Thème : Les grands paradigmes en sciences sociales Document 1 Au premier contact avec l'analyse économique, on est sans cesse tenté d'objecter que, dans le monde réel, les choses ne se passent pas toujours comme dans la théorie. Mais ce reproche est souvent déplacé. En effet, par définition, aucune théorie n’est réaliste. L’analyse théorique ne cherche pas à simplement décrire la réalité, ce n'est pas un reportage! Toute théorie procède par abstraction. Il s'agit en effet de disposer d'un modèle suffisamment simple pour être maniable. Or, la simplicité n'est pas de ce monde; la réalité est complexe, et c'est précisément cette complexité qui rend nécessaire l'abstraction théorique pour construire une interprétation intelligible du monde. Cela dit, il ne suffit pas d'un raisonnement abstrait parfaitement logique pour constituer une théorie scientifique ; celui-ci doit en outre être confronté aux faits. Mais ce sont les conclusions de la théorie qui sont soumises à l'épreuve des faits et non ses hypothèses de départ. Par exemple, on construit la théorie de la production à partir d'une hypothèse très simple : les dirigeants des entreprises cherchent à maximiser leur profit. [...] Cette hypothèse n'est pas toujours réaliste ; il existe chez les dirigeants bien d'autres motivations que le profit. Mais le problème de l'économiste n’est pas de savoir ce qui se passe dans la tête des dirigeants ; il cherche seulement à construire un modèle du comportement des entreprises qui lui permette d'expliquer correctement leurs décisions. Si ce modèle permet d'expliquer correctement la façon dont la production réagira à une modification du SMIC, de la TVA ou des taux d'intérêt, il sera retenu, quel que soit le degré de réalisme ou d'irréalisme de ces hypothèses. La performance scientifique d'une théorie ne se mesure pas au réalisme de ses hypothèses de départ mais à celui de ses conclusions. Jacques Généreux, Introduction à l'économie, Le Seuil, 1992. Question 1 : Pourquoi une théorie doit-elle procéder par simplification ? [5 points] Question 2 : Expliquez la phrase soulignée. [5 points] Question 3 : Selon l’auteur, est-ce les hypothèses ou les conclusions des théories économiques et sociologiques qui doivent être « réalistes » ? Justifiez cette réponse. [5 points] Document 2 I1 existe dans les sciences sociales deux grandes options méthodologiques : l'individualisme méthodologique d'une part, et le holisme méthodologique d'autre part. La première de ces options prescrit d'expliquer les phénomènes sociaux par les actions individuelles dont ils sont composés. La seconde considère au contraire que les phénomènes sociaux forment des touts qui ne sont pas réductibles à des actes individuels (ce sont les phénomènes sociaux qui expliquent les actes individuels, et non l'inverse). Le terme « holisme » a été forgé à partir du mot grec holos qui signifie « entier ». Chacune de ces deux grandes options méthodologiques peut se réclamer de l'une des deux traditions majeures de la sociologie, la tradition allemande et la tradition française. La tradition allemande, principalement représentée par Max Weber et Georg Simmel, a opté pour l'individualisme méthodologique. La tradition française, principalement représentée par Auguste Comte et Émile Durkheim, a opté pour le holisme méthodologique. [...] Les théories de l'interaction sociale emploient l'individualisme méthodologique et sont issues de la tradition allemande ; le structuralisme et le fonctionnalisme sont fondés sur un holisme méthodologique et sont issus de la tradition française (le culturalisme relève lui aussi du holisme méthodologique). Bernard Valade, Introduction aux sciences sociales, PUF, 1996. Question : À l'aide de vos connaissances et du document 2, vous présenterez les grands clivages au sein des théories sociologiques. [5 points]