de contraste intercatégoriel éléments périphériques hypothèse du contact métasystème noyau central pensée rationnelle pensée sociale pratiques sociales préjugé principe d'homéostasie processus de catégorisation processus de rationalisation représentations sociales sens commun soumission forcée stéréotypes sociaux Lexique pour les autres chapitres complémentaires rappels du cours de L1 attitude discrimination dissonance cognitive endostéréotype exostéréotypes Jodelet l'appartenance des sujets à un groupe Système central Système périphérique noyau central préjugé représentations sociales stéréotype symétriques ou asymétriques Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 8 la pensée sociale 131 PAR CHRISTIAN GUIMELLI A - PENSÉE RATIONNELLE ET PENSÉE SOCIALE Lorsqu'on oppose pensée rationnelle et pensée sociale, on sous-entend qu'il existe deux formes de pensée susceptibles de cohabiter chez le même individu. L'une, la pensée rationnelle, s'inscrit dans une logique de démonstration rigoureuse et obéit à des règles particulièrement strictes et contraignantes. Fondée sur la rationalité, elle permet de traiter les informations disponibles de la manière la plus objective possible. Elle accepte les vérifications comme principe fondamental de décision mais se nourrit des réfutations qui sont susceptibles de la contredire, et le cas échéant, de l'infirmer. C'est la pensée de l'expert ou, plus généralement, du scientifique. L'autre, la pensée sociale p144, traite les informations de manière plus fermée. Certes, elle est tournée vers le monde extérieur, mais ce n'est que pour filtrer et intégrer les seuls éléments d'information ou événements qui fortifient et renforcent sa démarche et son cheminement. Dès lors, soigneusement sélectionnés, elle ne retiendra que ceux d'entre eux qui coïncident avec ses intentions et qui lui apportent la confirmation, notamment de son cadre général. Par ailleurs, le principe de non-contradiction, fondamental dans la pensée rationnelle, n'est pas prioritaire dans les modes de raisonnement qui caractérisent la pensée sociale. Disons qu'elle ne se complaît pas, nécessairement, dans la contradiction, mais qu'elle s'en accommode. En fait, ce qui est au cœur même de la pensée sociale, c'est la sauvegarde et le maintien du lien social. Cette fois, l'enjeu est de taille. La rupture de ce lien constitue, en effet, pour l'individu, un coût exorbitant, aussi bien du point de vue affectif que cognitif, car il importe souvent pour le sujet d'éviter la déviance et de se maintenir dans le groupe. Or, le maintien dans un groupe est toujours associé au respect et à la promotion des normes (cf. discussion sur le forum ; voir aussi Opinion croyances et vie collective partie1 page 80) admises dans ce groupe et qui le régissent (Deutsch et Gerard, 1955). Dès lors, les modes de raisonnement propres à la pensée sociale et les constructions sociocognitives qui en découleront seront davantage guidés par l'application des valeurs et des normes qui sont admises dans les groupes plutôt que par le principe de non-contradiction. Pour le dire autrement, le fait que la pensée sociale soit peu sensible à la contradiction et qu'elle s'en accommode lui permet précisément de donner la priorité aux modes de raisonnement qui contribuent au maintien et au renforcement du lien social. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC codage couleur : information qui a attiré mon attention information restante questionnante définition mise en évidence d’un lien hypertexte remarque personnelle tests L1 : 10 45 132 Psychologie sociale Mais il y a plus. La pensée sociale se caractérise aussi par la prédominance de l’affectivité sur l'intellect. Elle lie étroitement les faits et les valeurs, les aspects normatifs ayant une place privilégiée dans les modes de raisonnement qu'elle met en œuvre. La situation dans laquelle se trouvent le sujet et son degré d'implication dans cette situation aura alors une importance capitale. Lorsque le contexte social change brusquement d'état et modifie les enjeux de la situation, les gens ne «voient» plus les choses sous le même angle. Ainsi, le médecin ne parlera pas de la maladie X de la même manière selon que c'est son patient qui en est atteint ou selon que c'est quelqu'un de son entourage immédiat. On a tous entendu parler d'ingénieurs très rationnels dans leur fonction, qui lisent attentivement leur horoscope avant de prendre des décisions importantes, surtout quand ces décisions les concernent directement. Le sujet impliqué dans la situation est, par définition, porteur du sens commun. De même que le sujet engagé, comme on le verra dans le chapitre suivant, précisément parce qu'il est sous le regard d'autrui, ne se comportera pas de la même manière. Pourtant la pensée sociale n'est pas dépourvue de logique. Elle possède la sienne propre. C'est cette logique, propre à chaque groupe, faisant intervenir ses valeurs, ses normes, ses intentions et ses croyances qui guide les constructions sociales telles que les préjugés ou les stéréotypes, les opinions ou leurs représentations sociales. Il résulte de ces différents principes que la pensée sociale est beaucoup moins efficace que la pensée rationnelle lorsqu'il s'agit de développer des processus d'analyse .et de conceptualisation. En revanche, elle est particulièrement adaptée lorsqu'il s'agit de porter des jugements ou d'évaluer des situations sociales. C'est pourquoi elle joue un rôle capital dans le domaine spécifique de la construction des croyances collectives. Nous allons examiner maintenant quelques-unes de ces croyances. B - LES PRÉJUGÉS forum Préjugés, discriminations, stéréotypes, racisme ... Les significations de ces différents termes s'imbriquent et empiètent les unes sur les autres. Ils ont cependant un point commun. Tous décrivent des situations qui comportent des évaluations négatives d'un groupe d'individus. Nous sommes là au cœur même de la notion de préjugé. Le préjugé est constitué par un ensemble de jugements négatifs à l'égard d'un groupe et des individus qui le composent. Autrement dit, un sujet qui a des préjugés à l'encontre d'un groupe aura tendance à évaluer les membres de ce groupe de façon spécifique et négative, en raison de leur seule appartenance à ce groupe. Les caractéristiques personnelles des membres de ce groupe jouent alors un rôle totalement secondaire dans cette évaluation: ils sont rejetés parce qu'ils sont membres de ce groupe. C'est Allport (1954) qui, le premier, s'est intéressé aux processus psychosociaux liés aux préjugés qu'il définissait comme «un sentiment d'antipathie fondé sur une généralisation erronée et inébranlable» (p. 9). Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC RAPPEL DU COURS DE L1 attitude : Définie comme un état mental s'intercalant entre le sujet et les objets sociaux, elle permet d'expliquer les réactions aux stimulations environnementales. Thomas et Znaniecki (1918-1920) Le préjugé correspond à la dimension affective d'une attitude, l'objet du préjugé est nécessairement un groupe d'individus. La discrimination : c’est leur manifestation, la dimension conative → agissement réf (en local) synthèse du cours sur l'enquête partie 2 L1 : 10 45 La pensée sociale 133 Dans la littérature psychosociale, le préjugé est souvent considéré comme une attitude générale. Il comporte donc les trois composantes classiques de l'attitude. Une composante affective avec des sensations et des sentiments, une composante comportementale qui se traduit souvent par des intentions d'actions et une composante cognitive constituée par des croyances. Ainsi, les sujets ayant des préjugés à l'encontre de telle ou telle personne vont détester cette personne, avoir à son encontre des comportements discriminatoires et croire, par exemple, qu'elle a le pouvoir de leur nuire. D'une manière générale, c'est la composante affective qui est considérée comme prédominante dans les préjugés. C'est elle qui va constituer un guide pour l'action et qui va être à l'origine des croyances. C'est elle qui va s'imposer d'emblée à la perception du sujet lorsque, par exemple, celui-ci va rencontrer une personne appartenant à un groupe à l'égard duquel il a des préjugés. Un grand nombre de résultats expérimentaux montrent que les préjugés sont le résultat de constructions collectives. Ainsi, ils font souvent l'objet d'un partage social très large. À titre d'exemple, les adultes d'âge mûr sont perçus, dans 19 nations différentes (Williams, 1993), comme sympathiques, mais moins énergiques et moins actifs que les jeunes adultes. Les stratégies sociocognitives, propres à la pensée sociale qui sont à l'origine de ces constructions collectives, sont mises en lumière dans de très nombreux travaux expérimentaux. On sait notamment que les sujets qui ont des préjugés à l'encontre de tel ou tel groupe social traitent l'information qui provient de ces groupes de manière tout à fait spécifique. Ainsi, Blascovich et al. (1997) ont montré que les sujets ayant des préjugés raciaux ont besoin d'une période de temps plus longue pour décider si oui ou non des étrangers, dont l'identité sociale est ambiguë, appartiennent à une catégorie raciale ou à une autre. Chez ces sujets, l'information pertinente par rapport aux préjugés est traitée avec une plus grande attention, de façon plus minutieuse et ordonnée. D'autres résultats, présentés par Fiske et Neuberg (1990) ont clairement montré que les informations qui sont consistantes avec les préjugés des individus reçoivent, de la part de ces individus, une attention plus soutenue et, par conséquent, sont beaucoup mieux mémorisées que les informations qui ne sont pas consistantes avec ces préjugés. De tels effets montrent que, dans ce domaine, les sujets ne s'exposent en, définitive qu'aux seuls éléments d'information ou événements qui fortifient et renforcent leurs convictions. Les préjugés peuvent alors être considérés comme des structures cognitives fermées qui vont, au fil du temps, se stabiliser, se renforcer et s'ancrer du point de vue social. La grande stabilité des préjugés peut aussi s'expliquer par leur utilité sociale. Ils jouent en effet un rôle important dans la protection et la mise en valeur de l'estime de soi. Par exemple, lorsqu'on menace leur estime de soi, les sujets ont tendance à dénigrer les groupes à l'égard desquels ils ont des préjugés, ce qui a pour résultat de restaurer leur propre estime (Fein et Spencer, 1997). Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC Ce qui semble en contradiction avec la définition proposée en L1 ! mais ... L1 : 10 45 134 Psychologie sociale Du point de vue de leur utilité sociale, les préjugés contribuent également à réduire la complexité du monde qui nous entoure ainsi que son étrangeté. L'analyse des situations nécessite alors pour le sujet moins d'efforts cognitifs. Une fois qu'ils sont construits, les préjugés nous permettent de faire l'économie d'un travail cognitif important qui serait alors destiné à une analyse fine et systématique de la situation. Grâce à eux, nous avons d'emblée des certitudes inébranlables concernant les caractéristiques des membres du groupe auquel nous sommes confrontés (Bodenhaussen, 1993). Et, dans la mesure où elles sont partagées par les membres de notre propre groupe, nous faisons à ces certitudes une confiance aveugle. Ainsi, même s'ils nous sont totalement étrangers, les individus qui nous entourent nous sont finalement familiers. Et c'est ainsi que le monde auquel nous sommes confrontés devient moins mystérieux. Est-ce à dire que les préjugés sont totalement figés et qu'on ne peut pas les atténuer ? Très tôt, les psychologues sociaux se sont intéressés à cette question, très importante du point de vue social. Une hypothèse est au centre des travaux visant à atténuer les effets négatifs des préjugés. Celle-ci, connue sous le terme de « hypothèse du contact p135», prévoit que si l'on provoque des contacts relativement réguliers entre des individus appartenant à des groupes différents (par exemple de races ou d'ethnies différentes), les préjugés des uns et des autres vont avoir progressivement tendance à s'éroder. Le premier support empirique de cette hypothèse date de 1951 et il est dû à Deutsch et Collins. Leur projet de recherche revient à observer et à analyser les attitudes d'un groupe de blancs envers un groupe de noirs dans deux ensembles de logements publics qui différaient en fonction de leur degré d'intégration raciale. Dans un cas, les logements avaient été attribués en installant les familles blanches et les familles noires dans des bâtiments distincts. Dans l'autre, au contraire, les logements des deux ensembles de familles étaient situés dans les mêmes bâtiments. Quelques mois après, Deutsch et Collins observèrent, chez les familles logées dans les mêmes bâtiments, un important changement d'attitude des blancs envers les sujets noirs, ces derniers étant perçus plus positivement qu'ils ne l'étaient auparavant. Et cela, même dans le cas où ces familles n'avaient pas choisi initialement de vivre dans les mêmes bâtiments. Différentes raisons ont été avancées pour expliquer le processus d'érosion qui affecte les préjugés des sujets lorsqu'ils sont mis en contact. Tout d'abord, des contacts réguliers entre des individus appartenant à des groupes différents peuvent les amener à découvrir les similitudes qui les caractérisent. Or, la perception de similitudes interpersonnelles a souvent pour effet de rendre attractives les interactions entre les sujets. Dès lors les jugements négatifs à l'égard d'autrui peuvent s'estomper .. D'autre part, le processus d'érosion peut être accéléré lorsque de nombreuses informations, inconsistantes avec les contenus du préjugé parviennent au sujet. En d'autres termes, le préjugé aura tendance à s'affaiblir si le sujet est confronté à des mises en cause nombreuses et répétées de ses certitudes (voir par exemple Kunda et Oleson, 1995). Or, la probabilité que ces mises en cause s'imposent à la perception des sujets sera d'autant plus grande que les contacts entre eux seront plus nombreux et soutenus. Il va sans dire que le seul contact entre les sujets n'est pas toujours suffisant pour résoudre les problèmes. En fait, six conditions doivent être réunies pour que le contact entre les sujets produise les effets d'atténuation des préjugés attendus: Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 La pensée sociale 135 C - RELATIONS HUMAINES, GROUPES ET INFLUENCE SOCIALE l / Les sujets appartenant à des groupes différents doivent être placés dans des situations dans lesquelles ils sont en interdépendance. Or, d'une manière générale, l'interdépendance des sujets est de mise dans les situations où ils sont obligés de coopérer les uns avec les autres. On se souvient, notamment de la célèbre observation de Sherif et al. (1961) concernant deux groupes de garçons, les «Eagles» et les «Rattlers ». Ce n'est qu'après que la situation est devenue coopérative que le nombre de sujets déclarant avoir leur ami intime dans l'autre groupe augmenta de manière spectaculaire. Jusqu'alors, en fait, tant que la situation était restée compétitive, peu de sujets avaient fait cette déclaration, malgré des contacts fréquents et répétés. 2 / En relation avec le point précédent, les sujets appartenant à des groupes différents doivent avoir un objectif commun, accepté par tous. 3 / Les participants des différents groupes doivent avoir un statut « égal », ou des statuts très similaires, dans le cadre de la situation de contact. Dans l'observation de Deutsch et Collins (1951) présentée ci-dessus, par exemple, les membres des deux groupes étaient extrêmement proches du point de vue de la hiérarchie et du pouvoir. S'il existe des différences marquées de statut entre les sujets, les interactions seront guidées par les préjugés. Dans ce cas, chacun maintiendra ses attentes et ni les uns ni les autres ne percevront les mises en cause de leurs certitudes nécessaires à l'évolution des mentalités. 4 / La situation de contacts doit amener les sujets des différents groupes à créer des liens entre eux par le biais de nombreuses interactions avec différents membres de l'autre groupe. C'est ainsi qu'elle permettra aux uns et aux autres de se connaître en tant qu'individu, et non en tant que membre du groupe adverse faisant l'objet de préjugés. Ce point est important dans la mesure où le préjugé peut être maintenu lorsque nous considérons qu'un individu que nous percevons comme différent des autres membres du groupe adverse ne constitue, finalement, qu'une exception (Wilder, 1984). 5 / Dans le même ordre d'idée, il est très important que les contacts interviennent dans un cadre amical et informel. Les interactions doivent se produire entre les membres des différents groupes, sur des bases individuelles. Ainsi, mettre les gens dans une pièce où les groupes sont en face à face, les uns d'un côté, les autres de l'autre, matérialisant ainsi les oppositions, n'est pas la meilleure façon d'atténuer les préjugés. 6/ La situation de contacts conduira plus probablement à l'érosion des préjugés si les normes sociales propres à cette situation sont centrées sur l'égalité des groupes et si elles favorisent des relations intergroupes égalitaires. De telles normes, en effet, contribuent au développement des interactions entre les membres des différents groupes. Ainsi, lorsque ces six conditions sont réunies dans le cadre des situations de contacts, les groupes ont une forte tendance à réduire leurs préjugés et leurs comportements discriminatoires (voir par exemple Aronson et Brigeman, 1979). Récemment, une version modifiée ( « étendue » ) de l'hypothèse du contact a été défendue. Elle suggère que le contact direct entre les personnes appartenant aux différents groupes n'est pas nécessaire pour réduire les préjugés qui existent entre eux. En fait, pour que les effets attendus se produisent chez le sujet, il suffit tout simplement que celui-ci sache que des personnes de son propre groupe se sont liées d'amitié avec des personnes appartenant à l'autre groupe (Pettigrew, 1997). Un résultat extrêmement précieux est présenté par cet auteur. S'intéressant aux sentiments, aux préjugés et aux croyances à propos de l'immigration d'un échantillon étendu d'Européens envers un large éventail de groupes ethniques et culturels, Pettigrew montre que les préjugés des participants sont d'autant plus faibles à l'égard des divers groupes ethniques ou culturels que le nombre de relations amicales intergroupes signalées est plus élevé. Par ailleurs, conformément à cette hypothèse, lorsque les sujets entretiennent des relations amicales avec des membres d'un autre groupe ethnique ou culturel que le leur, leur attitude à l'égard des autres groupes, y compris ceux avec lesquels ils n'ont aucun contact, est plus positive. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC On retrouvera cette idée de cohésion sociale à l'origine de la motivation sociale - dans de nombreuses recherches célèbres de ce qui constitue la psychologie sociale classique. L'étude de Sherif et ses collaborateurs (1961) fait partie de ces recherches marquantes qui ont structuré la psychologie sociale. Cette étude se déroula en 1954 dans un camp de vacances. Deux groupes séparés de garçons se livraient à des activités de loisir. Dans une seconde phase, les animateurs réunirent les enfants des deux groupes pour des activités compétitives qui se déroulèrent sur plusieurs jours. Une franche hostilité apparut entre les enfants des deux groupes, caractérisée par des attitudes méprisantes à l'égard des enfants appartenant au groupe opposé. Le conflit renforçait la cohésion à l'intérieur de chaque groupe, ce qui se manifestait par une surestimation systématique des performances des membres du groupe d'appartenance et une sous-estimation des performances des membres de l'autre groupe. Les animateurs tentèrent alors, lors d'une troisième phase, de conjurer cette hostilité en proposant des activités non compétitives. Des repas pris en commun, des activités ludiques telles que séance de cinéma ou feux d'artifices se soldèrent, cependant, par un échec. Sherif eut, enfin, l'idée de proposer aux enfants de résoudre des problèmes qui impliquaient tous les membres des deux groupes. Dans cette quatrième phase de l'étude, des projets importants qu'un groupe seul ne pouvait réaliser (payer une somme élevée pour la location d'un film, dépanner le camion de ravitaillement, etc.) amenèrent les sujets des deux groupes à coopérer ensemble, dans le cadre d'une interdépendance positive, amenant ainsi les uns et les autres à réduire sensiblement les manifestations d'hostilité et à modifier la perception que chacun avait des membres de l'autre groupe. La définition de «buts supraordonnés» constitue, pour Sherif, un impératif pour dépasser les antagonismes intergroupes inhérents à l'appartenance à des groupes constitués. Cette stratégie s'avère efficace pour gérer les conflits au sein des camps de vacances; elle peut l'être tout autant pour dépasser les antagonismes entre les nations: songeons au projet des pères fondateurs de l'Europe à la sortie de la Seconde Guerre mondiale ... Histoire de la psychologie sociale p. 7 doc. source (en local) : Fiche de lecture histoire psycho sociale L1 : 10 45 136 Psychologie sociale Toutes ces recherches attirent finalement notre attention sur le fait que la grande diversité des contenus propres aux préjugés (raciaux, liés au genre, aux catégories de personnes : jeunes, âgées, etc.) ne peut cacher leur point commun: les préjugés permettent à chacun de nous de s’approprier le monde qui l’entoure afin de le rendre plus familier, plus consistant et moins mystérieux. Nous allons examiner maintenant une autre notion) proche de celle de préjugé: la notion de stéréotype. RAPPEL DU COURS DE L1 C - LES STÉRÉOTYPES forum Comme les préjugés, les stéréotypes contribuent à l'organisation des informations qui nous parviennent sans cesse de notre environnement, notamment social. Nous nous intéresserons ici aux stéréotypes sociaux, c'est-à-dire ceux qui sont en relation avec les groupes humains ou ethniques. Les stéréotypes sociaux sont définis par Leyens, Yzerbit et Schadron (1996, p. 24) comme «des croyances partagées concernant les caractéristiques personnelles, généralement des traits de personnalité, mais souvent aussi des comportements, d'un groupe de personnes ». Par conséquent, utiliser un stéréotype revient à considérer que tous les membres d'une catégorie donnée, telle que par exemple un groupe ethnique, partagent les attributions qui sont contenues dans le stéréotype. Si, par exemple John est un Écossais, alors il présente tous les traits de personnalité ou de comportement qui sont caractéristiques de cette population. Il sera donc considéré, entre autres, comme quelqu'un de très certainement avare. C'est pourquoi Leyens et al. distinguent le stéréotype proprement dit du processus de stéréotypisation des individus qui consiste selon eux à « leur appliquer un jugement - stéréotypique - qui rend ces individus interchangeables avec les autres membres de la catégorie» (op. cit.) p. 24). En fait, nous ne sommes pas très éloignés de la notion de préjugés. D'une manière générale, on considère, comme on l'a vu précédemment, que les préjugés sont consti tués par une structure attitudinale dont la composante saillante est d'ordre affectif. Autrement dit, le préjugé est généralement défini comme une attitude défavorable ou négative à l'égard d'individus appartenant à un groupe donné. Il manifeste, le plus souvent, un vigoureux sentiment d'hostilité à l'égard d'autrui. Le stéréotype, par contre, n'est pas nécessairement construit autour d'une émotion, d'un affect ou d'un sentiment. Il s'agit aussi d'une structure, mais d'une structure cognitive. Autrement dit, cette fois, c'est la composante cognitive qui est dominante dans cette structure. En fait, les stéréotypes sont gérés par des processus sociocognitifs qui, comme nous allons le voir, sont propres à la pensée sociale. Au centre de ces processus se trouve la catégorisation qui a fait l'objet de très nombreux travaux en psychologie sociale (voir par exemple Leyens, 1983). Une catégorie est généralement définie comme l'ensemble des dimensions descriptives permettant de rendre compte d'un objet donné. [Quant au] le processus de catégorisation, [il] se caractérise par différentes fonctions. Il permet tout d'abord de réduire la complexité de notre environnement physique ou social en résumant à grands traits un ensemble substantiel d'informations. Une ou deux dimensions descriptives suffisent, en effet, dans beaucoup de cas pour traiter un nombre d'informations beaucoup plus vastes. Ainsi, par exemple, le fait d'avoir des ailes et d'être couvert de plumes suffit à catégoriser tous les oiseaux, du moineau à l'autruche. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC attitude : Définie comme un état mental s'intercalant entre le sujet et les objets sociaux, elle permet d'expliquer les réactions aux stimulations environnementales. Thomas et Znaniecki (1918-1920) Le stéréotype renvoie à la dimension cognitive de l'attitude, il correspond aux croyances sociales que les sujets du groupe source ont du groupe cible. Il se traduit par des traits ou des comportements associés de manière arbitraire. théorie explicative (le préjugé affect le stéréotype qui e, retopur le justifie). réf (en local) synthèse du cours sur l'enquête partie 2 L1 : 10 45 La pensée sociale 137 Le processus de catégorisation facilite ainsi l'identification ou la reconnaissance d'objets connus. Cependant, lorsque les objets ne sont pas (ou mal) connus, ou bien encore lorsqu'ils sont nouveaux dans le champ perceptif du groupe, le même processus permet de leur attribuer des caractères propres à une catégorie donnée, déjà existante. Dès lors ils peuvent entrer dans cette catégorie. C'est ainsi que l'objet « étrange» peut devenir plus «familier ». Enfin, le processus de catégorisation permet aussi la différenciation. En effet, Tajfel et Wilkes (1963) ont montré de façon particulièrement claire que, lorsque les individus sont amenés à évaluer des objets, ils ont tendance à surestimer les ressemblances entre les objets d'une même catégorie (effet d'assimilation intracatégorielle), mais aussi les différences entre les catégories (effet de contraste intercatégoriel). Ainsi, par exemple, McGarty et Turner (1992) demandent à leurs sujets de classer dix déclarations politiques sur une échelle allant de a (gauche) à 100 (droite). Parmi les dix déclarations présentées aux sujets, cinq sont considérées comme étant de gauche et cinq comme étant de droite. Dans une situation expérimentale, ils attribuent les déclarations de gauche à un auteur « A» et les déclarations de droite à un auteur « B » (condition de «catégorisation »). Dans l'autre condition expérimentale, les déclarations ne sont pas catégorisées: aucune mention n'est faite des auteurs. Ils observent alors, d'une part, que les déclarations à l'intérieur d'une catégorie donnée sont évaluées comme plus proches les unes des autres (assimilation intracatégorielle), et d'autre part, que les catégories sont perçues comme plus différenciées (contraste intercatégories) lorsque les déclarations sont catégorisées. Le processus de catégorisation permet ainsi de mettre de l'ordre dans un environnement physique et social complexe, avec en prime le sentiment qu'il est possible, malgré tout, de le maîtriser. On observera cependant que ce processus se situe bien au-delà de la saisie objective du monde qui nous entoure. Comme on vient de le voir, il sert à la maîtrise de celui-ci et ses principes ne sont pas déterminés par la rationalité, mais seulement par l'utilité et plus particulièrement par l'utilité sociale. En fait cette volonté de maîtriser l'environnement obéit à une double exigence qui, lorsqu'elle est satisfaite, a pour effet de rassurer les uns et les autres. D'une part, il s'agit d'asseoir les constructions collectivement élaborées sur des fondations stables, difficiles à ébranler. D'autre part, il importe pour l'individu d'accroître son emprise sur l'environnement, notamment dans les secteurs de celui-ci qui l'impliquent fortement. Ce rappel sur le processus de catégorisation effectué, revenons à la notion de stéréotype. En fait, les stéréotypes sont largement déterminés par des processus du même ordre, mais il s'agit cette fois de catégorisation sociale p139. Autrement dit, le processus de catégorisation ne s'applique pas à des objets quelconques, mais à des groupes d'individus. C'est la raison pour laquelle il convient de parler de catégorisation sociale. Le processus de catégorisation sociale a fait l'objet de nombreuses illustrations expérimentales. Une expérience de Taylor et al. (1978) montre, par exemple, que lorsque les sujets connaissent l'appartenance raciale des gens, ils traitent l'information qui les concerne de manière spécifique. Ainsi, quand les sujets observent des gens donnant leur opinion, ils oublient le plus souvent qui a dit quoi, mais ils se souviennent de la race à laquelle appartient la personne qui a présenté telle ou telle opinion. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 138 Psychologie sociale L'observation la plus ancienne, mais aussi la plus célèbre, concernant l'attribution de traits typiques à des groupes sociaux est due à Katz et Braly (1933). Ils demandèrent à un échantillon de sujets de donner par écrit les adjectifs qu'ils considéraient comme caractéristiques des dix nationalités ou groupes ethniques suivants: Américains, Chinois, Anglais, Noirs, Allemands, Irlandais, Italiens, Japonais, Juifs et Turcs. Ils purent ainsi sélectionner une liste de 84 traits de personnalité. Ils demandèrent alors à un autre groupe de 100 étudiants de rechercher dans cette liste les cinq traits de personnalité les plus caractéristiques de chacun des dix groupes. Les résultats obtenus par Katz et Braly firent apparaître un fort consensus entre les sujets. Ainsi, plus de trois sujets sur quatre estimèrent, par exemple, que les Noirs sont superstitieux (84 %), que les Allemands sont caractérisés par l'esprit scientifique (78 %), ou que les Juifs sont futés (79 %). Il s'agit donc bien de croyances qui sont «partagées» au sein d'un groupe social donné et qui organisent entre elles les cognitions. Le consensus qui intervient entre les individus d'un groupe social pour attribuer un trait particulier de personnalité aux individus d'un autre groupe cible, constitue ainsi un caractère spécifique du stéréotype. Ce consensus a d'ailleurs été observé à partir de méthodes différentes de celle utilisée par Katz et Braly. Ainsi, Brigham (1971) l'a également mis en évidence en demandant à ses sujets de donner le pourcentage des membres d'un groupe· donné présentant telle ou telle caractéristique. Cette technique permit, en outre, de calculer des scores individuels de stéréotypisation, très utiles pour analyser ce processus. D'autres recherches ont permis de conclure que les stéréotypes sont relativement stables dans le temps, bien qu'ils puissent varier en fonction des circonstances, notamment lorsqu'elles sont particulièrement impliquantes ou suite à l'intervention d'événements exceptionnels. Ainsi, l'observation de Katz et Braly réalisée en 1933 avait montré que les étudiants américains, pensaient que les Japonais étaient intelligents, travailleurs et progressistes. Une observation ultérieure montra l'influence massive de la Seconde Guerre mondiale. En effet, réalisée en 1951 par Gilbert, cette nouvelle observation révéla que les étudiants les percevaient désormais comme rusés et sournois. Toutefois, une nouvelle observation effectuée, cette fois, en 1969 (Karlins, Coffman et Walters) indiqua que les Japonais étaient à nouveau, peu ou prou, perçus par les étudiants américains comme ils l'étaient en 1933. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 La pensée sociale 139 On conçoit que certains événements qui ont bouleversé la face du monde, comme la Seconde Guerre mondiale, puissent entraîner des modifications profondes de certains stéréotypes! Cependant, d'une manière générale, les informations qui viennent mettre en cause tel ou tel aspect des stéréotypes n'ont le plus souvent que très peu d'effets sur leur dynamique. Cette résistance au changement, caractéristique des stéréotypes, s'explique par les stratégies sociocognitives qui sont mises en œuvre par les sujets dans le but de protéger des structures de connaissances qui leur sont particulièrement utiles pour trouver très rapidement une réponse adaptée à une situation nouvelle pour eux. En effet, une fois le stéréotype activé, les traits correspondant au groupe et aux individus qui le composent viennent immédiatement à l'esprit du sujet, facilitant l'expression d'une réponse immédiate au problème posé. Ainsi, dans la mesure où ils ne nécessitent que peu d'énergie cognitive, les stéréotypes sont d'une grande utilité dans la vie sociale. C'est pourquoi ils font l'objet d'une protection systématique. Dès que des informations inconsistantes avec le contenu du stéréotype parviennent au sujet, elles sont l'objet d'un traitement spécifique aboutissant soit à la réfutation des informations gênantes, soit à une modification de leur contenu pour les rendre consistantes avec le stéréotype. Un certain nombre de résultats empiriques montrent, notamment, que lorsque le sujet reçoit des informations à propos d'une personne qui appartient à un groupe faisant l'objet d'un stéréotype, et que ces informations sont inconsistantes avec celui-ci, le sujet procède à des inférences «tacites », c'est-à-dire qui sont sous-entendues, implicites, et qui débouchent sur des conclusions ou des idées qui ne sont pas exprimées dans ces informations. Les informations initiales changent alors de signification jusqu'à devenir consistantes avec le stéréotype (Kunda et Oleson, 1995). Dans cette perspective, Dunning et Sherman (1997) ont rapporté des résultats particulièrement convaincants. On présente aux sujets des phrases qui sont censées décrire des personnes fictives en leur demandant de se former une impression concernant ces personnes. Dans ces phrases, on fait apparaître des inférences qui sont soit consistantes, soit inconsistantes avec le stéréotype. Les sujets doivent ensuite rappeler les différentes phrases. Les résultats montrent qu'ils font beaucoup plus d'erreurs dans le rappel des phrases portant des inférences consistantes avec le stéréotype (35 %) que dans le rappel des phrases portant des inférences inconsistantes avec le stéréotype (15 %). C'est donc bien la consistance avec le stéréotype qui s'impose à leur perception, au détriment de la qualité du rappel. Cela amène Dunning et Sherman à décrire les stéréotypes comme de véritables «prisons inférentielles» et à évoquer un processus circulaire débouchant sur la consolidation et la fortification systématiques du stéréotype. Les stéréotypes constituent donc des connaissances sociales relativement consensuelles et stables. Ils ont été fréquemment décriés ou combattus en raison du caractère le plus souvent négatif de leur contenu qui, parfois, les a fait confondre avec les préjugés raciaux. Mais ne nous y trompons pas. Les stéréotypes ne sont ni pathologiques par essence, ni erronés par nature. Ils doivent être considérés comme des théories naïves dans lesquelles interviennent, massivement, des processus de catégorisation et de généralisation propres à la pensée sociale. En simplifiant et en organisant la réalité sociale, les stéréotypes constituent, pour le sujet social, des moyens cohérents et efficaces pour expliquer le monde, se l'approprier et s'y mouvoir. Ils participent ainsi, à leur manière, à l'organisation et à la gestion de la vie sociale. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC ? L1 : 10 45 140 Psychologie sociale RAPPEL DU COURS DE L1 D - LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES Comme on vient de le voir dans les sections précédentes, l'activité mentale qui est à l'origine des croyances collectives permet à un groupe social particulier de s'approprier la réalité à partir d'une activité cognitive de construction (et de reconstruction) destinée à la rendre signifiante, mais aussi consistante avec les systèmes de jugement et d'évaluation qui lui sont propres; c'est-à-dire, en fait, en l'intégrant et en l'ancrant dans un système de valeurs particulier, lui-même dépendant de l'histoire du groupe, ainsi que du contexte social et idéologique auquel celui-ci est rattaché. En procédant de la sorte, chaque groupe construit, maîtrise, sauvegarde et maintient, par la même occasion, sa propre identité. Cette dernière remarque a au moins deux conséquences. La première conséquence nous amène à considérer que la réalité qui nous entoure n'a pas d'existence propre. Elle est toujours construite et représentée. C'est ainsi que le même objet social sera caractérisé par des significations sensiblement différentes, voire profondément divergentes, selon le groupe qui est à l'origine de sa construction. Dès lors? chaque groupe «verra» l'objet à sa façon, d'une manière spécifique et différente de la manière dont il sera « vu» par le groupe voisin. La deuxième conséquence découle de la première: dans la mesure où chaque groupe « voit» les choses plus ou moins différemment, les relations intergroupes seront a priori conflictuelles. On comprend mieux les raisons pour lesquelles Moscovici (1984) avait défini la psychologie sociale comme «la science du conflit entre l'individu et la société ». Parmi les constructions collectives d'importance se trouvent les représentations sociales, lieu d'expression privilégiée de la pensée sociale et du «sens commun ». Observons tout d'abord que l'analyse des représentations sociales suppose que l'on prenne en compte simultanément leurs composantes cognitives et leurs composantes sociales. Les premières sont directement liées à l'activité de production individuelle du sujet. Elles sont donc régies par des règles qui sont spécifiques aux processus cognitifs. Les secondes déterminent la mise en œuvre de ces processus cognitifs en générant des règles spécifiques qui conduisent ainsi à une logique interne, sociocognitive, permettant l'organisation générale des cognitions propres à un objet particulier. C'est d'ailleurs pour cette raison, essentielle, que l'on peut parler de représentations «sociales ». Les représentations sociales p141 peuvent donc être définies comme une modalité particulière de la connaissance, généralement qualifiée de «connaissance de sens commun », dont la spécificité réside dans le caractère social des processus qui les produisent. Elles recouvrent ainsi l'ensemble des croyances, des connaissances et des opinions qui sont produites et partagées par les individus d'un même groupe, à l'égard d'un objet social donné. C'est d'ailleurs en ce sens que l'on parle aussi, à juste titre, pour les définir, de «théories naïves» faisant référence en cela à des constructions plus ou moins élaborées, mais qui s'opposent à celles de l'expert ou du scientifique. Ce dernier point est fondamental. C'est la raison pour laquelle les représentations sociales constituent un lieu privilégié où s'exprime la pensée sociale. C'est en 1961 que Serge Moscovici (1961, 1976), reformulant un ensemble de propositions théoriques présentées par Durkheim (1898), proposa à l'occasion de son étude princeps sur les représentations de la psychanalyse, le concept de représentations sociales en le replaçant d'emblée dans un cadre théorique remarquablement structuré et cohérent, qui a ouvert la voie à une importante série de recherches. La fonction première des représentations sociales est d'interpréter la réalité qui nous entoure, d'une part, en entretenant avec elle des rapports de symbolisation et, d'autre part, en lui attribuant des significations. Comme l'a montré Moscovici, cette fonction constitutive de la réalité résulte d'une activité de construction spécifique qui consiste, finalement, dans un véritable «remodelage mental» de l'objet. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC attitude : Définie comme un état mental s'intercalant entre le sujet et les objets sociaux, elle permet d'expliquer les réactions aux stimulations environnementales. Thomas et Znaniecki (1918-1920) Les représentations sociales sont définies par Jodelet comme un ensemble de connaissances/ croyances correspondant à un système d'interprétation du réel construit conjointement par un groupe afin de gérer la réalité sociale. réf (en local) synthèse du cours sur l'enquête partie 2 L1 : 10 45 La pensée sociale 141 Mais il convient tout d'abord d'insister sur le fait que cette activité est socialement marquée. Elle ne se manifeste pas indépendamment du champ social dans lequel, inévitablement, elle s'insère. En fait, ce qui est à l'œuvre, c'est un métasystème constitué par des régulations sociales faisant intervenir les modèles, les croyances déjà établies, les normes et les valeurs du groupe. Ce métasystème canalise, modifie, oriente, en un mot, dirige les opérations cognitives. Par ailleurs, la pensée sociale est axée sur la communication. Dès lors, pour peu que l'objet constitue un enjeu social, même limité pour le groupe, la représentation correspondante sera le résultat d'un vaste ensemble d'interactions sociales, internes au groupe. Elle sera donc générée collectivement. C'est pourquoi, entre autres, elle sera partagée par les individus de ce groupe, tout au moins en ce qui concerne l'essentiel. Nous examinerons maintenant les deux aspects caractérisant le mieux les représentations sociales: leur organisation interne et leur structuration d'une part, et leur liens étroits avec les pratiques sociales d'autre part. I - Organisation interne et structuration des représentations sociales Il est admis aujourd'hui que les représentations sociales se présentent comme des ensembles structurés de cognition, de croyances ou d'opinions, ce qui signifie que les éléments qui les constituent sont hiérarchisés et entretiennent entre eux des relations qui en déterminent, dans une large mesure, la signification. Cette position a une implication très importante. Elle signifie qu'une représentation sociale doit toujours être définie à partir de deux composantes: son contenu, c'est-à-dire ses éléments de connaissance constitutifs de la représentation, et son organisation interne, c'est-à-dire les relations que ses éléments constitutifs entretiennent entre eux. Abric (1994 a, 1994 b) a proposé une construction théorique très convaincante pour rendre compte de cette forme d'organisation interne, propre aux représentations sociales. Selon lui, les représentations sociales fonctionnent comme une entité, mais avec deux systèmes dont le statut est différent: le Système central et Système périphérique. Le premier est le fondement même de la structure de la représentation. Par conséquent, il joue un rôle spécifique dans l'économie de la représentation. Le second est sous la dépendance du premier : la pondération des éléments qui le composent, leur valeur et leur portée dans le champ de représentation sont déterminés dans une large mesure par le système central. Ainsi, l'importance que peut prendre un élément périphérique dans le champ représentationnel dépend essentiellement de la structure et de la signification du noyau central pour le sujet. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 142 Psychologie sociale Les fonctions du noyau central ont fait l'objet de nombreuses propositions théoriques. Le noyau central a d'abord une fonction d'organisation de la représentation. Cette fonction permet de définir la nature des liens qui unissent entre eux les différents éléments de la représentation. C'est donc le noyau central qui constitue la composante unificatrice et stabilisatrice de l'ensemble (pour une présentation plus approfondie et des exemples concrets, voir Guimelli, 1998, 1999). Le noyau central a également une fonction génératrice de sens. Ainsi, il va déterminer le sens global attribué à l'ensemble de la représentation. Cette dernière fonction a été clairement mise en évidence par une expérience de Moliner (1989), centrée sur les représentations sociales du groupe idéal. Dans cette expérience, on présente aux sujets une situation qui induit cette représentation, puis on donne aux sujets une information qui vient mettre en cause soit la proposition d'égalité, faisant partie du noyau central (dans ce cas on leur dit qu'un individu , donne des ordres aux autres ; le groupe n'est donc plus égalitaire), soit la proposition faisant partie du système périphérique (dans ce cas on leur dit qu'il existe de fortes divergences d'opinions). On demande ensuite aux sujets des deux groupes de dire si désormais la situation peut être décrite en référence ou non au «groupe d'amis idéal ». Or, si près de trois quarts des sujets se trouvant dans la situation expérimentale « élément périphérique mis en cause» (73 %) continuent à penser qu'il s'agit bien d'un groupe idéal, en revanche, dans la situation «élément central mis en cause» trois quarts des sujets (78 %) estiment, cette fois, que la situation qui leur est décrite ne correspond plus à un groupe idéal, Ces résultats montrent que la mise en cause de l'élément central provoque à elle seule l'effondrement du sens attribué à l'ensemble de la représentation. Si l'on préfère, un seul élément mis en cause, lorsqu'il est central, a pour effet de mettre en cause à son tour la représentation de l'objet dans son ensemble. Par contre, l'effet n'est pas obtenu lorsque c'est l'élément périphérique qui est mis en cause. Cette recherche illustre donc le rôle organisateur et générateur de sens du noyau central. Le noyau central comporte également deux propriétés importantes. Il est d'une grande stabilité, propriété fondamentale pour maintenir en l'état l'essentiel de la représentation et assurer sa pérennité. C'est donc le noyau central qui va être résistant à tout changement. Par ailleurs, le noyau central est aussi le lieu de consensus de la représentation. Il constitue ainsi la base collectivement partagée des représentations sociale, contrairement aux éléments périphériques qui, eux, grâce à leur souplesse, permettent à la représentation de s'ancrer dans la réalité du moment. Ces derniers peuvent se définir comme la composante concrète et opérationnelle assurant le lien entre la représentation et les pratiques quotidiennes réalisées par les uns et les autres en direction de l'objet. Ils permettent ainsi une appropriation de la représentation individualisée. Les éléments périphériques autorisent ainsi la construction de représentations sociales individualisées, organisées néanmoins autour d'un noyau central commun et consensuel. C'est ce qui explique que l'on puisse observer, à l'intérieur du même groupe et à propos du même objet, de fortes variations discursives. Cependant, une observation attentive montre que l'hétérogénéité des discours disparaît dès que l'on touche sous une forme ou sous une autre au noyau central. Aujourd'hui, bon nombre de résultats empiriques, obtenus sur le terrain ou en laboratoire et à partir de méthodologies diverses, convergent. Ils plaident fortement en faveur de l'existence de ces deux catégories d'éléments, chacun jouant un rôle différent dans le champ représentationnel. Abric et Flament (1996), par exemple, mais aussi Guimelli (1993, 1998), Moliner (1992) rapportent plusieurs recherches expérimentales qui vérifient l'existence et le rôle spécifiques des éléments centraux. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 La pensée sociale 143 Par ailleurs, la référence à la théorie du noyau central permet une meilleure compréhension des processus sociocognitifs qui sont mis en œuvre par les groupes. Des recherches de Mugny, Moliner, F1ament (1997), confirmées et précisées par celles de Mugny et al. (1998), de Mugny, Qjamzade et Tafani (2001) ou de Tafani et Souchet (2002) montrent clairement que les rapports d'influence, opérationnalisés par des communications persuasives (cf. Chap.9 psychologie sociale p. 152), ont des effets particulièrement différenciés selon qu'ils sont fondés sur les éléments centraux de la représentation ou sur les éléments périphériques. Plus précisément, ils indiquent que l'infirmation d'une cognition d'ordre périphérique n'induit aucune modification structurale de la représentation alors que l'infirmation d'une cognition centrale donne lieu à une restructuration cognitive (donc: à une modification profonde) du champ représentationnel. On a pu observer également (Eyssartier, Joule et Guimelli, 2005; Eyssartier, 2005), que lorsque l'on fonde les techniques d'engagement sur les éléments centraux de la représentation, et non sur les éléments périphériques, on augmente de façon très nette la probabilité de voir apparaître le comportement attendu (en l'occurrence: signer une carte de donneur d'organes). Ainsi, dans des champs de recherches aussi différents que l'influence sociale ou l'engagement, dont il sera question dans le prochain chapitre, la théorie du noyau central permet de préciser la compréhension que nous avons de certains phénomènes. II - Représentations et pratiques sociales Les représentations sociales entretiennent des liens étroits avec les pratiques. Elles constituent, en quelque sorte, comme le dit Moscovici (1976), un «guide pour l'action ». Une étude de Jodelet (1989) illustre parfaitement ce lien. Cette étude concerne les représentations sociales de la folie et elle a pour objectif d'analyser les pratiques et les représentations sociales d'une communauté de ruraux à l'égard des malades mentaux qu'ils hébergent, par tradition, depuis plusieurs décennies. L'étude des représentations montre que les sujets opposent le cerveau et les nerfs pour expliquer la folie. Cette opposition a donné lieu, au fil du temps et des générations, à une théorie psychiatrique naïve permettant, entre autres, de diagnostiquer deux types de malades: les malades du cerveau O'innocence) et les malades des nerfs~a méchanceté). Dès lors, une fois posé, c'est ce «diagnostic» qui va déterminer des pratiques spécifiques à l'une ou à l'autre des deux catégories: les malades du cerveau vont connaître un régime privilégié, du fait même de leur « innocence », et vont être intégrés à la vie familiale alors que les malades des nerfs, à cause de leur « méchanceté» vont être ségrégés (on lave leur linge à part, ils ont leur propre couvert et/ou ne mangent pas à la table familiale, on ne leur laisse pas «toucher les choses de la maison », on leur interdit les relations avec les enfants ... ). Dans une autre étude (Guimelli, 2001), on induit la représentation sociale du groupe idéal, puis les sujets sont répartis dans différentes situations expérimentales dans lesquelles on leur présente un scénario. Ce scénario permet d'opérationnaliser deux variables indépendantes: la perception de la situation (contexte réversible des problèmes rencontrés dans ce groupe ou au contraire contexte irréversible) et le degré d'implication (élevé : acteur ou faible: observateur). Une fois que les sujets ont pris connaissance de ce scénario, on leur demande d'indiquer s'ils vont ou non « quitter le groupe» et avec quel degré de certitude. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC Ici ! Créer un lien sur communications persuasives avec le chapitre 9 quand on l’aura traité. L1 : 10 45 144 Psychologie sociale Les résultats indiquent tout d'abord un effet de la variable «perception de la situation » : lorsque la situation est perçue comme irréversible, les sujets ont davantage tendance à vouloir quitter le groupe. On observe également un effet de la variable «implication» : lorsque les sujets sont impliqués, ils ont davantage tendance à ne pas vouloir quitter le groupe. Enfin, il apparaît un effet d'interaction entre les deux variables: c'est surtout lorsque les sujets sont peu impliqués dans la situation et lorsqu'ils perçoivent la situation comme irréversible qu'ils prennent la décision de quitter le groupe. Les deux études dont il vient d'être question montrent que les représentations sociales peuvent affecter les comportements ou les intentions comportementales. Mais, à l'inverse, les pratiques sociales - et donc les comportements - peuvent aussi affecter les représentations sociales. Ces pratiques sont même, de notre point de vue, à l'origine de la dynamique des représentations, de leur changement d'état. Le schéma de causalité peut être brièvement décrit de la manière suivante. Un événement inattendu modifie l'environnement du groupe de manière significative. Pour s'adapter à la nouvelle situation, jugée irréversible, le groupe met alors en place de nouvelles pratiques. Si ces pratiques ne sont pas en contradiction avec le noyau de la représentation et si elles sont bien acceptées dans le groupe (en d'autres termes, si elles sont légitimes), elles deviennent de plus en plus fréquentes. Dès lors, les schèmes qui les prescrivent vont être suractivés. Ils vont prendre de l'importance dans le champ représentationnel et vont être intégrés au noyau pour en constituer un nouveau. Il s'agit donc bien d'une transformation structurale de la représentation. Dans le cas où les pratiques nouvelles sont en contradiction avec la représentation, le schéma est très différent. Dans ce cas, en effet, les circonstances génèrent des pratiques illégitimes, c'est-à-dire contraires aux prescriptions de la représentation sociale Dans de telles situations, apparaissent alors un certain nombre de mécanismes de défense destinés à protéger la représentation menacée. Pour une même prescription, les rationalisations prolifèrent et se multiplient dans le groupe, ce qui provoque un climat général d'incohérence qui semble se résoudre par la formation d'un nouveau noyau central. Les pratiques sont ainsi un facteur déterminant de la structuration des représentations sociales (Guimelli, 1998, 1999). E - DE LA LOGIQUE SOCIALE Comme on l'a déjà dit, la pensée sociale doit être envisagée comme une forme de pensée différente de la pensée rationnelle et surtout autonome, c'est-à-dire régie par des règles formelles spécifiques et possédant, en définitive, sa propre logique. Un certain nombre de modèles théoriques se sont efforcés d'identifier cette logique propre à la pensée sociale. Tous ces modèles ont pour caractéristique commune d'être fondés sur le principe d'homéostasie . Le principe d'homéostasie peut être défini de la manière suivante: il existe chez l'homme une tendance générale vers la recherche de l'équilibre entre les cognitions propres à un objet donné. Cette tendance est si marquée que la rupture de cet équilibre active chez le sujet un certain nombre de stratégies cognitives destinées à le rétablir. Ces stratégies cognitives et la logique qui en résulte ont fait l'objet de plusieurs constructions théoriques par les chercheurs américains à la fin des années 1950. Les plus connues sont la théorie de la dissonance cognitive (Festinger, 1957), la théorie de l'équilibre cognitif (Heider, 1958) et le modèle psychologique (Abelson et Rosenberg, 1958). Nous n'évoquerons ici que l'une d'entre elles: la théorie de la dissonance cognitive. Nous allons voir que cette théorie, par le statut qu'elle accorde à l'action, nous rapproche des travaux dont il sera question dans le chapitre suivant. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 La pensée sociale 145 1 - La théorie de la dissonance cognitive Pour Festinger (1957), le fait de défendre une attitude A alors qu'on y adhère pas (comportement contre-attitudinal) crée chez nous un état d'inconfort psychologique, la connaissance que nous avons de ce que nous sommes en train de faire (notre comportement) ne s'accordant pas avec nos idées (notre attitude privée). C'est pour réduire cet inconfort que nous modifions notre attitude privée afin qu'elle s'ajuste mieux à notre comportement. Pour Festinger, il suffirait que nous disposions de quelque bonne raison de faire ce que nous faisons (par exemple: une forte récompense) pour que notre inconfort s'en trouve réduit au point de nous dispenser de changer d'attitude. On a là l'une des hypothèses les plus contre-intuitives et les mieux confirmées de la psychologie sociale. Elle sera testée avec succès dès la fin des années 1950 (pour une synthèse: Harmond-Jones et Mills, 1999). Par exemple, Cohen (dans Brehm et Cohen, 1962) demande à des étudiants, pour l'aider dans une recherche, de rédiger un texte justifiant une intervention musclée de la Police sur le campus de l'Université de Yale, suite à des manifestations étudiantes. Il va de soi que les sujets de Cohen, tout comme la plupart des étudiants, n'avaient pas du tout apprécié cette intervention policière. Ils acceptèrent néanmoins de rendre le service demandé. Certains s'étaient vus promettre une récompense dérisoire d'un demi-dollar, d'autres, au contraire, une récompense particulièrement élevée de 10 $, d'autres encore des sommes intermédiaires de 1 ou 5 $. Leur texte rédigé, Cohen demandait aux étudiants d'exprimer leur propre attitude à l'égard de l'intervention de la police, afin de la comparer à celle d'un groupe d'étudiants n'ayant pas eu à rédiger de texte (groupe contrôle). Conformément à l'hypothèse issue de la théorie de la dissonance cognitive, les sujets ayant reçu une récompense insuffisante pour justifier leur comportement (rédiger des arguments favorables à l'intervention de la police) modifièrent leur attitude dans le sens de la rationalisation de leur comportement. Les voilà maintenant plus favorables à l'intervention de la police que les étudiants du groupe contrôle. Ce n'est pas le cas des sujets pour lesquels une forte rémunération constituait une bonne raison de faire ce qui leur était demandé. Quant aux étudiants ayant reçu une rémunération intermédiaire, ils changèrent d'attitude mais moins que les sujets n'ayant reçu qu'un demi-dollar, le changement d'attitude s'avérant ainsi inversement proportionnel à l'importance de la rémunération. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC RAPPEL DU COURS DE L1 La dissonance cognitive : On doit à Festinger (1957) d’avoir envisagé une conception radicalement différente du rapport qu’entretiennent nos idées et nos actions. Pour lui, si nous avons émis un comportement problématique, en particulier en nous soumettant à une figure d’autorité, nous allons essayer de restaurer une valeur à une conduite qui en est dépourvue en modifiant nos attitudes à l’égard de l’objet de notre comportement dans le sens du comportement émis : cela traduit le mécanisme de la rationalisation caractéristique de la théorie de la dissonance cognitive. réf (en local) Fiche de lecture histoire psycho sociale L1 : 10 45 146 Psychologie sociale Il faut savoir que la rédaction d'un texte contraire à ses convictions n'est qu'une modalité particulière d'une situation expérimentale générale: la situation de soumission forcée ou encore de soumission induite: dans cette situation expérimentale, un sujet est amené à faire quelque chose qu'il ne ferait pas sur la base de ses attitudes (tenir un discours contraire à ses convictions, rédiger un texte défendant un point de vue différent du sien, etc.) ou de ses motivations (manger un plat répugnant, faire un travail fastidieux, endurer une épreuve douloureuse, etc.) ou à s'abstenir de faire ce qu'il ferait volontiers (s'abstenir de fumer, de boire, de s'amuser avec un jouet attractif, etc.). Dans les expériences relevant de ce paradigme, on constate, comme la théorie de la dissonance le prédit, que les sujets modifient leur attitude a posteriori afin de l'ajuster à la conduite qu'ils viennent de tenir. Ainsi, après avoir accepté de réaliser une tâche fastidieuse, les sujets trouvent cette tâche moins fastidieuse. Ainsi, encore, après avoir accepté de goûter un plat répugnant (sauterelles grillés, vers de terre ... ) ils trouvent ce plat moins répugnant. Autrement dit, après avoir agit autrement qu'ils ne l'auraient fait spontanément, les sujets modifient leur attitude ou leur motivation pour qu'elle s'accorde mieux avec leur acte. Ce processus est donc en fait un processus de rationalisation (Beauvois et Joule, 1996; Joule, 1993; Joule et Beauvois, 1998 a). La situation de soumission forcée, par le statut qu'elle donne à l'action allait inaugurer une nouvelle problématique du changement d'attitude. Si la problématique classique revient à se demander : que dire à cet homme-là dont on veut changer les attitudes? la problématique posée par Festinger revient, quant à elle, à se demander: que dois je faire faire à cet homme-là pour qu'il en vienne à changer ses attitudes? ou, si l'on préfère: quel comportement obtenir de lui? Nous allons voir que ce dernier questionnement (voir chapitre suivant) ouvre d'amples perspectives. LECTURES CONSEILLÉES Deschamps, J-C., & Beauvois, J-L. (1996). Des attitudes aux attributions. Sur la construction de la réalité sociale. Grenoble: PUG. Guimelli, C. (1999). La pensée sociale. Paris: PUF. Rouquette, M.-L. (1994). Chaînes magiques. Les maillons de l'appartenance. Neuchâtel: Delachaux & Niestlé. Yzerbyt, V., & Schadron, G. (1996). Connaître et juger autrui. Grenoble: PUG. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 RAPPEL DU COURS DE L1 CHAP.4 - METHODOLOGIE DE L’ENQUÊTE p. 45 b Principales caractéristiques des préjugés/stéréotypes et conséquences sur la mesure Le préjugé correspond à la dimension affective d'une attitude, l'objet du préjugé est nécessairement un groupe d'individus. Le stéréotype renvoie à la dimension cognitive de l'attitude, il correspond aux croyances sociales que les sujets du groupe source ont du groupe cible. Il se traduit par des traits ou des comportements associés de manière arbitraire. Le préjugé et le stéréotype sont en étroite relation de cohérence: la valence du préjugé (positive ou négative) affecte le contenu du stéréotype associé, celui-ci correspond en outre à une justification du préjugé (il est sous-tendu par une théorie explicative). La manifestation du préjugé et du stéréotype, la discrimination, correspond à la dimension conative de l'attitude. Elle se traduit par des agissements (cf. Yzerbyt et Schadron, 1996; Bourhis et Leyens, 1999). Les études réalisées montrent que la valence du préjugé, le contenu du stéréotype et les comportements discriminants dépendent de l'appartenance groupale de la cible (endogroupe versus exogroupe). Les stéréotypes qui s'appliquent aux exogroupes sont dénommés exostéréotypes, dans ce cas, la valence du préjugé est en principe négative, et la discrimination l'est également. Le stéréotype qui s'applique à l'endogroupe est un endostéréotype. La valence est en général positive, tout comme la discrimination. Ainsi, les Américains voient les Français «râleurs» et « irrespectueux des règles ». Alors que les Français, renversant la mécanique et la valeur explicative, se perçoivent comme « ayant l'esprit critique» et «débrouillards ». Compte tenu de la dépendance des préjugés, des stéréotypes et de la discrimination, à l'appartenance groupale, leur mesure apparaît d'un grand intérêt. Elle permet en effet d'appréhender les relations intergroupes: symétriques ou asymétriques, et dans ce dernier cas, de révéler la nature de l'asymétrie (cf. Sales-Wuillemin, 2005, 2006). Ces caractéristiques ont des conséquences sur la mesure effectuée. Le dispositif doit mobiliser l'appartenance des sujets à un groupe pour clairement distinguer l'endostéréotype de l'exostéréotype. Ensuite, il faut mettre en évidence la nature de la partition et les positions de chacun des groupes dans celle-ci. Cela se fait en trois étapes. Tout d'abord, il faut procéder à la vérification de l'existence réelle d'une partition, les groupes doivent se percevoir comme distincts l'un de l'autre. Ensuite, il faut déterminer la nature des relations, sont-elles symétriques ou asymétriques? Autrement dit, est-on dans une relation paritaire ou une relation majoritaire/minoritaire. Si tel est le cas, il faudra évaluer, grâce à un travail sociologique et historique approfondi, la nature de l'asymétrie et son origine ainsi que le positionnement respectif de chacun des groupes. Par exemple, s'il s'agit d'une partition de valeur, quel est le groupe valorisé/dévalorisé, s'il s'agit d'une partition en fonction du nombre, quel est le groupe majeur/mineur, etc. (pour toutes ces notions cf. Sales- Wuillemin, 2006). Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 c Spécificités des représentations sociales et conséquences sur la mesure L'étude des représentations sociales a été amorcée en psychologie sociale par la recherche de Moscovici (1961). Jodelet (1989) les définit comme un ensemble de connaissances/ croyances correspondant à un système d'interprétation du réel construit conjointement par un groupe afin de gérer la réalité sociale. Il est possible de tirer plusieurs conclusions à partir de cette définition. Tout d'abord, ces connaissances ne sont pas scientifiques, mais « de sens commun» ou « naïves ». Ensuite, elles sont partagées par le groupe, elles peuvent ainsi faciliter les communications interindividuelles et limiter les conflits. De plus, elles traduisent le positionnent du groupe dans un ensemble social. Enfin, elles ont un impact à un niveau individuel (définition de l'identité, modèle de conduites et de pensée, implications affectives) et social (expression des groupes sociaux et transformations sociales). L'enquête réalisée par Jodelet (1986) sur la représentation sociale de la folie, réalisée auprès d'habitants hébergeant des malades mentaux, permet d'illustrer les caractéristiques du contenu d'une représentation sociale. Elle montre que la cohérence de la représentation est assurée par une «théorie psychiatrique naïve» mettant en jeu deux sources de la maladie : une atteinte du cerveau ou des nerfs1. Dans le premier cas, le malade est réputé inoffensif, il est intégré dans la famille d'accueil, dans le second, il est pressenti dangereux, il est écarté. Ce système de catégorisation transparaît au travers de dénominations spécifiques: le malade mental (<< Bredin ») est socialement différenciable des non-malades (« Civils»). Les «Bredins» se subdivisent en sous-catégories (l' «innocent», le «fou mental», etc.), qui permettent de ranger d'emblée tout nouveau venu et d'adapter son comportement. La structure des représentations sociales a été décrite grâce à la théorie du noyau central (Flament, 1989; Abric, 1989) qui prédit que toute représentation s'organise en deux systèmes. Le Système central p141 (sc) est composé d'éléments qui structurent et orientent la représentation dans son ensemble. Le Système périphérique p141 (sp) comprend des éléments qui particularisent la représentation, décryptent la réalité et protègent le système central. Dans l'optique structurale, pour dire qu'une représentation se transforme, il faut qu'il y ait modification des éléments du sc. Elle peut avoir plusieurs origines, mais résulte d'une contradiction entre le sc et l'environnement. Le cas le plus typique étant le changement des pratiques du groupe (cf. Guimelli, 1989). Mesurer une représentation suppose un objet (sur lequel porte la représentation) et un substrat (un groupe qui en est porteur), ce qui implique que les individus soient interrogés en tant que membre d'un groupe précis, c'est cette appartenance catégorielle qu'il leur faudra mobiliser. De plus, le groupe n'est pas choisi au hasard, il l'est parce qu'il est censé être le plus signifiant en regard de l'objet et de 1 Parallèlement, l'explication de la maladie mentale se fait à travers d'expressions particulières « un détraquement des nerfs » dû à «un choc)) une «peur de guerre qu'est restée ici)) ou encore «sa femme l'a quitté, c'est quelque chose qui est resté là dans le cerveau et qui a tourné )). Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 l'ensemble social considéré. Pour montrer sa spécificité il faudra le comparer à d'autres groupes sociaux. L'analyse de la représentation peut également révéler le positionnement de chacun au sein de l'ensemble social. Par exemple, la représentation de l'hygiène diffère selon que l'on est médecin, infirmier, étudiant spécialisé, ou étudiant non spécialisé en soins infirmiers, parce que la relation à l'objet dépend du rôle, des connaissances, des pratiques, etc., à propos de cet objet (Sales-Wuillemin, 2005). Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 RAPPEL DU COURS DE L1 CHAP. 1 - PSYCHOLOGIE SOCIALE p. 10 III - Attitude ou rationalisation? Prédire des comportements sur la base de la connaissance des attitudes renvoie à une conception assez habituelle du rapport que l'on entretient entre ses idées et ses actions: je pense de telle manière, j'agis alors en conformité avec mes opinions. Autrement dit, lorsque je me suis comporté d'une certaine façon, c'est parce que mes attitudes, opinions, croyances m'ont amené à agir de cette façon. Cette conception apparaît tellement ancrée dans les esprits que nous avons un peu de mal à distinguer les notions d'attitude et de comportement, alors qu'il s'agit - pour les psychologues sociaux - de deux notions bien distinctes: la première renvoie au monde des idées (par exemple, je déteste mon chef), la seconde au monde, des actions (par exemple, je lui mets mon poing dans la figure). On doit à Festinger (1957) d'avoir envisagé une conception radicalement différente du rapport qu'entretiennent nos idées et nos actions: et si le fait de s'être comporté, en raison de circonstances, nous amenait à modifier nos attitudes à l'égard de l'objet du comportement? Bien qu'inhabituelle, cette conception ne nous est pas totalement étrangère: nous avons tous vécu l'expérience d'être confronté à un objet sur lequel nous n'avions pas d'attitude" très ancrée, et cette confrontation nous a amené à nous forger une opinion. Mais si nous possédions préalablement une attitude bien ancrée et négative à l'égard de cet objet, et si nous avions pourtant été amenés à émettre un comportement non conforme à nos convictions, quelle conséquence cela pourrait-il avoir sur notre attitude à l'égard de cet objet? Pour Festinger, si nous avons émis un comportement problématique, en particulier en nous soumettant à une figure d'autorité, nous allons essayer de restaurer une valeur à une conduite qui en est dépourvue en modifiant notre attitude à l'égard de l'objet de notre comportement dans le sens du comportement émis : cela traduit le mécanisme de la rationalisation caractéristique de la théorie de la dissonance cognitive. Ainsi, dans une célèbre expérimentation, Festinger et Carlsmith (1959) amenaient, dans un premier temps, leurs sujets à réaliser une tâche particulièrement ennuyeuse (visser, quart de tour par quart de tour, des écrous sur des vis fixées à une planche en bois). Dans un second temps, on demandait à chaque sujet de présenter au sujet suivant l'expérience qu'il venait de réaliser comme particulièrement attractive et intéressante. Comme rétribution pour ce mensonge, on proposait au sujet soit une somme de 1 $, soit une somme de 20 $. Contrairement à ce que l'intuition permettrait de prédire, mais conformément aux prédictions de la théorie de la dissonance cognitive, les individus les plus rémunérés ne changeaient pas d'attitude à l'égard de la tâche rébarbative puisqu'ils ne ressentaient pas de dissonance entre leur action et leur croyance, la rémunération venant justifier l'action émise. En revanche, les sujets payés 1 $ changeaient significativement d'attitude, considérant, à l'issue de leur mensonge, que cette expérience était utile, intéressante et à même de faire avancer les connaissances scientifiques. Ces sujets qui ont accepté librement de se soumettre à une requête problématique alors qu'ils étaient mal rémunérés ont ressenti une forte dissonance. Pour diminuer cette dissonance, ils ont été amenés à modifier leur attitude à l'égard de la tâche rébarbative: s'ils ont accepté de présenter l'expérience comme intéressante, c'est donc qu'elle était bien intéressante. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 Forum Stérétoype et préjugé p132 ; 136 Auteur : CECILE CHOIMET Posté le : Lundi 02 Avril 2007 à 15:02 Bonjour, J'avoue quelques dificultés à bien saisir la différence entre stéréotype et préjugé. Voici ce que j'ai compris : le principal point de distinction est qu'un préjugé consiste essentiellement en une dimension évaluative (je n'aime pas les Noirs) alors qu'un stéréotype est une croyance (Les blondes sont idiotes) déterminée par des processusude catégorisation et de généralisation. Ils ont comme points communs une résistance au changement et de permettre une économie cognitive. Ai-je bien compris ? De plus je ne comprends pas bien p 135 du cours, concernant les conditions d'atténuation des préjugés, la différence entre le point 3 "les participants des différents groupes doivent avoir des statuts très similaires", " proches du point de vue de la hiérarchie et du pouvoir" et le point 6 "les normes sociales propres à cette situation sont centrées sur l'égalité des groupes et favorisent des relations intergroupes égalitaires". Quelle est la différence ? D'autre part, il me semble que l'hypothèse de contact peut aussi très bien s'appliquer aux stéréotypes et pas seulement aux préjugés ? Merci Cécile Choimet pour vos réponses, Auteur : MARYLL BERTRAND Posté le : Vendredi 07 Septembre 2007 à 18:56 pour comprendre la différence entre les 2 notions, je pense qu'il faut oublier l'usage habituel du mot "préjugé" : il s'agit d'un sentiment négatif, mais qui ne peut pas être défini par tel ou tel trait descriptif. Dans le stéréotype il y a des traits précis : on "pense" d'un écossais qu'il est avare on ne parle pas de sentiment. - c'est un trait cognitif, c'est ce qui définit la catégorie "écossais". Dans la langage quotidien, je pense que nous mélangeons les 2 termes... imaginons que nous soyons tous dans un séminaire d'intégration et que nos animateurs souhaitent que nous laissions tomber nos préjugés les uns envers les autres : ils nous placent tous dans une salle, nous demandent de travailler à un objectif commun, en ayant un statut égal (pas les uns sont les chefs, les autres les esclaves en caricaturant) et dans une situation qui soit centrée sur l'égalité, par exemple nous devons tous réaliser une oeuvre d'art ensemble...la différence est mince, mais je pense que le 2nd point évoqué parle de la situation dans laquelle on nous place pour coopérer, par exemple on ne nous fait pas jouer à un combat entre 2 équipes adverses, mais plutôt à une réalisation centrée sur de la coopération. C'est comme ça que je le comprends. Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 Auteur : VERONIQUE COTTEL Posté le : Vendredi 19 Octobre 2007 à 10:05 Bonjour A mon avis le stéréotype est un ensemble (un pack) d'attitudes, de comportements, d'habitudes, de schémas etc... que l'on a à l'esprit. Et le préjugé c'est quand on colle ce pack à quelqu'un parce qu'il en possède une des caractéristiques (par exemple il est français donc il porte un béret et consomme du pain sous forme de baguette) Des fois c'est plus grave ex : il habite la cité, donc c'est un voyou, un casseur... Auteur : OLIVIER ISSAURAT Posté le : Vendredi 19 Octobre 2007 à 15:04 3 / Les participants des différents groupes doivent avoir un statut « égal », ou des statuts très similaires, dans le cadre de la situation de contact. Dans l'observation de Deutsch et Collins (1951) présentée ci-dessus, par exemple, les membres des deux groupes étaient extrêmement proches du point de vue de la hiérarchie et du pouvoir. S'il existe des différences marquées de statut entre les sujets, les interactions seront guidées par les préjugés. Dans ce cas, chacun maintiendra ses attentes et ni les uns ni les autres ne percevront les mises en cause de leurs certitudes nécessaires à l'évolution des mentalités. 6/ La situation de contacts conduira plus probablement à l'érosion des préjugés si les normes sociales propres à cette situation sont centrées sur l'égalité des groupes et si elles favorisent des relations intergroupes égalitaires. De telles normes, en effet, contribuent au développement des interactions entre les membres des différents groupes. CECILE a bien fait de faire cette remarque entre les deux points car personnellement je n'y avais pas prété attention. Pour moi la différence entre les deux points se situe entre "statut" et "nomes sociales". Je dirai que statut renvoie a l'attribution d'un fonction identifiée et validée par l'institution (au sens large). Une sorte de validation objective par un élément extérieur faisant autorité. Alors que les normes sont des constructions sociales internes au groupe. J'ai un peu l'impression que les modifications des préjugés que cela engagent sont un peu inhérentes à la définition des groupes. Les cirtères sont tels qu'ils excluent les préjugés trop étayés par des stéréotypes. Je ne suis pas très satisfait de mon intervention, il faudra que je la relise pour savoir ce qu'il vaut. Notamment en intégrant les deux interventions suivantes. Petit ajout par rapport à la remarque "D'autre part, il me semble que l'hypothèse de contact peut aussi très bien s'appliquer aux stéréotypes et pas seulement aux préjugés ?" Justement je pense que c'est ce qui fait la difficulté. Les stéréotypes ne sont pas des sentiments qui s'appuyent sur l'émotion. Il s'agit de constructions cognitives qui engagent un raisonnement. L'émotion peut simplement être remplacée par une autre émotion. Par exemple le plaisir de réaliser quelque chose avec un "autre" que nos préjugés nous faisaient rejeter. La construction cognitive il faut la démonter. L'autre reste un "autre" si l'émotion est là mais que mes stéréotypes l'insérent dans un réseau argumentatifs démontrant son étrangeté. D'ailleurs un peu plus loin page 136 sur les stéréotypes, il est fait référence au processus de catégorisation et de structure. Ce sont là deux éléments qui enferment l'autre dans une "interchagéabilité" avec tous les membres de son groupe et rend bien plus compliqué la modification de Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC L1 : 10 45 mon attitude envers lui. Quel étrange chose que [se] de voir un autre dans le regard de tous les autres... Haut 131 132 133 134 135 136 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 CC