Tableau 5-5 : Principaux résultats des estimations du modèle Probit

Chapitre 5
177
En ce qui concerne le volume d’échanges, la méthode de décomposition employée
consiste à identifier un modèle ARIMA parcimonieux pour la série du volume en logarithme,
par le biais de la méthode de Box et Jenkins (Box & Jenkins, 1976). Les « résidus » issus du
modèle estimé constitueront la série du volume non anticipé, tandis que la variable expliquée
estimée représentera le volume anticipé. Nous examinons tout d’abord la « stationnarité » de
la série originale transformée en logarithme. D’après les tests d’ADF (Dickey-Fuller
augmenté, Fuller, 1996) et de Phillips-Perron (Phillips & Perron, 1988), cette série se révèle
stationnaire au niveau. Ensuite, l’analyse des corrélogrammes et le test de Box-Ljung (Ljung
& Box, 1978)
1
proposent que le modèle AR(1) avec une constante s’avère relativement
approprié pour caractériser la rie chronologique du volume d’échanges en logarithme de
notre échantillon.
C’est après ces examens préliminaires que nous estimons ce modèle identifié, en y
ajoutant trois variables explicatives : une variable de tendance, une variable muette visant à
capter « l’effet de vendredi » (1 pour le jour du vendredi, ou la veille du jour férié, et 0 pour
les autres jours), et une seconde variable muette destinée à capter « l’effet de lundi » (1 pour
le jour du lundi ou le lendemain du jour férié, et 0 pour les autres jours). Cependant, ces trois
variables ne sont pas significatives dans le modèle AR(1) estimé. C’est ainsi que nous
estimons simplement le pur modèle AR(1) qui donne :
VOLt = 6,27 + 0,31*VOLt-1 .
(5.17)
La variable VOLt désigne le volume en logarithme du jour t. Les erreur types de la constante
estimée (6,27) et du coefficient estimé (0,31) pour le premier retard étant respectivement de
0,79 et de 0,09, ces deux éléments estimés sont significatifs d’après le test de Dickey-Fuller
(Fuller, 1996). Le R2, le R2 corrigé, et la valeur de F sont respectivement de 0,09, 0,09, et de
12,47. L’hypothèse de l’autocorrélation des résidus issus de cette estimation est d’ailleurs
rejetée d’après le test de Box-Ljung
2
. Grâce à cette régression qui s’avère significative, les
séries du volume anticipé et du volume non anticipé peuvent être ensuite respectivement
constituées, par le biais du calcul des valeurs estimées pour la variable expliquée, et de ses
résidus.
Quant à la volatilité du taux de change, sa décomposition est plus complexe. D’un côté,
cet élément peut être calculé, entre autres, par trois méthodes : la variation absolue du taux
de change en pourcentage, la différence première absolue du taux de change en logarithme, et
1
La valeur de Q égale 24,32, pour p = 11 et t = 1.
2
La valeur de Q égale 5,78, pour p = 11 et t = 1.
Chapitre 5
178
enfin le carré de la différence première du taux de change. De l’autre, la série chronologique
de la volatilité du taux de change, d’après de nombreuses études
1
qui figurent dans la
littérature économique, se révèle influencée par « l’effet ARCH » (hétéroscédasticité
conditionnelle autorégressive), ce qui implique qu’elle conviennent d’être spécifiée par un
modèle GARCH (1,1). C’est dans cet esprit que nous testons tout d’abord l’existence de
l’effet ARCH dans les trois séries chronologiques de volatilité calculée par les trois méthodes
différentes que nous venons d’évoquer. Le test du multiplicateur de Lagrange (Engle, 1982)
suggère l’absence de l’effet ARCH dans toutes ces séries. Cependant, une quatrième rie de
volatilité a réussi ce test (la valeur de Khi-deux égale 14,6 pour q = 1). Cette série de volatilité
est en fait une transformation de la seconde série, à savoir de la série de volatilité calculée en
termes de différence première absolue du taux de change en logarithme. Nous prenons cette
seconde rie en logarithme, ensuite inversons son signe, puis calculons son inverse. Cette
nouvelle volatilité (VALt) est aussi non gative, et une valeur plus élevée signifie une plus
grande variation du taux de change entre deux jours. Cette série transformée est ensuite
analysée, par le biais de l’estimation d’un modèle GARCH (1,1) qui donne :
VALt = 0,1845 + ut , ut|t-1 ~ N (0, ht2),
ht2 = 0,0013 + 0,3415*ut2 0,1713*ht-12 .
(5.18)
Les erreurs types des quatre coefficients estimés (0,1845, 0,0013, 0,3415 et 0,1713) sont
respectivement de 0,0039, 0,0004, 0,1675, et de 0,2102. Leurs valeurs de z montrent, à
l’exception de l’estimateur de ht-12, une significativité au seuil de 1 % pour les coefficients
estimés. Grâce à cette estimation, les variances conditionnelles (ht2) sont déduites, et servent
enfin à la décomposition de la volatilité du taux de change. Considérant que la constante
estimée (0,1845) représente la volatilité systématique du marché, et que les variances
conditionnelles estimées constituent l’ajustement journalier anticipé de la volatilité
conditionnée par les informations disponibles dans le passé, nous calculons ainsi la volatilité
anticipée par la somme de la volatilité systématique du marché, 0,1845, et la racine carrée de
la variance conditionnelle estimée, à savoir ht, pour chaque jour, ce qui constitue ensuite une
nouvelle série chronologique. Quant à la volatilité non anticipée, elle est simplement la
différence entre la volatilité totale (VALt) et la volatilité anticipée.
Il faut noter que, contrairement aux variables « anticipées », la valeur des deux variables
« non anticipées », à savoir du volume non anticipé et de la volatilité non anticipée, peut être
soit positive, soit négative. Elles doivent donc être interprétées de manière différente par
1
Entre autres, Bollerslev & Melvin (1994).
Chapitre 5
179
rapport aux variables anticipées. En fait, l’existence de ces deux variables non anticipées, de
nature aléatoire, reflètent l’arrivée de nouvelles informations sur le marché, analysée dans la
section précédente. En présence des innovations informationnelles, le niveau de liquidité du
marché est modifié, à la fois par la voie du volume, et par la voie du prix (volatilité). Une
valeur positive du volume non anticipé ou une valeur négative de la volatilité non anticipée
signifie ainsi une amélioration, par rapport à l’anticipation du jour précédent, de la liquidité
du marché, faisant suite aux innovations d’informations, et vice versa.
V-2. Méthodes d’estimations et principaux résultats
Avant d’entamer des estimations, nous rappelons que l’objectif de notre analyse
consiste à examiner la forme réduite de l’équation (5.16) :
St, m = f (Vt , l, I) .
+ (+)
(5.19)
La variable Vt correspond au volume d’échanges anticipé, obtenu de l’estimation résumée
dans (5.17). La variable l est mesurée, soit par la volatilité anticipée dans une optique plus
large, soit par la GARCH estimée, ht2, deux éléments tous dérivés dans (5.18). Enfin, l’effet
de I qui représente l’arrivée de nouvelles informations sur le marché est reflété, d’une part,
dans l’impact qu’a le volume non anticipé, et d’autre part, dans l’incidence que crée la
volatilité non anticipée, c’est-à-dire dans les deux voies par lesquelles des innovations
d’informations influent sur la détermination du spread interbancaire. Outre ces variables, nous
examinerons également le rôle que jouent deux variables muettes sur le spread : « l’effet de
vendredi » et « l’effet de lundi ». Enfin, nous étudierons l’impact du volume d’échanges total
(avant la décomposition en partie anticipée et en partie non anticipée), et celui de la volatilité
totale, sur le spread, pour référence.
Nous effectuons tout d’abord une estimation préliminaire par la méthode classique des
MCO (moindres carrés ordinaires), pour vérifier si la relation décrite dans (5.19) existe, et si
elle est significative. D’après cette estimation, le spread, quel que soit son mode de calcul (en
pourcentage ou en points, au niveau ou en différence première), n’a pas, à une seule
exception, de relation significative (au moins à l’intervalle de confiance à 90 %) avec toutes
les variables explicatives que nous venons d’évoquer ci-dessus. Cette exception concerne la
variable muette de « l’effet de vendredi », qui est pourtant seulement une variable explicative
significative (influence positive) pour le spread en « points », et non pas pour le spread
exprimé en pourcentage.
Chapitre 5
180
Le résultat obtenu de cette première estimation révèle un problème qu’une étude
microstructurelle du marché des changes à court terme est susceptible de rencontrer : la
nature discrète de la variable expliquée étudiée, à savoir du spread. C’est ainsi que nous
abandonnons la méthode classique d’estimation, en recourant aux modèles discrets pour
estimer la relation entre le spread en points et les mêmes variables explicatives que nous
venons d’analyser, afin de mieux examiner la pertinence de l’équation (5.19) servant à
caractériser la dynamique du spread à court terme.
Dans un premier temps, nous utilisons le modèle Probit ordonné, en transformant les
spreads de notre échantillon en trois groupes. En effet, comme le montre le tableau 5-4, ces
spreads se sont répartis en trois « zones » distinctes : les spread en deux points, les spreads
entre 4 et 7 points, et enfin les spread en neuf ou dix points. En raison de la concentration de
certains points, ce classement en trois groupes caractérise relativement bien les trois
principaux différents « niveaux » du spread en vigueur sur le sous-marché étudié : le
niveau faible, le niveau moyen, et enfin le niveau élevé. Nous récapitulons d’abord, dans le
tableau 5-5 ci-dessous, les principaux résultats des estimations du modèle Probit ordonné, par
le biais de la méthode du maximum de vraisemblance.
Dans la première estimation, nous examinons l’influence du volume total, de la
volatilité totale, ainsi que des deux « effets », sur le spread. Seuls le volume total et l’effet de
vendredi sont des variables explicatives significatives. Ce phénomène de « significativité
partielle » des coefficients de variables choisies est aussi présent dans les estimations
suivantes, malgré une confirmation de la significativité de la régression pour ces cinq
estimations, en vertu du test de Wald (Greene, 1993).
Comme les coefficients estimés dans un modèle probit ne représentent pas l’effet
marginal exact de la variable explicative sur la variable expliquée, il est nécessaire de calculer
les pentes au regard de chaque probabilité pour les trois groupes de spreads. Pourtant, les
signes des coefficients estimés semblent, dans la plupart de ces cinq estimations, aller à
l’encontre de l’anticipation théorique. Par exemple, le volume anticipé qui représente la seule
variable dont le coefficient s’avère significatif dans nos estimations, a une influence positive
sur le spread, d’après le tableau 5-5. Ce coefficient positif implique que la probabilité, pour le
spread de niveau élevé, augmente lors d’une hausse du volume anticipé, ce qui paraît donc
contradictoire au regard de notre analyse théorique réalisée dans la section précédente. Dans
une optique globale, seul le coefficient estimé de la variable muette de « l’effet de vendredi »
est à la fois significatif lorsqu’il s’agit d’expliquer le niveau du spread, et « correct » selon la
théorie. En effet, sa relation positive avec le spread reflète une pression plus élevée au regard
Chapitre 5
181
de la gestion de position sur le marché ce jour-là, car il est impératif pour les cambistes
interbancaires de remettre à zéro leur position à la fin de ce jour, afin d’éviter un risque de
change trop élevé au cours du week-end. En d’autres termes, cet effet est essentiellement un
effet « inventaire » dans la dynamique du spread interbancaire à court terme.
Tableau 5-5 : Principaux résultats des estimations du modèle Probit ordonné1
estimation 1
variables explicatives
volume
total
effet de
vendredi
effet de
lundi
μ
coefficient estimé
valeur de t
probabilité asymptotique
0,17
2,30
0,02
0,57
2,00
0,04
0,07
0,25
0,79
0,48
3,58
0,00
vraisemblance en logarithme = -104,31
test de Wald : χ(4) = 88,61 ; probabilité = 0,00
estimation 2
variables explicatives
volume
anticipé
volatilité
GARCH
μ
coefficient estimé
valeur de t
probabilité asymptotique
0,20
6,61
0,00
-49,01
-0,38
0,70
0,46
3,51
0,00
vraisemblance en logarithme = -106,88
test de Wald : χ(3) = 77,12 ; probabilité = 0,00
estimation 3
variables explicatives
volume
anticipé
volatilité
non anticipée
μ
coefficient estimé
valeur de t
probabilité asymptotique
0,14
1,95
0,05
-5,69
-1,08
0,28
0,48
3,57
0,00
vraisemblance en logarithme = -105,76
test de Wald : χ(3) = 76,42 ; probabilité = 0,00
estimation 4
variables explicatives
volume
anticipé
μ
coefficient estimé
valeur de t
probabilité asymptotique
0,19
8,26
0,00
0,48
3,56
0,00
vraisemblance en logarithme = -106,44
test de Wald : χ(2) = 70,06 ; probabilité = 0,00
estimation 5
variables explicatives
volatilité
anticipée
μ
coefficient estimé
valeur de t
probabilité asymptotique
8,59
8,79
0,00
0,40
3,20
0,00
vraisemblance en logarithme = -109,85
test de Wald : χ(2) = 83,08 ; probabilité = 0,00
Note : 1 En désignant S comme étant le spread (S = 1, 2, ou 3, correspondant respectivement à ses trois différents
niveaux), x et b comme étant le vecteur des variables explicatives et celui de leurs coefficients à estimer, μ
comme étant la variable instrumentale à estimer, et F comme étant la fonction de distribution cumulée suivant
une loi normale standard, nous pouvons écrire notre modèle Probit ordonné estimé : Prob(S = 1) = F(b΄x) ;
Prob(S = 2) = F(b΄x + μ) F(b΄x) ; Prob(S = 3) = F(b΄x + μ).
Malgré cette confirmation du rôle que joue le « vendredi » sur la gestion inventaire par
cambistes, rôle déjà observé lors de la première estimation via la régression classique des
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