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SYNDROMES MANIAQUES,
MALADIE MANIACO-DEPRESSIVE ET TROUBLES BIPOLAIRES
Les troubles de l'humeur comptent parmi les troubles les plus fréquents, tant en population
générale que dans la pratique psychiatrique et en médecine générale.
Ils se présentent sous 2 aspects cliniques très contrastés :
- les syndromes dépressifs, de loin les plus fréquents, sont caractérisés par une humeur triste,
abaissée, déprimée ;
- plus rarement observés, les syndromes maniaques s'accompagnent à l'inverse d'une
humeur euphorique et expansive.
Sur le plan classificatoire, on distingue :
- le trouble bipolaire, qui représente l'élément central de la maladie maniaco-dépressive,
- les troubles dépressifs : épisodes dépressifs isolés ou récurrents, dysthymie, dépressions
brèves récurrentes, etc.
LES SYNDROMES D'EXCITATION SYNDROMES MANIAQUES
L’état maniaque est une pathologie de l’humeur caractérisée par un état d’excitation et
d’exaltation euphorique.
Il survient :
- le plus souvent dans le cadre d’un trouble bipolaire ;
- parfois dans le cadre d'un trouble de l'humeur organique : ces manies organiques ont une
origine lésionnelle ou toxique qu’il faut systématiquement rechercher et éliminer avant de faire
le diagnostic de trouble bipolaire.
1 % des sujets de la population générale présenteront au moins un épisode maniaque au cours de
leur vie. Il s’agit donc d’une pathologie moins fréquente que les troubles dépressifs. Elle touche
autant les hommes que les femmes.
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I- SEMIOLOGIE
La présentation même d’un patient maniaque est d’emblée souvent évocatrice avec typiquement,
tenue gligée, familiarités, euphorie, associations d’idées accélérées plus ou moins difficiles à
suivre.
Euphorie pathologique :
Le patient maniaque est euphorique, ludique, hypersyntone mais versatile.
Euphorique, le patient maniaque est content de lui et du monde extérieur. Son estime de soi
est augmentée, il éprouve une sensation d’aisance et de super-forme inépuisable, il est
optimiste, généreux, jovial, de contact facile ; il manque parfois de pudeur. Sa tenue
vestimentaire peut être remarquable par son caractère exubérant (originalités, couleurs vives).
Ludique, le patient maniaque joue avec les mots, fait des rimes et des associations par
assonances (exemples : «air de rien» appelle «rien du tout» ou «Belle de Jour» «Jour de fête,
fête à Neu-neu, Neuleptil (un neuroleptique)».
Hypersyntone, le patient maniaque éprouve des réactions affectives immédiates et intenses
au moindre stimulus, donnant l’impression d’un accord affectif étroit avec le monde
environnant.
Cependant, son humeur est fluctuante. Il peut passer rapidement du rire aux larmes, de la
joie à la tristesse ou à l’angoisse. Incapable de tolérer une contrariété, il peut rapidement
devenir ironique, caustique, coléreux, agressif ou violent.
Excitation psychique
• Le symptôme caractéristique en est la tachypsychie, c’est-à-dire l’accélération de la pensée.
• Cette tachypsychie a pour conséquence une fuite des idées et des passages du coq-à-l’âne.
Elle s’accompagne d’une logorrhée, flux de paroles au contenu labile, et parfois d’une
graphorrhée.
• Une hypermnésie, une hyperesthésie et des troubles du jugement y sont associés.
Mais cette hyperactivité reste stérile, car désordonnée et sans but précis. De même, la
distractibilité est importante témoignant d’une labilité de l’attention et de troubles de
concentration.
Excitation motrice
• Elle accompagne l’accélération des processus psychiques.
Elle se traduit par une hyper expressivité, notamment une hypermimie, une hyperactivité
avec hyper mobilité (déambulation excessive notamment) mais aussi, souvent, une agressivité
et parfois une agitation.
Troubles du comportement
L’excitation et le relâchement des censures morales et sociales sont parfois à l’origine de
propos excessifs, familiers, parfois grossiers voire orduriers, d’une gloutonnerie, de dépenses
inconsidérées, de démarches intempestives et d’actes délictueux (vols, fraudes, altercations
sur la voie publique, attentats à la pudeur..).
Ex : Tel patient, saisi d’une idée géniale, téléphone en pleine nuit à ses relations. Tel autre,
enthousiasmé par un projet, signe des engagements déraisonnables. Tel autre, encore, se
précipite dans des conduites sexuelles «à risques».
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Signes somatiques :
• Les troubles du sommeil constituent un signe essentiel qui a valeur de symptôme d’alarme :
l’insomnie, typiquement à type de réveil matinal précoce, est précoce et constante. Dans
certains cas, l’insomnie est totale.
Les troubles du comportement alimentaire consistent le plus souvent en une diminution de
l’appétit, un amaigrissement et une déshydratation associée.
II- FORMES CLINIQUES
L’hypomanie, forme atténuée de manie, est caractérisée par une hyperactivité physique et psychique
parfois féconde et par une insomnie.
La manie délirante est caractérisée par la présence d’idées délirantes congruentes ou non à l’humeur.
Parmi les idées délirantes congruentes à l’humeur, les thèmes mégalomaniaques (mystiques, prophétiques,
de filiation, de richesse) et les mécanismes imaginatifs sont les plus fréquents. Parmi les idées délirantes
non congruentes à l’humeur, des idées de persécution et des idées hypocondriaques semblent les plus
fréquemment associées aux états d’excitation.
La manie confuse est caractérisée par une note confusionnelle parfois au premier plan qui peut égarer le
diagnostic. Cette forme survient plus volontiers chez le sujet âgé.
La manie furieuse est caractérisée par une agitation extrême avec dangerosité pour le patient et pour
autrui. Elle s’accompagne d’un retentissement somatique souvent important. Elle est rare aujourd’hui.
La manie atypique est un état d’excitation dans le cadre d’une schizophrénie. Elle est caractérisée par la
présence associée de signes de la série schizophrénique.
Les états mixtes sont caractérisés par la coexistence, à des degrés divers, de symptômes dépressifs et de
symptômes maniaques. Ils doivent être distingués des fluctuations rapides de l’humeur habituelles dans
l’accès maniaque.
CRITERES DIAGNOSTIQUES D’UN EPISODE MANIAQUE SELON LE DSM-IV
A. Période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon anormale et
persistante, pendant au moins une semaine (ou toute autre durée si une hospitalisation est
nécessaire).
B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes suivants (4
si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité suffisante :
1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur
2) Réduction du besoin de sommeil (p. ex. le sujet se sent reposé après seulement 3 heures de
sommeil)
3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment
4) Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent
5) Distractibili (p. ex. l’attention est trop facilement attirée par des stimulus extérieurs sans
importance ou insignifiants)
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6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou
agitation psychomotrice
7) Engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences
dommageables (p. ex. la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites
sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables).
C. Cette perturbation ne répond pas aux critères d’un Episode mixte.
D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée
du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour
nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour
autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.
E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex.
substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale
(p. ex. hyperthyroïdie).
CRITERES DIAGNOSTIQUES D’UN EPISODE MIXTE SELON LE DSM-IV
A. Les critères sont réunis à la fois pour un Episode maniaque et pour un Episode dépressif majeur (à
l'exception du critère de durée), et cela presque tous les jours durant au moins une semaine.
B. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du
fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour
nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour
autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.
C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance
donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale (p. ex.
hyperthyroïdie).
CLASSIFICATION DES ETATS D’EXCITATION ET TROUBLES BIPOLAIRES
On distingue deux grandes catégories diagnostiques pour les états d'excitation (épisode maniaque) :
- Manies symptomatiques d’une affection organique ou psychiatrique, d'une part,
- Manies survenant dans le cadre d'un trouble bipolaire.
Ces derniers sont les plus fréquents.
Néanmoins, un bilan étiologique à la recherche d’un état d’excitation symptomatique est
systématiquement réalisé, notamment lors d’un premier épisode.
I- LES MANIES SYMPTOMATIQUES
• Les causes organiques :
- Les causes lésionnelles : lésions cérébrales organiques
- Les causes endocriniennes : hyperthyroïdie, hypercorticisme
- Les causes toxiques : psychostimulants (cocaïne, amphétamine), haschich, hallucinogènes,
médicaments au premier rang desquels les corticoïdes mais aussi cyclosporine, bromocriptine, L-
Dopa, opiacés, isoniazide, cimétidine et intoxication au CO.
- Les causes médicamenteuses : certains états (hypo)maniaques surviennent durant un traitement
antidépresseur. On parle alors de (hypo)manies pharmacologiquement induites (cf infra).
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• Les causes psychiatriques :
- phases maniaques des schizophrénies dysthymiques ;
- états d’excitation des bouffées délirantes aiguës.
II. LES TROUBLES BIPOLAIRES (DSM-IV et CIM-10)
La majorité des épisodes maniaques ou hypomaniaques entrent dans ce cadre.
Le diagnostic de trouble bipolaire peut être porté devant un épisode dépressif, (hypo)maniaque ou mixte,
ou durant un intervalle libre.
Les différents types de trouble bipolaire (TB) :
Le TB de type I :
Il est défini par la survenue d'au moins un épisode maniaque ou mixte franc (nécessitant une
hospitalisation), non symptomatique : l'existence d'antécédent dépressifs est habituelle mais non
obligatoire pour le diagnostic (il existe d'exceptionnel TB purement maniaques).
Le TB de type II :
Il est défini par la survenue d'au moins un épisode hypomaniaque, non pharmacologiquemnt induit et
non symptomatique, associé à un épisode dépressif : contrairement au TB de type I, l'existence d'au
moins un épisode dépressif dans les antécédents est nécessaire au diagnostic.
L'hypomanie est caractérisée par les mêmes symptômes que la manie (en dehors des caractéristiques
psychotiques, qui sont spécifiques de la manie), mais la sévérité de l’épisode n’est pas suffisante pour
entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel ou social ou pour nécessiter une
hospitalisation et il n’existe pas de caractéristiques psychotiques.
Le TB de type III :
Il s'agit d'un diagnostic non encore reconnu par les classifications officielles. Ce diagnostic est porté
en cas de dépression récurrente :
o associée à une cyclothymie (trouble de la personnalité caractérisé par des fluctuations de
l'humeur, oscillant entre humeur dépressive et hyperthymie),
o ou dont la guérison s'accompagne d'un virage hypomaniaque spontané ou
pharmacologiquement induit,
o ou survenant dans les familles de bipolaires.
Lorsque, au cours d’une année, il a existé au moins 4 épisodes de trouble de l’humeur, soit dépressifs, soit
maniaques, soit mixtes ou hypomaniaques, on parle de Trouble bipolaire à cycles rapides.
Le DSM-IV spécifie certaines caractéristiques du trouble bipolaire et des épisodes :
épisodes isolés ou récurrents,
sévérité,
caractéristiques psychotiques congruentes ou non congruentes à l’humeur,
caractéristiques catatoniques,
début dans le post-partum,
retour à l’état de base entre les épisodes,
cycles rapides (au moins 4 épisodes par an).
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