...avec une composition de la main-d’œuvre qui change...
La composition de la main-d’œuvre de l’Europe continuera à changer, en conséquence de la
modification de la structure des âges. L’accroissement temporaire de la fécondité après la seconde
guerre mondiale - qui a produit un dividende de la productivité lorsque la génération du baby-boom est
arrivée sur le marché du travail - posera bientôt un problème, la génération du baby-boom commençant
à prendre sa retraite et augmentant la proportion de dépendants dans la population. Il est toutefois
important de noter qu'une population active plus âgée et des durées d'emploi plus longues peuvent être
une opportunité plutôt qu'un désavantage, et ne signifient pas une main-d’œuvre moins productive. Les
travailleurs ne sont pas nécessairement moins productifs ou novateurs avec l'âge : la baisse des
facultés physiques et mentales varie considérablement, en fonction des personnes concernées et de
l'efficacité des politiques sanitaires de prévention. Ce qui est plus important, c’est que les pertes de
productivité peuvent être compensées par l’expérience plus grande des travailleurs, des modifications
dans l’organisation du travail et une utilisation plus efficace des technologies de l’information et de
communication (TIC, voir la section suivante). En outre, les générations futures de travailleurs âgés
bénéficieront de niveaux de formation plus élevés9, réduisant ainsi le risque d’un développement plus
lent des nouvelles technologies avec le vieillissement.
Les jeunes générations arrivant sur le marché du travail sont déjà beaucoup moins nombreuses suite à
la baisse de la fécondité. Le nombre d’enfants âgés de 0 à 14 ans dans l’Union européenne a baissé
constamment depuis 1975, chutant d'environ 100 millions à un nombre estimatif de 66 millions en 2005.
Paradoxalement, ces chiffres de recul en eux-mêmes ne facilitent pas forcément l'accès des jeunes au
marché du travail : une bonne formation et des compétences adéquates seront encore plus essentielles
pour assurer la stabilité de l'emploi. Notamment, un bon départ dans la vie restera primordial, les
désavantages accumulés pendant l'enfance tendant à persister et ne pouvant être corrigés que
partiellement par le biais de mesures destinées à y pallier10. La diminution du nombre de personnes
arrêtant tôt l’école est un défi politique important pour l’UE, l'abandon des études étant associé à des
perspectives d'emploi médiocres, un risque de chômage plus élevé et des emplois à faible productivité
et de qualité restreinte.
... et des flux migratoires en augmentation
L’Europe est déjà la destination des principaux flux migratoires en provenance des pays tiers. En 2004,
l’Union européenne a enregistré 1,8 millions d’immigrés, comparé à juste 500 000 dix ans auparavant.
Ceci est plus que les Etats-Unis par rapport à la population totale, bien que la population d’origine
étrangère de l’UE (9 %) soit toujours inférieure à celle des USA (12 %) et bien sûr du Canada et de
l’Australie (20 %). Concernant le marché du travail, deux nouveaux emplois sur 10 créés au sein de l’UE
entre 1995 et 2005 étaient justifiés par les immigrés des pays tiers.
L’immigration ne peut compenser que partiellement les tendances de répartition des classes d'âge de la
population européenne, parce-que les populations immigrées deviennent âgées à la même vitesse que
les populations locales, et aussi car, au fil du temps, elles adoptent les mêmes modèles de fécondité
que la société d’accueil. La plupart des études indiquent que les conséquences de l'immigration sur le
marché du travail global dans les économies développées sont positives mais que leur étendue est
limitée. Par ailleurs, même actuellement, 40 % seulement des immigrants des pays tiers entrent dans
l’UE pour des raisons d'emploi, les autres immigrant au titre du regroupement familial ou étant des
demandeurs d'asile.
Cependant, l’immigration – en améliorant la mobilité de la main-d’œuvre à l'intérieur même de l'UE -
pourrait aider à rendre le marché du travail plus souple et à soulager les pénuries de main-d’œuvre.
Dans le contexte des sociétés européennes vieillissantes et de la demande croissante de services
personnels (dans les soins médicaux par exemple), l’immigration peu ou moyennement qualifiée va
vraisemblablement augmenter : Eurostat prévoit qu’environ 40 millions de personnes vont immigrer
vers l’Union européenne entre aujourd’hui et 2050. La plupart de ces immigrants étant en âge de
travailler, ils font baisser l'âge moyen de la population. Néanmoins, les répercussions à plus long terme
restent incertaines, puisqu'elles dépendent également de la nature plus ou moins restrictive des
politiques de regroupement familial et des tendances en matière de fécondité des populations
migrantes. Dans ce contexte, alors que les tentatives de micro-gestion à court terme des marchés du
travail de l’UE par le biais de l’immigration ne peuvent pas manquer d'échouer, un élément important
pour l'avenir sera le développement d'instruments politiques et d’indicateurs statistiques plus
performants, pour analyser la migration et concevoir des mesures destinées à répondre aux besoins du
marché du travail à long terme.
9 Voir par exemple, Commission européenne (2007 ; à paraître), Employment in Europe, Chapitre 4.
10 Commission européenne (2007), Investing in Youth: from childhood to adulthood.