Mais les conflits d’intérêt entre le Conseil et la Commission continuent. Le Conseil essaye de
prévaloir. Il favorise les Etats-souverains alors que la Commission défend l’intérêt
communautaire. Avec l’AUE qui introduit l’alinéa 3 à l’article 100A, les mesures relatives au
marché intérieur pourront concurrencer l’environnement. Le contentieux se diffuse. Mais si les
Etats ont en amont le même pouvoir, ce n’est pas le cas en aval : l’article 100A est plus stricte que
l’article 175. Ceci est renforcé par la jurisprudence communautaire. Par exemple, dans son arrêt
« Dioxine de titane » en 1991 ou encore « Commission contre Conseil » du 17 mai 1993, la CJCE
favorise l’article 175. Le 30 janvier 2001 (arrêt « Royaume Uni contre Conseil »), la CJCE voulait
limiter le domaine de l’unanimité. Le 13 septembre 2005, la CJCE a annulé une décision cadre du
Conseil sur la protection de l’environnement par le droit pénal. Selon la Commission, cette
décision devait relever du premier pilier, de l’article 175. La CJCE vient la conforter. Selon elle, la
protection de l’environnement est un objectif essentiel. La procédure pénale n’est pas du ressort de
la Communauté mais dans le domaine de l’environnement, la Communauté peut prendre des
mesures en relation avec le droit pénal.
On peut s’interroger sur l’intégration des exigences environnementales dans les autres politiques.
Le principe d’intégration est un principe proclamé mais encore à concrétiser. Il est très utilisé.
Dans le domaine de l’environnement, la reconnaissance a été précoce et s’est posée dès 1987 avec
l’article 130 R. Puis avec le traité de Maastricht, l’environnement doit être intégré dans les autres
politiques. De plus, on a assisté à la remontée de ce principe aux articles liminaires et notamment à
l’article 6 du traité. Même si ce principe est très général, cela n’influe pas sur la juridicité du
principe. Ce principe intervient dans la motivation des juges.
Mais au niveau de l’effectivité juridique, le bilan est contrasté. Il est réussi au niveau de la PAC
(ex. : règlement de mai 1999 et de 2003). Mais par exemple, l’utilisation des fonds structurels pose
problème. Au niveau du financement, il y a eu plusieurs programmes dont le programme LIFE. Or
ce financement se concilie mal avec d’autres financements des fonds structurels. Les objectifs des
fonds se neutralisent parfois les uns des autres. Il y a beaucoup de textes qui ne forment pas un
ensemble cohérent. La cohérence est introuvable. Les concepts utilisés sont flous et évanescents.
La notion même d’environnement est flou. D’où l’absence de définition. Cela pose beaucoup de
questions : l’homme est-il le point focal de la définition, ce qui est le point de vue de la CPI ? Doit-
on insérer uniquement les éléments naturels ou artificiels ? Quel est le lien entre l’environnement
et d’autres notions telles que la santé ? En outre les techniques sont décousues et il y a de
nombreux emprunts à d’autres branches du droit comme le droit administratif ou le droit privé
auxquelles se superposent des techniques inventées comme la technique des listes. Pourtant la
cohérence est en voie de construction grâce à son squelette de principes généraux : l’article 174 al.
2, le principe de prévention, de précaution, de correction à la source et de pollueur-payeur. Ces
principes inspirent le législateur communautaire. On peut citer pour exemple, la directive 85/337
sur l’évaluation préalable des conséquences environnementales des projets publics. Se sont
également des instruments d’interprétation au service du juge. Par exemple dans son arrêt du 9
juillet 1992 « Déchets Wallons», la CJCE a utilisé le principe de correction à la source pour
interpréter extensivement l’exigence impérative d’intérêt général.
Cette cohérence est un objectif à relativiser. De fait, il existe une cohérence fonctionnelle car le
droit de l’environnement est un droit finalisé. Ce droit a un noyau dur et une finalité claire.
Néanmoins, c’est une cohérence difficile, il s’agit d’un droit post-moderne. Alors que les autres
instruments juridiques relèvent de la logique kelsénienne, les accords environnementaux et la
coordination environnementale se font davantage sous forme de maillage.