Le tétanos Le tétanos est une maladie infectieuse grave existant à l’échelle mondiale, le bacille anaérobie Clostridium tetani étant ubiquitaire dans l’environnement. C’est une toxi-infection aiguë très grave due à l’exotoxine neurotrope de Clostridium tetani caractérisé par une paralysie spastique, généralisée ou locale, et des spasmes. Cette maladie, caractéristique sur le plan clinique, a été rapportée dès les premiers écrits de médecine quand Hippocrate, médecin grec de l’Antiquité décrivit un syndrome d’hypercontraction généralisée chez un marin. Etiologie et épidémiologie C. tetani est une bactérie anaérobie ubiquitaire rencontrée dans le sol à travers le monde entier. C. tetani, comme les autres Clostridium, grâce à leurs spores, qui constituent une forme de résistance, peuvent survivre dans des conditions hostiles pendant de longues périodes. La forme sporulée est très caractéristique, comparé à une baguette de tambour. C. tetani peut être un hôte du tube digestif de l’homme et des animaux, mais aucun cas naturel de tétanos d’origine digestive n’a été rapporté. Les surfaces et objets contaminés par des matières fécales, les poussières peuvent contenir C. tetani. Sa présence a été mise en évidence dans l’environnement hospitalier : poussières et échantillons d’air de salles d’opération, surface de la peau chez l’homme, blessures, catgut, coton. Le tétanos associées au tatouage permanent a été rapporté exceptionnellement. La maladie n’est pas transmissible entre humains, et n’est pas immunisant. L’incidence du tétanos est plus élevée dans les pays chauds que dans le Nord. Près de 80 % de ces décès surviennent en Afrique ou en Asie du Sud-est et le tétanos est toujours endémique dans 90 pays. Dans le Monde, l’incidence du tétanos est estimée à 700 000 à 1 million de cas par an. Pathogénie C. tetani est largement répandue dans les sols sous forme sporulée extrêmement résistante. Elle pénètre dans l’organisme via une plaie cutanée, même minime (piqûre de rosier, échardes, morsure d’animal). Les plaies profondes, anfractueuses avec faible ouverture sur l’extérieur ou des plaies chroniques (ulcères variqueux, brûlures, lésions de grattage) sont favorables à la croissance de C. tetani. Dans les pays en voie de développement, le cordon ombilical, les voies gynécologiques (accouchement, avortement), les injections médicamenteuses, les plaies chirurgicales ou spontanées sont fréquemment à l’origine de tétanos. Quand les conditions d’anaérobie sont réunies, il y a germination des spores au site de la plaie et production de deux exotoxines : la tétanospasmine et la tétanolysine. La tétanospasmine ou toxine tétanique, une toxine extrêmement puissante (dose létale homme = 2.5 ng / kg), atteint les jonctions neuromusculaires des motoneurones α proches de la porte d’entrée donnant un tétanos localisé. Disséminée dans la circulation générale, elle va atteindre l’ensemble des terminaisons nerveuses motrices, sensitives et sympathiques de l’organisme, et être responsable du tétanos généralisé. La toxi infection est un modèle à trois étapes : la première est la liaison de la toxine à un accepteur membranaire localisé sur les terminaisons nerveuses, la seconde est l’internalisation de la toxine et la troisième est le blocage irréversible de la libération de neurotransmetteurs. La toxine tétanique entraîne l’inhibition de la libération du GABA et de la glycine par les neurones inhibiteurs de la moelle et du tronc cérébral, avec pour résultante une activation permanente des motoneurones α, d’où une paralysie musculaire spasmodique. Sur le système nerveux autonome, la toxine tétanique entraîne une augmentation de la synthèse des catécholamines (syndrome dysautonomique). Formes cliniques du tétanos La maladie peut se présenter sous différentes formes : généralisée, la plus fréquente; localisée dans la région anatomique proche de la porte d’entrée ; céphalique avec une atteinte des nerfs crâniens suite à une blessure de la tête ou du cou ; néonatale, chez les nouveau-nés, avec porte d’entrée ombilicale. La phase d’incubation varie de moins de 24 heures à plus de 3 semaines, sa brièveté étant un élément déterminant du pronostic. Tétanos généralisé La phase d’invasion est la période du premier symptôme, habituellement le trismus, jusqu’à la généralisation des contractures, et dure en moyenne 48 heures. Le trismus se traduisant par une douleur des masséters, une difficulté de mastication, évoluant rapidement vers une contracture permanente, avec impossibilité d’ouvrir la bouche. La raideur des muscles faciaux donnent un aspect particulier au visage dénommé rire sardonique (risus sardonicus). La raideur atteint les muscles du cou, puis des bras, du tronc, des membres inférieurs et se généralisent à l’ensemble de la musculature volontaire. La phase d’état est caractérisée par trois types de symptômes : - les contractures généralisées, permanentes, douloureuses, invincibles; les membres supérieurs sont en flexion et les membres inférieurs en hyperextension. - les spasmes réflexes douloureux, surviennent à la suite de stimuli minimes (lumière, bruit, soins) ou spontanément, prennent un aspect tonique ou tonicoclonique. La localisation glottique (spasme laryngé) ou aux muscles thoraciques est à l’origine d’un arrêt respiratoire. - le syndrome dysautonomique caractérisé par des chutes tensionnelles, des accès de tachycardie (risque d’un arrêt cardiaque), des sueurs profuses, de la fièvre Les complications du tétanos généralisé: - Respiratoires et ORL: laryngospasme, apnée, hypoxémie, syndrome de détresse respiratoire aiguë, complications de la ventilation prolongée, pneumopathie de déglutition, sténose trachéale. - Cardiovasculaires: tachycardie, hypertension, ischémie, hypotension, bradycardie, arythmies, asystolie, arrêt cardiaque, insuffisance cardiaque. - Rénales: insuffisance rénale, stase urinaire, infections urinaires. - Gastro-intestinales: stase gastrique, iléus paralytique, diarrhée, hémorragie digestive. - Autres: perte de poids, complications thrombo-emboliques, sepsis et défaillance multiviscérale, fractures de vertèbres et ruptures tendineuses pendant les spasmes Tétanos céphalique: débute par une paralysie faciale puis l’ensemble de la musculature de la tête et du cou est atteint et a un pronostic très réservé. Tétanos localisé: la musculature locale devient d’abord douloureuse puis spastique. Tétanos néonatal : les premiers signes sont une agitation inexpliquée, une difficulté de déglutition et un refus de boire. Puis s’installent un trismus, une raideur de la nuque suivie de celle des muscles faciaux, des membres et du tronc. Les spasmes réflexes provoquent une attitude en opisthotonos. L’évolution est le plus souvent fatale. Diagnostic Epidemiologic: absence de vaccination à jou. Clinique: la presence du plaie et tableau clinique. Paraclinique: la culture du bacille sur milieu anaérobie et tests de diagnostic rapide de l’immunité antitétanique . Diagnostic différentiel - trismus de cause locale: pathologie dentaire, angine et arthrite temporomaxillaire - trismus neurologique: consommation de neuroleptiques, pathologie du tronc cérébral; - trismus hystérique. - intoxication par strychnine. - encéphalites - la rage. Traitement Tout patient doit être hospitalisé en service de réanimation médicale. Le patient doit être installé au calme, dans une chambre individuelle et peu éclairée pour limiter les entrées sensorielles à l’origine des spasmes. Les soins et manipulations doivent être limités et effectués avec douceur. L’alimentation parentérale ou par sonde gastrique doit tenir compte d’une demande énergétique élevée due aux contractions musculaires. L’anticoagulation préventive et la prise en charge optimale en service de réanimation permettent actuellement de diminuer la mortalité globale du tétanos. Les plaies suspectes de constituer la porte d’entrée sont nettoyées, désinfectées, parées, ou débridées chirurgicalement si nécessaire. Le traitement du tétanos comprend des mesures spécifiques (immunothérapie, antibiothérapie) et des mesures symptomatiques. Les chances de guérison dépendent de la précocité de la mise en oeuvre du traitement par rapport à l’apparition des symptômes. Immunothérapie L’administration d’immunoglobulines anti-toxine tétanique neutralise les fractions de toxine non encore fixées sur le tissu nerveux, mais elle est sans effet sur la toxine déjà intériorisée dans les neurones. Le sérum anti-tétanique équin (500-1 000 UI/kg i.m.) a été initialement utilisé. Les préparations d’immunoglobulines anti-tétaniques d’origine humaine sont préférables (3000- 6000 UI i.m.), car elles s’accompagnent rarement de réponse anaphylactique et elles ont une durée d’action plus longue. L’inoculation simultanée d’une dose vaccinale est indiquée mais par injection dans un muscle différent de celui utilisé pour les immunoglobulines. L’antibiothérapie a pour intérêt de tuer le bacille présent au lieu d’inoculation, source de la production de toxine. Deux antibiotiques de choix sont préconisés : la pénicilline G et le métronidazole qui doivent être idéalement débutés dans les premières 24 heures suivant le diagnostic. La pénicilline (100 000 à 200 000 UI/kg/jour) pendant 7 à 10 jours est souvent utilisée mais est un antagoniste GABA et serait donc susceptible d’aggraver les spasmes. L’antibiotique de choix est le métronidazole à la dose de 2 g/ jour (7 à 10 jours). Traitement symptomatique Le traitement des contractures et des spasmes va débuter par une trachéotomie rapide, préférable à l’intubation qui déclenche les spasmes. Les benzodiazépines à fortes doses sont le traitement de choix des contractures et des spasmes, en raison de leur activité agoniste GABA. Le syndrome dysautonomique peut être contrôlé par les benzodiazépines telles que le labétalol, le magnésium intraveineux, ou la morphine utilisée en intraveineux. Prévention Le tétanos est une maladie a déclaration obligatoire, non transmissible. Vaccination par l’anatoxine tétanique: le vaccin antitétanique, une anatoxine tétanique purifiée, fait partie des vaccins obligatoires en Roumanie. Chez les nourrissons et les enfants, le calendrier vaccinal prévoit une primovaccination avec trois doses de vaccin à l’âge de 2, 4 et 6 mois, complétée par un rappel à l’âge de 1 an et des rappels à 4 et 14 années. À l’âge adulte, les rappels sont administrés tous les 10 ans. Il n’existe aucune contre indication à la vaccination antitétanique. La vaccination des femmes enceintes (2 injections lors de la première grossesse suivies d’une injection à chaque grossesse ultérieure), les mesures sanitaires lors de l’accouchement et les soins du cordon ombilical sont la base du programme d’éradication du tétanos néonatal par l’OMS. Prophylaxie en cas de plaie: le traitement des plaies doit être rapide, avec un nettoyage et si nécessaire un parage chirurgical minutieux. L’attitude recommandée devant une plaie est synthétisée dans le tableau: Attitude pratique devant une plaie. Type de vaccination blessure complète + dernier rappel entre 5 et 10 ans Mineure, propre Pas d’injection vaccination complète + dernier rappel datant de plus de 10 ans VAT Majeure, propre ou tétanigène VAT VAT + Ig 250 UI Vaccination absente ou incomplète dans les 10 dernières années commencer ou complèter la vaccination VAT+ Ig 250 UI tétanigène, VAT VAT+ Ig 500 UI VAT+ Ig 500 UI débridement antibiothérapie antibiothérapie antibiothérapie retardé ou incomplet VAT, vaccin antitétanique ; Ig, immunoglobulines spécifiques ; UI, unités internationales.