Mathieu Brugidou Un bilan d’activité (avril 2003-Mars 2006) et un projet de recherche : L’opinion et ses publics. Pour une approche discursive et pragmatique des controverses EDF R&D ICAME 1 avenue du Général de Gaulle F-92141 Clamart cedex [email protected] Laboratoire d’accueil : PACTE UMR 5194 PACTE (Politiques publiques, ACtion politique, TErritoires) 1 Résumé Ce document présente le bilan des trois premières années du programme de Directeur de Recherche Associé au CNRS de Mathieu Brugidou. Ces recherches ont été menées en collaboration avec les équipes d’EDF R&D et de PACTE-Cidsp1. Il propose dans une deuxième partie un programme de travail pour la période allant d’avril 2006 à fin mars 2009. Les recherches sur l’opinion publique connaissent aux Etats Unis comme en France, un renouvellement important voire un changement de paradigme insistant sur la compétence des agents « ordinaires », sur l’importance des aspects situationnels et discursifs - voire délibératifs - dans la formation et l’expression de l’opinion publique. Ce renouvellement conduit à réaménager de manière conséquente le paradigme « comportementaliste » qui fait de l’opinion publique la somme des opinions individuelles « privées ». Ces avancées théoriques ont par ailleurs profité et/ou suscité des innovations méthodologiques portant sur de nouveaux types de dispositifs, dits « expérimentaux », plus attentifs aux apports d’informations, aux effets de contexte et de cadrage. Des progrès méthodologiques ont aussi été accomplis dans l’analyse des données textuelles qui ont donné des moyens nouveaux (en termes d’algorithme mais aussi d’herméneutique) au traitement du langage naturel et singulièrement aux questions ouvertes. Ces avancées sur le front des méthodes permettent d’envisager des dispositifs d’enquête par sondage hybrides donnant une plus large place aux questions ouvertes, voire à des séquences mêlant questions fermées et ouvertes. Ce projet a une thèse : l’opinion publique ne peut être comprise comme la somme des opinions individuelles privées mais comme l’expression publique du discours des publics au sens de Dewey. Ce n’est donc pas dans le for intérieur des individus mais dans l’extériorité de la culture et dans la dynamique des controverses sur des enjeux qu’il faut analyser les phénomènes d’opinion publique. Il suit de cela que notre attention doit moins porter sur la notion d’attitude – au sens de schème comportemental intégré– que sur les « lieux communs » qui constituent les publics. Ce déplacement de l’attention permet de mettre en évidence, exemples à l’appui, le travail politique du public– qui n’est dés lors plus confiné au régime passif de la réception. Ce travail est visible dans les discours du public à travers la construction des identités politiques, la recherche des causes etc. 1 Ce projet doit beaucoup à ceux qui ont participé à ces recherches à EDF ou au CNRS qui apparaissent d’ailleurs le plus souvent dans ma liste de publication au titre de co-auteurs, liste qui atteste assez du caractère collectif de ces recherches. Merci donc pour EDF R&D à Stéphane Chataignier, Magda Dargentas, Isabelle Dubien, Caroline Escoffier, Arthur Jobert, Dominique Le Roux, Xavier Marc, Isabelle Ras, et Antoine Lestien pour son soutien sans faille. A PACTE-cidsp merci à Céline Belot, Annie-Claude Salomon, Philippe Caillot, Michèle Moine et à Bruno Cautres, Bernard Denni sans qui ce partenariat entre une R&D en SHS et une recherche académique - que l’on aurait pu croire improbable à une certaine époque - n’aurait pas été possible. Merci aussi à ceux, nombreux – en m’excusant de ne pouvoir les citer ici- avec qui j’ai eu des discussions animées et fertiles qui ont nourries le programme des trois prochaines années. 2 SOMMAIRE I- PARTIE : BILAN DU PROGRAMME DE RECHERCHE POUR LA CANDIDATURE DE DIRECTEUR DE RECHERCHE ASSOCIE AVRIL 2003-MARS 2006 : « UNE ANALYSE DISCURSIVE DE L’OPINION PUBLIQUE » ................................................................................................... 8 1-1 RAPPEL DU PROJET DE RECHERCHE ..................................................................................................................... 8 1-2 UNE ANALYSE DISCURSIVE DE L’OPINION PUBLIQUE .......................................................................................... 9 1-2-1 Un bilan de recherche « théorique » .......................................................................................................... 9 1-2-2 La mise en évidence de topoï argumentatifs et narratifs à travers l’analyse de corpus de questions ouvertes: ............................................................................................................................................................... 9 1-2-3 L’identification de publics à travers l’analyse de corpus de questions ouvertes: .................................... 13 1-3 LES DIMENSIONS METHODOLOGIQUES DE L’ANALYSE DU DISCOURS DE L’OPINION PUBLIQUE ......................... 16 1-3-1 Mode d’administration des questions ouvertes ........................................................................................ 16 1-3-2 Le travail méthodologique réalisé sur le Panel électoral Français (PEF) .............................................. 17 1-3-3 capitalisation et analyse secondaire ......................................................................................................... 18 1-3-4 Enseignement............................................................................................................................................ 19 1-Méthodologie de l’analyse textuelle appliquée aux questions ouvertes .............................................. 19 2-Techniques D’analyse Du Discours .................................................................................................... 19 3- Discours Et Représentations Politiques .............................................................................................. 20 II- PARTIE : L’OPINION ET SES PUBLICS – UN PROJET DE RECHERCHE (MARS 2006- AVRIL 2009) ...................................................................................................................................................................... 22 2-1 DE LA QUESTION DU PARADIGME DE L’OPINION DISCURSIVE A LA CONCEPTION DE NOUVEAUX DISPOSITIFS D’ENQUETE. ............................................................................................................................................................ 22 2-1-1 Quelques repères historiques sur l’évolution des paradigmes ................................................................. 22 2-1-2 Vers une représentation discursive de l’opinion publique ....................................................................... 25 Discours public et discours du public ..................................................................................................... 27 Le sondage d’opinion comme dispositif socio-technique ....................................................................... 28 Le sondage d’opinion comme épreuve ................................................................................................... 31 La mise au point d’une enquête expérimentale pour constituer un corpus « d’énoncés d’opinion publique » ............................................................................................................................................... 34 2-2 UNE APPROCHE DISCURSIVE DES PUBLICS : TROIS CAS D’ETUDES ET UN PROGRAMME D’ANIMATION SCIENTIFIQUE .......................................................................................................................................................... 37 2-2-1 De nouveaux dispositifs expérimentaux pour appréhender l’opinion publique : le cas de l’EPR............ 37 Le débat sur L’EPR et le dispositif projeté ............................................................................................. 38 L’enquête par sondage ............................................................................................................................ 39 2-2-2 Gestion des controverses et du débat public sur les nanotechnologies, identification des représentations-40 2-2-3 Participation à l’enquête électorale sur l’élection Présidentielle de 2007. ............................................. 41 2-2-4 Participation à l’animation du dispositif transverse de PACTE : « Méthodes et données. De la donnée à la connaissance et à l’action. Enjeux de l’exploitation scientifique des données sociales, territoriales et environnementales »....................................................................................................................................... 41 2-2-5 Analyse secondaire et capitalisation (la poursuite du projet CAPAS) ..................................................... 42 ANNEXE 1 : Publications- Mathieu Brugidou................................................................................................... 44 ANNEXE 2 : Dispositif collaboratif de PACTE (source contractualisation 2007-2010)................................... 46 ANNEXE 3 : Ouvrages en cours ou en projet .................................................................................................... 49 1-« L’opinion et ses publics » ................................................................................................................. 49 2- Un ouvrage collectif sur une controverse territoriale et un débat public sur une ligne THT dans le Lot ................................................................................................................................................................ 52 3- Un ouvrage collectif sur l‘Analyse secondaire et la capitalisation en recherche qualitative .............. 54 ANNEXE 4 : Organisation de colloque et de journée d’étude ........................................................................... 58 1-Analyse secondaire en recherche qualitative ....................................................................................... 58 3 Compte-Rendu des Journées Internationales : L’analyse Secondaire en Recherche Qualitative. Utopie ou Perspectives Nouvelles ? Organisees par le groupe capas à la MSH-Alpes ...................................... 58 2-Interprétation sociologiques et analyses textuelles informatisées........................................................ 69 ARCATI : retour sur cinq années d’expérience ................................................................................................. 69 3- membre du comité scientifique du colloque International sur le Débat Public "La situation délibérative dans le débat public" .......................................................................................................... 73 ANNEXE 5 : Programme des enseignements ......................................................................................... 75 1-Techniques d’analyse du discours ....................................................................................................... 75 Science Po Paris Master de recherche ................................................................................................... 75 2-: Discours et représentations politiques ............................................................................................... 77 Paris I- Département de science politique - ............................................................................................ 77 BIBLIOGRAPHIE GENERALE ..................................................................................................................................... 79 4 Introduction De Herbert Blumer à Pierre Bourdieu, nombreux sont les sociologues pour qui « l’opinion publique n’existe pas ». Ce projet cherche à renouveler ce débat ancien en l’abordant sous un autre angle : il existe « des » publics, qui se créent et se recréent autour d’enjeux et de controverses spécifiques. Et c’est la dynamique de ces controverses qu’il se propose d’étudier dans la perspective « pragmatique » ouverte par John Dewey. Des publics se forment en effet parce que des individus, des groupes sont plus ou moins attentifs à telle controverse, intéressés à trouver des causes, et parfois des responsables, à un problème qui, pensent-ils, les concerne. Le sondage constitue une des scènes du débat public, une « épreuve » démocratique, que les citoyens ordinaires sont devenus en partie capables de manipuler. Répondre à un sondage, c’est d’une certaine manière s’exprimer en public. C’est aussi comme à l’occasion d’une discussion, une situation où des opinions peuvent se former, tout autant que la conscience de se situer dans un camp et de construire des arguments et des contre arguments. Pour vérifier ces thèses, ce projet dans la continuité de celui initié il y a trois ans et commun à EDF R&D et PACTE-Cidsp, souligne la nécessité d’adapter les dispositifs d’enquête au public plutôt qu’à l’opinion publique : il ne s’agit pas ici en effet de mesurer les attitudes d’un échantillon dit « représentatif » mais de restituer la parole des « agents ordinaires » (leurs images, leurs récits et leurs arguments qui forment des « lieux communs ») sur un problème et d’identifier ainsi des publics. Les « opinions », quand elles existent, sont toujours contextualisées et la prise de parole constitue leur seul mode d’existence. L’opinion ne réside donc pas dans la solitude du for intérieur, mais au contraire dans l’extériorité de la culture et dans le tumulte de la controverse. Diverses techniques permettent de retrouver à travers les interactions entre questions fermées/ouvertes et les réponses (prises de position et justification) la dynamique de ces controverses. La raison statistique sert alors moins les buts de la représentation politique (où un individu égale un vote) que ceux de la démocratie délibérative, où il s’agit plutôt de rendre à une voix (qui s’exprime plus ou moins fortement) ses raisons. Ces recherches portent principalement sur des controverses environnementales qui concernent au premier chef un industriel comme EDF. Elles relèvent d’une approche discursive de l’opinion publique que mon premier projet de recherche de Directeur de Recherche associé au CNRS avait esquissé et que ce nouveau projet tend à systématiser : - en articulant une définition théorique de l’opinion comme acte de langage et une conception délibérative de la démocratie à travers la notion de public - en proposant des dispositifs expérimentaux de recueil (sondage expérimentaux avec questions ouvertes) du discours des personnes interrogées et des modalité de traitement permettant d’identifier des topoï, véritables heuristiques textuelles, (« lieux communs argumentatifs » ou schèmes narratifs simplifiés) plutôt que des attitudes, - en décrivant certaines des modalités les plus saillantes du « travail politique » des publics, dimensions réflexive et pragmatique qui les distinguent des groupes statistiques : la construction d’identité à travers l’image du porte-parole, l’imputation de cause à propos d’un problème ou la mobilisation et l’engagement dans l’action politique. Pour des raisons de commodités je distinguerai dans la partie bilan concernant mes trois premières années de Directeur de Recherche Associé au CNRS les recherches qui portent sur des questions théoriques (notamment sur la définition de l’opinion publique à partir d’une approche communicationnelle s’appuyant sur les concepts de topos ou de public) et celles qui touchent à des enjeux de méthodes. Toutefois, cette distinction est analytique et ne doit pas 5 dissimuler les liens étroits qui associent la réflexion sur les dispositifs et les constructions théoriques. Ces liens, sur lesquels la sociologie des sciences attirent notre attention sont détaillés dans le premier chapitre de la partie projet : c’est en effet l’élaboration de sondages expérimentaux mais aussi la mise au point de chaînes de traitement adaptés (à travers des algorithmes d’analyse des données textuelles mais aussi grâce à une démarche herméneutique) qui rendent possible l’objectivation des constructions théoriques. Ainsi, il n’est pas suffisant de déporter notre attention de la sociologie des attitudes et de son paradigme comportementaliste vers une définition de l’opinion comme un acte de langage dans une perspective pragmatique, il faut encore proposer des dispositifs expérimentaux permettant une représentation discursive de l’opinion publique. La réflexion sur les dispositifs est donc indissociable de la recherche théorique, c’est au fond le principal résultat de ces trois premières années de recherche, résultat développé et systématisé dans le chapitre 1 de la deuxième partie. Ce résultat me paraît par ailleurs cohérent avec l’esprit d’une recherche menée dans le cadre d’un contrat de directeur associé au CNRS : la recherche appliquée, tant sur la méthode que sur les concepts (topos, public), qu’elle soit menée avec les équipes d’EDF R&D et/ou celle de PACTE-Cidsp, a pu en effet être systématisé et surtout être l’objet d’une réflexion théorique approfondie. C’est le rapprochement des préoccupations de la recherche « fondamentale » - et notamment ses enjeux les plus théoriques concernant la discussion des paradigmes - et des questions de la recherche appliquée sur l’opinion publique telles qu’elles se posent à un énergéticien comme EDF, qui ont rendu possible ce programme de recherche. Avant de présenter le cadre théorique auquel je suis arrivé à l’issue de ces trois années de recherche, il convient de revenir sur les principaux acquis de ce programme. Dans une première partie consacrée au bilan, je présenterai d’abord une série de recherches sur l’existence « d’heuristiques textuelles » dans l’opinion publique. Ces recherches montrent l’existence dans le discours des « agents ordinaires » interrogés par sondage de topoï argumentatifs ou narratifs, véritables lieux communs qui permettent aux citoyens ordinaires de prendre position dans une controverse publique. Ces recherches se situent aux croisements (et donc probablement aux confins) de la statistique textuelle, de la linguistique et de la science politique. Ensuite, je montrerais comment, pourvu d’un tel viatique méthodologique et conceptuel, il est possible de traiter la question des publics et de la distinguer d’une approche en terme d’opinion publique. Dans la deuxième sous-partie de ce bilan consacrée à la méthodologie, je proposerai des recherches sur les « données qualitatives », leur statut et leur traitement. Les premiers résultats concernent les questions ouvertes (leur mode d’administration, leur traitement etc.), j’aborderai ensuite la capitalisation des entretiens et l’analyse secondaire des entretiens, travaux initiés par Dominique Le Roux menés dans le cadre du groupe CAPAS réunissant des membres d’EDF R&D et de PACTE. Au terme de ce bilan, j’évoquerai les journées d’études organisés dans le cadre du partenariat entre EDF R&D et le CNRS, les ouvrages collectifs en cours (décrits en annexe) et les activités d’enseignements directement liées à mon travail de recherche (cf. la description de mes cours et séminaires en annexe). Dans la partie « projet » de ce document, je tenterai une présentation systématique d’une théorie du public et de ses discours en présentant les concepts mais aussi les dispositifs expérimentaux qui soutiennent une telle approche. Enfin, je présenterai l’état d’avancement des projets qui doivent nourrir ce programme de recherche pendant les trois prochaines années. 6 Concernant l’approche discursive des publics : - Un sondage expérimental sur le débat public de l’EPR, réacteur nucléaire de troisième génération - Une recherche sur les controverses et les débats sur les nanotechnologies - La participation à une enquête expérimentale portant notamment sur les enjeux environnementaux à l’occasion de la prochaine présidentielle, Concernant les enjeux de méthode et d’animation scientifique : - l’animation du dispositif COMMOD à PACTE - la poursuite du projet CAPAS et la constitution d’une réseau autour de la capitalisation des entretiens et de l’analyse secondaire 7 I- Partie : Bilan du programme de recherche pour la candidature de directeur de recherche associé Avril 2003-Mars 2006 : « UNE ANALYSE DISCURSIVE DE L’OPINION PUBLIQUE » 1-1 Rappel du projet de recherche Ce premier projet de recherche (avril 2003- mars 2006) se proposait d’explorer certaines des conséquences empiriques d’une conception discursive de l’opinion publique. La définition de l’opinion publique comme état d’un processus communicationnel ménage une voie possible entre la réification positiviste de l’opinion et sa dissipation comme illusion, pur effet de domination. On considérait en effet que l’opinion publique n’est ni un « sujet collectif », ni un artefact idéologique mais le produit d’un échange de multiples actes de langage, expressions publiques d’opinions individuelles. Avant même de parler « de discours de l’opinion publique », il convenait de revenir sur la définition du discours politique. La première section de ce projet rappelait les conséquences théoriques des travaux de science politique récents (tant du domaine de l’analyses politiques publiques que de la communication politique) sur la définition du discours politique : les nouveaux « modèles » de la communication politique, bien qu’asymétriques, insistent sur les registres d’action des « citoyens ordinaires » qui se voient dotés de capacités, notamment cognitives et rhétoriques, de reformulation des problèmes. On était ainsi conduit à adopter une définition élargie du discours politique qui dote le citoyen ordinaire – bien que profane - de capacité discursive. Il était alors possible d’envisager l’opinion publique, non pas seulement comme la manifestation de structures sous-jacentes (système d’attitudes, habitus), mais comme un moment d’un processus communicationnel relevant d’une approche discursive. Cette base théorique établie, on proposait un programme de recherche en deux volets théorique et méthodologique. Le premier proposait un double programme d’étude des représentations politiques dans l’opinion, soit, au niveau macro, à travers l’analyse de confrontations d’arguments ou de symboles essentiellement à travers des questions ouvertes de sondage, soit, au niveau micro, en étudiant des discours politiques « ordinaires » à partir d’entretiens non directif de recherche. Le second volet exposait les enjeux méthodologiques qui touchent tant les réflexions sur l’étude de l’opinion publique, les différentes approches du discours que les questions propres à l’archivage et à l’analyse des données qualitatives. Ces questions faisait déjà l’objet d’une collaboration entre le GRETS/EDF R&D et le CIDSP/CNRS qui ont initié des actions communes. On fixait notamment le cadre pratique et les objectifs intermédiaires de la recherche pour les deux laboratoires concernés par ce projet. 8 1-2 Une analyse discursive de l’opinion publique 1-2-1 Un bilan de recherche « théorique » Une série de recherche à partir de questions ouvertes de sondage a permis de mieux identifier les topoï argumentatifs ou narratifs qui circulent dans le public à propos de controverses. 1-2-2 La mise en évidence de topoï argumentatifs et narratifs à travers l’analyse de corpus de questions ouvertes: Une première étude menée avec Daniel Boy du Cevipof abordait d’abord la représentation « spontanée » des problèmes environnementaux puis traitait des différentes attitudes environnementales. Nous avons essayé dans ces deux approches, l’une, synthétique, privilégiant la formulation de la demande sociale sur ces questions, l’autre, analytique, reprenant des thèmes environnementaux en partie mis en forme par l’offre politique - et à partir de méthodologies différentes- , de mettre en évidence la dimension politique des choix environnementaux. Ce travail a été réalisé à partir des données d’une enquête de sociologie électorale consacrée à la dernière élection Présidentielle. Ces questions étaient issues d’un important dispositif d’enquête auquel participait le CEVIPOF, le PACTE-CIDSP, le CECOP et le GRETS EDF R&D sur les élections Présidentielles et législatives. Il comportait 3 vagues d'enquêtes : pré-présidentiel, (n=4000), post-présidentielles (n=4000) et post-législatives (n=2000). Une partie de l’échantillon était panélisée. Une question ouverte sur l’environnement était insérée dans une séquence de question spécifique sur ce thème. L'intérêt étant de croiser les préoccupations environnementales et les attitudes politiques. La question portait sur la définition des problèmes environnementaux : « Concernant l’environnement, quel est à votre avis le problème le plus important actuellement ? » La taille de l’échantillon, la qualité du terrain , la somme des informations disponibles sur les attitudes et les comportements politiques mais aussi les critères socio-démographiques rendaient le traitement de cette question particulièrement intéressant. Cette recherche a donné lieu à une publication2 dans un ouvrage collectif et à un séminaire du GRETS3. L’analyse des classes de réponses sur les risques a permis de faire apparaître plusieurs types de discours que l’on peut caractériser par le type d’histoires causales4 et les schèmes explicatifs des risques qu’elles mettent en œuvre. Le caractère global ou diffus du risque appelle différentes manières de construire la figure de la victime, qu’ils s’agissent de la planète, de l’habitat ou du cadre de vie pour la ville ou de la menace plus intime qui pèse sur Brugidou M., Boy D. “Environnement et politique” in Cautres B., Mayer N., Le nouveau désordre électoral , Presse de la FNSP, pp 71-96, 2004 3 Brugidou M., Boy D. “Environnement et politique” Séminaire Grets, Paris, novembre 2003 4 La typologie des « histoires causales » de D. Stone croise deux dimensions, celle de l’action (qui peut être guidée ou non guidée) et la dimension des conséquences qui peuvent être recherchées ou non (intentionnelles ou non intentionnelles). Le croisement de la dimension de l’action et de la dimension des conséquences permet d’identifier quatre types « d’histoires causales » (Stone, 1989) impliquant un degré croissant de responsabilité. Les distinctions entre types de risques, mais aussi entre types de responsabilités, peuvent ainsi être redoublées par une typologie des histoires causales, ce qui nous permet de mieux comprendre comment les questions environnementales sont construites ou non comme des problèmes politiques. 2 9 le corps propre à travers la thématique de la santé puissamment développée dans la classe « vache folle ». Graphique 2 : Les discours sur les risques. (source Brugidou M., Boy D. “Environnement et politique” in Cautres B., Mayer N., Le nouveau désordre électoral , Presse de la FNSP, p80, 2004) planète Cause Risques globaux : rupture de l’équilibre naturel, causalité accidentelle effet Destruction de Climatique : sec vs humide La couche d’ozone Déséquilibre Planète Géologique : stocker vs retraiter Accumulation Des déchets Habitat Cause Risques diffus : effet Les voitures, Urbain : fumée vs bruit La qualité de vie les usines Dissémination confusion des milieux, causalité par inadvertance Rural : aliment vs air L’agriculture L’élevage Corps propre La santé Un seconde étude a porté sur des questions portant sur la participation électorale Une première séquence portait sur l’abstention. Beaucoup d’électeurs n’iront sans doute pas voter au premier tour de l’élection présidentielle. Vous-même, pensez-vous que vous irez voter au premier tour de l’élection présidentielle le 21 avril prochain ? OUI/NON puis… Q.1. c’est certain c’est probable Probablement non Certainement non Q. 2. Q401 Bis– A tous Question ouverte : Pourquoi ? L’étude a montré qu’à droite, le vote est plutôt décrit comme un acte (acte, avancer, bouger, améliorer etc.) alors qu’à gauche il s’agit d’une prise de parole (mot, voix, opinion, avis etc.). Bref, le vote peut être comparé de ce point de vue à un acte de langage avec ses deux dimensions. 10 Mais le principal résultat de la recherche est de montrer que le vote, dans les réponses, peut être décrit comme le récit d’une action impliquant différents participants ou rôles (« actants »). Cette recherche a donné lieu à une communication avec Anne Jadot5 A titre d’exemple, nous présentons ci-dessous l’analyse de type de discours sur le vote. Les énoncés de la classe Devoir comportent, comme la classe Droit, une surreprésentation de substantifs, ne sont pas ou peu personnalisés. C’est souvent une « voix narrative » impersonnelle qui s’exprime : « le vote est un devoir », « le vote est un droit ». L’objet de l’action (ou « objet de valeur ») dans la classe Devoir est le vote défini comme un devoir. On trouve toutes les variations sémantiques autour de cette idée : du devoir moral impérieux décrit comme une obligation à une norme sociale plus ou moins contraignante : une responsabilité, un rôle de citoyen voire au frontière de la classe, « faire comme les autres », jusqu’à l’habitude. Le type de compétence requis, ou d’épreuve à passer, est essentiellement l’accomplissement d’une action : accomplir, remplir (un devoir), faire un acte civique. La simplicité de l’action relatée explique souvent le coté très lapidaire des réponses. Le type d’actant mis en scène est principalement celui de l’agent, le responsable de l’action : les personnes interrogées se définissent comme citoyen français, électeur. Les énoncés de la classe Droit, plus longs en moyenne que ceux de la classe précédente, proposent un récit de l’action un peu différent : L’objet de l’action est le vote défini cette fois comme un droit. Là aussi, on recense toute une série de variations sémantiques, de quasi-synonymes qui oscillent autour d’un noyau central : un droit peut être ainsi décrit comme un principe (ce qui le rapproche du Devoir) un privilège, une liberté, voire comme une occasion. Le type de compétence requis implique un rôle plus ou moins actif selon que l’on décrit l’action « primaire » - il s’agit d’utiliser, de respecter, de se servir ou de profiter d’un droit – ou « secondaire » – dans le passé, ce droit a été acquis, obtenu de haute lutte par des gens qui se sont battus. L’action est décrite « en puissance » et non pas « en acte » comme pour le devoir : elle est soit au passé, soit minimale, quasiment sur le mode passif, puisqu’il s’agit de respecter ce que d’autres ont acquis (« des gens se sont battus pour que les femmes aient le droit de vote, donc j’en use »). Le type d’actant mis en scène est, pour les deux classes développant des raisons formelles, principalement celui de l’agent : ce sont cette fois les gens, figure plus ordinaire et moins institutionnelle que celle du citoyen, ou des femmes dont les luttes passées sont rappelées ainsi que la figure plus historique de ceux qui sont morts. 5 Brugidou M., Jadot A., « Comprendre la (non-)participation lors de l’élection présidentielle de 2002. Une approche croisée des questions ouvertes et fermées du Panel Électoral Français. » Communication au Colloque annuel de la SQSP " L'engagement et le désengagement politique ", Université de Montréal, 26-27-28 mai 2004 Résumé : Abstentionnistes et participants déclarés ont indiqué les raisons de leur futur comportement et ce verbatim s’avère très riche. Il a fait l’objet d’une classification hiérarchique descendante grâce au logiciel Alceste et une typologie des discours a été construite puis analysée du point de vue linguistique pour dégager les grands axes d’interprétation de la participation électorale et de l’abstention. Par ailleurs, l’enquête PEF permet d’expliquer la (non-)participation à l’élection présidentielle et ses à-coups entre premier et second tour selon le background social des répondants, leurs attitudes de fond à l’égard de la politique (en termes de légitimité, d’efficacité et de confiance) et enfin leurs réactions vis-à-vis de la campagne électorale 11 Tableau 1 : une typologie des discours sur la participation le vote = Devoir « En acte » : Devoir d’agir (droite) longueur moyenne des réponses = 4,56 mots + de substantifs, verbes modaux = devoir, pas personnalisation (voix narrative) "Objet de valeur" : - un devoir (une responsabilité, un rôle, une habitude) "Type d'épreuves, de compétences" : - remplir, accomplir, faire un acte (civique) "Type d'actants (Agent)" = : - citoyens français, électeur Segments répétés les plus fréquents : c'est un devoir, il faut le vote = Droit Raisons formelles le vote = Changement longueur moyenne des réponses = 10,43 mots + de verbes, verbes modaux = vouloir "Objet de valeur" : - un espoir, ( promesse) "Type d'épreuves, de compétences" : - changer, avancer, bouger, améliorer - représenter, élire, choisir "Type d'actants, (Bénéficiaire)" : - La France Segments répétés le plus fréquents : pour essayer de changer, faire changer les choses, Raisons liées que ça change au contenu le vote = Premier tour (Protestataire) (Système) longueur moyenne des réponses = 9,90 mots + de substantifs, verbes modaux = falloir, pas personnalisation (voix narrative) "Objet de valeur" : - un droit , un principe, un privilège, une liberté, une occasion longueur moyenne des réponses = 13,75 mots (beaucoup de mots outils, marqueurs d'argumentation, verbes modaux = pouvoir, savoir, vouloir) personnalisation du discours (narrateur =je) + Opinion longueur moyenne des réponses = 9,69 mots + de verbes, personnalisation du discours (narrateur = nous) "Objet de valeur" : - un souhait (voix, opinion, avis, point de vue) "Type d'épreuves, de compétences" : - (primaire) utiliser, servir, profiter, respecter -(secondaire) acquérir, obtenir, battre "Type d'actants (Agent)" : - gens, femmes, morts Segments répétés les plus fréquents : droit de vote, il faut, c'est un droit et un devoir "Type d'épreuves, de compétences" : - exprimer, donner (son opinion), contester, se faire entendre "Type d'actants (Bénéficiaire)": - le pays Segments répétés les plus fréquents : pour donner mon avis, pour donner mon opinion (Opinion) premier tour, c'est important, mes idées, mon mécontentement (Premier tour) « En puissance » : Droit de parole (Gauche) 12 Le travail mené avec Anne Jadot a montré l’intérêt de l’analyse des questions ouvertes sur l’abstention qui s’est avérée valider l’approche par entretien approfondi. Pour Anne Jadot « la structuration des discours sur la participation et l’abstention, qui avait été analysée à partir d’un matériau qualitatif approfondi, est complètement validée par le verbatim plus court recueilli grâce à des questions ouvertes dans cette enquête représentative »6 (Jadot, 2006) 1-2-3 L’identification de publics à travers l’analyse de corpus de questions ouvertes: Cette recherche7 a porté sur une figure souvent absente, mais pourtant centrale dans les travaux sur les cadres : celle du citoyen ordinaire. En articulant une réflexion théorique sur l’opinion publique et des instruments empiriques innovants (sondage expérimental comportant des questions ouvertes), ce travail proposait de montrer en quoi la confrontation des conceptions discursives de l’opinion publique à la théorie des cadres invitait à reposer la question des publics et de l’opinion publique dans le cadre de la sociologie de l’action collective. Nous nous sommes appuyés sur l’étude empirique des différents “ publics ” construits par une controverse (un projet d’aménagement de ligne THT dans le Lot) à partir de l’analyse des topoï argumentatifs ou cadres produits par l’action collective. L’étude à montré qu’il était possible d’identifier différents publics en fonction de ces cadrages, que ceux-ci varient pour partie en fonction du niveau de “ concernement ” (niveau d’intérêt et d’information sur la controverse) et sélectionnent (ou sont sélectionnés par) des propriétés sociales distinctes. L’analyse détaillée des raisons mises en avant pour justifier une opposition au projet de construction d’un ligne THT dans le Quercy Blanc nous a conduit a revenir sur les concepts que nous avions mobilisés (cadrage, argumentation, topos, grammaire, publics, groupes statistiques etc.). Le tableau récapitulatif ci-dessous constituait une tentative de typologie des formes de justification et des publics. 6 Anne Jadot, Le rapport des citoyens aux différents types d’élections en France et en Angleterre Contribution à une sociologie compréhensive de la participation électorale, thèse de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris en Science Politique, janvier 2006. Résumé, p.4. 7 Brugidou M., Escoffier C. « Mobilisation, cadrage et opinion publique territoriale », Table ronde Où en sont les théories de l’action collective ?, VIII eme Congrès de l’Association Française de Science Politique. Lyon, 14-16 septembre 2005. 13 Tableau 2 : Typologie des formes de justification et des formes de publicisation Argumenter Justification Cadrage (cognitif) Les nuisances Sur le Paysage, la Vie Argumentation Les lignes (linguistique) THT défigurent le paysage Topos (linguistique) Public Public Groupe statistique Les lignes THT représentent un danger Le paysage, Il faut se c’est le Pays garder du danger Publicisation Grammaire de Authenticité la discussion Partage de l’expérience vécue Scène La Santé Discussion ordinaire Authenticité Partage de l’expérience vécue Discussion ordinaire faible niveau faible niveau d’implication d’information et d’implication PS/radicaux de gauche + de 20 ans dans le département Revenu faible Contre argumenter Le Développement économique Il y a d’autres solutions techniques même si elles sont plus chères Le progrès technique permet une meilleure qualité de vie Il y a d’autres formes de développement pour la région Arguments désindexés de la situation, Contraintes formelles Débat public/débat politique Arguments désindexés de la situation, Contraintes formelles Débat public Arguments désindexés de la situation, Contraintes formelles Débat public/ débat politique fort niveau d’information, concerné, non engagé directement Ecologiste fort niveau d’information et d’implication très fort niveau d’information et d’implication Les champs électromagnétique sont nuisibles pour la santé Principe de précaution Nord du Ruraux département CSP et niveau de CSP-, niveau diplôme moyens de diplôme Revenu faible La richesse n’est pas matérielle (consommation) Propriétaires, Néoruraux hommes CSP moyennes CSP +, niveau de diplôme + Revenu élevé Dans les formes de justification, il nous a fallu tout d’abord distinguer entre trois concepts différents8 : 8 Pour une discussion des concepts de cadre et de topos argumentatif, cf. [Cefaï, 2005]. 14 - le cadrage implique de « sélectionner certains aspects d’une réalité perçue et [de] les rendre plus saillants dans un message pour promouvoir une définition particulière d’un problème, un interprétation causale, un évaluation morale et/ou une recommandation concernant le traitement de l’objet » [Entman,1993 cité par Gerstlé 2004]. On distinguera ainsi trois types de cadrage dans notre étude. Celui des Nuisances physique (sur le Paysage, la Vie), de la Santé, et du Développement économique. Par exemple, le cadrage de la Santé met en exergue une partie « de la réalité perçue ». Ces réponses insistent moins sur le paysage, ignorent totalement les aspects économiques pour souligner les risques attachés à la ligne THT. - l’argumentation suppose de déployer un ou plusieurs arguments à partir du cadrage sélectionné. Ainsi, le cadrage des Nuisances, privilégiant le registre du « sens commun », insiste sur les aspects matériels des lignes, les poteaux, les fils et donne naissance à deux types d’argumentations : le premier souligne combien les lignes dans leur insertion matériel constituent une atteinte physique au paysage, le second montre combien ces lignes représentent un véritable danger matériel pour la vie des hommes et des animaux du territoire. - Le topos est un « axiome normatif socialisé » [Rastier 1987], par exemple « les Gascons sont vantards » qui permet une afférence. Nous avons ainsi identifié les « lieux communs » qui soutiennent une argumentation, par exemple celui qui identifie le paysage au « pays ». Sauvegarder le paysage (menacé par les lignes) revient alors à préserver l’identité du Quercy Blanc et de ses habitants.9 L’attention portée au contenu des justifications – et notamment à son substrat culturel et historique qui implique d’identifier quel type de « tradition » ou de corpus la justification mobilise -, ne devait pas nous détourner de l’analyse des formes de publicisation, des scènes et des règles ou « grammaires » qui régissent les prises de parole sur ces scènes. Nous avons distingué essentiellement deux grammaires (ou « régimes de discussion », cf. plus bas) impliquant des formes de monté en généralité : - - celle de la discussion ordinaire, dont on a précisé qu’elle était régie par des exigences d’authenticité et de partage de l’expérience vécue, et celle du débat public, marquée par la nécessité de désindexer l’argumentation par rapport à la situation. Enfin, il convenait de préciser le statut des publics crées par ces scènes que l’on a distingué des groupes statistiques caractérisés par une position dans un espace social10. Il s’agit en effet de « public » au sens où les personnes interrogées sont conscientes d’argumenter dans l’espace public (notamment sur la « scène » que constitue le sondage). Elles adoptent ainsi une position réflexive. 9 Danny Trom et Bénédicte Zimmerman ont montré que ces topos ne sont pas de simples inférences langagières, mais qu’ils sont le fruit d’un processus historique relativement long, produit d’un travail collectif, se diffusant « progressivement dans le corps social, de sorte que les entités qu’il fait exister viennent à peupler le monde des expériences communes, terreau de toute mobilisation » [Trom, Zimmerman, 2001, p 306]. 10 La position dans l’espace social caractérisant le public s’analyse soit comme le produit d’un processus communicationnel (les publics ont été construits par la controverse et ils ont une série de caractéristiques sociales, soit (et en même temps) comme une forme de prédisposition, mais en aucun cas on ne peut déduire de ces prédispositions les formes de justifications. C’est ce que symbolise les deux flèches à droite du tableau. 15 1-3 Les dimensions méthodologiques de l’analyse du discours de l’opinion publique Les recherches réalisées sur le discours de l’opinion publique sont indissociablement liées à des enjeux méthodologiques et épistémologiques. Elles posent des questions importantes de méthodes sur les dispositif de recueil et d’analyses du discours des agents ordinaires, que l’on considère les questions ouvertes ou les entretiens. Cette réflexion sur les « dispositifs hybrides », qualitatif et quantitatif allait déboucher sur un travail sur les sondages expérimentaux impliquant notamment de se confronter aux problèmes (à la fois politique et statistique) de la représentativité et de l’échantillonnage. On a retrouvé par ailleurs des interrogations épistémologiques classiques sur le statut des « données qualitatives », leurs rapports avec les données quantitatives qui ont nourri les journées d’études organisées avec le PACTE-Cidsp sur l’analyse secondaire des entretiens ou le journée d’étude préparée avec le réseau ARCATI sur le statut de l’interprétation dans l’analyse textuelle informatisée. Enfin, cours et séminaires ont bien sûr été les reflets de ces parcours de recherche. 1-3-1 Mode d’administration des questions ouvertes Le traitement d’une question provenant d’une enquête menée par Les instituts Opinion Way et Novatris en collaboration avec le DESS Progis de Grenoble a permis de comparer différents modes d’administration de questionnaires. La question « Quand on vous dit environnement, quels sont les mots qui vous viennent à l’esprit ? » a été posée par en face à face, en auto-administré par voie postale, par téléphone, en auto-administré on line via le web. Un premier travail était en cours au début de notre programme de recherche avec Michelle Moine (Labsad-Pierre Mendès France) et Philippe Caillot (PACTE-Cidsp) qui a donné lieu à une intervention au colloque sur les sondages fin 2002 et à une publication11. Cette première étude à visée méthodologique se proposait de comparer la forme de ces réponses, leur richesse, la nature des représentations qui en résultent dans le but d’isoler d’une part ce qui doit être attribué au canal d’administration lui-même, et d’autre part à la spécificité des publics qu’il atteint caractérisés par l’âge, la catégorie sociale, le niveau d’études, la taille de la commune de résidence, la proximité partisane,… Sur le fond, ce corpus a permis l’analyse de « l’image » de l’environnement dons l’opinion publique. Deux types de conclusions ont pu être tirés de cette étude sur la forme et sur le fond. Sur la forme, il s’est avéré que les réponses on line sont indéniablement plus longues. Deux explications non exclusives ont été avancées : - d’une part, le mode d’interrogation autoadministré sollicitant une participation plus active de l’enquêté semble favoriser une expression plus libre. Par ailleurs l’absence de médiation permet d’éviter toute tentation de pré-codage de la part de l’enquêteur qui résumerait les réponses sous la forme de mots-clefs. - d’autre part, les personnes considérant que l’environnement constitue un problème relevant de l’espace public - et éventuellement d’un traitement politique - sont plus nombreuses dans l’échantillon on line. Or, on sait que la propension à répondre à un 11 Brugidou M. Caillot P. Moine M. « Influence du mode d’administration d’un questionnaire sur les réponses à une question ouverte », in P. Ardilly (dir), Echantillonnage et méthodes d’enquêtes, 2002, Dunod, pp.260268.2004. 16 sondage d’opinion est notamment liée à l’intérêt manifesté pour les problèmes relevant du débat public. Sur le fond, on remarquait d’abord que les représentations sociales de l’environnement sont suffisamment structurées et robustes sociologiquement pour « résister » au mode d’enquête : aucun des thèmes retenus n’était exclusif d’un terrain. Ensuite, il apparaissait que l’échantillon on line évoquait plus fréquemment les questions environnementales comme des « problèmes » relevant d’un traitement collectif et politique. L’échantillon administré avait plus tendance soit à considérer que ces questions relèvent de l’espace privé et individuel, soit encore à se représenter l’environnement à travers des évocations édéniques d’une nature intouchée par l’homme. On voyait ainsi se dessiner une distinction entre deux régimes de représentations – traduisant probablement une proximité plus ou moins grande au thème abordé – l’un symbolique, puissant dans le vieux fond de représentations de l’imaginaire, l’autre descriptif et argumentatif sensible à des effets d’information et à l’actualité. Ces deux régimes n’étant d’ailleurs pas exclusifs. On considérait enfin que l’usage de l’internet traduit sans aucun doute une forme de « style de vie » avec ses valeurs qui tend à estomper les effets des variables sociologiques lourdes connus par ailleurs. 1-3-2 Le travail méthodologique réalisé sur le Panel électoral Français (PEF) Pour la première fois dans l’histoire des enquêtes électorales, l’important dispositif de sondage mis en place par le CEVIPOF, le Cidsp-PACTE et le CECOP comportait un nombre conséquent de questions ouvertes. Cette avancée méthodologique, dans un dispositif par ailleurs innovant12, a été rendu possible par l’existence d’une équipe de chercheurs formée à l’analyse de questions ouvertes au cidsp-PACTE. Le travail de cette équipe a donné lieu à plusieurs articles et communications sur les problème de méthodes posés par les questions ouvertes13. Nous reprenons ci-dessous les principales voies de recherche définies à l’issue de ce travail. Il apparaissait que l’apport de questions ouvertes dans un dispositifs d’enquête électoral ou d’opinion et le recours à des approches d’analyses des données textuelles permettent incontestablement de proposer de nouveaux angles d’analyses et d’enrichir les approches de la sociologie politique. Toutefois, elles suscitent aussi de nombreuses questions qui Cautrès Bruno, Jadot Anne « Panel, mode d’emploi », in Cautrès B., Mayer N. Le nouveau désordre électoral, Presses de Science Po 2004, p 369-385. 13 Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C., « Méthode et stratégie d’analyse des questions ouvertes du Panel Electoral Français », communication au Congrès de l’Association Française de Sociologie Villetaneuse, 24-27 février 2004, RTF Méthodes (n°20) Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C., « Méthode et stratégie d’analyse des questions ouvertes du Panel Electoral Français », BMS, Bulletin de Méthodologie Sociologique, septembre N°82, pp. 5-26, 2004. Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C, « Les apports de l’analyse textuelle pour l’analyse électorale », Le poids des mots (vol.1 et 2) Actes des 7es Journées internationales d’Analyse statistique des Données Textuelles, Purenelle G, Fairon C., et Dister A., Presses universitaires de Louvain, Louvain-la-Neuve, 2004 Brugidou M., Mandran N,: « Méthode et stratégie d’analyse des questions ouvertes en sociologie électorale », séminaire ARCATI, IRESCO, Jeudi 20 novembre 2003 Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C, « Les apports de l’analyse textuelle pour l’analyse électorale », JADT 2004, 7ème Journées internationales d’Analyse statistique des Données Textuelles, Louvain, mars 2004. Brugidou M., "Une approche discursive de l'opinion publique : la contribution de l'analyse textuelle (questions ouvertes de sondage, média) à l'analyse des cadres herméneutiques", Séminaire du CRPS (Centre de Recherche Politique de la Sorbonne), Paris I, 20 février 2004. 12 17 constituent un véritable programme de recherche que dont on se contentera ici d’indiquer les grandes lignes : - du point de vue des stratégies de questionnement, il s’agit de construire une véritable typologie des questions ouvertes différenciant des niveaux de réponse (citation, mémorisation, discours) mais aussi des types de discours (question ouverte « projective », « argumentative » etc.). Cette étude est inséparable d’une réflexion approfondie sur les séquences de questions – reprenant les éléments concernant les effets d’ordre, de contexte – en s’interrogeant par exemple sur des séquences incluant questions fermées et ouvertes. Au-delà, il s’agirait de reprendre à nouveau frais le débat amorcé dans les années quarante entre Rensis Likert et Elmo Wilson sur les questions ouvertes et les questions fermées14 et de promouvoir des approches hybrides et de nouveaux dispositifs. - du point de vue des « terrains », il s’agit d’apporter une extrême vigilance aux interactions enquêteurs/enquêté et à la qualité du recueil des « données » si sensibles quand il s’agit de discours, - concernant les stratégies d’analyse, il s’agit d’approfondir selon les cas les approches en termes d’analyse de contenu ou de discours voire à parfois cumuler ces stratégies. Ces stratégies posent et articulent entre elles de nombreuses questions linguistiques (et plus généralement sur la place et l’importance à accorder au langage dans l’analyse de ces questions) mais aussi statistiques (de simples croisement avec des variables agrégées aux procédures de classification exploratoires en passant par le traitement de plusieurs questions ouvertes etc.). Elles impliquent en outre une réflexion sur les logiciels d’analyse des données textuelles et leurs attendus théoriques. - Le « retour aux répondants » implique une réflexion méthodologiques sur les protocoles (dont certains ont été ici présentés) mais aussi épistémologique plus large sur la combinaison d’approches compréhensive et explicative, - Enfin il convient de s’interroger sur certains des « objets » construits par la théorie tant il est vrai que le renouvellement théorique, ainsi que le rappelle Jean-Claude Passeron et Michel de Fornel, est aussi le résultat « de la mise au point de nouvelles modalités de l’enquête empirique » qui transforment « l’intelligibilité des « faits » ». Ainsi l’étude des questions ouvertes issues de ce type de dispositif peut-elle par exemple contribuer à « décentrer » la réflexion théorique sur l’opinion publique voir sur celle d’attitude, en en proposant des représentations discursives y compris au niveau agrégé. 1-3-3 capitalisation et analyse secondaire Ce travail a été principalement initié par Dominique Le Roux de la R&D d’EDF. Mon rôle ici a notamment consisté à mettre en rapport des chercheurs d’EDF travaillant sur ces questions et une équipe de PACTE-cidsp familière des données quantitatives et désirant approfondir les problèmes méthodologiques de l’analyse qualitative. J’ai par ailleurs participé à un travail de réflexion épistémologique dans le cadre de ce projet. Un groupe de travail CAPAS (CApitalisation et Analyse Secondaire) a réuni des membres des deux laboratoires : deux contrats de recherche ont concrétisé la volonté des ces équipes de travailler ensemble. Deux journées d’études (Cf. annexe) réunissant les meilleurs spécialistes internationaux sur ces questions et un ouvrage collectif en préparation chez Lavoissier (Coédition EDF R&D, cf. Annexe) ont permis de valoriser ce programme de recherche. 14 Converse, J.-M. « Strong arguments and weak evidence : The open/closed questionning controversy of the 1940s. Public Opinion Quartely, 48, 267-282. 18 1-3-4 Enseignement Les cours et les séminaires bénéficient des travaux de recherche. Ils permettent par ailleurs de progresser dans l’élaboration théorique par l’exigence de clarification qu’ils impliquent. 1-Méthodologie de l’analyse textuelle appliquée aux questions ouvertes Etablissement : SCIENCE PO GRENOBLE Discipline : Sciences Sociales – Analyse des données textuelles Nature et volume : CM- 20 heures avec Michèle Moine Niveau : Master : Analystes politiques et sociaux-Progis, Études d'opinion et de marché Les textes de réponses d’enquêtés à une question ouverte (réponses libres à une question) apportent souvent une information spontanée et riche sur les locuteurs. Ces informations se sont révélées particulièrement intéressantes pour les études d’image, de notoriété ou des représentations sociales. Ce ne sont pas les seules sources d’informations textuelles exploitées dans le domaine des études (articles de presse, transcription d’entretiens,..). Le développement de logiciels a considérablement facilité l’exploitation de ces corpus particuliers. L’exploitation de ce type d’information et son interprétation requiert des compétences sociologiques, linguistiques et statistiques. L’objectif de cet enseignement est l’acquisition des compétences nécessaires.. Une importante partie de ce cours est consacré à l’exploitation de textes de questions ouvertes 2-Techniques D’analyse Du Discours Etablissement : SCIENCE PO PARIS Discipline : Sciences politiques – Analyse de discours Nature (CM) et volume (nombre d'heures effectives) : CM-14 heures Niveau (L, M, D, à l'exception de la direction des thèses) : Master de Recherche Objectif pédagogique : L’objectif de cette première partie du module est de présenter les principales notions d’analyse de contenu et d’analyse du discours appliquées à des corpus politiques. Présentation générale : A partir d’une première définition opposant une analyse de contenu, telle qu’elle est pratiquée par les sociologues – et qui trouve le plus souvent sa justification dans le caractère opératoire de la démarche –, et l’analyse de discours, pour l’essentiel issue de la linguistique, qui tente de se constituer en champ disciplinaire, cette première partie du module propose de croiser ces approches avec les objets d’étude que le sociologue et le politiste cherchent à traiter. On abordera notamment le problème de la constitution des corpus et du choix des stratégies d’analyse en considérant le statut des locuteurs 19 (« professionnels » de la politique, journalistes, experts, « citoyens ordinaires »…), les différentes situations de communication (allocution de campagne, émission politique, article de presse, intervention dans un forum, réponse à des questions ouvertes de sondages…) ainsi que les « questions programmes » des sociologues et des politistes (légitimation, justification, mise sur agenda, effets d’information, cadrage et définition de la situation, etc.). Pour cela, on présentera dans un premier temps les principales notions de l’analyse de contenu notamment à partir d’exemples d’études de corpus médias en contrastant les contextes politiques (campagne, communication gouvernementale etc.). Dans un deuxième temps, en prenant en compte la situation d’énonciation et la dimension linguistique des corpus, on proposera un premier éclairage sur les méthodes d’analyse du discours. Deux formes discursives particulièrement intéressantes pour l’étude des corpus politiques seront privilégiées : le récit et l’argumentation. On se référera ici aussi bien à des forums politiques « classiques », réunissant des hommes politiques et des journalistes, qu’à des forums mêlant « experts » et « profanes », « professionnels » et « citoyens ordinaires » Cette première partie du module se terminera par une présentation des principaux logiciels d’analyse qualitative et/ou quantitative des textes en signalant les apports de disciplines comme la statistique ou le Traitement Automatique des Langues (TAL). Cette séance sera l’occasion de rappeler que l’objectivation de « traces » discursives sous la forme de « données textuelles » ainsi que l’automatisation partielle des tâches de l’analyse ne sont pas incompatibles avec une perspective herméneutique. 3- Discours Et Représentations Politiques Etablissement : Paris I Discipline : Sciences politiques – Analyse de discours Nature et volume : CM- 28 heures Niveau : Master Objectif pédagogique : L’objectif du séminaire est de proposer les principales notions d’analyse du discours politique tant sur le plan théorique - dans le cadre d’une approche élargie de la communication politique en sollicitant des approches multidisciplinaires-, que d’un point de vue méthodologique. Présentation générale : Il s’agit de présenter un panorama de travaux sur les discours politiques dans le cadre d’une communication politique « élargie » : on s’intéressera ainsi aux discours des « professionnels » de la politique (homme politique, communauté de politique publique) mais aussi à ceux des médias, des experts, jusqu’aux « profanes » qui tentent, à travers des discours, de construire des représentations politiques des problèmes ainsi que des identités de ceux qui les portent. On discutera des notions élaborées dans le champs de la science politique (dans le cadre de la communication politique mais aussi de certaines approches de l’analyse des politiques 20 publiques), ainsi que dans le champ de la sociologie des sciences et de la sociologie pragmatique. Le séminaire s’appuiera sur différents exemples et méthodes d’analyses du discours. On illustrera par des études de cas des approches comme l’analyse de contenu, l’analyse structurale du récit ou l’analyse des données textuelle appliquée à des corpus des textes relevant de différents types de communication (émission politique, articles, réponses à des questions ouvertes de sondages…) 21 II- Partie : L’opinion et ses publics – un projet de recherche (Mars 2006- Avril 2009) Le bilan de ces trois, premières années de recherche m’a amené à systématiser mon approche « discursive de l’opinion publique ». Cette réflexion m’a conduit d’une part à abandonner le concept d’opinion publique pour celui de public et, d’autre part à une réflexion méthodologique élargie sur la question des dispositifs de recueil dans une perspective qui a emprunté à la sociologie de sciences et à la sociologie morale de L. Boltanski et L. Thévenot. Dans ce premier chapitre, je reviens donc sur la question des paradigmes de l’opinion publique puis je propose quelques éléments théoriques pour une définition communicationnelle de l’opinion publique, enfin, je propose des dispositifs d’enquête de la famille des sondages expérimentaux. Ces dispositifs intègre ce que je considère comme le principal résultat de mon premier programme de recherche : l’enquête d’opinion est de manière indissociable un dispositif socio-technique et une épreuve au sens de L. Boltanski et L. Thevenot. 2-1 De la question du paradigme de l’opinion discursive à la conception de nouveaux dispositifs d’enquête. 2-1-1 Quelques repères historiques sur l’évolution des paradigmes Le sondage n’a pas toujours été la forme privilégiée d’expression de l’opinion publique : Loïc Blondiaux a montré comment ce dispositif socio-technique s’est imposé à partir des années trente aux Etats-Unis, et un peu plus tard en France (à partir des années cinquante), (Blondiaux, 1998). Cette technique d’enquête entre en effet en concurrence avec d’autres modes d’objectivation de l’opinion qu’elle a finit par surclasser (que l’on songe à l’opinion telle qu’elle est exprimée par les journalistes, les portes-paroles de groupes d’intérêt, les hommes politiques ou telle qu’elle reconstituée par l’historien à partir d’indices convergents et de preuves diverses). Ce succès s’explique en partie parce que le sondage n’est pas simplement un dispositif permettant d’objectiver l’opinion : en s’imposant comme instrument de mesure, il a aussi validé une définition théorique et savante de l’opinion publique « comme somme des opinions individuelles et comme ensemble complexe de clivages entre des groupes à l’intérieur de chacun desquels les individus émettent des opinions identiques » (Zask, 1999, p.174). Cette définition, « comportementaliste » née des apports du béhaviorisme et de la psychologie sociale, ne va pourtant pas de soi. Si tout le monde s’accorde à penser que l’opinion publique, comme figure conceptuelle, est bien consubstantielle à la démocratie (Habermas, L’espace public, 247) « parler avec précision de l’opinion publique est une tâche qui n’est pas sans ressemblance avec celle qui consiste à en venir aux prises avec le Saint-esprit » ainsi que le remarque V.O Key (Key, 1961, p.7-8). Un bref aperçu sur l’histoire de la notion comme sur celle des dispositifs de mesure permet de mieux comprendre cette difficulté. Elisabeth Noëlle Neumann, retraçant l’histoire de la notion d’opinion publique depuis le XVII eme siècle, a mis en évidence dans la littérature politique et sociologique l’importance d’une première définition, péjorative, selon laquelle comportement et opinion seraient déterminées « de l’extérieur » par un climat d’opinion jouant le rôle d’une instance de régulation et de contrôle social (Noëlle Neumann, 1984). Dans la deuxième moitié du XVIII eme siècle, l’émergence d’une critique populaire du gouvernement royal favorise la naissance d’une nouvelle culture politique : l’opinion comme principe de légitimation (et de critique extérieure au gouvernement) y est définit comme un « tribunal de la raison » et une « force invisible et 22 irrésistible » (Blondiaux, 1998, p.46). Cette définition se réfère à une opinion « éclairée », celle d’une force politique montante – la bourgeoisie – et doit être distinguée de l’opinion « commune », celle de la « masse ». Pourtant, il existe dès cette période une ambiguïté sur la nature de l’opinion publique (parle-t-on de l’opinion éclairée ou de celle, réputée irrationnelle, du plus grand nombre ?), cette ambivalence de l’opinion va perdurer et accompagner l’histoire de l’entrée des masses en politique. La démocratisation croissante de la société ira en effet de pair avec un effacement progressif de la frontière entre des élites éclairées (la sphère publique bourgeoise) et les « masses » incultes. L’histoire des dispositifs de contrôle et de surveillance de l’opinion publique, si elle montre la permanence d’une volonté de mesure et de connaissance de l’opinion publique par les élites, met d’abord en évidence l’hétérogénéité des pratiques jusqu’à l’invention des sondages. Ces derniers s’imposent en s’appuyant sur une double légitimité : la représentativité statistique, en décrivant, à partir d’échantillon « représentatif » d’un point de vue statistique, une opinion agrégée, somme des opinion individuelles, et une représentativité politique, sur le principe « un homme égale une voix ». Une première série de critiques, que l’on peut qualifier de sociologique, va contester la définition dominante de l’opinion publique « sondagière ». Elle s’attaque à la dimension psychologique de cette opinion notamment à travers son approche individualiste : la société n’est pas composée d’atomes mais de groupes plus ou moins organisées. Cette critique portée aux Etats-Unis par le sociologue Herbert Blumer à la fin des années quarante oppose notamment les actions individuelles et collectives, elle conteste par ailleurs une définition performative de l’opinion publique : celle-ci est décrite telle qu’elle devrait être selon la théorie démocratique libérale - un agrégat d’opinions individuelles – et non telle qu’elle l’est concrètement - l’expression de groupes sociaux (Blumer, 1948). En France, Pierre Bourdieu et Madeleine Grawitz reprennent en partie les termes de cette critique sociologique qui cherche à affaiblir deux postulats, l’universalité et l’égalité (déduits du concept d’opinion publique ), à la base de la technique des sondages : - 1) Tout le monde comprendrait les questions du sondage de la même façon et tout le monde aurait une opinion sur les problèmes abordés. Or la sociologie montre que les compétences (linguistique et politique) et les intérêts pour les problèmes traités sont très inégaux et sont socialement conditionnés. - 2) Il serait possible d’agréger des opinions individuelles. Or les opinions sont de nature et de valeur très différentes : la place dans le groupe, le statut social etc. déterminent un « poids » très variables des opinions si l’on considère la « conduite collective » (Bourdieu, 1973). Cette approche tend à remettre en cause la légitimité statistique sur lequel repose les sondages en s’attaquant à l’équivalence posée entre les individus (qui assure la représentativité de l’échantillon et permet d’agréger les résultats). Une deuxième série de critiques est plus normative et s’appuie sur une définition plus « politique » de l’opinion publique [Zask, 1999 ; Fishkin et Luskin, 2000]. S’appuyant une conception délibérative de la théorie démocratique, elle met en doute le caractère « public » de l’opinion mesurée et s’attaque ainsi par une autre voie au paradigme comportementaliste en mettant en cause sa légitimité politique. L’opinion que recueille les sondages n’est pas en effet le fruit d’une délibération et d’une discussion publique. Elle serait ainsi, d’une part, biaisée par les effets d’impositions de problématique et des phénomènes de dissymétrie d’information notés par ailleurs par les sociologues et, d’autre part, illégitime du point de vue de la théorie démocratique puisque non discutée dans l’espace public. Ces critiques s’attaquent à des notions comme celle de « personnalité sociale », ou « d’attitudes » qui enracinent l’opinion dans un substrat individuel et latent. Les attitudes seraient certes produites par un environnement psychologique et social mais elles fonctionneraient comme 23 une véritable « boîte noire », échappant à l’individu qui n’en a pas conscience le plus souvent comme à l’analyste qui parfois se contente de relever un lien statistique sans pouvoir l’expliquer, ni l’étayer par une théorie sociologique. Dans cette perspective, l’opinion publique serait plus perçue comme une entité collective substantielle, fruit des structures sociales – qu’elles soient morphologiques et attitudinales – que ressaisit comme le produit plus ou moins stabilisé d’un processus complexe d’interactions, la communication politique. Ces différentes critiques tendent pour les premières à remettre en cause la validité scientifique de la notion – sans pour autant négliger son efficacité politique liée à son instrumentalisation – ou, pour les secondes, à proposer un paradigme différent de l’opinion publique. En France, les travaux théoriques de Louis Quéré et de Laurence Kaufman, reprenant une partie des acquis de l’ethnométhoddologie et de la philosophie analytique, propose une définition discursive et située de l’opinion publique : Quéré, 1990 ; Kaufmann, 2002) peu compatible avec l’instrument et la définition « comportementaliste » et agrégée de l’opinion publique sondagière. D’autres recherches proposent des reformulations partielles du paradigme comportementaliste de l’opinion publique et reprennent en partie le dispositif technique des sondages en le faisant toutefois évoluer de manière notable. La réflexion théorique et pratique sur l’opinion publique connaît en effet aux Etats Unis [Hermes, 2001] un renouvellement important insistant notamment sur la compétence des personnes « ordinaires », sur le caractère décisif des aspects situationnels et discursifs – voire délibératifs - dans la formation de l’opinion publique. Les sondages expérimentaux15 [Hermes, 2001 ; Grunberg, Mayer et Sniderman, 2002] prennent ainsi acte de l’importance des effets d’information et de « cadrage » (proposant un éclairage particulier du problème, par exemple la sûreté pour le nucléaire) provoqués par la discussion publique : grâce à des apports d’information et des questions argumentées la dimension réflexive de l’opinion publique est pris en compte. De manière générale ces travaux en partie issue de la psychologie cognitive mettent en avant les capacités critiques des personnes ordinaires soit en s’attachant à décrire les procédures de raisonnements ordinaires (procédés heuristiques, raccourcis cognitifs etc.), soit en mettant en évidence une dimension morale dans les énoncés d’opinion [Schwartz, Hammer et al]. Cette dernière dimension, bien qu’en partie de l’ordre de la conscience pratique, relèverait aussi d’une forme de réflexivité en étant mobilisé consciemment par les agents, à la différences des attitudes. J. R. Zaller, partant d’une analyse de l’instabilité des opinions constatée dans les enquêtes, de son coté, invite à abandonner l’idée selon laquelle les citoyens possèderaient de « véritables attitudes » sur la plupart des sujets de discussion publique suivant en cela Converse (Converse, 1964). Tout en restant à l’intérieur du paradigme comportementaliste, il propose un modèle mêlant influence des élites (le discours des élites charriant des informations politiques en partie contradictoires), un intérêt faible du public pour les questions politiques impliquant une reprise plus ou moins critique des argumentations des élites et une réponse des personnes interrogées lors de l’enquête le plus souvent « à la volée » (« top-of-thehead decision making»), la personne sélectionnant la considération la plus immédiatement accessible au moment du sondage et ce en fonction du cadrage proposé par les questions (du fait de leur formulation, leur ordre etc.) [Zaller, 1992]. D’inspiration moins sociologique et plus normative, les travaux récents sur les sondages délibératifs montrent l’intérêt de ce type d’approche pour analyser les « dynamiques Techniques en partie issues de la psychologie politique cognitive et de l’amélioration des techniques d’enquêtes du fait de l’informatisation, cf. les système de gestion informatisée d’enquête CATI et CAPI permettant de gérer des échantillons partagés, l’ordre des questions, de tester des formulations différentes de question etc. 15 24 d’opinion », alliant l’analyse des échanges argumentatifs, que l’on croyait dévolues aux seules techniques qualitatives, et la caractérisation en termes de morphologie sociale propre aux approches macro-sociologiques. Ces différents travaux, notamment parce qu’ils proposent des approches diachroniques - en testant notamment l’effet d’argument et d’apport d’informations -, limitent les risques de réification liée à l’étude de l’opinion publique. Dans cette perspective, l’analyse des questions ouvertes paraît techniquement intéressante, elle permet de considérer les réponses « libres » des personnes interrogées et de les analyser comme autant de « discours » [Brugidou, 2003]. Jacques Gerstlé a proposé récemment un bref retour sur les paradigmes de la sociologie électorale qui rend bien compte de ces différentes tentatives de redéfinition de l’opinion publique16 : dans une première conception le vote est principalement expliqué par le jeu des structures sociales – le « vote reflet »- dans une deuxième conception le vote apparaît déterminé par des variables d’attitudes (schèmes idéologiques intégrés), il s’agit alors d’un « vote réflexe », dans une troisième conception le vote est défini comme le fruit des variables informationnelles (effets d’information lié aux campagnes, controverses, cadrage des problèmes etc.), « le vote réfléchi » [Gerstlé, 2004]. Ces paradigmes successifs n’aboutissent pas à une redéfinition radicale de l’opinion publique, ils s’additionnent en fait plus qu’ils ne s’excluent : en effet « le vote réfléchi », bien qu’ils prennent en compte la dimension réflexive et les interactions dans la sphère publique n’équivaut pas « au vote rationnel car il correspond aux produits d’ajustements que l’électeur effectue entre ces prédispositions sociales et politiques à long terme et l’information même sporadique et biaisée qu’il reçoit dans le court terme ». Ces renouvellement théoriques et pratiques s’avèrent particulièrement intéressants pour analyser l’opinion publique sur les questions environnementales. En effet, la « perception » de ces problèmes est assez peu structurée par des variables sociologiques lourdes et les attitudes environnementales s’avèrent très labiles et sensibles aux effets d’information et aux fortes controverses que connaît ce secteur de la vie publique. 2-1-2 Vers une représentation discursive de l’opinion publique La réflexion théorique sur l’opinion publique connaît ainsi aux Etats Unis17 comme en France18, un renouvellement important voire un changement de paradigme insistant notamment sur la compétence des agents « ordinaires », sur l’importance des aspects situationnels et discursifs - voire délibératifs - dans la formation et l’expression de l’opinion publique. Ce renouvellement conduit à tout le moins à réaménager de manière conséquente le paradigme « comportementaliste » [Zask, 1999] qui fait de l’opinion publique la somme des opinions individuelles « privées ». L’auteur distingue par ailleurs différentes formes d’opinion publique - agrégée, latente, perçue ou mobilisée – que l’on peut étudier du point de vue de la « consistance, la congruence ou la représentation dynamique ». 17 Pour une synthèse, cf. Hermes, 2001. 18 En France, les travaux théoriques de Louis Quéré et de Laurence Kaufmann, reprenant une partie des acquis de l’ethnométhoddologie et de la philosophie analytique, propose une définition discursive et située de l’opinion publique : [Quéré, 1990 ; Kaufmann, 2002] peu compatible avec l’instrument et la définition « comportementaliste » et agrégée de l’opinion publique sondagière. Les recherches anglo-saxonnes s’inscrivent pour l’essentiel dans la perspective d’une opinion publique agrégée restituée par un dispositif d’enquête par sondage. La réflexion théorique sur l’opinion est ici étroitement liée à une réflexion sur les dispositifs et leurs effets. 16 25 Ces avancées théoriques ont par ailleurs profité et/ou suscité des innovations méthodologiques portant sur de nouveaux types de dispositifs19, dits « expérimentaux », plus attentifs aux apports d’informations, aux effets de contexte et de cadrage [Grunberg, Mayer et Sniderman, 2002]. Des progrès méthodologiques ont aussi été accomplis depuis une vingtaine d’années dans l’analyse des données textuelles [Lebart et Salem, 1994] du fait du rapprochement de préoccupations de statisticiens, de linguistes [Rastier,1991] 20 et d’informaticiens, progrès qui ont donné des moyens nouveaux au traitement du langage naturel, aux corpus importants de textes et singulièrement aux questions ouvertes 21. Ces avancées sur le front des méthodes permettent ainsi d’envisager des dispositifs d’enquête hybrides donnant une plus large place aux questions ouvertes, voire à des séquences mêlant questions fermées et ouvertes [Brugidou, 2003 ; Brugidou et al., 2004]. Ils rendent ainsi possibles la constitution de véritables corpus « d’énoncés d’opinion publique ». Ce chapitre se propose de présenter les collections formées par les réponses à ces dispositifs, en examinant leur prétention à constituer des corpus politiques. Il ne s’agit donc pas ici de présenter les outils ou les méthodes– notamment l’analyse des données textuelles appliquées à ce type de corpus, présentée au chapitre suivant – mais d’identifier les conditions sociopolitiques et linguistiques qui doivent présider à la formation de tels corpus et qui déterminent d’ailleurs en partie les stratégies d’analyse et d’interprétation22. Une telle entreprise suppose d’aborder en premier lieu la notion de « discours politiques des citoyens ordinaires », ensuite d’examiner le sondage sous l’angle socio-technique en analysant notamment ses prétentions à constituer un dispositif d’énonciation. Une enquête d’opinion peut-elle constituer une « scène » du débat public ? Cette première question implique de réfléchir, d’une part, aux compétences mobilisées par l’enquête et ses interactions, aux types de montée en généralité suscités par la « scène » du sondage, qui autoriseraient que l’on puisse assimiler une réponse à une question ouverte de sondage à une forme de discours politique et, d’autre part, de s’interroger sur la représentativité statistique, liée à une conception de la représentativité politique, de ces dispositifs de recueil et de traitement. Ces conditions éclaircies, je proposerai de définir les corpus « d’énoncés d’opinion publique » comme des séquences de questions fermées et ouvertes, composées d’une suite d’interactions formée par la succession des couples de questions et de réponses 23 et je présenterai un exemple de dispositif. Par exemple les sondages expérimentaux profitant des techniques d’échantillonnage partagé et des systèmes CATI ou CAPI pour tester des contextualisations et des cadrages différents des questions cf. [Grunberg, Mayer, et Sniderman, 2002). On citera par ailleurs la technique du « stop and think » « qui demande au sondé de prendre son temps et de réfléchir avant de répondre, celle du « sondage argumentatif », où l’intervieweur prend le contrepied de l’opinion émise pour tester sa cohérence, celle dite de la « manipulation de la source », présentant l’opinion comme avalisée par telle ou telle personnalité ou organisation politique » [Mayer, 2002, p21]. Dans une optique plus normative mais profitant là-aussi d’innovations méthodologiques et d’hybridation, les sondages délibératifs, cf. [Fishkin, et Luskin, 2000]. 20 La question de la place du langage et plus largement des sciences de la culture, sciences « herméneutiques », est posée de manière particulièrement aiguë par ces travaux à la jonction d’approches explicatives et compréhensives. Voire à ce sujet les travaux de F. Rastier [Rastier ,1991]. 21 Cf. Le numéro spécial du Journal de la société Française de statistique, 2001. 22 Sur ces questions, on se reportera au numéro spécial du Journal de la société Française de statistique (tome 142, n°4, 2001) consacré aux questions ouvertes , reprenant les interventions à la journée d’étude organisée par le 8 juin 2001 à Grenoble. 23 Une configuration de questions et de réponses extraite d’une enquête en fonction de la problématique pourra ainsi être considérée comme constituant un « corpus » : par exemple, une prise de position (question fermée et sa réponse) et sa justification (question ouverte et sa réponse) mais aussi les variables morphologiques ou d’attitudes décrivant par ailleurs le locuteur. 19 26 Discours public et discours du public Les discours des « citoyens ordinaires », dans leur dimension politique, font depuis la fin des années quatre-vingt l’objet d’un regain d’intérêt de la part des sociologues et des politistes24, qui s’attachent à mettre en exergue les compétences critiques et discursives dont les « profanes » sont dotés. Outre-Atlantique, les travaux de William Gamson sont emblématiques de cette préoccupation : à partir d’une approche interactionniste, ils montrent en effet que les citoyens ne se contentent pas d’appliquer les cadres interprétatifs véhiculés par les médias mais qu’ils mobilisent leur propres expériences et leurs discussions interpersonnelles, pour négocier le sens des enjeux politiques [Gamson, 1992]. En France, les travaux de Luc Boltanski illustrent, dans la perspective de la sociologie pragmatique, le même souci en proposant une sociologie « de la critique », plutôt que critique : les citoyens ordinaires sont en effet engagés dans des épreuves de justification pour lesquelles ils disposent de ressources en termes de compétences morales et discursives leur permettant de « monter en généralité », de dénoncer ce qui leur apparaît comme des injustices mais aussi de construire de véritables « causes politiques » [Boltanski, 1990, Boltanski et Thévenot, 1991]. Bien que ces travaux s’inscrivent dans des traditions sociologiques et des configurations de la discussion scientifique différentes (ici une réaction contre des approches déterministes et « top-down » de la fonction d’agenda des médias [Rogers et Dearing,1988], là un déplacement de la question de la critique éclairant les compétences des « dominés » plutôt que leurs dispositions [Boltanski, 1990; Corcuff, 2005]), ils tentent de rétablir une forme d’équivalence entre des locuteurs aux positions pourtant très asymétriques et ont pour conséquence connexe – mais décisive pour la question de l’opinion publique - de définir l’objet « discours politique », non plus à partir du seul statut autorisé du locuteur ou du champ politique25, mais à travers le prisme de la constitution des problèmes et des enjeux politiques. Le fait que les citoyens ordinaires soient dotés de compétences morales et critiques ne devrait pas être sans conséquence sur la manière dont nous nous représentons l’opinion publique comme dispositif théorique et pratique. Il est en effet paradoxal de reconnaître à un niveau micro-sociologique des compétences au simple citoyen et de voir celles-ci s’évaporer au niveau macro-sociologique : or l’opinion, au fur et à mesure qu’elle est sommée et agrégée, semble dans les sondages perdre en universalité (au sens de « montée en généralité) et en intelligence ce qu’elle gagne en nombre et en représentativité statistique. C’est sans doute d’abord parce que les opinions, décontextualisées et désindexées des situations, sont objectivées par un dispositif d’enquête et un questionnement standardisé dont on postule qu’il est reçu par tous de la même façon. Elles sont ainsi rendues équivalentes et quantifiables par une opération de dématérialisation, propre au nominalisme politique qui triomphe au XVIII ème siècle [Kaufmann, Guilhaumou, 2003]26. On sait que ces positions méthodologiques ont été l’objet, à partir des années soixante aux Etats Unis [Cicourel 1963], puis en France, de critiques vigoureuses, opposant à la méthode des sociologues statisticiens une « ethno-méthodologie », c’est-à-dire la « façon dont les personnes enquêtées ellesmêmes, comprennent, décrivent et catégorisent leurs propres activités » [Desrosieres, 1996 ; Les corpus de travaux relevant de la linguistique, de la socio-linguistique et du domaine de l’information et la communication importants sur ces questions - mais relevant de perspectives différentes de celle de la sociologie politique privilégiée ici - ne sont pas envisagés dans le cadre restreint de cet article, et a fortiori de ce très rapide rappel. 25 Pour une discussion de ces questions et des perspectives maintenant un approche statutaire des discours tout en cherchant à inclure les apports de la sociologie pragmatique, cf. [Le bart 1998 et 2003]. 26 Opération de dématérialisation similaire à celle que connaît la monnaie (et la notation musicale) à la même époque [Gordon, 2003] pour s’achever à l’orée du XX ème siècle et qui rend possible la constitution de monde sémiotique. 24 27 Maynard et Schaeffer, 2001]27. Ensuite - et ce deuxième point, théorique, est lié au problème de « méthode » que je viens d’évoquer - c’est parce qu’il n’existerait tout simplement pas d’espace public correspondant à ce qu’on appelle communément l’opinion publique. Il n’y aurait pas vraiment « d’espace national unifié » traitant d’enjeux collectifs ou alors de manière occasionnelle [Favre, 1999]. La plupart des questions d’opinion abordée par les sondages publiés ne feraient alors pas sens pour les citoyens ordinaires - non parce qu’ils seraient des « idiots culturels », selon la célèbre formule de Garfinkel, mais parce que ces questions ne seraient pas construites comme des enjeux du débat public au niveau d’espace public présupposé par ces sondages. De ce fait, les citoyens ordinaires ne disposeraient ni des informations (ou alors de manière très fragmentaire), ni du type de langage politique (et de l’idéosystème, i.e. l’outillage cognitif et symbolique [Bon, 1985]) permettant de saisir et de traiter ces problèmes comme enjeux politiques [Brugidou, 1995] du fait notamment d’une défaillance des médiations politiques et des divers forums [Damamme, Jobert, 2001] (intellectuels, partis, syndicats, associations, médias etc.), chargés de produire des langages en prise avec ce niveau d’espace public [Boltanski et Chiappello, 1999].28 On retrouverait ici – quoique dans une perspective théorique différente - une partie des critiques classiques faites aux sondages sur l’absence d’enjeux pratiques et l’imposition de problématique [Bourdieu, 1973]. Ces critiques paraissent rédhibitoires pour les sondages dans la mesure où elles mettent en cause leur capacité à entendre et à saisir le discours des citoyens ordinaires et a fortiori à restituer l’opinion du public dans une « opinion publique ». Toutefois avant de porter un jugement si définitif sur les capacités de représentation du sondage, il convient d’examiner au préalable l’enquête d’opinion comme un dispositif socio-technique, d’en définir les limites afin de pouvoir proposer d’éventuels amendements à ce dispositif. Le sondage d’opinion comme dispositif socio-technique La première difficulté relevée tient au dispositif institutionnel et matériel que représente un sondage. Un tel dispositif socio-technique [Callon, 1986] est d’abord matérialisé par un questionnaire29, c’est-à-dire un cheminement a travers une succession de questions, dont les thèmes sont plus ou moins articulés et chaînés. Chaque consigne, chaque couple de question et réponse construit progressivement une représentation pour l’interviewé des enjeux et du « sens » de l’enquête. Les « effets de contexte » et « d’ordre » sont une des manifestations les plus connues de ces cadrages successifs, théorisés comme des « effets d’information » et de contexte notamment dans les sondages expérimentaux [Popkins, 1991, Sniderman, 1991 ; Page et Shapiro, 1992 ; Mayer 2002]. La plupart des questions sont dites « fermées » proposent des échelles d’attitudes sur lesquelles les personnes interrogées doivent se positionner en intégrant l’ordre hiérarchique et 27 Pour une présentation détaillée de ces discussions Outre-atlantique, à partir de la critique de l’ethnométhodologie, et en France, des travaux sur les conventions d’équivalence cf. [Desrosieres, 1996]. 28 Langages politiques pris en porte à faux par des déplacements sémantiques constants induit par les oppositions du couple justification et critique, qui refondent « l’esprit du capitalisme » et appellent à un réarmement de « la critique » sur les bases d’une nouvelle « cité » [Boltanski et Chiappello, 1999]. Voir, à propos des dernières élections de 2002, les analyses d’Eric Dupin sur la déconstruction des représentations sociales des classes populaires et leur absence corrélative dans le discours de Lionel Jospin et des socialistes. « Quand la classe ouvrière devient invisible », Le Monde, 5 juin 2002. 29 On ne peut détailler ici l’ensemble du dispositif et l’étude du « centre de calcul » [Latour, 1989] que constitue un institut de sondage et notamment la chaîne de traitement et les différentes opérations de mises en équivalence [Desrosieres, 1996] (classement des professions, recodage des questions ouvertes etc.) qu’elle comporte pour agréger les réponses. Sur la mise à l’épreuve et « l’étalonnage » de l’instrument, cf. [Blondiaux, 1998 ; p. 325 à 366.] 28 les distances sémantiques séparant les items de réponse que l’on suppose stables par convention (par exemple, tout à fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt pas d’accord ou pas du tout d’accord, renvoyant à une échelle ordinale). L’enquêté doit donc intégrer le type de réponse attendu et pour cela met en œuvre une habileté spécifique pour formater sa réponse dans le cadre proposé et ne pas « déborder »30 en s’adaptant au rythme du questionnaire, à ces changements thématiques parfois brusques (« Nous allons maintenant parler de… »). C’est ce que montre un documentaire tourné en 1994 par une équipe de télévision ayant suivi plusieurs enquêteurs dans une enquête dite « en face à face » d’un institut de sondage [Anspach, 1995]. Pour expliquer la consigne à certains enquêtés déconcertés par la forme de la réponse demandée, un des enquêteurs matérialisait avec la main, les différents degrés de l’échelle d’attitude dans laquelle leur réponse devait s’inscrire. Il cherchait ainsi à rendre perceptible à quel niveau correspondait le fait d’être « tout à fait d’accord », le tranchant de la main à plat symbolisant le degré d’une échelle invisible suspendue dans les airs puis descendait d’une dizaine de centimètres et s’arrêtait pour matérialiser, le niveau inférieur « plutôt d’accord », et descendait d’une dizaine de centimètres encore, pour marquer la distance équivalente qui doit séparer les items, « plutôt d’accord » et « plutôt pas d’accord » et les items « tout à fait d’accord » et « plutôt d’accord », etc. Les exemples de « ratés » dans les réponses, qui émaillent ce documentaire, montrent le type de monde sémiotique et les règles que l’enquêté doit mobiliser pour répondre à une enquête d’opinion. Celui-ci doit trouver une « prise » sur l’enquête (sa forme et son sujet) en intégrant notamment la métrologie et « l’espace de calcul » déployés par le sondage d’opinion31, pour reprendre la terminologie de Francis Chateauraynaud [Chateauraynaud, 2004]. Ils montrent aussi a contrario les opérations de dématérialisation et d’abstraction à laquelle doivent se livrer les enquêtés pour que leur activité ait un sens. La question de la mesure de cette compétence spécifique dans la population reste largement ouverte. Elle ne peut être appréciée que très indirectement par les proportions de refus et de non-réponse. On peut supposer toutefois qu’il s’agit d’une forme d’habileté répandue, tant les sondages et leurs présupposés participent de notre monde32 et de sa reconduction- jusqu’aux formulations bizarrement abstraites des questions et des réponses possibles, apparemment désembrayées de l’expérience vécue, mais dont les formes, à la manière des Gestalten [Cadiot, Visetti 2001], trouvent des échos dans la publicité, les tests des magazines, les standards téléphoniques interactif etc. Répondre à un sondage d’opinion suppose ainsi la maîtrise d’habiletés spécifiques (cheminement dans un questionnaire, maniement d’échelle d’items etc.) et l’exécution d’une série de manipulations symboliques mais aussi physiques. La « posture » de l’interviewé implique, outre le respect de la consigne, une forme de discipline corporelle, d’attitude, au sens physique du terme, rendue nécessaire par l’abstraction de l’interaction ou du moins par son dédoublement : une partie est jouée, en coulisse, dans le registre du privé avec l’enquêteur, l’autre en public sur la scène publique et abstraite du questionnement d’opinion entraînant au passage le dédoublement des figures de l’énonciateur et de l’auditoire (le Ce qui a une implication sur le sens des réponses mais aussi un effet économique pour l’enquêteur – qui ne peut passer trop de temps sur un questionnaire -, pour l’institut etc. 31 Le succès inattendu de Le Pen au premier tour de l’élection présidentielle de 2002 atteste de l’existence d’une forme d’espace de calcul commun aux enquêtés et acteurs du champ politique : c’est parce que les résultats des sondages anticipaient régulièrement la présence de Lionel Jospin et de Jacques Chirac au deuxième tour qu’une partie de l’électorat de gauche a cherché à lancer un « avertissement » à Lionel Jospin par un « vote expressif » pour un candidat plus radical [Blais, 2004]. 32 En 2001, on dénombre en France la passation de plus de 6 millions de questionnaires. Concernant l’opinion, plus de 800 sondages sont publiés chaque année (ce qui implique de 600 à 800 000 personnes interrogées), il faudrait encore recenser les consommateurs de ces médias pour avoir une idée du nombre de personnes qui manipulent à un titre ou un autre ces enquêtes. Sur les logiques de refus de réponse chez les personnes interrogées, Cf [Brehm 1993]. 30 29 particulier de l’enquêteur vs l’auditoire universel visé dans l’énoncé d’opinion [Perelman et Olbrechts-Tyteca, 1958]). Ici, les corps, mais aussi les discours, sont escamotés (y compris en face à face) dans les coulisses grâce à la machinerie propre au sondage puisque toute la réponse doit se tenir dans l’item, gage de la facticité des data. Comme nous le rappelle Ian Hacking [2003] à propos du problème de l’induction : « les faits [modernes] sont de vilains petits canards, gauches, désordonnés, des faits bruts ». Le reste, qu’ils s’agissent d’explicitations, de gloses ou de marques non verbales - haussement d’épaules, froncement de sourcil, moue dubitative, rire etc.-, qui constitue les marges annotés et le hors-texte ordinaire des interactions, est considéré comme hors cadre33. L’enquête par sondage, pour l’enquêteur mais aussi pour l’enquêté, implique de faire comme si les individus répondaient à la description de Hume, pour qui « toutes nos impressions sont des faits-particules » 34 [Hacking, 2003, 296], et ainsi de faire advenir de tels individus, artefacts si l’on veut mais néanmoins manières de répondre et d’être persistantes, propres à s’enchâsser dans le dispositif d’enquête pour le rendre opératoire. Et de fait, « les recherches qualitatives suggèrent que les deux parties s’engagent dans un travail d’interprétation conjoint afin de décider, voire de « négocier », le caractère approprié des réponses formulées » [Maynard et Schaeffer, 200135]. C’est d’ailleurs le sens du paragraphe de conclusion de l’ouvrage référence de Loïc Blondiaux proposant une histoire sociale des sondages : « Différents indicateurs amènent à noter également que c’est dans la mesure où il a accepté de jouer le jeu, d’ouvrir la porte aux enquêteurs, de répondre aux questions, de ne pas mentir lorsqu’on lui demandait pour qui il allait voter, d’opérer un travail sur lui-même pour verbaliser ses opinions sur les sujets les plus divers, en bref de se transformer en objet de recherche et d’investigation, que le peuple a participé à la production de cette opinion publique, de cette nouvelle définition de luimême ». [Blondiaux, 1998, p. 583] Grâce aux caractéristiques de l’enquête par sondage et aux efforts de coordination et d’ajustement déployés par l’enquêteur et l’enquêté, il est donc possible de produire des représentations de l’opinion publique, congruentes avec les théories savantes (professionnels, chercheurs etc.) qui soutiennent ce dispositif et dont on sait qu’elle sont en partie divergentes : celles-ci définissent, pour l’individualisme méthodologique, l’opinion comme une intention d’agir ou une motivation formée dans le for intérieur d’un acteur stratégique, ou, pour la sociologie des attitudes, relevant à divers degrés selon ses formulations d’un holisme classique, comme le produit de normes ou de valeurs intériorisées. Ces théories se retrouvent pourtant sur des éléments de définition à la fois mentaliste et substantialiste de l’opinion, « état mental interne », pour s’accorder sur un dispositif pouvant approcher36 l’opinion publique en réalisant la somme des états mentaux individuels. Il convient de proposer d’une part, des formulations théoriques sur l’opinion publique plus en rapport avec ce que nous dit une partie de la sociologie politique des compétences des 33 Dans le cas de questionnaire auto-administré, la réponse implique la gestion physique du cheminement, l’inscription matérielle de la réponse dans des cases etc. 34 « Qu’est-ce que le fait moderne ? Poovey entend par là la particule minuscule d’information, la petite boîte, la pépite, et les métaphores qui viennent à l’esprit : quelque chose de robuste, de compact, de terre à terre, de neutre, de petite taille, de la taille d’un octet, l’opposé même de la théorie, de la conjecture, de l’hypothèse, de la généralisation. Les faits sont de vilains petits canards, gauches, désordonnés, des faits bruts ». [Hacking, 2003, 295]. 35 [Cicourel, 1974] cité par [Maynard et Schaeffer, 2001, p 189 note 16]. Ces auteurs remarquent qu’à des « moments particuliers et imprévisibles, ils [les enquêteurs] détachent les yeux de l’écran, éloignent leurs mains du clavier et bougent de manière plus ou moins vive, formulant des phrases qui ne figurent pas dans les scripts et ne sont pas préformées : cette animation subite indique qu’ils tentent de résoudre des problèmes qui les écartent de leur routine de travail, afin de pouvoir y revenir le plus rapidement possible » [Maynard et Schaeffer, 2001, p194] 36 Comme le rappelle Loïc Blondiaux, la position théorique de Stoetzel est complexe, elle est en tout cas loin d’identifier l’opinion publique à la somme des opinions privées, cf. [Blondiaux, 1998 ; p 362 et suivantes]. 30 citoyens ordinaires et, d’autre part, des dispositifs d’enquêtes, faisant une plus large place au contexte et à la prise en compte de la situation d’interaction. Le sondage d’opinion comme épreuve Cette analyse conduit à envisager l’enquête par sondage non plus seulement comme un « dispositif » mais comme une « épreuve » à visée en partie normative – et non pas seulement descriptive. Pour cela, je rappellerai, suivant Laurence Kaufmann, quelques éléments de ce qui serait une théorie discursive de l’opinion publique. Celle-ci invite à un véritable renversement de perspective puisque l’opinion publique n’y est plus définie comme la somme des états mentaux encapsulés dans le for intérieur des individus, mais se voit refondée dans l’extériorité de la culture [Rastier, Bouquet, 2002] et dans ses « institutions du sens » [Kaufmann 2001, Descombes, 1996]. L’opinion est alors définie comme un « acte de langage dont la validité éminemment conditionnelle, dépend de la reconnaissance d’autrui » [Kaufmann, 2003, 283]. Dans cette perspective, le sondage ne viserait pas seulement à décrire des opinions individuelles toujours déjà là, mais à susciter- ce qui implique un dispositif expérimental - une action communicationnelle. Celle ci est régie par une grammaire propre, celle de l’opinion publique qui vise à ajuster un point de vue singulier et le monde : le sujet – comme institution i.e. le citoyen - se posant en proposant une formulation d’un monde commun qui soit, « vraisemblable » et acceptable par la communauté. Dans cette conception, le sondage, conçu comme « épreuve » doit, dès lors solliciter les compétence morales et réflexives des agents. Le dispositif doit donc être fortement aménagé, ce qui justifie le recours aux sondages expérimentaux comportant des questions fermées contextualisées et des questions ouvertes. La thèse de Laurence Kaufmann sur l’opinion publique, qui analyse l’émergence, la reconfiguration et la stabilisation sous cette étiquette, de pratiques discursives et de modes de légitimation constitue un des éléments central de cette enquête théorique [Kaufmann, 2001]. Elle met en évidence l’avènement d’une « juridiction linguistique » nouvelle, celle de l’opinion publique dont la grammaire et les règles s’imposent à tout un chacun qui prétend évoquer le bien public. On sait que dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle, l’émergence d’une critique populaire du gouvernement royal favorise la naissance d’une nouvelle culture politique : l’opinion comme principe de légitimation (et de critique extérieure au gouvernement) y est définie comme un « tribunal de la raison » et une « force invisible et irrésistible » [Blondiaux, 1998, p.46]. Laurence Kaufmann37, poursuivant les travaux de Louis Quéré, a décrit deux caractéristiques de cette juridiction linguistique, en montrant d’une part, que l’énoncé d’opinion par sa dimension expressive (« je pense que… ») permet à la personne interrogée de « se produire vis-à-vis d’autrui comme un sujet de pensée et d’action 38» et en soulignant d’autre part que l’énoncé d’opinion vise à susciter un consensus et pour cela s’appuie sur l’économie du vraisemblable [Quéré,1990], c’est-à-dire « sur ce qui est acceptable dans une communauté donnée » [Perelman, 1984 cité par Kaufmann, 2003 p277]39. Pour cela les agents mobiliseraient donc des lieux communs, des topoï culturellement sédimentés, des formes Pour Laurence Kaufmann « la sédimentation historique et argumentative de ses différentes valeurs d’usage lui ont peu à peu conféré l’inertie et la stabilité relative d’un « être institutionnel », structuré par des contraintes ou des « interprétants élémentaires » qui s‘imposent à quiconque, « qu’il les néglige ou qu’il en tienne compte » (Rastier, 1994, 21) » [Kaufmann, 2002, 53] 38 « Le rôle d’une opinion ne consiste pas en premier lieu à affirmer ou à faire connaître une proposition, mais à exprimer l’attitude du sujet par rapport à cette proposition » [Kaufmann, 2003, p268]. 39 Il ne doit donc pas être confondu ni avec « un acte rationnel qui poursuivrait l’intérêt général et la félicité publique, ni [avec] une conformité aveugle à l’opinion reçue » [Kaufmann, 2003, p277]. 37 31 convenues et socialement acceptables pour, en même temps, mettre en forme et exprimer leur attitudes envers un enjeu du débat public. « Ce lieu commun, c’est l’opinion de tous, non pas au sens du cumul factuel des opinions de chacun ou du catalogue des opinions mais au sens de ce que tout un chacun doit dire pour que son discours soit tenu pour vraisemblable » [Kaufmann,]. Dans ce sens pourtant, « l’opinion de tous » ne peut être que visée. Certes le locuteur s’appuie sur la force de la sémantique propre à l’opinion, qui fait que chacun se doit « d’opiner », au sens d’acquiescer, aux idées « conformes » et « dominantes »40, mais l’opinion comme, acte de langage, court toujours le risque d’échouer : « dans le temps court de l’énonciation, le sujet d’opinion conquiert en effet une position privilégiée, bien que toute provisoire : il s’impose comme « le point de perspective et de coordination qui fait que le monde est son monde, et en particulier que ses pensées, ses représentations sont siennes » [Bouveresse, 1987, p. 167] » [Kaufmann, 2003, p. 278]. L’opinion est ici définie comme une action régie par une grammaire publique spécifique41 qui s’impose aux locuteurs. La performance que constitue l’énoncé d’opinion publique dans le cadre d’une conversation ordinaire ou d’un débat public, voire d’un sondage constituerait une forme « d’épreuve42 » au sens que Luc Boltanski et Laurent Thévenot donnent à ce terme [Boltanski et Thévenot, 1989]. L’articulation d’un dispositif plus ou moins formalisé, comme le sondage, et d’une performance vise en effet à produire deux types de « faits institutionnels » : il s’agit, d’une part, d’une épreuve individuelle pour la personne interrogée instituée en sujet « responsable » et « rationnel » et, d’autre part, collective pour la communauté politique qui « compte comme » une communauté démocratique. Le sondage produirait, du fait de la puissance performative des énoncés d’opinion et de leur actualisation dans un dispositif de représentation à la fois statistique et politique, ces deux types de « faits institutionnels » au sens de Searle [Searle, 1972]. Le citoyen « rationnel » institué ici n’est toutefois pas celui de la théorie du « choix rationnel ». Ainsi que le précise Bernard Manin, l’homo oecconomicus « ne discute pas, ne justifie pas ses choix, ni ne cherche à persuader. L’idée centrale de la théorie de la démocratie délibérative est, au contraire, qu’il n’est ni désirable normativement, ni justifié empiriquement43, de considérer que lorsque les citoyens entrent sur le forum pour décider des affaires publiques, ils ont déjà des préférences entièrement formées et imperméables au contact d’autrui » [Manin, 2002, p.46]. Au passage, une nouvelle difficulté se présente : le corrélat de l’inexistence d’un for intérieur ou d’une attitude - au sens de schème intégré générant des états mentaux - est l’existence d’un ou de plusieurs niveaux d’espaces publics et de « langages politiques » permettant d’évoluer à ces niveaux et de manipuler les entités qui les peuple (la nation, le peuple, la gauche, la Pour une illustration de ces idées à propos de l’opinion publique sondagière, cf. [Noëlle Neumann, 1984]. Règles qui constituent le mode de réalité propre de ces étranges entités que sont les faits institutionnels qui s’avèrent « relationnels » et non substantiels. Pour une présentation claire de la pensée difficile de Vincent Descombes et sa conception du « holisme anthropologique », cf. [Kaufmann et Quéré, 2001] 42 On peut définir l’épreuve comme un dispositif (réglementaire, matériel etc.) visant à « étalonner » l’état de « grand » ou de « petit » selon une conception de la justice spécifique (« cité »). En tant qu’agents moraux, nous nous soumettons de notre plein grès à cette forme de mesure qui nous permet de nous auto-produire comme « sujet ». Cette perspective est proche de l’ethno-méthodologie : « tout se passe comme si ceux qui s’engagent dans un cours d’action plaçaient en extériorité surplombante, comme cadre normatif (auto-subsistant) auquel se référer, l’ordre même qu’ils sont en train de rendre sensible et manifeste par leurs conduites, comme s’ils se dotaient d’un pouvoir de contraindre leurs pratiques et le valorisaient comme tel, comme s’ils lui attribuaient le statut d’un cadre moral de référence, en fonction duquel former des attentes réciproques de comportement et appréhender (en termes moraux) les conduites des uns et des autres ». [Kaufmann et Quéré, 2001, p 382]. Ce point essentiel contredirait le principe de symétrie de la sociologie des sciences et différencierait les humains des non-humains. D’une certaine manière, les sondages classiques traitent les humains comme des coquilles Saint-Jacques et il est parfaitement possible – et intéressant - de décrire l’activité du chercheur quantitativiste en science sociale comme celle du chercheur en science naturelle comme le montre [Maynard et Schaeffer, 2001]. 43 Souligné par nous. 40 41 32 droite, l’intérêt général etc.). Ces développement sur l’opinion publique discursive ne peuvent donc se dispenser d’une réflexion sur la construction de différents niveaux d’espace publics et des dispositifs qui les rendent possibles (médiations et langages politiques etc.). Il s’agit en effet de rendre compte d’une représentation discursive de l’opinion publique non seulement au niveau micro (conversations interpersonnelles), mais aussi méso (controverses territoriales/locales) voir macro (par exemple national voire européen). Ce chapitre de recherche est à construire – et hors de ma portée -, je me contenterai d’indiquer que si l’existence d’espace public locaux est à peu près admise [François, Neveu, 1999], celle d’un espace public national est fortement discutée [Favre, 2001]. Cette réflexion sur les niveaux d’espace public – qui fait échos en partie aux travaux sur la gouvernance multi-niveaux de l’analyse des politiques publiques - doit en tout état de cause être redoubler par une étude des différents régimes de discussion publique, par exemple ceux distingués par F. Chateauraynaud : les procédés interactifs ordinaires (la conversation, la dispute, la négociation44), les arguments calés sur les dispositifs (comme le débat public, le dialogue social etc. caractérisés par une forme de symétrie entre acteurs – l’égalité de traitement -, une formalisation des arguments et de fortes contraintes procédurales45) et la « puissance d’expression » qui est le régime de discussion propre à l’espace politique où les problèmes sont surcodés par les langages politiques et deviennent des enjeux d’épreuves de force entre acteurs aux positions très asymétriques46 [Chateauraynaud, 2004]. Les travaux de Daniel Cefaï sur la sociologie de la constitution des problèmes publics constituent une piste intéressante pour la perspective esquissée ici sur les espaces publics : il remarque en effet qu’une « arène publique » « se déploie en prenant ses appuis et en lançant des passerelles entre différentes scènes publiques» [Cefaï, 2005]. Mon hypothèse ici est que l’opinion publique sondagière constitue à la fois une scène et une épreuve spécifique de l’arène publique [Brugidou et Escoffier, 2005]. Mais dans sa conception classique, le dispositif du sondage échoue à représenter et à articuler les différents actes de langage propres à chacune des scènes de l’arène publique47 et ainsi à constituer une épreuve. Il ne prend pas en effet en compte les dimensions normative et discursive de l’opinion publique et tient pour accessoires les compétences morales des agents. Cette intuition est fondamentalement celle de Fishkin, et Luskin [Fishkin et Luskin, 2000, Martin, 1996 ; Mayer, 2002]. En construisant un outil essentiellement normatif avec le sondage délibératif, ils tirent les conséquences d’une dimension normative déjà présente dans les sondages classiques mais mal assumée par le dispositif. Toutefois, ils manquent en partie leur cible et condamnent le sondage délibératif à ne rester qu’un dispositif expérimental à très faible portée descriptive en adossant la normativité du dispositif sur la seule « opinion argumentée»48 et en négligeant « l’opinion droite », « vraisemblable », voire même « l’opinion conventionnelle » comme appuis normatifs. 44 « la symétrie des protagonistes est ici fondamentale ; la codification est indissociable du milieu et de la culture partagée, c’est-à-dire des prises communes liant perceptions et représentations dans le monde sensible » [Chateauraunaud, 2004 p 12]. 45 « les arguments sont détachés des milieux à l’aide de dispositifs capable de se déployer de manière autonome », [Chateauraunaud, 2004 p 12]. 46 Ici les arguments engagent des visions du monde et la différence entre argumentation et rhétorique ne semble plus pertinente du fait d’un régime de conflit permanent. 47 « Une arène publique est un enchevêtrement de dispositifs théâtraux, où des acteurs aux compétences distinctes jouent des performances destinées à des publics distincts (…) Elle se décompose en une constellation de scènes qui empiètent les unes sur les autres, qui ouvrent sur des coulisses à géométrie variable, où les degrés de publicité sont déterminés par les cadrages (framing, footing et keying) des acteurs et dont les auditoires changent au gré des performances » [Cefaï, 2005, p30]. 48 Ce qui suppose peu ou prou la constitution problématique d’un espace public Habermassien [Habermas, 1993]. 33 La présentation d’un dispositif propre à prendre en compte ces dimensions doit donc étroitement articuler les considérations théoriques rappelées jusqu’ici et la réflexion sur la méthode. La mise au point d’une enquête expérimentale pour constituer un corpus « d’énoncés d’opinion publique » Avant de présenter plus de détail le dispositif, il convient de resituer le contexte de l’étude [Brugidou et Escoffier 2005] qui va me permettre de le présenter. Il s’agit d’une enquête d’opinion sur une controverse d’aménagement auprès de la population du territoire concerné par un projet de construction de ligne à très haute tension. L’enquête a été réalisée en Juin 2003 après dix ans de mobilisation importante contre le projet et quelques mois après la tenue du débat public local (huit réunions publiques) [Drocourt et Ras, 2004], qui a lui-même donné lieu à un suivi important de la part des médias régionaux. Afin de ne pas retomber sous le coup de critiques visant une « opinion publique sondagière » [Blumer, 1948 ; Bourdieu, 1973 ; Blondiaux, 1998 ; Gerstlé, 2003], il convient de préciser en quoi le dispositif proposé s’écarte des enquêtes par sondage publiées pour constituer une « épreuve » au sens défini plus haut : - d’une part, ce dispositif tend à saisir une opinion publique territorialisée. Le niveau d’intérêt et d’implication du public est lié assez étroitement à des logiques territoriales. L’enquête a donc été conçue pour différencier des publics à partir de sous-échantillon territoriaux. Comme pour les sondages réalisés in situ auprès des participants d’une manifestation [Favre, Filleule et Mayer, 1997], on se donne ainsi les moyens de distinguer des « publics d’identification », « attentifs » ou « intéressés » au sens de Cobb et Elder, et un « grand public », « masse indifférenciée des individus agrégés dans les enquêtes d’opinion » [Gerstlé, 2003 p. 869]. L’échantillon, de ce point de vue, n’est pas représentatif au sens classique du terme. Il est d’abord diversifié de manière à représenter la diversité politique49 des points de vue – déterminée ici par des scènes territoriales (d’un point de vue statistique des « strates »). Ensuite l’échantillonnage, bien que « non proportionnel » entre les strates est bien sûr « représentatif » d’un point de vue statistique à l’intérieur de chaque strate. Il n’y aurait pas de sens à notre point de vue à redresser ces échantillons, car il n’y a pas à proprement parler de « population de référence », mais une diversité de public dont il faut précisément rendre compte. La quantification ne sert pas ici à mesurer le poids des groupes ou des opinions (et a fortiori à les hiérarchiser) mais à identifier des discours (à travers la récurrence de patterns) et des publics qui sont alors caractérisés par leurs différences structurales - notamment par les topoï qu’ils mobilisent - et non par leurs poids. En résumé, il ne s’agit pas de réduire une différence entre opinions (éventuellement en les hiérarchisant) mais de trouver un mode de représentation qui permette de maintenir cette diversité. - D’autre part, l’enquête a pour ambition de restituer une opinion publique discursive. Une partie des questions posées est dite « ouverte » de manière à recueillir des réponses spontanées (par opposition à un choix comportant un nombre limité et standardisé de réponses) mais surtout un discours sur la controverse étudiée. La dimension réflexive est ici primordiale puisque ce sont les capacités de justification des personnes interrogées qui sont sollicitées. Ces réponses mobilisent de véritables « grammaires de motifs » au sens de Mills [Mills, 1940 ; Trom, 2001], il ne s’agit pas en effet d’identifier des « convictions intimes » déterminant l’engagement dans 49 C’est le type de représentativité que l’on trouve dans les dispositifs d’enquête qualitatif. 34 l’action collective mais des « façons convenues de mettre en scène son for intérieur, des façons convenables, intelligibles et acceptables, de se projeter dans tel ou tel contexte d’action » [Cefaï, 2005]. Par ailleurs, la technique d’analyse des questions ouvertes (analyse des données textuelles, méthodologie Alceste [Reinert, 1995] présente l’avantage de ne pas réduire la dimension discursive des réponses. Elle n’identifie pas seulement des thèmes, mais elle permet aussi, d’une part, de restituer en partie au moins des marques de l’énonciation et, d’autre part, de reconstruire les patterns linguistiques et cognitifs qui sont au principe de ces énoncés [Brugidou, 2001]. Le dispositif d’enquête50 présente plusieurs caractéristiques techniques remarquables : Les trois sous-échantillons ont été construits par quotas. Outre les quotas classiques (sexe, âge et profession du chef de famille), la construction des échantillons prenaient en compte le niveau de diplôme du chef de famille et la zone d’habitation. Le dispositif a par ailleurs exploité la plupart des possibilités du système de gestion informatisé des interviews CATI : - la technique des échantillons partagés a permis de tester l’ordre des questions (cf. l’ordre de passage de récit plus bas) et les effets de contexte (notamment dans l’argumentation), - l’enregistrement de micro-récits argumentatifs avait pour but d’évaluer de manière assisté et homogène leur force de conviction (les récits n’étaient pas lus par les enquêteurs), - le questionnaire comportait plusieurs séquences formées de questions fermées et ouvertes permettant d’articuler prises de position et justifications. La séquence est considérée comme un tout (une série d’interactions) et traitée comme un « discours » articulant la réponse à la question fermée et le verbatim de la question ouverte. - enfin l’enregistrement de toutes les réponses aux questions ouvertes rendait ainsi possible l’analyse textuelles des verbatims. Une discussion entre les enquêteurs et les chercheurs sur les enjeux de l’enquête, exposant le sens des différentes questions et une présence sur place pour des écoutes ont permis par ailleurs de suivre le déroulement de l’enquête. Le recueil des réponses constitue un des principaux reproches adressés à l’analyse textuelle appliquée au corpus de questions ouvertes. Toutefois l’enregistrement exhaustif51 des réponses qui a été réalisé au cours de cette enquête permet de pallier complètement ces défauts. L’étude des caractéristiques linguistiques de ce corpus et notamment sa comparaison systématique avec des corpus de verbatims retranscrits et saisis par des enquêteurs « à la volée » reste à faire52. Le recours à l’analyse des données textuelles pour ce type d’enquête et ces corpus d’énoncés d’opinion publique s’avère particulièrement pertinent. Deux types de raisons qui tiennent d’une part, à la « consistance des attitudes » ou plutôt des topoï et, d’autre part, aux poids inégaux des différents groupes me semblent devoir être avancés : - Le caractère stéréotypé de la réponse sur quoi repose l’analyse des données textuelles (et qui implique un format et une récurrence des réponses pour pourvoir les traiter) Echantillon de 1500 personnes, âgées de 18 ans et plus, interrogées par téléphone fin juin 2003 par l’institut BVA, soit quelques mois après l’organisation du débat local. 51 La généralisation de cette technique d’enregistrement implique de mettre au point un protocole d’accord auprès des personnes interrogées. 52 On sait toutefois, que les marques de l’argumentations et de l’énonciation ont tendance à disparaître dans de tels corpus au profit de « mots-clefs » [Marc, 2001 ; Lallich-Boidin, 2001 ; Caillot et Moine, 2001]. 50 35 - n’implique pas nécessairement pour la perspective théorique définie plus haut un stéréotype vide, un artefact suscité par effet d’imposition, mais relève du mode d’existence des « objets notionnels » comme l’opinion publique : les motifs d’engagement mis en avant par les personnes interrogées sont des topoï argumentatifs culturellement sédimentés et socialement disponibles53. J’ai montré avec d’autres qu’il était possible de mettre en évidence à partir de différentes études de cas, grâce à une démarche interprétative [Le Queau, 2001] la présence de patrons argumentatif ou de schèmes narratifs dans ces réponses apparemment si pauvres [Boy, Brugidou, 2004 ; Brugidou, Mandran, Moine, Salomon, 2004 ; Brugidou, 1998, 2003]. La technique d’analyse des questions ouvertes parce qu’elle donne un poids différent aux réponses selon, d’une part, leur longueur (les réponses les plus longues sont mieux représentées dans la classification) et, d’autre part, selon leur typicité (les réponses atypiques du point de vue du vocabulaire étant non classées) applique aux réponses une véritable « métrique politique » suivant en cela les recommandations de Blumer ou de Bourdieu de voir mieux rendue « l’inégalité de fait des opinions » [Blondiaux, 1997 ; 1998]. Cette approche présente en effet l’avantage de ne pas préjuger de la compétence et de l’intérêt des publics. Les échantillons ne sont pas pondérés a priori (par quota non proportionnel déterminés en fonction d’une compétence supposée) mais ce sont bien les réponses produites qui varient en fonction de l’implication, de la connaissance et de l’intérêt pour le sujet : l’inégale compétence des publics est ainsi restituée par le traitement statistique des réponses. Dans ce dispositif, le type de représentativité politique qui a présidé à la construction des sous échantillons, est mieux servi par le poids des mots54, prôné par la statistique lexicale plutôt que par l’équation55, qui fait correspondre un homme à un vote et qui règle les échantillonnages classiques dans les sondages [Blondiaux, 1998]. La présentation de ce dispositif montre que la constitution de corpus d’énoncés d’opinion publique dépend en grande partie d’une controverse sur les théories de la démocratie, plutôt que d’une question de méthode ou de statistique : le type de représentativité politique mis en avant ici - et qui soutient le calcul statistique -, s’appuie au fond sur des conceptions délibératives de la démocratie [Manin,1985] et fait plutôt correspondre à une voix (au sens du discours défini ici et de sa métrique lexicale), une femme ou un homme. Dans ce sens, on cherche à maintenir, coûte que coûte, une représentation de la diversité des points de vue. Ce parti pris théorique est à tout prendre moins critiquable, du fait de ses vertus descriptives et non d’un point de vue normatif, qu’un protocole de représentation de l’opinion qui réduit à l’unité ou hiérarchise les points de vue. En effet, ainsi que l’indique Bernard Manin, la légitimité démocratique résiderait désormais moins dans l’expression de la volonté générale, que dans le « processus de formation de la volonté collective » [Manin, 2002]. Cette réflexion normative accompagne les interrogations de nos sociétés sur elles-mêmes dans leurs efforts d’autoconstitution, c’est bien désormais ce qu’il nous faut éclairer. 53 Cette question de la typicité peut être aussi traitée du point de vue de la sociologie des attitudes [Caillot et Denni, 2004]. Une réponse atypique (i.e. l’algorithme de classification ne parvient pas à affecter la réponse à un groupe et à ainsi identifier un schème linguistique et cognitif sous-jacent à la réponse) renverrait au concept de « non-attitude » au sens de Converse [Converse, 1964]. 54 La question de la normalisation et de la lemmatisation de ce point de vue est essentielle ainsi que le montre Dominique Labbé [Labbé, 2001]. 55 Excellente d’un point de vue de la théorie de la représentation classique qui fonde la démocratie sur l’expression d’une volonté générale (nécessairement unie) mais douteuse en terme d’opinion publique telle qu’entendue ici 36 2-2 Une approche discursive des publics : trois cas d’études et un programme d’animation scientifique Concernant l’approche discursive des publics, le programme de recherche prévoit de traiter trois cas d’étude : - Un sondage expérimental sur le débat public de l’EPR, réacteur nucléaire de troisième génération.. Ce premier cas d’étude concerne pour l’essentiel EDF R&D et porte sur les questions d’acceptabilité des ouvrages électriques (projet CARTE). - Une recherche sur les controverses et les débats sur les nanotechnologies dans le cadre du projet de recherche ERT56 animée notamment par des équipes de PACTE mais concernant très directement EDF. -La participation à une enquête expérimentale portant notamment sur les enjeux environnementaux à l’occasion de la prochaine présidentielle dans le cadre de PACTE. Concernant plus particulièrement les enjeux de méthode et d’animation scientifique : - l’animation du dispositif COMMOD à PACTE - la poursuite du projet CAPAS et la constitution d’une réseau autour de la capitalisation des entretiens et de l’analyse secondaire 2-2-1 De nouveaux dispositifs expérimentaux pour appréhender l’opinion publique : le cas de l’EPR L’objectif de cette action de recherche est d’élaborer des protocoles d’enquête par sondages expérimentaux. Le cas d’étude choisi est celui du Débat sur l’EPR et de ses répercussions dans l’opinion publique locale et Nationale. Le dispositif d’enquête projeté reprend plusieurs des caractéristiques techniques décrites dans le chapitre I du projet : Les sous-échantillons seront construits par quotas : outre les quotas classiques (sexe, âge et profession du chef de famille) la construction des échantillons prendra en compte le niveau de diplôme du chef de famille et la zone d’habitation. Le dispositif exploitera la plupart des possibilités du système de gestion informatisé des interviews CATI : - la technique des échantillons permettra de tester l’ordre des questions (cf. l’ordre de passage de récit plus bas) et les effets de contexte (notamment dans l’argumentation), - l’enregistrement de micro-récits argumentatifs aura pour but d’évaluer de manière assisté et homogène leur force de conviction (les récits n’étaient pas lus par les enquêteurs), - le questionnaire comportera plusieurs séquences formées de questions fermées et ouvertes permettant d’articuler prises de position et justifications. La séquence est considérée comme un tout (une série d’interactions) et traitée comme un « discours » articulant réponse à la question fermée et le verbatim de la question ouverte. - enfin l’enregistrement de toutes les réponses aux questions ouvertes rendra ainsi possible l’analyse textuelles des verbatims. 56 Projet d’Equipe de Recherche Technologique (ERT)- Innovation, Usages, Micro et Nano technologies 37 Le débat sur L’EPR et le dispositif projeté Le vote de la loi d’orientation sur l’énergie a lancé le processus qui devrait mener à la mise en service, à titre expérimental, d'une première tête de série « EPR ». Conformément aux règles relatives à l'information du public en vigueur, une telle décision ne pourra être prise que dans les conditions définies aux articles L. 121-8 à L. 121-15 du code de l'environnement. Un débat public sera très probablement organisé à l’été 2005 sur ce projet dont les incidences seront locales du fait du choix du site et nationales, compte tenu des implications du lancement de l’EPR sur la politique énergétique nationale. Il paraît de ce fait nécessaire de mettre en place un dispositif d’études permettant le suivi de ce débat qui prennent en compte les caractéristiques propres à cet enjeu : - dimensions nationales et locales de l’enjeu importance des contenus scientifiques et techniques caractère très structuré et ancien de la controverse sur le nucléaire importance des acteurs institutionnels sur cet enjeu médiatisation importante probable mobilisation forte des acteurs relative saillance et politisation partielle de l’enjeu nucléaire dans l’opinion publique Suivi National Controverses, opinions territoriales et nouvelles formes de gouvernance Sondage National sur les délibérations liées à l’EPR : - Après le débat public : les effets du débat public Suivi Local Analyse des médias : cadrage et argumentation Sondage local : Analyse des médias : cadrage et argumentation Dans le cadre du projet CARTE menée à EDF R&D, deux études sont en cours de réalisation : - la première, au niveau national, aura pour objet l’analyse des discours des différentes parties prenantes (Parternariat GSPR/EHESS). Après avoir constitué un corpus le plus exhaustif possible comprenant des différentes prises de positions et argumentaires des acteurs sur l’EPR, l’étude cherche à identifier les principaux cadrages de l’argumentation, ainsi que les valeurs mobilisées pour justifier le projet. Sans détailler la méthodologie, on précise que l’analyse comportera une dimension quantitative destinée à hiérarchiser les différents cadres et les arguments qui leurs sont attachés. Une partie plus qualitative se donnera pour objectif de déterminer les procédés discursifs caractérisant chacun des acteurs. - La seconde étude porte sur les débats publics (mené avec ARENES). L’observation des jeux d’acteurs, notamment sur la « scène » délibérative, et les analyses des différents documents du débat constitueront les principales approches privilégiées pour cette analyse. 38 Il peut paraître paradoxal de proposer une enquête par sondage pour approcher le public du débat : n’est-ce pas tenter de réintroduire par la fenêtre une « opinion publique sondagière » que d’autres (et notamment les théoriciens de la délibération) ont eu tant de peine à chasser par la porte ? Le dispositif proposé s’écarte pourtant, nous semble-t-il, de manière suffisamment significative des enquêtes par sondage publiées pour échapper à cette critique et ce pour deux raisons qui concerne directement notre sujet : - d’une part, ce dispositif tend à saisir une opinion publique « territorialisée ». Le niveau d’intérêt et d’implication du public est lié assez étroitement à des logiques territoriales. L’enquête à donc été conçue pour différencier des publics à partir de sous-échantillon territoriaux. - D’autre part, l’enquête a pour ambition de restituer une opinion publique « discursive ». Une partie des questions posées est dite « ouverte » de manière à recueillir des réponses spontanées (par opposition à un choix comportant un nombre limité et standardisé de réponses) mais surtout un discours sur la controverse étudiée. La dimension réflexive est ici primordiale puisque ce sont les capacités de justification des personnes interrogées qui sont sollicitées. Toutefois, l’enquête combinera trois systèmes d’hypothèses : parallèlement à cette opinion réflexive, on ne s’interdit en effet ni de situer ces réponses dans l’espace social (hypothèse de l’opinion « reflet »), ni de restituer des schèmes attutidinaux ou idéologiques au principe de certaines réponses57 (hypothèse de l’opinion « réflexe »). Ces deux dimensions permettant de sélectionner et de moduler des effets d’information induits par le débat public. L’enquête par sondage Cette approche quantitative par sondage doit être conçue comme un des résultats de l’analyse qualitative (menée par ailleurs dans CARTES) et de l’analyse de discours mené par ailleurs, celle-ci déterminant la construction de l’échantillon et les principales hypothèses. Description du dispositif L’enquête sera réalisée auprès de deux échantillons définis par une logique territoriale déterminant différent niveaux d’implication et d’information probables Soit les deux populations suivantes : - population nationale - population résidant sur l’aire du débat et concernée directement par l’implantation de l’ouvrage EPR, il s’agira donc un échantillon territorialisé. Les objectifs de l’enquête et les indicateurs retenus On peut assigner trois types d’objectifs à l’enquête : 1) Il s’agira d’abord de mesurer le niveau d’information et de connaissance sur l’EPR. Les indicateurs suivants ont été retenus : connaissance du projet, niveau d’information et sentiment d’information, connaissance des caractéristiques techniques « innovantes », connaissance du processus de décision, connaissance des acteurs et de leur position, source d’information pour le suivi du débat local. 2) Il faudra ensuite connaître le jugement sur le projet et analyser les argumentations à travers des indicateurs comme la position sur le projet, le jugement sur l’importance De manière générale, l’enquête intègre une série de variables « cognitives » (« connaissances pratiques, attention, procédures de raisonnement ordinaires, les perceptions, l’exposition à l’information, le traitement médiatique de l’information, les stratégies de communication » J. Gerstlé, les effets d’information en politique, L’Harmattan, 2001. p 15. 57 39 du projet, l’implication personnelle, l’argumentation en spontané par le biais de questions ouvertes, en assisté avec hiérarchisation. 3) L’enquête se proposera enfin d’évaluer la participation au débat local, les niveaux d’information et les jugements portés sur le débat public. Les indicateurs suivants ont été utilisés : information sur le débat, participation à une ou des réunions locales (thèmes), connaissance des personnes ayant participé aux réunions, jugement sur le principe du débat local, avantages et inconvénients du processus délibératif. 2-2-2 Gestion des controverses et du débat public sur les nanotechnologies, identification des représentationsCette recherche s’inscrit dans le cadre du programme ERT58. La gestion des controverses et du débat public autour des nanotechnologies soulève quatre enjeux : - 1- La mobilisation et la stratégie des acteurs autour des controverses On s’intéresse ici à l’engagement des acteurs dans la controverse, aux processus d’enrôlement et de constitution de réseaux dans la perspective « classique » de la sociologie de la mobilisation qui articule une analyse de la structure des opportunités et des ressources, les carrières militantes… - 2- La rhétorique des acteurs, les dimensions symboliques et éthiques de la construction des causes et la diffusion des représentations via les média (électroniques ou non) Il s’agit ici de suivre les principales prises de positions et la dynamique des argumentations des acteurs de ces controverses - industriels, chercheurs, hommes politiques et associations, etc. - 3- la formation de publics autour des controverses des micro et nano technologies On s’intéressera non pas l’opinion publique (c’est-à-dire aux perceptions et avis de l’ensemble des citoyens) mais aux « agents ordinaires » qui s’estiment concernés par la controverse. - 4- le déroulement de débat et la mise en place de dispositif de participation Il s’agit ici d’étudier les dispositifs de participation des agents ordinaires concernés au débat public à travers des conférences de consensus type CNDP. Projets de recherche dans le thème Nous proposons de traiter plus particulièrement les enjeux 2 (rhétorique des acteurs et construction symbolique des causes), 3 (formation des publics) et 4 (dispositifs de participation). L’étude des mobilisations supposerait des moyens d’enquête plus importants. 58 Résumé du projet : Le projet d’ERT Innovation, Usages, Micro et nano technologies vise à concevoir des méthodes de management de l’innovation intégrant les dimensions sociales et humaines des usages. Ces méthodes sont destinées à être transférées aux industriels engagés dans la conception de produits et de services issus des micro et nano technologies. Mots clés : Innovation, usages, micro et nano technologies, conception, produits et services, modèles économiques, acceptabilité sociale des innovations. Etablissement principal : Université Pierre Mendès France de Grenoble Etablissements partenaires : CEA, Université Stendhal de Grenoble. Autres partenaires de formation : INPG, Grenoble Ecole de Management Partenaires industriels : Minatec Ideas Laboratory (Essilor, France Telecom R&D, EDF, Rossignol), Schneider Electric. Responsable scientifique du projet : Valérie Chanal, professeur de management, IAE de Grenoble, UPMF, laboratoire CRISTO 40 Méthodes envisagées et moyens nécessaires En plus d’une revue de la littérature sur ces sujets, deux grands types de méthode seront privilégiés. - On mettra en place un dispositif de suivi et d’analyse des arguments des différents acteurs. Les méthodes d’analyse des données textuelles seront particulièrement sollicitées pour cette étude. Un des points important de cette étude sera d’articuler la manière dont les acteurs définissent les problèmes par des opérations de « cadrage » et la dynamique de construction des causes vue à travers la mobilisation et une perspective plus stratégique. Les corpus ici sont donc formés par les discours publics de ces acteurs. La médiatisation de ces discours peut avoir de modalités différentes, soit via des médias classiques, soit via des médias électroniques (site web, forum etc.). - Concernant la formation des publics, on mettra en place un ou des sondages expérimentaux. Des publics se forment en effet parce que des individus, des groupes sont plus ou moins attentifs à telle controverse, intéressés à trouver des causes, et parfois des responsables, à un problème qui, pensent-ils, les concerne. Le sondage constitue une des scènes du débat public, une « épreuve » démocratique, que les citoyens ordinaires sont devenus en partie capables de manipuler. Répondre à un sondage, c’est d’une certaine manière s’exprimer en public. C’est aussi comme à l’occasion d’une discussion, une situation où des opinions peuvent se former, tout autant que la conscience de se situer dans un camp et de construire des arguments et des contre arguments. Les sondages expérimentaux, par la définition des échantillons (notamment des échantillons partagés mais aussi territorialisés), par la manipulation des « cadrages » des problèmes à travers la formulation des questions et par le recueil du discours des agents ordinaires grâce aux questions ouvertes permettent d’identifier des publics et les topoï argumentatifs autour desquels ils se forment. 2-2-3 Participation à l’enquête électorale sur l’élection Présidentielle de 2007. Il s’agira ici dans la continuité du travail effectué à l’occasion de 2002 (PEF) de traiter les discours sur les enjeux environnementaux dans le cadre d’une enquête expérimentale sur des échantillons territorialisés. Le projet est actuellement en cours d’élaboration et ne peut donc être détaillé. 2-2-4 Participation à l’animation du dispositif transverse de PACTE : « Méthodes et données. De la donnée à la connaissance et à l’action. Enjeux de l’exploitation scientifique des données sociales, territoriales et environnementales » Dans le cadre de la création de la nouvelle UMR PACTE, je participe à l’animation d’un des 5 dispositifs transverses dédié aux méthodes et aux données. L’objectif est le suivant : Les sciences de la société, de l’espace et du territoire mobilisent des protocoles de production, de traitement et de valorisation de l’information en constante évolution. Pôle de recherche à part entière, ce dispositif offre au laboratoire un outil collectif qui permettra de développer les conditions intellectuelles et techniques de production de recherches fondées sur des données empiriques. Transversal par nature, il a pour vocation de permettre aux chercheurs d’accéder plus facilement à des outils d’analyse empirique couramment utilisés dans les recherches de niveau international, et de favoriser le croisement des méthodes. Dans ce but, il offre des capacités d’expertise et de formation méthodologique 41 et technique. Il intervient également dans la formation des étudiants des Masters et de l’Ecole doctorale Dans le contexte de recomposition des équipes, le pôle méthodes et données traduit la volonté d’innovation et de réflexion méthodologique organisé autour des chercheurs et ingénieurs qui, dans leurs domaines respectifs, abordent la méthodologie comme un objet de recherche en soi, le pôle couvre un large spectre de méthodes et d’outils d’analyses empiriques (système géo-référencé, enquêtes, archives, ..) 2-2-5 Analyse secondaire et capitalisation (la poursuite du projet CAPAS) Il s’agit d’approfondir la réflexion sur le statut des « données » qualitatives. L’intérêt a jusqu’à présent porter tout particulièrement sur les entretiens, leur capitalisation et les conditions de possibilité de « l’analyse secondaire » des entretiens. Les travaux ont été consacrés au statut de l'analyse secondaire dans les sciences humaines et sociales, d'un point de vue méthodologique et épistémologique. A la suite des journées d’études organisées par PACTE et EDF R&D en novembre 2005, trois points principaux apparaissent importants à traiter : 1. Une réflexion générale sur les pratiques de l'entretien de recherche dans les sciences humaines et sociales et la façon dont elles conditionnent les possibilités d'analyse secondaire. En raison du renouveau des méthodes qualitatives, l’entretien semble aujourd'hui connaître un usage important dans certaines disciplines. Sa pratique reste cependant extrêmement diverse et la ré-utilisation des matériaux collectés pose différentes questions à débattre. 2. La question de la capitalisation d'un point de vue méthodologique et juridique La capitalisation des données qualitatives joue un rôle important de conservation des travaux de recherche menacés de disparaître et de valorisation de la constitution de données qualitatives accessibles à la communauté scientifique. Mais elle suppose aussi une réflexion d'ordre méthodologique sur les conditions de la collecte, et d'ordre juridique et éthique, dans le contexte français, sur le statut des archives ainsi constituées et leur utilisation. 3. Les pratiques diversifiées de l'analyse secondaire Un état des lieux des différents types d'analyse secondaire s'impose, à la fois d'un point de vue théorique et aussi du point de vue des outils logiciels disponibles pour les chercheurs. De ce point de vue on s’intéressera plus particulièrement aux CAQDAS. Un nouveau contrat de recherche entre EDF R&D et PACTE-Cidsp a été mis en route, il s’agit dans ce projet : de valoriser le travail réalisé au cours du contrat CAPAS et qui avait débouché sur deux journées d’études internationales sur la capitalisation et l’analyse secondaires. Ces journées ont permis de réunir 25 intervenants parmi les meilleurs spécialistes français et étrangers provenant de différents horizons disciplinaires des SHS. Lors de ces journées furent abordés : - l’usage et le renouveau du qualitatif dans les diverses sciences de l’homme - les aspects déontologiques et éthiques de la capitalisation et de l’AS - la capitalisation et la ré-utilisation des données qualitatives - les outils logiciels 42 - les débats autour des traditions de recherche L’objectif est de réaliser un ouvrage collectif dirigé par les membres de CAPAS (cf. en annexe le projet provisoire d’ouvrage) avec la collaboration des différents intervenants qui ont d’ores et déjà donné leur accord ; de jeter les bases d’un dispositif collaboratif réunissant des chercheurs du monde universitaire et des chercheurs d’entreprises. Il s’agira ici, d’une part, d’initier une collaboration entre les différents laboratoires intéressés (dont notamment EDF R&D et PACTE) par ces thèmes et, d’autre part, de mettre en place au sein du laboratoire PACTE un dispositif transverse aux différentes équipes et permettant notamment une meilleure intégration dans le cadre de la création de la nouvelle Unité Mixte de Recherche. La première étape consistera à élaborer un « guide des bonnes pratiques » avec la CNIL dans la mesure où il existe un vide juridique en France sur ces questions. d’approfondir notre connaissance méthodologique en matière d’analyse secondaire par la réalisation d’une étude portant sur la maîtrise de la demande d’énergie (MDE) à partir d’un corpus extrait de la base de capitalisation VERBATIM pour les besoins du projet « Compréhension du marché des particuliers » piloté par EDF R&D. Liste des chercheurs de PACTE concernés par programme de recherche : Gilles Bastin, Céline Belot, Anne-Marie Benoit, Philippe Caillot, Dominique Labbé, Michèle Moine, Annie-Claude Salomon Liste des chercheurs d’EDF R&D concernés : Dominique Le Roux ,Magda Dargentas et pour les aspects touchant aux logiciels Sylvaine Nugier et Yasmina Quatrain 43 ANNEXE 1 : Publications- Mathieu Brugidou Brugidou M., “Political television in France : an analysis of the pre-campagn in « the hour of truth »”, in Political Communication Review, 16, p. 15 - 29.,1991 Bétou E., Brugidou M., « Distribution irrégulière des mots-thèmes, à propos de l’Heure de Vérité de Charles Pasqua », Cahiers de Lexicologie, 63, 1993-2, p. 171-198. Brugidou M., « L’affaire du sang contaminé : la construction de l’événement dans Le Monde (1989-1992) » Mots, 37,1993, p.29-46. Brugidou M., "Les émissions politiques à la télévision", in Sfez L., Dictionnaire critique de la Communication, Paris, Presses Universitaires de France, 1993. Brugidou M., Le Queau P., «L’analyse des entretiens non-directifs par la méthode des rafales», JADT, Giornate, internazionali di dati testuali, Rome, CISU, CNR, 1995. Brugidou M., L’élection Présidentielle : discours et enjeux politiques, Paris, L’Harmattan, 1995. Backmann F. , Brugidou M., « L’icône profane », Sociétés, 57, 1997, p59 -70. Brugidou M., « Epitaphes, l’image de François Mitterrand à travers l’analyse d’une question ouverte posée à sa mort», Revue Française de Science Politique , vol. 48, n°1, 1998 p.97-120. Brugidou M., Le Queau P., « Les « rafales », une méthode pour identifier les différents épisodes d’un récit : contribution au traitement et à l’interprétation des entretiens non directifs de recherche », BMS, Bulletin de Méthodologie Sociologique, septembre 1999, p.49-81. Brugidou M., Le Queau P., La dynamique interne du récit - CREDOC - Cahier de recherche n°124., 83 pages, 1999. Brugidou M., « Les discours de la revendication et l’action dans les éditoriaux de la presse syndicale (1996 1998) », Revue Française de science politique, 50-6, décembre 2000. P. 967-992. Brugidou M., Escoffier C., Folch H., Le Roux D., Morin-Andréani P., Piat G., « Les facteurs de choix et d’utilisation de logiciels d’analyse des données textuelles », JADT, Lausanne, 2000. Brugidou M., Labbé D., « Le discours syndical français contemporain (CFDT, CGT, FO en 1996-98)», CERAT, 2000. Brugidou M. , Cautrès B. , « Compte-rendu de la journée d’études du cidsp, les nouvelles méthodes d’analyse des entretiens- Analyse assistée par ordinateur et capitalisation des entretiens non-directifs de recherche 9 MARS 2001 - Maison des sciences de l’homme - Grenoble. BMS, 2001. Brugidou, M. , « La combinaison des inférences statistiques, linguistiques et sociologiques dans l’analyse d’une question ouverte », Journal de la Société Française de Statistique, , 2001, 4. Brugidou M. « Argumentation et valeurs : analyse de la compétence politique ordinaire à travers une question ouverte ». Journées d’Analyse des Données Textuelles (JADT 2002) - Saint Malo. Mars 2002. Brugidou M. Cihuelo J. Meynaud H. Tempête sur le réseau, L’engagement des électriciens en 1999, Paris, L’Harmattan, 2002. Brugidou M., Llory M. “Un système sociotechnique fortement sollicité par un accident par un accident naturel. L’évitement de la crise et la gestion des crises futures, in Brugidou M. Cihuelo J. Meynaud H. Tempête sur le réseau, L’engagement des électriciens en 1999, Paris, L’Harmattan, 2002. Brugidou M., Une analyse discursive de l’opinion publique, Programme de recherche pour la candidature de directeur de recherche associé, CIDSP-EDF R&D, Novembre 2002. Brugidou M., Mandran N, « Des campagnes verrouillées mais non sans coup de théâtre… », Revue Politique et Parlementaire, Elections 2002 : quelles logiques ?, N°1020-1021, sept-oct/nov-dec.2002, pp. 34-60. Brugidou M. « Argumentation and Values : an analysis of ordinary political competence via an open-ended question », Intenational Journal of Public Opinion Research,V15 n°4, winter 2003. Brugidou M., Chataignier S., Jobert A., Hammer B., « Quels publics pour le débat public ? Problèmes et « ingénierie sociale » dans le domaine de l’environnement à EDF »,in Castagna B., Gallais S., Ricaud S., Roy J.P- (dir), La situation délibérative dans le débat public, Tours, Presses universitaires François Rabelais, 2004. Brugidou M. Caillot P. Moine M. « Influence du mode d’administration d’un questionnaire sur les réponses à une question ouverte », in P. Ardilly (dir), Echantillonnage et méthodes d’enquêtes, 2002, Dunod, pp.260268.2004. Brugidou M., Boy D. “Environnement et politique” in Cautres B., Mayer N., Le nouveau désordre électoral , Presse de la FNSP, pp 71-96, 2004. Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C., « Méthode et stratégie d’analyse des questions ouvertes du Panel Electoral Français », communication au Congrès de l’Association Française de Sociologie Villetaneuse, 24-27 février 2004, RTF Méthodes (n°20) Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C., « Méthode et stratégie d’analyse des questions ouvertes du Panel Electoral Français », BMS, Bulletin de Méthodologie Sociologique, septembre N°82, pp. 5-26, 2004. 44 Brugidou M., Mandran N, Moine M., Salomon A.-C, « Les apports de l’analyse textuelle pour l’analyse électorale », Le poids des mots (vol.1 et 2) Actes des 7es Journées internationales d’Analyse statistique des Données Textuelles, Purenelle G, Fairon C., et Dister A., Presses universitaires de Louvain, Louvain-laNeuve, 2004 Brugidou M., Escoffier C. « Mobilisation, cadrage et opinion publique territoriale », Table ronde Où en sont les théories de l’action collective ?, VIII eme Congrès de l’Association Française de Science Politique. Lyon, 14-16 septembre 2005. Rayssac G.-L., Brugidou M., Dubien I., Jobert A., « Penser l’ingénierie des débats publics », Négociations, 4, 131-137, 2005. Brugidou M., Escoffier C, « Question ouverte et opinion publique discursive », in Marc X., Tchernia J.F-. (A paraître), Brugidou M., Dubien I., Jobert A., « Les figures du public dans les procédures délibératives : opinion publique et acteurs, une opposition toujours féconde », in Marc X., Tchernia J.F-. (A paraître), Brugidou M. « Vers une représentation discursive de l’opinion publique », Corpus n°4, 2005. 45 ANNEXE 2 : Dispositif collaboratif de PACTE (source contractualisation 2007-2010) « Méthodes et données. De la donnée à la connaissance et à l’action. Enjeux de l’exploitation des données sociales, politiques, territoriales et environnementales » Objectif : Les sciences de la société, de l’espace et du territoire mobilisent des protocoles de production, de traitement et de valorisation de l’information en constante évolution, diffusion et spécialisation. Dans ce contexte, et qu’il s’agisse des approches qualitatives ou quantitatives, un laboratoire de recherche délibérément positionné à la croisée de plusieurs disciplines se doit de proposer ou d’inventer des réponses à une double injonction : celle de l’enjeu du traitement scientifique des données tout comme celle de l’enjeu scientifique du traitement des données. Pôle de recherche à part entière, le dispositif proposé vise donc deux objectifs : Développer ou optimiser les ressources intellectuelles et techniques au service des activités de recherche produisant ou mobilisant des données empiriques. Transversal par nature, cette plate-forme a pour vocation de permettre aux chercheurs d’accéder plus facilement à des outils d’analyse empirique couramment utilisés dans les recherches de niveau international mais également de favoriser le transfert ou le « métissage » des méthodes ainsi que la capitalisation et la valorisation des données. Dans ce but, il fédère et développe les ressources méthodologiques et techniques et offre des capacités d’expertise et de formation. Il intervient également dans la formation des étudiants des Masters et de l’Ecole doctorale. Mettre en actes l’interdisciplinarité en quelque sorte « par le bas » au travers non seulement de la confrontation des données proprement dites, mais également et parallèlement de leur questionnement en tant que « matérialisation » des représentations scientifiques voire des visions du monde. La rencontre des disciplines, des compétences et des singularités rassemblées au sein de PACTE sur et autour de la question des méthodes et des données offre l’opportunité d’interroger concrètement leurs modes et modalités d’élaboration et d’usage et partant, d’aborder par un biais original mais de plus en plus crucial l’essence même de la recherche initiée et produite. Domaine : Dans le contexte de recomposition des équipes, le pôle méthodes et données traduit la volonté d’innovation et de réflexion méthodologique organisé autour des chercheurs et ingénieurs qui, dans leurs domaines respectifs, abordent la méthodologie comme un objet de recherche en soi, le pôle couvre un large spectre de méthodes et d’outils d’analyses empiriques (qualitatif/quantitatif, données géo-référencé, enquêtes, archives, iconographie ..) 46 Responsables : Mathieu Brugidou, Grégoire Feyt, Rachid Nedjaï Equipe méthodologique et technique : I. André-Poyaud, AC Salomon, XX, YY Equipe administrative : Argument scientifique résumé : Ce pôle valorise le capital de compétence et de ressources accumulé par les différentes équipes en matière d’acquisition et de traitement des matériaux empiriques. Son activité englobe des données et des méthodes aussi diverses que l’observation ou la mesure de terrain, les enquêtes par entretiens ou par sondages, les archives historiques, l’analyse textuelle, les statistiques sociales, l’analyse spatiale et la représentation géographique, l’analyse statistique, la production d’indicateurs et de systèmes de monitoring ou d’évaluation. Il est également susceptible d’apporter une compétence technique en matière de conception d’applications originales ou spécifiques. Ce pôle développera les activités suivantes : Appui à la recherche : - Collaboration avec les chercheurs pour mettre au point, dès la genèse des projets, les dispositifs empiriques de production et de traitement des données, de construction d’indicateurs pertinents, de démarche de diagnostic et de suivi, de modes ou de supports de restitution des résultats « lisibles » par les acteurs économiques, sociaux ou territoriaux. -.Mise en place d’une plateforme d’expertise pour l'exploitation et la mutualisation des données et outils pour la recherche et pour favoriser leur utilisation croisée. - Capitalisation et valorisation des données : favoriser la création de bases de données à partir des matériaux empiriques produits par les chercheurs de PACTE dans le but de développer des analyses secondaires. Suivi des relations avec les banques de données factuelles régionale, nationales et internationales. Couplage d’informations relevant de logiques techniques distinctes (données environnementales, socio-économiques, flux, etc) au moyen notamment des technologies de l’information géographique. - Pédagogie et information : diffusion des méthodes et des innovations auprès des chercheurs et des doctorants par des séminaires et des écoles thématiques de formation méthodologique - Animation d’une réflexion épistémologique et méthodologique sur la question de la production et de l’usage de la donnée scientifique dans ses différentes registres : spécifier, modéliser, décrire, analyse, restituer, transmettre… - Production de données nationales ou internationales : participation à des programmes régionaux, nationaux et internationaux de production ou de valorisation des données (grandes enquêtes du type ISSP ou enquêtes Valeurs, initiatives nationales ou directives européennes type INSPIRE sur l’accès à la donnée publique…) ou à la mise en place de référentiels géographiques partenariaux. - Démarches partenariales de recherche appliquée : collaboration avec les partenaires professionnels et institutionnels (collectivités territoriales, organismes d’études, gestionnaires et « développeurs » sociaux ou territoriaux,…) afin de susciter et d’accompagner le développement de dispositifs de production, de diffusion, de valorisation de données et de méthodes qui renouvellent les savoirs-faire professionnels. - Veille, expérimentation et développement : suivi des évolutions technologiques et méthodologiques, contribution aux innovations méthodologiques (fonctions d'analyse spatiale, outils d'exploitation assistée à l'analyse qualitative (CAQDAS), passerelles entre outils, développement d’applications spécifiques). Participation aux débats et controverses qu’elles suscitent. 47 - Expertise juridique et déontologie de la recherche. Suivi juridique des dispositifs de production, d’utilisation et de diffusion des données. Mise en perspective avec les législations nationales, européennes et internationales. Contribution aux Codes de Bonne Pratique. 48 ANNEXE 3 : Ouvrages en cours ou en projet 1-« L’opinion et ses publics » Editeurs : Accepté aux presses de Science Po Collection « Références » De Herbert Blumer à Pierre Bourdieu, nombreux sont les sociologues pour qui « l’opinion publique n’existe pas ». Cet ouvrage renouvelle ce débat ancien en l’abordant sous un autre angle : il existe « des » publics, qui se créent et se recréent autour d’enjeux et de controverses spécifiques. Et c’est la dynamique de ces controverses qu’il se propose d’étudier dans la perspective « pragmatique » ouverte par John Dewey. Des publics se forment parce que des individus, des groupes sont plus ou moins attentifs à telle controverse, intéressés à trouver des causes, et parfois des responsables, à un problème qui, pensent-ils, les concerne. Le sondage constitue une des scènes du débat public, une « épreuve » démocratique, que les citoyens ordinaires sont devenus en partie capables de manipuler. Répondre à un sondage, c’est d’une certaine manière s’exprimer en public. C’est aussi comme à l’occasion d’une discussion, une situation où des opinions peuvent se former, tout autant que la conscience de se situer dans un camp et de construire des arguments et des contre arguments. Pour vérifier ces thèses, l’ouvrage souligne la nécessité d’adapter les dispositifs d’enquête au public plutôt qu’à l’opinion publique : il ne s’agit pas ici en effet de mesurer les attitudes d’un échantillon dit « représentatif » mais de restituer la parole des « agents ordinaires » (leurs images, leurs récits et leurs arguments qui forment des « lieux communs ») sur un problème et d’identifier ainsi des publics. Les « opinions », quand elles existent, sont toujours contextualisées et la prise de parole constitue leur seul mode d’existence. L’opinion ne réside donc pas dans la solitude du for intérieur, mais au contraire dans l’extériorité de la culture et dans le tumulte de la controverse. Diverses techniques permettent de retrouver à travers les interactions entre questions fermées/ouvertes et les réponses (prises de position et justification) la dynamique de ces controverses. La raison statistique sert alors moins les buts de la représentation politique (où un individu égale un vote) que ceux de la démocratie délibérative, où il s’agit plutôt de rendre à une voix (qui s’exprime plus ou moins fortement) ses raisons. Cet ouvrage est le premier a présenter une approche discursive de l’opinion publique : - en articulant une définition théorique de l’opinion comme acte de langage et une conception délibérative de la démocratie à travers la notion de public - en proposant des dispositifs expérimentaux de recueil (sondage expérimentaux avec questions ouvertes) du discours des personnes interrogées et des modalité de traitement permettant d’identifier des topoï, véritables heuristiques textuelles, (« lieux communs argumentatifs » ou schèmes narratifs simplifiés) plutôt que des attitudes, - en décrivant certaines des modalités les plus saillantes du « travail politique » des publics, dimensions réflexive et pragmatique qui les distinguent des groupes statistiques : la construction d’identité à travers l’image du porte-parole, l’imputation de cause à propos d’un problème ou la mobilisation et l’engagement dans l’action politique. 49 Sommaire UNE APPROCHE PRAGMATIQUE ET DISCURSIVE DE L’OPINION PUBLIQUEERROR! BOOKMARK NOT DEFINE PARTIE I : DECRIRE LES COMPETENCES DU CHERCHEUR ET CELLES DU PUBLICERROR! BOOKMARK NOT D CHAPITRE 1 : DE LA QUESTION DU PARADIGME DE L’OPINION DISCURSIVE A LA CONCEPTION DE NOUVEAUX DISPOSITIFS D’ENQUETE. .... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. QUELQUES REPERES HISTORIQUES SUR L’EVOLUTION DES PARADIGMES .......... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. VERS UNE REPRESENTATION DISCURSIVE DE L’OPINION PUBLIQUE ................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Discours public et discours du public .................................................................. Error! Bookmark not defined. Le sondage d’opinion comme dispositif socio-technique ..................................... Error! Bookmark not defined. Le sondage d’opinion comme épreuve ................................................................. Error! Bookmark not defined. La mise au point d’une enquête expérimentale pour constituer un corpus « d’énoncés d’opinion publique »Error! Bookmark not CHAPITRE 2 : LA COMBINAISON DES INFERENCES STATISTIQUES, LINGUISTIQUES ET SOCIOLOGIQUES DANS L’ANALYSE D’UNE QUESTION OUVERTE.ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. INFERENCES STATISTIQUES ............................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. INFERENCES LINGUISTIQUES ............................................................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. DE LA LINGUISTIQUE A LA SOCIOLOGIE ............................................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. INFERENCES SOCIOLOGIQUES ............................................................................ ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. UN PARCOURS INTERPRETATIF .......................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. CHAPITRE 3 : ANALYSER DES ARGUMENTS ET DES SYLLOGISMESERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. DES REPONSES LIBRES COMME DES ENTHYMEMES ............................................ ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. L’ANALYSE DES DONNEES TEXTUELLES : LA METHODE ALCESTE. .................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. DES CLASSES DE REPONSES A L’ANALYSE DES ARGUMENTS ............................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. RECONSTITUTION DE L’ENTHYMEME : DES ARGUMENTS AUX VALEURS............ ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. CHAPITRE 4 : ANALYSER DES RECITS ....................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. L’ANALYSE TEXTUELLE DES QUESTIONS OUVERTES : STRATEGIES D’ANALYSE ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. LA CONSTRUCTION D’UNE TYPOLOGIE DE DISCOURS SUR LA PARTICIPATION ... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. PARTIE II ............................................................................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. DECRIRE LE TRAVAIL POLITIQUE DU PUBLIC : CONSTRUIRE DES IDENTITES, IMPUTER DES CAUSES, SE MOBILISER CHAPITRE 5 : FABRIQUER DES IDENTITES- « EPITAPHES » ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. LES PASSEURS D’AMES...................................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Lieux de mémoire ................................................................................................. Error! Bookmark not defined. Trois hypothèses ................................................................................................... Error! Bookmark not defined. La méthode : l’analyse lexicométrique d’une question ouverte. .......................... Error! Bookmark not defined. Analyse lexicométrique ........................................................................................ Error! Bookmark not defined. DES REPRESENTATIONS SOCIALEMENT DETERMINEES....................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Un discours de consensus ? ................................................................................. Error! Bookmark not defined. Les hommes, les femmes et l’image de F. Mitterrand .......................................... Error! Bookmark not defined. Importance de la période et du cycle de vie dans la genèse de l’image ............... Error! Bookmark not defined. Image et position sociale ...................................................................................... Error! Bookmark not defined. DES REPRESENTATIONS IDEOLOGIQUEMENT ORGANISEES................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Le soutien au porte-parole ................................................................................... Error! Bookmark not defined. Proximité partisane .............................................................................................. Error! Bookmark not defined. « Je me souviens » ................................................................................................ Error! Bookmark not defined. CHAPITRE 6 : IMPUTER DES CAUSES ET IDENTIFIER DES RESPONSABLES ENVIRONNEMENT ET POLITIQUE .............................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. La représentation « spontanée » des « problèmes » environnementaux à travers une question ouverteError! Bookmark not defin La responsabilité .................................................................................................. Error! Bookmark not defined. La responsabilité collective : « transport/éolien » ............................................... Error! Bookmark not defined. La responsabilité individuelle : « respect de la nature » ..................................... Error! Bookmark not defined. 50 Déterminants sociaux et politiques des répondants ............................................. Error! Bookmark not defined. CHAPITRE 7 : SE JUSTIFIER, INSTITUER DES PUBLICS –« MOBILISATION, CADRAGE ET OPINION PUBLIQUE TERRITORIALE » ...................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. UN CONFLIT D’AMENAGEMENT : LA QUESTION DE L’OPINION PUBLIQUE TERRITORIALE ET DU DISPOSITIF D’ENQUETE ....................................................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Présentation de la méthode d’analyse des questions ouvertes ............................. Error! Bookmark not defined. Les opposants dans la population du débat ......................................................... Error! Bookmark not defined. La justification des prises de position .................................................................. Error! Bookmark not defined. L’ANALYSE DES « PUBLICS » DE LA MOBILISATION A PARTIR DE TOPOÏ ARGUMENTATIFSERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Argumenter .......................................................................................................... Error! Bookmark not defined. Contre-argumenter............................................................................................... Error! Bookmark not defined. FORMES DE JUSTIFICATION ET PUBLICS ............................................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. CONCLUSIONS ................................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. BIBLIOGRAPHIE................................................................................................. ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. ANNEXES DU CHAPITRE XX ............................................................................... ERROR! BOOKMARK NOT DEFINED. Annexe – Détails des champs lexicaux et arguments des classes . ....................... Error! Bookmark not defined. 3Questionnaire ........................................................................................... Error! Bookmark not defined. 51 2- Un ouvrage collectif sur une controverse territoriale et un débat public sur une ligne THT dans le Lot Editeurs : proposé aux presses de Science Po (Co-direction avec Daniel Boy) Dans le cadre d’un programme de recherche privilégiant une approche multidisciplinaire plusieurs études ont été réalisées sur ce débat public. Elles portaient sur la question de l’organisation du débats publics, sur les publics du débat, sur sa médiatisation et sur la question plus générale des « effets » de cette procédure. Cette recherche, privilégiait une approche pluridisciplinaire et réunissait des chercheurs d’EDF R&D et de laboratoires de sciences politiques, des sciences de l’information et la communication et de linguistique. Contexte : le projet de ligne THT dans le Quercy Blanc a fait l’objet de plusieurs études techniques dans les années 90. En 1996 et 1997, un nouveau projet est soumis a concertation. Fin 2002, suite à une opposition persistante un débat public local comprenant plusieurs réunions dans différentes parties du Lot et dans quelques communes du Tarn et Garonne a été organisé pour que chacun puisse connaître et discuter les différentes solutions. A l’issue de ce débat, RTE, c’est-à-dire le gestionnaire public du réseau de transport d’électricité, a annoncé le retrait de son projet de construire une ligne Très Haute Tension dans le Quercy blanc. Eric Drocourt (EDF R&D et CEDP) « La préparation au débat public : modalités et enjeux pour l’aménageur » L’organisation d’un débat, qu’elle soit décidée par le maître d’ouvrage (dans le cas du débat local) ou bien prise en main par une commission particulière pilotée par un membre de la Commission Nationale du Débat Public (cas du débat public) exige une lourde phase de préparation impliquant le maître d’ouvrage. Ce moment de préparation nécessite une mobilisation « exceptionnelle » des ressources. Trois objectifs orientent notre analyse de cette phase amont du débat qui s’intéresse globalement aux modalités et aux enjeux de la préparation au débat public : comprendre les mécanismes de la construction de la posture du maître d'ouvrage ;comprendre les effets de la préparation du débat public sur l’organisation interne ; comprendre ce qui se joue à ce moment du débat dans les interactions du maître d'ouvrage avec les autres acteurs impliqués Marie Galio - Elena Mouratidou (Laboratoire Dynalang – SEM, Unviversité René Descartes - Paris V-Sorbonne) « Etude semiolinguistique et semiologique de la couverture médiatique des débats publics autour des lignes très haute tension dans le Lot ». La presse est impliquée tout au long des débats publics autour des projets de ligne THT et son rôle doit être interrogé. Observateur et relais d’opinion, elle est acteur du débat de part son action d’information et de communication au sein d’un dispositif visant la participation du public. Une des manières d’appréhender le rôle de la presse dans la constitution d’une opinion publique est d’analyser la manière dont elle relaye le débat. L’approche proposée ici est une analyse sémiologique et linguistique de la couverture médiatique des débats Lyon-Chambéry et du Lot. Elle vise à dégager les thèmes et leur évolution, les représentations médiatiques du débat public ainsi que l’image véhiculée des différents protagonistes. Daniel Boy (FNSP) sur la base d’un contrat de recherche réalisé avec EDF R&D portant sur une enquête par sondage. Ce chapitre traite notamment de l’information sur les projets de lignes THT, des attitudes personnelles à l'égard de ces projets, et des informations et attitudes sur les différentes étapes du débat public. 52 Mathieu Brugidou (EDF R&D et PACTE-cidsp) et Caroline Escoffier (EDF R&D), « Mobilisation, cadrage et opinion publique territoriale » Ce chapitre porte sur une figure souvent absente, mais pourtant centrale dans les travaux sur les cadres : celle du citoyen ordinaire. En articulant une réflexion théorique sur l’opinion publique et des instruments empiriques innovants (sondage expérimental comportant des questions ouvertes), ce travail propose de montrer en quoi la confrontation des conceptions discursives de l’opinion publique à la théorie des cadres invite à reposer la question des publics et de l’opinion publique dans le cadre de la sociologie de l’action collective. Nous nous appuyons sur l’étude empirique des différents “ publics ” construits par une controverse (un projet d’aménagement de ligne THT dans le Lot) à partir de l’analyse des topos argumentatifs ou cadres produits par l’action collective. L’étude montre qu’il est notamment possible d’identifier différents publics en fonction de ces cadrages, que ceux-ci varient pour partie en fonction du niveau de “ concernement ” (niveau d’intérêt et d’information sur la controverse) et sélectionnent (ou sont sélectionnés par) des propriétés sociales distinctes. Loïc Blondiaux (IEP de Lille- CERAPS) et Laura Michel (Université de Montpellier 1/CEPEL) « Un débat sans conséquences ?Une analyse du contexte, de l’organisation et des effets politiques et sociaux du débat local sur le renforcement de l’alimentation électrique du Lot » Nous nous proposions, au départ de cette recherche de revenir sur la manière dont les différentes catégories d’acteurs locaux concernées par ce débat – militants associatifs, maître d’ouvrage, services de l’Etat, élites économiques et politiques locales – s’étaient ou non emparées de ce nouvel instrument d’action publique et s’étaient positionnées par rapport à lui. Notre hypothèse de départ était que la mise en place d’un tel forum public de discussion, dans un cadre légal et ouvert, est susceptible d’affecter sensiblement les stratégies et les logiques d’argumentation des acteurs. D’un point de vue théorique, nous souhaitions enrichir la réflexion actuelle sur les effets de la situation délibérative dans le débat public, pour reprendre le titre d’un colloque récent auquel trois d’entre nous ont participé. Nous voulions, à partir de l’étude du cas Lotois, soulever un certain nombre de questions relatives à l’influence du débat public sur les dynamique de mobilisations associatives et les stratégies d’entreprise d’un opérateur tel que RTE. 53 3- Un ouvrage collectif sur l‘Analyse secondaire et la capitalisation en recherche qualitative Editeurs : Accepté par les Editions Lavoisier. A examiner la possibilité d’une co-édition avec l’éditeur anglophone Sage Publications. Editeurs scientifiques : Membres du groupe CAPAS (CAPitalisation et Analyse Secondaire de données qualitatives en sciences sociales et humaines) Collaboration scientifique entre le laboratoire PACTE-CIDSP (Centre d’Informatisation des Données en Sciences Politiques – CNRS – Grenoble) et la R&D du Groupe EDF (GRETS Clientèle et GRETS Environnement et DD). Equipe éditoriale : Mathieu BRUGIDOU59, Magda DARGENTAS60, Dominique LE ROUX61, Annie-Claude SALOMON62 Langues : Français, Anglais. Public concerné : Sciences Humaines et Sociales (Sociologie, Psychologie, Histoire, Etudes Politiques, Anthropologie, Linguistique, Ergonomie) ; Entreprises (EDF, France Télécom, Institut Louis Harris, INRETS, ANRS, SNCF, RATP, INSERM etc). Disciplines où la recherche qualitative peut être utilisée (Economie, Professions médicales). Chercheurs, enseignants, ingénieurs, étudiants en premier, second et troisième cycle. Intérêt scientifique et pertinence pour le monde industriel du sujet : Nombreuses sont actuellement les entreprises qui ont besoin, notamment pour anticiper les évolutions du marché, de conduire des enquêtes qualitatives visant à une meilleure connaissance sociétale de son environnement. Au sein d’EDF R&D, c’est le rôle que joue le GRETS63, pôle des Sciences Humaines et Sociales, constitué d’une équipe pluridisciplinaire qui effectue depuis une vingtaine d’années des enquêtes qualitatives autour des problématiques de société intéressant l’entreprise (analyse des controverses autour de l’implantation d’ouvrages, usages de l’électricité, tarification, aménagement du territoire, maîtrise de l’énergie…). Depuis 1998, le GRETS a entrepris d’une part de capitaliser, dans le cadre de la base de données ad hoc Verbatim, les études et les entretiens réalisés, et d’autre part d’effectuer des analyses secondaires à partir de ce gisement d’information, c’est à dire ré-utilisant des données qualitatives pour d’autres hypothèses de travail que celles ayant présidé à leur recueil. Cette pratique de l’analyse secondaire a forcément nécessité de développer parallèlement une réflexion méthodologique sur les conditions et les limites d’une telle pratique afin d’assurer la fiabilité des résultats dont l’utilité est essentiellement exploratoire pour servir de base à de nouvelles études. Le développement de telles pratiques est essentielle pour l’entreprise de EDF dans la mesure où elles permettent de capitaliser des savoirs sur des objets d’étude stratégiques et de réEDF R&D – PACTE - CIDSP EDF R&D – PACTE - CIDSP 61 EDF R&D 62 PACTE - CIDSP 63 GRETS (Groupe de Recherches Energie – Technologie – Société). Entité dépendant du Département ICAME et composée du GRETS Clientèle et du GRETS Environnement et Développement Durable. 59 60 54 interroger des matériaux déjà disponibles avant de relancer des études à la fois lourdes et coûteuses. De même, elles contribuent à une ré-organisation des pratiques de recherche. L’enjeu est donc à la fois scientifique et financier. Il faut souligner que, si l’analyse secondaire est pratiquée couramment dans le domaine du quantitatif, une telle pratique sur le qualitatif, telle qu’elle a été conduite à la R&D d’EDF est pionnière en France. En revanche, la capitalisation des données qualitatives d’entretiens sociologiques de recherche et leur ré-utilisation ont été développées dans le monde anglosaxon depuis au moins le début des années 90 et ont donné lieu à des réalisations, des colloques, des ouvrages, des réseaux de recherche tant aux Etats Unis qu’en Europe du Nord. C’est d’ailleurs sur ces travaux et ces expériences, à l’époque encore mal connus en France, que le GRETS s’est appuyé pour conduire son projet. Actuellement, dans le milieu scientifique français des sciences humaines et sociales au sens large, on constate, comme le montre la floraison des journées d’étude et des rapports sur ce thème, le développement d’un courant de réflexion sur les modalités d’archivage et de réutilisation des données qualitatives. Les chercheurs du GRETS/R&D-EDF mènent depuis un an une collaboration avec l’équipe PACTE – CIDSP64 du CNRS de Grenoble à la fois pour approfondir et développer ces techniques et réfléchir à leurs modalités d’intégration au sein du monde académique français qui se révèle essentiel pour en assurer le développement. Ce livre est le résultat de cette collaboration, qui a débouché sur des contacts internationaux avec des chercheurs et des praticiens étrangers. Il a pour objectif de présenter ces nouvelles manières de gérer les données qualitatives. Il est également le résultat d’un dialogue entre chercheurs provenant d’une diversité de disciplines et de contextes culturels, ayant une pratique diversifiée de la capitalisation et d’analyse secondaire des données qualitatives. Les chercheurs qui participent à la rédaction de ce livre proviennent d’ institutions de recherche et de pays divers (Allemagne, France, Finlande, Royaume Uni, Suisse). Plusieurs aspects sont abordés à travers les expériences de ces chercheurs : le renouveau des méthodes qualitatives au sein des sciences de l’homme, l’archivage et la capitalisation, les problèmes déontologiques et juridiques que cela pose, les conditions de collecte de données, l’état des archives dans le monde anglo-saxon et en France, les pratiques d’analyse secondaire, les outils logiciels disponibles, les réseaux de recherche qualitative existants, l’usage de l’entretien. L’objectif de cet ouvrage est de présenter à un public français peu familiarisé avec ces questions ces nouveaux modes de traitement du qualitatif, leur intérêt et les problèmes qui y sont liés et de mener une réflexion quant à leurs modalités d’évolution dans un contexte scientifique favorisant leur développement. Il ouvre ainsi de nouvelles perspectives de recherche dans le monde scientifique français. PACTE – CIDSP : Politiques publiques, ACtion politique, TErritoires - Centre d’Informatisation des Données Socio-Politiques ; CNRS – Grenoble. 64 55 Plan indicatif de l’ouvrage 1. Introduction Bernard Denni (PACTE-CIDSP/ CNRS Grenoble) « Les enjeux de la capitalisation et de l’analyse secondaire dans le contexte scientifique actuel, en France et dans le monde anglo-saxon » Philippe Chabault (EDF R&D) « Les enjeux de la capitalisation et de l’analyse secondaire dans le contexte industriel » Louise Corti (UK Data Archive, University of Essex) « Approaching Utopia: the maturing of qualitative data archiving services and secondary analysis in the UK » Magda Dargentas (Cidsp-PACTE/CNRS, Grets-R&D/EDF) « Etat de l’art sur la capitalisation et l’analyse secondaire du qualitatif » 2. Usage et renouveau du qualitatif, dans les diverses sciences de l’homme Introduction : présentation des chapitres et de principaux questionnements Nigel Fielding (University of Surrey). « Qualitative research: resurgence, institutionalisation and application » Didier Demazière (PRINTEMPS) « Productions et usages de l’entretien en Sociologie » Pascale Laborier (Centre Marc Bloch Berlin, CURAPP) & Philippe Bongrand (Curapp) « ‘Une thèse, c'est cinquante entretiens’. L'entretien dans l'analyse des politiques publiques ou les paradoxes d'un impératif non codifié » Sophie Duchesne (Cevipof) « Le développement des méthodes d’analyse comme préalable nécessaire à celui de l’analyse secondaire des données qualitatives » Dietmar Loch (Université P. Mendès France) « L'entretien en milieu populaire: expériences françaises et allemandes » 3. Capitalisation et analyse secondaire : expériences, acquis et limites. Introduction : présentation des chapitres et de principaux questionnements / Recueil, capitalisation des données. Les pratiques de l’AS. Méthodes de traitement 3.1. Aspects déontologiques et éthiques Arja Kuula ( Finland Data Services) « Ethics Reconsidered » Anne-Marie Benoît (PACTE- CIDSP) « Vers la constitution d’un code de bonnes pratiques ? » 3.2. Capitalisation et ré-utilisation des données qualitatives Libby Bishop (UK Data Archive, University of Essex), “Is Secondary Analysis Second Best? A case study of reusing qualitative data” Irena Medjedovic, (Life-Course-Archive, GSSS, University Bremen) « Secondary Analysis of Qualitative Interview Data: Objections, Experiences and Demands. Results of a Nationwide Empirical Study » Andreas Witzel (Graduate School of Social Sciences, Universität Bremen, Archiv für Lebenslaufforschung) & Reiner Mauer (Zentralarchiv für Empirische Sozialforschung an der Universität zu Köln) “Basis considerations about an archive concept for qualitative interviews-data” Dominique Le-Roux (GRETS/R&D-EDF) et Magda Dargentas (GRETS/R&D-EDF, CIDSP-CNRS) « Contexte de développement et pratiques de l’analyse secondaire du qualitatif au GRETS/R&D-EDF : expériences, acquis et limites » 56 Dominique Beynier (LASMAS), « Deux exemples de bricolages en analyse secondaire de données textuelles » 3.3. Les outils logiciels Jacques Jenny (IRESCO) « Propositions pour impulser un véritable « tournant sociologique » à toute analyse de textes et discours, qu’elle soit « primaire » ou « secondaire » » Nigel Fielding (University of Surrey) “Methods and tools for secondary analysis: how IT can help” Sylvaine Nugier (SOAD/R&D-EDF), Benoît Habert (LIMSI) « TROIE et ACHILLES, prototypes pour la ré-utilisation de corpus et la capitalisation d'analyse » 3.4. Ré-interroger les données textuelles et traditions de recherche (méthodologiques, disciplinaires et culturelles). Débats. Introduction : présentation des chapitres et de principaux questionnements Louise Corti, Libby Bishop (University of Essex), « The politics of archiving and secondary analysis of qualitative data » Dominique Joye (Sidos) « Archivage des données qualitatives et ré-utilisation: ressources et défis » Béatrice Madiot (Université de Picardie – Jules Verne) « Analyse secondaire et dimension temporelle en psychologie sociale » Mathieu Brugidou, Magda Dargentas (GRETS/R&D-EDF, PACTE-CIDSP), Céline Belot (PACTE-CIDSP) « Premières réflexions critiques sur l’analyse secondaire » 4. Conclusion 5. Bibliographie 6. Annexes techniques 7. Présentation du comité éditorial et des auteurs 57 ANNEXE 4 : Organisation de colloque et de journée d’étude 1-Analyse secondaire en recherche qualitative Compte-Rendu des Journées Internationales : L’analyse Secondaire en Recherche Qualitative. Utopie ou Perspectives Nouvelles ? Organisees par le groupe capas à la MSHAlpes (à paraître dans le BMS) par Magdalini Dargentas (Pacte/CNRS-R&D/EDF, [email protected]) Mathieu Brugidou (Pacte/CNRS-R&D/EDF, [email protected]) Dominique Le-Roux (R&D/EDF, [email protected]) Annie-Claude Salomon (Pacte/CNRS, [email protected]) -------------------------------------Abstract. Report on the International Symposium: Secondary Analysis in Qualitative Research. Utopia and Perspectives. Qualitative secondary analysis consists of a new field of research in France. A symposium on this issue was held in Grenoble (MSH-Alpes) on November 2005, 3rd and 4th. The following issues were discussed: state of the art in qualitative research by interviews in social and human sciences; Anglo-Saxon and French practices of secondary analysis; ethical, legal and methodological questions regarding archiving and secondary analysis of interviews; epistemological views. Key words. qualitative research, interviews, secondary analysis, archiving, ethical and legal issues, tools and software for secondary analysis, methods. Résumé. L’analyse secondaire du qualitatif est un nouveau domaine de recherche en France. Deux Journées Internationales ont porté sur ce domaine. Elles ont eu lieu le 3 et le 4 novembre 2005 à Grenoble (MSH-Alpes). Les objectifs de cette manifestation étaient les suivants : faire un état de lieu de la recherche qualitative à entretiens dans les sciences humaines et sociales ; présenter l’usage de l’analyse secondaire dans le monde anglo-saxon et en France ; aborder des questions déontologiques, juridiques et méthodologiques liées à la capitalisation des entretiens et à leur analyse secondaire ; ouvrir sur des prospectives épistémologiques. Mots-clés. recherche qualitative, entretiens, analyse secondaire, capitalisation, aspects déontologiques et juridiques, outils d’assistance à l’analyse secondaire, méthodes. -------------------------------------La capitalisation des données qualitatives et leur ré-utilisation en vue de nouvelles études (analyse secondaire) constituent un nouveau domaine de recherche à l’intersection de toutes les disciplines formant les sciences humaines et sociales et interrogeant les pratiques de la recherche qualitative. Ces questions sont explorées dans le monde anglo-saxon, de manière systématique, depuis les années 90. Outre l’organisation de plusieurs colloques et journées d’études, il y a eu la création de réseaux de recherche, de centres d’archivages, ainsi que la publication de nombreux articles et ouvrages portant sur l’analyse secondaire (cf. Corti, Kluge, Mruck, Opitz, 2000 ; Corti, Witzel, Bishop, 2005 ; Bergman, Eberle, 2005). En France, cette orientation de la recherche qualitative est récente. Les Journées Internationales l’Analyse Secondaire en Recherche Qualitative, Utopies ou Perspectives Nouvelles ? – réalisées le 3 et le 4 novembre 2005 à Grenoble (Maison des 58 Sciences de l’Homme-Alpes) - sont la première manifestation scientifique française, exclusivement consacrée à ce domaine et tentant de l’aborder sous plusieurs angles. Elles constituent un des résultats du travail fournit par le groupe CAPAS qui en a assuré l’organisation65.Le groupe CAPAS (CAPitalisation et Analyse Secondaire) : a été formé en 2004, il réunit des chercheurs issus des équipes GRETS/R&D-Edf66 et PACTECIDSP/CNRS67, avec une affiliation pluridisciplinaire (sociologie, linguistique, sciences politiques, psychologie sociale). Ce partenariat est intimement lié à une expérience pionnière en France, celle du pôle de recherches en Sciences Humaines et Sociales (GRETS) de la R&D/Edf : depuis 1998, en s’appuyant sur l’expérience de Qualidata (University of Essex), le GRETS est le seul groupe de recherches en France menant systématiquement la capitalisation des études qualitatives et de leurs matériaux68, ainsi que la réalisation d’analyses secondaires (Dargentas, Le-Roux, 2005). Le groupe CAPAS a été créé avec l’objectif de développer cette méthode, en élargissant la réflexion méthodologique, théorique et épistémologique, et en l’introduisant dans le monde académique français. Les Journées organisées s’inscrivent dans ce programme de recherche initié par le GRETS et le PACTE-Cidsp. Leur objectif était le partage des expériences et des réflexions avec la plus large communauté scientifique, dans une visée interdisciplinaire et internationale. Elles ont été l’occasion de bâtir les prémisses d’un réseau scientifique consacré à l’élaboration et au développement de ces nouvelles pratiques du qualitatif. Un autre objectif était de soumettre cette pratique aux jeunes chercheurs. Se limitant volontairement aux seuls entretiens de recherche, les Journées étaient structurées autour des questionnements suivants : quel est l’état de la recherche qualitative actuellement ? Quelles sont les pratiques d’analyses secondaires, leurs objets et les difficultés identifiées ? En quoi les questions juridiques, déontologiques et éthiques peuvent-elles influer sur ces pratiques, ainsi que sur la capitalisation du qualitatif ? Quelles sont les méthodes susceptibles de préparer et d’assister les analyses secondaires ? Quelles sont les prospectives théoriques et épistémologiques de la recherche qualitative ? Cette manifestation scientifique a permis d’entendre sur ces questions une vingtaine de spécialistes de l’analyse secondaire qualitative, de la recherche qualitative ou de la capitalisation, issus de diverses disciplines : sociologie, sciences politiques, psychologie sociale, linguistique, droit, statistiques. Il s’agissait aussi de tenir compte des expériences plus avancées et des problématiques de recherche existant dans les autres pays européens ; des spécialistes des pays suivants faisaient partie des conférenciers : Grande Bretagne, Allemagne, Finlande, Suisse. Concernant les participants, les Journées ont réuni plus que 80 doctorants et chercheurs utilisant la recherche qualitative et issus de la diversité des disciplines des sciences humaines et sociales, toutefois avec une très forte participation des sciences politiques. Sur le plan technique, les langues officielles des Journées étaient le Sous l’égide et avec le soutien des institutions suivantes : MSH-Alpes (Maison des Sciences de l’Homme), GRETS/R&D-EDF, PACTE-CIDSP/CNRS, Groupe Interuniversitaire Ethique en Recherche (Grenoble Universités), IEP Grenoble (Institut d’Etudes Politiques), UPMF (Université Pierre Mendès France). 66 Groupe de Recherche-Energie–Technologie–Société (Groupes E71 et E75). Recherche & Développement, EDF. 67 Politique, Action publique, Territoires/Centre d’Informatisation des Données Socio-Politiques : UMR 5194 rattachée au CNRS, à l'Institut d'études politiques de Grenoble, à l'Université Joseph Fourier, à l'Université Pierre Mendès France, et par convention liée à la Fondation nationale des sciences politiques. 68 C’est la vocation de la base Verbatim (Le-Roux, Vidal, 2000). 65 59 français et l’anglais ; des traducteurs faisaient la traduction simultanée de grande qualité. Enfin, le colloque était disponible en télétransmission sur le site de la MSH. En lancement des Journées, on a pu écouter les propos introductifs de Bernard Bouhet, directeur de la MSH-Alpes, de Bernard Denni, directeur de Science Po recherche du laboratoire PACTE, et de Philippe Chabault, directeur du pôle Sciences Humaines et Sociales de R&D/Edf. Ces conférenciers ont abordé entre autres : la complémentarité des démarches qualitatives et quantitatives ; l’intérêt des équipes organisatrices à la recherche qualitative et aux pratiques de la capitalisation et d’analyse secondaire ; la réflexion sur la production des données et sur les attitudes des chercheurs relativement à celles-ci ; la coopération pluridisciplinaire et la collaboration entre chercheurs. Philippe Chabault a insisté sur l’intérêt et la volonté d’EDF R&D pour le développement de partenariat de recherche avec le monde académique, notamment en SHS. La première conférence invitée était celle de Louise Corti, directrice de l’institution majeure pour la pomotion de la capitalisation et de la ré-utilisation du qualitatif en Grande Bretagne, celle de Qualidata (UK Data Archive, University of Essex). Louise Corti a présenté ce service, son historique depuis sa création en 1994 et ses objectifs. Les tâches de ce centre se rapportent à la valorisation de la recherche qualitative, à l’archivage de recherches qualitatives majeures (cf. Thompson, 2000) ou risquant de se perdre, à la mise en relation des chercheurs avec les autres centres d’archivage, à l’organisation de formations et d’assistance méthodologique aux chercheurs. Par ailleurs, les chercheurs souhaitant procéder à l’archivage sont accompagnés concernant les questions d’anonymisation, de confidentialité, ou de format de données. D’autres aspects ont été également abordés : les acteurs utilisant ce service, les difficultés techniques liées à l’archivage (consentements, copyright, enregistrement, retranscription, problèmes juridiques), la création de bourses et d’allocations de recherche. Le service de Qualidata fait figure de pionnier pour les équipes européennes et internationales dédiées à l’archivage du qualitatif.. La matinée du 3 novembre a été ensuite consacrée à la recherche qualitative, son renouveau et ses usages. Il s’agissait d’examiner les conditions de possibilités de la ré-utilisation des entretiens. Des chercheurs représentant plusieurs disciplines étaient invités à participer à cet état des lieux constrasté afin de présenter les particularités de la recherche qualitative dans leurs travaux et leurs disciplines. La session a commencé avec la communication du sociologue Nigel Fielding (University of Surrey) qui a traité du statut de la recherche qualitative dans les sciences sociales. Ayant passé en revue l’évolution de la recherche qualitative depuis son émergence, sa domination par la recherche quantitative dans les années 40 (Ecole de Chicago), ce chercheur a ensuite évoqué le renouveau de l’intérêt pour ce type de recherche. A travers cet historique et à travers son propre parcours de recherche, Nigel Fielding a abordé le débat quantitatif-qualitatif, l’épistémologie positiviste, les questions méthodologiques de validité – fidélité – généralisation, le virage qualitatif initié par Glaser et Strauss en 1967, ainsi que les problématiques récentes de la recherche qualitative -, notamment : les logiciels d’aide à l’analyse, l’existence de ressources issues d’archivage, les développements techniques fournissant de nouvelles formes de données qualitatives. Il a également évoquer l’institutionnalisation de la recherche qualitative à partir des constats suivants : l’inscription de plus en plus fréquente de cours sur la recherche qualitative dans le programme de formation universitaire en Grande Bretagne ; des tentatives d’évaluation de la qualité des 60 études utilisant des méthodes qualitatives et l’utilisation élargie de la méthodologie qualitative dans la recherche à orientation appliquée (cf. Medical Health Services). Pascale Laborier (Centre Marc Bloch) et Philippe Bongrand (CURAPP) ont présenté les conclusions d’une enquête qu’ils ont réalisée (2004) sur les méthodes utilisées dans la recherche de l’analyse des politiques publiques. L’entretien semi-directif semble être la méthode principale de recueil de données, ce qui toutefois soulignent les intervenants soulève des problèmes fondamentaux. Ces chercheurs constatent que ce recours« massif » aux entretiens n’est pas accompagnée par un effort de systématisation des pratiques, ni pas une réflexion épistémologique et méthodologique sur l’usage des entretiens qui constituent un « impensé » de l’analyse des politiques publiques. L’usage de l’entretien reste en effet très hétérogène, peu armé, souvent sans recours à l’enregistrement, et limité à sa seule fonction informative. Revenir sur cet impensé de l’analyse qualitative apparaît comme un préalable à tout recours à l’analyse secondaire. Lors de cette même session, Sophie Duchesne (CEVIPOF, CNRS) a décrit l’état de la recherche qualitative en sociologie politique et plus particulièrement telle qu’elle est pratiquée depuis de nombreuses années dans un laboratoire aussi important pour cette sous-discipline que le CEVIPOF. Elle a par ailleurs évoqué sa propre attitude à l’égard de l’analyse secondaire, passant d’un sentiment plutôt réservé à une défense et illustration de cette méthode. L’entretien constitue une méthode fondamentale dans l’analyse des représentations politiques, alors qu’un fonds très important de matériaux est disponible au CEVIPOF. Sophie Duchesne a estimé que les enquêtes à base d’entretiens ont proportionnellement donné lieu à peu de publications (cf. recherches de Guy Michelat et Michel Simon) et qu’il serait très intéressants de ré-analyser ces corpus qui s’avèrent encore disponibles. Elle a également mentionné l’utilité des analyses secondaires à fonction de vérification et comme moyen d’enseignement de méthodes d’analyse. Cette intervenante a discuté les pratiques liées à la collecte de l’entretien (biais liés au chercheur et à la relation avec l’interviewé, influence du contenu par les relances, etc). Elle a également apporté des argumentats en faveur de l’analyse secondaire : une attitude plus critique grâce au recul vis-à-vis des entretiens produits par d’autres chercheurs, l’effet positif du temps sur l’interprétation plus objective des entretiens et le désengagement par rapport à la fidélité à l’égard de l’interviewé. Cette première partie s’est terminée sur une communication de Dietmar Loch (UPMFPACTE-Cidsp). S’appuyant sur ses recherches en milieu populaire, ce chercheur a développé les particularités de la méthodologie qualitative et notamment de l’entretien pour aborder la population de jeunes issus de l’immigration en milieu urbain. Une réflexion méthodologique a été menée sur : les catégories du chercheur influant sur l’objet d’étude, la distance sociale entre les acteurs et les rapports culturels. L’entretien, lorsqu’il est inscrit dans une sociologie compréhensive, semble une méthode qui permet de se rapprocher de la perspective subjective de l’acteur. Cette constatation amène Dietmar Loch à interroger la pertinence de la réutilisation d’entretiens : lorsque les entretiens sont décontextualisés de leur environnement politique et social, le chercheur peut-il avoir accès au sens de l’acteur ? Après cette première partie sur la recherche qualitative, l’après-midi a été consacrée aux pratiques qui apparaissent diversifiées de l’analyse secondaire, tout en faisant un détour nécessaire par la capitalisation des données. Il s’agissait de donner un aperçu de cette méthode à travers les communications des chercheurs britanniques, allemands et français, représentant différents moments de son évolution. 61 Libby Bishop (UK Data Archive, University of Essex a questionné le bien-fondé de la dichotomie entre les analyses de type ‘primaire’ et ‘secondaire’. Elle a fondé son argumentation sur une analyse secondaire qu’elle a réalisé sur l’alimentation. Selon elle, toute analyse qu’elle soit primaire ou secondaire doit examiner exhaustivement les questions de la définition de l’objet de recherche, de l’échantillonnage, du contexte local et social de recherche, de la co-construction de l’objet de recherche, de la relation avec l’interviewé, des consentements et de la distance du chercheur pendant l’analyse des résultats. Le chercheur doit envisager tout processus de recherche comme une construction ; par ailleurs, un même matériau peut être examiné sous une multiplicité d’angles. Les deux types d’analyse, malgré leurs similarités, diffèrent surtout par la relation entre chercheur et interviewé. Enfin, Libby Bishop a traiter de la manière de réaliser les entretiens, et par conséquent le rapport aux données, dans un contexte de recherche collective. Le partage de données dans un tel cas d’étude présente beaucoup de similarités avec le processus de recherche de l’analyse secondaire. Cette méthode devrait pourtant être utilisée avec précaution, en fonction de sa compatibilité à la question de recherche. Les deux communications suivantes portaient sur les expériences allemandes d’archivage et d’analyse secondaire. Irena Medjedović a présenté les résultats d’une recherche réalisée auprès d’une large communauté scientifique utilisant les méthodes qualitatives ; les chercheurs interrogés étaient invités à s’exprimer sur l’analyse secondaire, en abordant leurs expériences, leurs attentes et leurs objections. Parmi les obstacles identifiés empêchant le développement d’une banque nationale de données qualitatives et de l’analyse secondaire il faut noter : la confidentialité, la relation avec l’interviewé, les pratiques de recherche habituelles (par exemple, le mode de retranscription), la peur de critiques. Les chercheurs interrogés, qui ont réalisé des analyses secondaires, dans leur majorité ont ré-utilisé leurs propres données.Ils font par ailleurs état de leur absence de familiarité avec cette méthode. Néanmoins, l’analyse secondaire semble s’inscrire pour la communauté scientifique allemande dans une « culture of disputation », dans la mesure où elle semble offrir un défi à l’interprétation du chercheur, ainsi que la complémentarité d’interprétations. Une telle perspective est envisageable uniquement dans la mesure où une documentation large du contexte de recherche est préalablement effectuée et où les questions de confidentialité sont résolues. Andreas Witzel (Life Course Archive, Graduate School of Social Sciences, Bremen) et Reiner Mauer (Central Archive for Empirical Social Research, Cologne) ont ensuite abordé la situation actuelle de l’archivage du qualitatif en Allemagne en évoquant le cas de leurs institutions respectives. Cette tâche est n’est pas assurée, au moins pour le moment, par une institution nationale d’archivage, elle est assurée par une aire spécialisée (LCA). L’étude auprès de la communauté des chercheurs montre que ceux-ci souhaitent la création d’un centre d’archivage. Une telle réalisation impose une réflexion fine quant aux obstacles que peuvent poser les modes de retranscription ou son absence, les problèmes d’anonymisation, le contexte de recherche insuffisant et la protection de données. Ces deux intervenants semblent s’orienter vers une institution d’archivage dont le fonctionnement rappelle celui de Qualidata : archivage ; coordination avec d’autres institutions d’archivage nationales et européennes ; accompagnement des chercheurs dans la ré-utilisation ; expertise déontologique et méthodologique ; offre de logiciels d’aide à l’analyse ; enseignement. Les deux dernières communications de cette session ont porté sur les expériences françaises. 62 Magda Dargentas (PACTE/R&D-Edf) et Dominique Le-Roux (R&D-Edf) ont évoqué le contexte de développement et les pratiques de l’analyse secondaire du qualitatif dans le groupe de recherche en sciences humaines et sociales de Edf (GRETS). La capitalisation et la ré-utilisation d’entretiens, exercées depuis 1998, constituent une expérience unique en France. Accompagnées de difficultés d’acceptation par les chercheurs interpellés dans leurs habitudes scientifiques, ces pratiques contribuent toutefois à l’interdisciplinarité et à la collaboration entre chercheurs. La récurrence des thèmes d’étude et la disponibilité d’un grand nombre d’études qualitatives ont conduit à la création de la base Verbatim et à la réalisation de plusieurs analyses secondaires (par exemple sur les thèmes : stress au travail, représentations et pratiques du confort, usages d’électricité, renovation). Comparées aux études existantes dans le monde anglo-saxon, ces analyses secondaires ont la spécificité de contenir un grand nombre d’entretiens et provenant de plusieurs recherches. L’attitude méthodologique adoptée est la suivante : respect des principes de la recherche qualitative ; collaboration systématique avec les autres chercheurs et souvent ‘experts’ des thèmes d’étude ; portée exploratoire ; démarche réflexive et holiste ; usage de plusieurs logiciels [CAQDAS (Atlas-Ti) Vs école française d’analyse du discours (Alceste, Tropes)]. Les intervenantes ont aussi abordé les questions juridiques et déontologiques. Elles ont terminé leur communication sur le projet CAPAS et les prospectives de cette expérience à Edf dans le monde académique français. Dominique Beynier (Université de Caen, LASMAS) a présenté son expérience de réutilisation du qualitatif en partant de deux exemples de recherche. Ce chercheur a une grande expérience du traitement des données qualitatives et quantitatives ; il souligne la complémentarité de ces deux démarches. Travaillant avec des données médicales, il dispose de très nombreux travaux d’étudiants et de doctorants ainsi que des entretiens de ses propres études. Ces entretiens sont minutieusement documentatés notamment quant à leur modalités de réalisation et à leur contexte. Pour lui le sens d’un corpus n’est pas épuisé dès la première analyse (cf. choix théoriques et outils utilisés), une nouvelle analyse s’avère être une pratique fréquente pour ce chercheur soit pour les besoins de recherche ou d’enseignement. Identifier cette pratique comme de l‘analyse secondaire’ revient pour lui à questionner les usages de recherche. La première recherche citée en exemple porte sur l’allaitement. La ré-analyse de16 entretiens semi-directifs porte sur une autre problématique (analyse des réseaux sociaux) que l’approche initiale (représentations de la mère), d’où les limites soulignées de cette nouvelle analyse. Le second exemple porte sur une enquête de l’INSEE (enquête emploi) et pourrait être utile pour l’analyse des questions ouvertes. Plus précisément, il s’agissait de redéfinir les intitulés d’emploi pour les intervenants sociaux, par le biais d’une analyse fine du corpus de déclarations. Ce travail a abouti à une proposition des libellés de dénombrement des professions de l’intervention sociale. L’outillage mis en place associe le codage d’une méthode qualitative à une analyse plus quantitative grâce à SAS. La journée du 4 novembre a débuté avec une première session consacrée aux questions éthiques et juridiques. Arja Kuula (Finnish Social Science Data Archive) a traité des questions éthiques qui constituent une limité au développement de l’archivage des données qualitatives. Plusieurs questions sont abordées : le caractère émotionnel et personnel de la relation entre le chercheur et l’interviewé ; la représentation par les chercheurs d‘interviewés vulnérables voire ignorants ; la peur de leur porter préjudice par une utilisation détournée de leurs dires ; l’impossibilité d’anonymiser entièrement les données, le risque permanent d’identifier les acteurs ; l’idée que le chercheur doit être le seul détenteur des données qu’il a recueillies…. Arja Kuula fait quelques propositions : d’abord, il faut questionner la perception de l’éthique 63 par les interviewés. Elle a contacté 169 personnes ayant participé à une recherche afin de leur demander leur autorisation de ré-utilisation du matériel dont ils étaient la source : seulement 4 parmi elles n’ont pas accepté, tandis que 16 personnes n’ont pas réagi du tout. le souhait de faire avancer la science et de maximiser l’usage de leurs dires ont constitué les principales raisons de consentement des participants. Arja Kuula estime que le chercheur qui aimerait réutiliser des données doiventanonymiser leurs données et recontacter les participants pour obtenir leur accord. De même, elle pense que la relation développée pendant un entretien doit être envisagée uniquement comme une relation définie par les objectifs de recherche. Enfin, la question de l’anonymisation se pose pour la publication d’une étude et non pendant le processus d’analyse. Une ré-utilisation d’entretiens permettrait d’approfondir les processus régissant l’interaction entre les deux types d’acteurs. Anne-Marie Benoît (PACTE-Cidsp) a traité de la collecte des données, le stockage et l’utilisation secondaire d’un point de vue juridique en se focalisant sur le contexte académique français. Comment en effet protéger les libertés fondamentales de l’individu tout en optimisant l’utilisation des matériaux qualitatifs ? Les textes juridiques mettent en avant les principes de finalité et de proportionnalité concernant l’usage des données collectées. Deux catégories de données sont par ailleurs identifiées : les données à caractère personnel nominatives et les données sensibles requérant l’autorisation de la CNIL et le consentement éclairé du répondant (écrit, oral). Quant aux entretiens réalisés dans le passé et dépourvus de consentement, un problème juridique se pose : il s’agit de retrouver l’auteur (l’interviewé) ou « de basculer » sur la législation des archives. Une autre question est discutée par Anne-Marie Benoît, celle de l’obligation du dépôt. Une telle éventualité pose le problème de l’appropriation par les chercheurs des entretiens : ce sont les interviewés et non pas les chercheurs qui sont les propriétaires des entretiens. Quelques solutions sont proposées, entre autres : faire signer au répondant une clause de cession des droits d’exploitation des entretiens ; céder les entretiens avec rémunération. Enfin, l’intervenante propose l’élaboration d’un guide de bonnes pratiques par la communauté académique et en accord avec la CNIL. La matinée a pris fin avec une session sur les méthodes et les outils d’assistance à l’analyse secondaire. Jacques Jenny (Iresco, Arcati) a interrogé la production du discours et son analyse. S’inspirant de la sociolinguistique énonciative et pragmatique, il a défini le discours comme un système de co-énonciation et de représentations en relation avec des valeurs, des pratiques sociales et discursives. Ces ‘instances de pratiques socio-discursives’ sont dépendantes des modalités de fonctionnement des groupes sociaux (organisés Vs informels) et de leur taille (micro / méso / macro). Ce chercheur a également examiné le sens régissant toute expression discursive. Deux dimensions constitutives du sens sont identifiées : l’axe praxéo-idéologique et l’axe onto-axiologique. Le sens émerge dans ses dimensions : connaissance et perception de la situation, évaluation de la situation, système de valeurs…. Ces constituantes sont censées interférer dans le discours et provoquer des ‘effets de sens’. Ensuite, Jacques Jenny a insisté sur la temporalité du discours. Les aspects qui précèdent imposent une analyse du discours qui tient compte de la complexité des processus discursifs. De même, ils interrogent les implicites des méthodes d’analyse, les pratiques d’analyses lexicométriques, ainsi que la considération insuffisante de la dynamique des registres de discours. Nigel Fielding (University of Surrey) a ensuite pris la parole pour traiter de la question des outils informatiques qui contribuent à l’analyse secondaire du qualitatif. Il a commencé sa communication en rappelant les typologies existantes. Il a également abordé les spécificités 64 de la recherche qualitative (entre autres : réflexivité, difficultés pratiques, richesse de données, familiarisation avec le terrain, présence de facteurs externes et internes influant sur le phénomène étudié). L’analyse secondaire selon ce chercheur est une pratique particulièrement intéressante ; de même, elle présente l’avantage d’utiliser au mieux les données issues de personnes auxquelles l’accès n’est pas facile. Les obstacles ayant empêché le développement de cette méthode sont d’ordre pratique (archivage) et épistémologique. En ce qui concerne notamment les obstacles épistémologiques, ils sont dus à une perception erronée du processus d’analyse des données primaires. Nigel Fielding a suggéré que l’analyse secondaire peut être facilitée par le biais des CAQDAS (par exemple, NVivo). Ces outils permettent au chercheur de prendre une distance par rapport aux données ; toutefois, il faudrait être vigilant quant aux perspectives analytiques de ces outils et à leurs implicites. Enfin, ce chercheur a évoqué quelques perspectives du développement de l’analyse secondaire et de l’archivage : cyberrecherche, méta-analyse d’études qualitatives, pratiques de collaborations et de dialogues entre chercheurs relativement aux résultats de recherches, cumulativité du savoir, archivages de mémoires et dans le cas de l’histoire. Il a suggéré le besoin pour les sciences sociales d’aller au-delà des inquiétudes épistémologiques. Sylvaine Nugier (R&D-Edf) a présenté un projet en cours de construction d’outils logiciels procédant à la structuration de données (TROIE) et au requêtage ainsi qu’à la capitalisation d’analyses secondaires (ACHILLES). Il s’agit d’un projet développé au sein de EDF et qui porte sur la connaissance du client Edf à partir de plusieurs types de matériaux : entretiens, questionnaires, sites internet, forums de discussion, bases de données, etc. On entre dans le cas de la capitalisation et de l’analyse secondaire. Ce projet pose des problèmes d’ordre technologique et méthodologique. Au niveau technologique, il y a absence d’outils permettant la capitalisation de données si hétérogènes. C’est l’objectif de l’outil TROIE : ce logiciel est censé transformer des données de formats différents en un format pivot incluant des métadonnées. Ensuite, sur le plan méthodologique, la ré-utilisation de ces données impose des précautions quant au contexte initial de recherche. C’est la mission de l’outil ACHILLES qui permet de faire une requête pour une analyse secondaire, d’extraire les données et les métadonnées, et de capitaliser les nouvelles analyses. Ces outils doivent faciliter le travail collaboratif entre chercheurs. Les Journées se sont terminées par une table ronde sur les perspectives de l’analyse secondaire et une réflexions sur les questions épistémologiques. Les discussions ont roulé sur les questions suivantes : les difficultés pratiques et méthodologiques liées tant à l’analyse secondaire qu’à l’archivage du qualitatif, les prospectives de l’analyse secondaire dans le domaine de la psychologie sociale, la situation académique française. Voici quelques échos de ces débats : Louise Corti et Libby Bishop (UK Data Archive, University of Essex) ont attiré notre attention sur le besoin de développer l’archivage pour pouvoir faire évoluer à long terme l’usage de l’analyse secondaire du qualitatif. Dominique Joye (SIDOS) a ensuite présenté les enjeux de l’archivage du qualitatif. La culture de ré-utilisation impose l’exigence de transparence et oriente la recherche vers l’étude du changement social. La question méthodologique qui se pose alors concerne le contexte initial et sa connaissance en vue de la compréhension ultérieure des données. La création d’un centre d’archivage implique des difficultés d’ordre pratique relatives à l’infra-structure nécessaire pour qu’un tel centre puisse jouer son rôle de relais entre recherche, enseignement, archives, place d’échanges, lieu de formations et de discussions méthodologiques. Malgré la spécificité 65 des données qualitatives en termes de matériel ou d’approches d’analyses, Dominique Joye a insisté sur le nécessité d’arrêter d’opposer le qualitatif au quantitatif ; il a notamment souligné la similarité des deux types de données quant à leur contexte de production. Ensuite, Béatrice Madiot (Université de Picardie - Jules Verne) a questionné la pertinence de l’analyse secondaire du qualitatif pour la Psychologie Sociale. L’analyse secondaire pourrait orienter cette discipline vers la reconquête de la dimension temporelle. En effet, au sein de la psychologie sociale, l’étude des phénomènes dans leur dimension temporelle, diachronique, ou longitudinale est quasiment inexistante. De même, on constate la faible présence de travaux qualitatifs, en raison de leur coût et de la domination du courant expérimental. Béatrice Madiot a valorisé l’étude - dans la durée et dans la dynamique - de la pensée sociale en train de se construire et la pertinence de la théorie des représentations sociales. Elle a cité une recherche sur les représentations sociales du corps (Jodelet, Ohana, 1982) qui rappelle la problématique de l’analyse secondaire : il s’agit de l’analyse à 15 ans d’intervalle d’entretiens réalisés par plusieurs chercheurs. Enfin, pour l’intervenante, l’analyse secondaire contribue à la cumulativité du savoir et offre l’avantage de faire varier les cadres d’analyse d’un même matériel par le biais de différents outils méthodologiques. La dernière intervention de Mathieu Brugidou, Magda Dargentas (PACTE/R&D-Edf) et Céline Belot (PACTE-Cidsp). a tenté une première synthèse des questions abordées pendant les Journées et une réflexion sur les perspectives de l’analyse secondaire dans le contexte académique français. Après un bref historique et une typologie des pratiques de l’analyse secondaire les intervenants se sont interrogées sur les raisons de l’‘appropriation par les chercheurs britanniques de cette méthode. Ils sont revenus sur le statut des données et des hypothèses interprétatives, sur la pertinence de l’analyse secondaire en fonction des objectifs de recherche et des cadres épistémologiques adoptés, sur la faisabilité de cette méthode et enfin sur les questionsd‘éthiques. L’analyse secondaire s’avère incontestablement une pratique collaborative mais celle-ci impose au préalable une réflexion élargie pourr les diverses disciplines des sciences humaines et sociales.. La capitalisation et l’analyse secondaire des entretiens constituent probablement un bon moyen de préserver la mémoire de la recherche mais aussi de forger l’identité d’équipes nouvelles et pluridisciplinaire qu’illustre la création de l’UMR PACTE. Cette communication a été l’occasion de discuter avec les autres chercheurs de la table ronde et avec le public, notamment de l’existence d’un centre national d’archivage du qualitatif, conditionnant pour certains le développement de l’analyse secondaire. Les chercheurs étrangers ont exprimé leur étonnement devant les particularités françaises. Les rapports de deux laboratoires relatifs à la faisabilité d’un tel centre ont été cités (Dubar, Reinert, 2001 ; Cribier, Feller, 2003). D’autres voies plus modestes ont préconisées, passant, à l’intérieur de laboratoire comme PACTE (à l’image de l’expérience du GRETS d’EDF R&D) par la mise en place d’outils collaboratifs (logiciels comme des CAQDAS, procédures d’archivages, formation notamment pour les doctorants) et, pour la communauté académique, par la création d’un réseau de laboratoire public et d’entreprise intéressés par ces questions. Cette réflexion devrait par exemple aboutir à l’établissement d’un guide de bonnes pratiques. Le discours de clôture des Journées a été émis par Olivier Ihl, directeur de l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble. Ce conférencier a souligné les défis institutionnels et intellectuels de l’analyse secondaire et de la capitalisation du qualitatif. Il a souhaité la consolidation de réseaux de recherche autour de ces questions. 66 Les Journées Internationales l’Analyse Secondaire en Recherche Qualitative, Utopies ou Perspectives Nouvelles ont contribué à l’introduction de ce nouveau domaine de recherche et des problématiques associées au sein de l’espace de recherche français. Le groupe CAPAS souhaite continuer ses activités et élargir son cercle de réflexion. Un ouvrage collectif est en cours de publication, tandis que des informations supplémentaires concernant les Journées et leurs contenus sont disponibles sur internet69. En conclusion, nous estimons que cette manifestation scientifique a eu lieu dans un contexte qui semble encourager l’émergence de ce courant de recherche. On peut rappeler à cet égard les deux rapports évaluant les besoins pour les sciences humaines et sociales d’une banque de données qualitatives déjà cités. Signalons également que plusieurs colloques et Journées – organisés par diverses disciplines – se sont déroulés sur des questions convergentes à celles qui ont été étudiées lors des Journées à Grenoble70. Nous ne pouvons qu’espérer le maintien d’une telle activité scientifique ainsi que la consolidation d’un réseau de chercheurs souhaitant approfondir les questions lies à la recherche qualitative, la capitalisation et l’analyse secondaire du qualitatif, et contribuer ainsi à une culture scientifique de partage et de collaboration. RÉFÉRENCES Bergman, M.M., Eberle, T.S. (Eds) (2005). Qualitative Inquiry: Research, Archiving, and Reuse. FQS (Forum Qualitative Sozialforschung/ Forum : Qualitative Social Research). Volume 6, No 2. http://www.qualitativeresearch.net/fqs/fqs-e/inhalt2-05-e.htm Corti, L., Kluge, S., Mruck, K., Opitz, D. (Eds) (2000). Text, Archive, Re-analysis. FQS (Forum Qualitative Sozialforschung/ Forum : Qualitative Social Research). Volume 1, No 3. http://www.qualitativeresearch.net/fqs/fqs-e/inhalt3-00-e.htm Corti, L., Witzel, A., Bishop, L. (Eds) (2005). Secondary Analysis of Qualitative Data. FQS (Forum Qualitative Sozialforschung/ Forum : Qualitative Social Research). Volume 6, No 1. http://www.qualitative-research.net/fqs/fqs-e/inhalt1-05-e.htm Cribier, F., Feller, E. (2003). Projet de conservation des données qualitatives des sciences sociales recueillies en France auprès des la ‘société civile’. CNRS-EHESS, LASMAS, UMR 8097. (Rapport de recherche remis au Ministère de la recherche en avril 2003. Mise en ligne été 2005.) http://www.iresco.fr/labos/lasmas/rapport/Rapdonneesqualita.pdf Dargentas, M., Le Roux, D. (2005). Potentials and Limits of Secondary Analysis in a Specific Applied Context: The Case of EDF—Verbatim. Forum: Qualitative Social Research, 6(1). http://www.qualitativeresearch.net/fqs-texte/1-05/05-1-40-e.htm. Dubar, C., Reinert, M. (2001). Faisabilité d’une banque de données d’entretiens biographiques en sciences sociales : Réflexions à partir du rapport remis au CNRS-SHS sur l’archivage et la capitalisation des entretiens en sciences sociales. Communication à la Journée d’Etudes du CIDSP sur Les Nouvelles Méthodes d’Analyse des Entretiens, Grenoble, 9 Mars 2001, MSH-Alpes. http://www.msh-alpes.prd.fr/Actualites/Analyseentretiens.htm Jodelet, D., Ohana, J. (1982). Représentations sociales du corps et groupes sociaux. Paris : EHESS. 69 Voir le site : http://www.pacte.cnrs.fr/Productions/Seminaires/Capas/05-11-3et4.htm Nous pouvons nous référer aux manifestations suivantes : -Journée d’Etudes du CIDSP Les Nouvelles Méthodes d’Analyse des Entretiens (9 Mars 2001). Grenoble, MSHAlpes. http://www.msh-alpes.prd.fr/Actualites/Analyseentretiens.htm -Réunions d’ARCATI (13 Mars 2003, 27 Janvier 2006). -Colloque Sources et Ressources pour les Sciences Sociales (9-11 Décembre 2004). Paris, EHESS. http://www.ethno-web.com/evenements.php?action=show&numeve=5 -Colloque Archives des sociétés en mouvement. Regards croisés : archivistes et chercheurs (29 Septembre-1 Octobre 2005). Dijon, Université de Bourgogne. http://www.u-bourgogne.fr/colloquearchives2005 70 67 Laborier, P., Bongrand, P. (2004). L’entretien dans l’analyse des politiques publiques, un impensé méthodologique ? Revue Française de Science Politique, 55 (1), 73-111. Le-Roux, D., Vidal, J. (2000). Verbatim : Une expérience de capitalisation d’entretiens qualitatifs. Bulletin de Méthodologie Sociologique, no 65, p.58-67. Thompson, P. (2000). Re-using Qualitative Research Data: a Personal Account. Forum: Qualitative Social Research, 1(3). http://www.qualitative-research.net/fqs-texte/3-00/300thompson-e.htm 68 2-Interprétation sociologiques et analyses textuelles informatisées Interprétations sociologiques et analyses textuelles informatisées ARCATI : retour sur cinq années d’expérience Journée d’étude du vendredi 27 janvier 2006 Site Pouchet (ex-Iresco), 59-61 rue Pouchet, 75 017 Paris. Depuis cinq ans, le réseau ARCATI (Atelier recherche coopératif sur l’analyse textuelle informatisée) organise des séminaires bi-mensuels et bénéficie d’un intérêt assidu de nombreux chercheurs issus de différents horizons disciplinaires. Pour la première fois depuis sa création, le réseau a prévu une journée d’étude qui se tiendra le vendredi 27 janvier 2006 sur le site Pouchet, 59-61 rue Pouchet 75017 Paris (Métro Guy Moquet ou Brochant). Ce moment de synthèse sera placée sous le signe d’un bilan de fonctionnement et d’une mise en perspective théorique, méthodologique et épistémologique sur les usages des logiciels d’analyse de discours en sciences sociales. L’entrée est libre sous réserve d’une inscription ou d’une confirmation de présence (pour les personnes déjà enregistrées) avant le 20 décembre 2005 par courriel à [email protected]. Programme 9h00 Accueil des participants Matinée sous la présidence de Pascal Marchand (LERASS, Université Toulouse III). 9h15-10h00 ARCATI : histoire, fonctionnement, trajectoires Témoignage de Jacques Jenny, (ancien chercheur CNRS, membre fondateur ARCATI) Mathieu Brugidou, (GRETS-EDF, CIDSP-PACTE, comité de pilotage ARCATI) : Compétences et statuts de la participation au réseau ARCATI 10H00-10h30 Christophe Lejeune (ULG-EHESS) : Panorama de l’offre logicielle existante 10h30-12h00 De quelques enjeux autour de l’analyse textuelle informatisée Claire Brossaud (GRASS-CNRS, coordinatrice du réseau ARCATI), Bernard Reber, CERSES-CNRS, comité de pilotage d’ARCATI) : Analyse textuelle informatisée et Technologies de l’information et de la communication : parcours de recherche. En prenant appui sur leurs parcours de recherche, Claire Brossaud et Bernard Reber se proposent de définir un certain nombre d’enjeux qui les ont conduit vers les Technologies de l’Information et de la Communication et dans ce champ-là, vers les logiciels d’analyse textuelle informatisée. Ils motiveront leurs orientations vers ces objets en questionnant, sans pour autant s’illusionner sur le déterminisme technique, certaines de leurs caractéristiques : les TIC (Technologies de l’information et de la communication) et par extension les logiciels d’analyses textuelles informatisées permettent-elle de « mieux » argumenter, de favoriser la réflexivité, de dire l’histoire ou encore de se repérer dans un monde complexe et réticulaire ? Selon les tâches attendus par les logiciels d’analyse textuelle qu’ils ont abordés dans leurs travaux, ils nous invitent à réfléchir à leurs usages en sociologie et en philosophie morale. 69 Marc Glady (Université Paris Dauphine, comité de pilotage ARCATI), Jacques Jenny : Paradigme des registres de sens pour l’analyse (psycho)sociologique du discours. Dans la continuité de l’inventaire critique des différents logiciels d’analyse textuelle informatisée (Jenny, 1997), il s’agira de dégager ici les implicites de ces logiciels quant à une théorie du langage et à l’analyse de la construction de sens. On sera amenés à revenir sur des questions de sociologie générale pour proposer quelques « dimensions constitutives fondamentales », quasiment incontournables lorsque l’on veut pratiquer une analyse sociologique ou psycho-sociologique de toute énonciation par traitement automatisé de matériaux discursifs. La mise en œuvre de ces dimensions d’analyse et leur traduction sous forme de programme de repérage (marqueurs) peut faire l’objet d’un nouveau cahier des charges à finaliser éventuellement avec des concepteurs de logiciels et avec des socio-linguistes. Mathieu Brugidou, Karl Van Meter (LASMAS-CNRS, comité de pilotage ARCATI) : Questions d’épistémologie et de méthodes posées par le recours à l’analyse textuelle informatisée dans la recherche sociologique. Au cours des cinq années de séminaires, le paysage méthodologique d’ARCATI s’est révélé plus contrasté que prévu, tant les paradigmes, les champs disciplinaires et les cadres théoriques – d’ailleurs inégalement explicités soutenant ces méthodes sont divers. Renonçant à optimiser des parcours méthodologiques si variés, on a tout au plus repéré quelques concentrations remarquables. Ainsi celle qui oppose des logiciels marqués par une épistémologie nomologique, « explicative », s’attachant à décrire les textes indirectement ou directement à travers des variables et cherchant derrière les « données textuelles » , le format des « données numériques », aux logiciels inspirés par une épistémologie herméneutique, « compréhensive », décrivant plus volontiers à partir des textes des compétences indigènes – qu’elles soient argumentatives ou narratives – et mettant en évidence des « grammaires », des schèmes. En prenant deux exemples, les CAQDAS (Computer-Asssited Qualitative Data Analysis Software) et les systèmes d’analyse tels qu’Alceste et Trideux, on constatera combien ces deux formes polaires affectent les logiciels eux-mêmes ainsi que le travail du chercheur, qui détourne souvent les fonctionnalités de leurs objectifs initiaux. Que des évolutions, trajectoires de méthodes et projets de recherche soient possibles montrent assez l’existence, par delà la pluralité des langages de la sociologie, d’un domaine de cohérence ou comme dirait JeanMichel Berthelot de « communauté de langage » qui favorise des « interlangages ». Débat avec la salle 12h00 Déjeuner 13h30 Pratiques de la sociologie et analyses textuelles informatisées Après-midi sous la présidence de Claude Dubar (Printemps, Université de Saint-Quentin en Yvelines) 13h30-14H30 Construire un objet sociologique avec l’analyse de discours Mathilde de Saint-Léger, Bill Turner (LIMSI-CNRS) : Du concept de « traduction » à la technique des mots-associés. La sociologie des contenus scientifiques et techniques a eu beaucoup de mal à s’imposer au début des années 70. M. Calon et B. Latour ont forgé le concept de « traduction » en vue de décrire un monde social composé d’entités qui s’entre-définissent mutuellement et en permanence. Dans cet univers où seules comptent associations et dissociations, la traduction rassemble tous les mécanismes par lesquels un acteur, quel qu’il soit, identifie d’autres acteurs ou éléments et les met en relation les uns avec les autres. Le problème méthodologique que pose une sociologie des contenus scientifiques et techniques se résume dans cette vision de la traduction : comment donner à voir la fluctuation des entités (ou forces) qui participent à l’élaboration des connaissances et des savoir-faire ? Ou plus simplement, comment décrire l'état d'un système productif et suivre son évolution dans le temps ? La technique des mots-associés (co-word analysis) est née de cette interrogation et du choix que nous avons fait d'explorer les mécanismes de traduction moyennant l'étude des écrits scientifiques. 70 Patrick Trabal (EHESS-GSPR, Université Paris X-Nanterre) : Des outils informatiques au service du travail sociologique. Dans cette communication, nous défendrons l’idée selon laquelle la tension entre des préoccupations sociologiques et le développement de méthodes et d’outils informatisés peut être surmontée. Pour cela, nous partirons de quelques questionnements au cœur de notre travail de sociologue, pour montrer comment, avec la série de logiciels Prospéro-Marlowe-Chéloné, il est possible de faire des expériences sur les textes et ainsi progresser dans le raisonnement. Il s’agira donc de décrire les nombreux passages entre des réflexions théoriques, des questionnement sur un matériau donné et des considérations techniques. Ce parcours nous conduira à préciser le type d’épistémologie dans lequel s’inscrivent nos travaux ainsi que notre conception du travail collectif au fondement de nos projets. 14H30-15h40 Faire un travail de formalisation sociologique avec l’analyse textuelle informatisée François Rastier (Directeur de recherche, CRIM-Inalco, TGE-Adonis) : Décrire normes et valeurs par la sémantique de corpus ? Les deux linguistiques, celle de la langue et celle de la parole restent unies par l’espace des normes, dont l’étude peut permettre de revenir au problème du rapport entre idéologies et « formations discursives », en le posant au sein de la linguistique. Un domaine de recherche des plus prometteurs semble celui de la doxa, car l’accès à de grands corpus numériques permet d’étudier la stéréotypie textuelle. Entre l’espace normatif des règles et le désordre apparent des usages, l’espace des normes s’étend ainsi de la généralité de la doxa jusqu’à la particularité du paradoxe. Carme Alemany (sociologue, directrice de recherche du CEDIS (Centre d'Etudes Femmes et Société), conceptrice du logiciel Qualita) : L'analyse de contenu classique et les limites des logiciels existants. On examinera dans un premier temps deux difficultés rencontrées dans certaines recherches sociologiques assistées par ordinateur : 1. croiser des variables lorsqu'on découvre que les réponses varient en fonction de certaines variables non prévues d'avance. 2. analyser et donner du sens aux comportements méta-langagiers : rires, pleurs, tremblements de voix, doutes et silences exprimés dans les entretiens. Puis nous cernerons l’apport spécifique du logiciel Qualita par rapport aux entretiens de groupe et groupes de discussion dans ce contexte en insistant notamment sur la possibilité offerte par cet outil de distinguer les réponses de chaque personne. Valérie Beaudouin (France Télécom R&D) : Apports des traits contextuels (linguistiques et sociologiques) pour consolider l'analyse textuelle. Les méthodes de statistique textuelle permettent de comparer des unités textuelles de taille et de nature variable en fonction de leurs occurrences (toutes ou certaines, brutes ou réduites, simples ou complexes...). Pour orienter, affiner et consolider les traitements de statistique textuelle, il nous paraît essentiel d'introduire trois dimensions : la prise en compte des conditions de production du texte, le croisement avec d'autres indicateurs linguistiques (syntaxiques, sémantiques, voire métriques) et enfin la capacité à construire et à comparer à un niveau plus macro des profils de textes en fonction des champs lexico-sémantiques. En balayant quelques expériences sur des corpus variés, nous montrerons comment un ancrage contextuel de l'analyse textuelle permet de construire des interprétations qui résistent mieux. Débat avec la salle 15H40-16H00 Pause 16H00-17H00 Le statut de l’interprétation dans l’analyse textuelle informatisée Eddie Soulier (chercheur en informatique, Tech-CICO, Université Technologiques de Troyes) : L’analyse informatisée des narrations professionnelles dans la perspective d’une sociologie de la connaissance. HyperStoria, OntoStoria, Sum’itUp et Memor Expert est une suite logiciels destinée à l'étude des différentes facettes du fonctionnement de la narrativité dans les interactions sociales de travail. La question de la signification 71 est ainsi mise en rapport avec l'interaction et plus généralement avec les processus cognitifs sociaux. La conception de ces outils d'étude s'appuie largement sur l'ingénierie des connaissances puisque l'un des objectifs est d'assister les processus de création, partage et réutilisation de connaissances narratives dans le cadre d’interventions en milieu professionnel. Magda Dargentas (projet CAPAS, CIDSP, EDF R&D), Dominique Le Roux (ingénieurchercheur au GRETS-EDF R&D pôle « sciences humaines et sociales ») : Problèmes méthodologiques de la capitalisation et de l’analyse secondaire d’entretiens sociologiques avec des CAQDAS. Le pôle « Sciences humaines et sociales » de la R&D d’EDF (GRETS) s’est doté voici quelques années d’un outil de capitalisation des entretiens sociologiques effectués avec des CAQDAS dans le cadre des études qui y sont menées et qui portent sur des champs disciplinaires et des objets d’étude divers (sociologie des usages, analyses de la controverse, sociologie des organisations…). Cette expérience a été menée à l’instar du dispositif britannique d’archivage des données d’entretiens sociologiques mis en place dans le cadre du projet Qualidata. Au cours de ces années d’expérience du projet Verbatim au GRETS, il a été acquis une pratique d’analyse secondaire de ces entretiens grâce au développement d’une collaboration entre chercheurs, spécialistes de l’objet, analystes et spécialistes de la méthodologie et des outils d’analyse. Nous présenterons ici les points essentiels des acquis méthodologiques que nous pouvons tirer de notre pratique de la capitalisation et de la ré-utilisation des entretiens. Débat avec la salle 17h00 Claude Dubar : Clôture de la journée 17h15 Pot de clôture Inscription ou confirmation de présence obligatoire avant le 20 décembre 2005 par courriel à [email protected] Cette journée reçoit le soutien du GRETS-EDF, du LASMAS, du Site Pouchet et de la revue « Langage et société » 72 3- membre du comité scientifique du colloque International sur le Débat Public "La situation délibérative dans le débat public" Tours, 14-16 mai 2003 CEDP Axes du colloque Le débat public est à la fois nécessaire pour nos démocraties et généralement inefficace dans ses mises en œuvre : les débats télévisés n’ont d’autres finalités que le spectacle lui-même, les débats politiques sont détournés en opérations de communication, et les forums se contentent de juxtaposer des opinions. De fait, l’efficacité du débat public réside dans la légitimité qu’il confère au citoyen et dans l’impact de la parole de ce dernier sur les processus décisionnels. En pratique, cela ne peut se réaliser qu’avec un nombre réduit de participants dans le cadre d’un processus délibératif. Se pose ainsi le besoin d’une réflexion sur : La situation délibérative dans le débat public. Motivée par les questions de la vulgarisation scientifique, notre équipe s’est positionnée sur une problématique de l’usage qui renverse le schéma traditionnel de la communication : d’une démarche d’interrogation sur le public, elle est passée à une position théorique qui interroge le questionnement de ce même public. De nouvelles méthodes de débat public sont recherchées, ce dernier apparaît comme la technique générique de la production d’une « efficacité sociale » des usages de la science. À partir de trois acteurs qui, dans l’interrelation nouvelle proposée, sont légitimés (le public, le politique, l’expert), le laboratoire s’est attaché à mettre au point un protocole de « Rencontres Délibératives » visant à rendre le grand public plus apte au débat sur la science. Le CEDP a décliné le modèle « Rencontres Délibératives » dans des champs diversifiés. A partir de cet expérimental, un répertoire des méthodologies employées en fonction du champ social considéré a été constitué. Nous avons alors abordé le problème de la propagation des savoirs et de leur appropriation par le public. Se pose aujourd’hui la question du débat public comme « propédeutique sociale » permettant aux publics le passage de la participation à la délibération.Ce questionnement appelle, de nos jours, une approche pluridisciplinaire. Les travaux du colloque explorent les points suivants : Processus délibératifs : genèse, épistémologie.L’intérêt est porté ici sur l’histoire et la philosophie du délibératif. Les approches culturelles, scientifiques, politiques, sociologiques, pédagogiques et communicationnelles sont privilégiées dans cette réflexion. Modèles de communication et émergence de la facilitation. Aspects théoriques, pratiques, expérimentaux des modèles délibératifs (éthique, ontologie, postures cognitives et communicationnelles, rencontres délibératives, etc.). La facilitation comprise comme condition nécessaire du délibératif. Place de la délibération dans le débat public contemporain. L’actualité des processus délibératifs dans le débat public : notions de transparence, de public, de démocratie de proximité, ... 73 Il s’agit de déterminer comment le débat public peut s’articuler sur la décision politique (démocratique), comment il peut favoriser une communication efficace et comment il peut aider au renforcement du lien social. Question de la propagation des modèles délibératifs. L’impact des processus délibératifs dans l’évolution des procédures démocratiques. Veille et dissémination. Les constantes et les variables. COMITÉ SCIENTIFIQUE* (Review Committee) Loïc BLONDIAUX, CRAPS / IEP, Université de Lille (France) Mathieu BRUGIDOU, EDF - R&D GRETS (France) Bernard CASTAGNA, Centre d’Étude du Débat Public - Université de Tours (France) Annie GUEDEZ, Université de Poitiers (France) Michel HASTINGS, Institut d’Études Politiques de Lille (France) Yves JEANNERET, CELSA - Université Paris IV (France) Peter KEMP, Center of Ethics and Law, University of Copenhagen (Danemark) Etienne KLEIN, CEA, Orsay (France) Arnaud MERCIER, Université de Nice - Sophia Antipolis (France) Jean MOUCHON, Université Paris X (France) Jean-Paul NATALI, Cité des Sciences de l’Industrie - Paris La Villette (France) Michael D. PAYNE, Bucknell University - Lewisburg, PA (USA) Jean-Philippe ROY, Centre d’Étude du Débat Public - Université de Tours (France) Jean-François TETU, Université Lyon 2 (France) 74 ANNEXE 5 : Programme des enseignements 1-Techniques d’analyse du discours Science Po Paris Master de recherche PROGRAMME DES SEANCES 2005/2006 PREMIERE PARTIE – ANALYSE DU DISCOURS Séance 1 Introduction : objectifs, définition de l’objet et présentation du programme 1-1 Objectifs : - Quelques éléments théoriques sur les usages de l’analyse de discours en sciences sociales. 1-2 Programme des séances et repères bibliographiques. 1-3 –Un exemple d’analyse de contenu : analyse de l’image de F. Mitterrand I - ANALYSE DE CONTENU : DES QUESTIONS DE SOCIOLOGUES ? Séance 2 Discours de campagne 2-1 L’analyse de contenu : principales notions (Exemple de l’analyse de contenu d’une communication gouvernementale dans les médias) 2-2 Un exemple d’analyse de contenu lors de l’élection présidentielle de 1988 (M. Brugidou, L’élection Présidentielle : discours et enjeux politiques, Paris L’Harmattan, 1995) La mise sur agenda 3-1 Analyse de contenu et agenda3-2 « L’analyse de contenu appliquée aux grands corpus d’information médiatique : pour une méthode face à l’abondance des données. » à partir d’un texte Philippe Blanchard 3-3 Cas pratique sur une controverse d’aménagement II - ANALYSE DU DISCOURS : DES QUESTIONS DE LINGUISTES ? LE REPERAGE DE LA SITUATION D’ENONCIATION ET LA DIMENSION PRAGMATIQUE DES DISCOURS. Les récits : discours de « professionnels » vs discours de citoyens « ordinaires » 4-1 Méthode : l’analyse structurale du récit, quelques notions 4-2 Un récit politique : exemple de l’analyse du discours de J.-M Le Pen. L’argumentation : controverses, forums et débats publics. 5-1 Méthode : l’argumentation, quelques notions. 5-2 Des exemples d’analyse de l’argumentation à travers l’analyse d’une question ouverte sur le nucléaire, la justification de la participation électorale et d’un site web sur le développement durable. III - L’ANALYSE DES DONNEES TEXTUELLES ET LES LOGICIELS : DES QUESTIONS DE STATISTICIENS ET D’INFORMATICIENS ? LES APPROCHES QUALITATIVES ET QUANTITATIVES ASSISTEES PAR ORDINATEUR. Identifier les acteurs et leurs « messages » Séance 3 Séance 4 Séance 5 Séance 6 6-1 Analyse des données textuelles et CAQDAS (Computer Assisted Qualitative Data Analysis System), une présentation des logiciels. Avec la participation de Dominique Le Roux (sous réserve) 6-2 La question de l’interprétation : la combinaison des inférences sociologiques, linguistiques et statistiques. CONCLUSION DU MODULE ANALYSE DU DISCOURS 75 Séance 7 La sémiologie : une approche des textes et des images. Une présentation par Ferenc Fodor (sémiologue). 76 2-: Discours et représentations politiques Paris I- Département de science politique PROGRAMME DES SEANCES 2005/2006 SEMAINE 1ère séance mercredi 5 Octobre 2005 THEMES DES SEANCES Introduction : objectifs, définition de l’objet et présentation du programme 1-4 Objectifs : - Analyser les modalités de la construction de la réprésentation politique à travers la mise en discours des enjeux et des identités - Se familiariser avec des méthodes d’analyse de contenu et de discours. 1-5 Définition de l’objet : la construction des problèmes et la représentation politique, une triple redéfinition du discours politique - la dimension communicationnelle du discours politique - la prééminence de la controverse au détriment du statut du locuteur - une « méthode » au service de la légitimation 1-6 Les différentes approches du discours politique : nouveaux objets et apports transidsciplinaires - la rhétorique politique : le discours des « professionnels » de la politique - les politiques publiques et discours politique : les apports de la sociologie cognitives des politiques publiques - le débat public : la dimension délibérative de l’opinion publique - la mise sur agenda et la question des médias, les apports de la sociologie des médias - les controverses technologiques, la question de la science et de la rationnalité, les apports de la sociologie des sciences - le sens ordinaire de la justice, les apports de la sociologie pragmatique 1-4 Présentation du programme des séances 2ième séance mercredi 12 Octobre 2005 3ième séance mercredi 19 Octobre 2005 4ième séance mercredi 26 Octobre 2005 I- Le rôle des professionnels de la politique : analyser l’offre politique à travers les discours Séance méthode : Analyse de contenu et analyse de discours 2-1principe de l’analyse de contenu et de l’analyse de discours 2-2 les principales étapes de l’analyse de contenu Etude de cas : Exemple de l’analyse de contenu d’une communication gouvernementale dans les médias Rhétorique nationale : des discours en campagne 3-1 Analyser des discours politiques : logique de position et logiques des prises de positions 3-2 Un exemple d’analyse de contenu lors de l’élection présidentielle de 1988 (M. Brugidou, L’élection Présidentielle : discours et enjeux politiques, Paris L’Harmattan, 1995) Séance méthode : L’analyse du récit 4-1 Exposé : Dominique Memmi, Du récit en politique, Presse de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1986 4-2 Un exemple d’analyse de discours lors de l’élection présidentielle de 1988 - Politique Publique 77 5ième séance mercredi 2 Novembre 2005 6ième séance mercredi 9 Novembre 2005 5-1 Le statut du discours du point de vue des politiques publiques Exposé : Damamme D., Jobert B., (2001), « Le Plan Juppé. Pluralité des répertoires et genèse d’un référentiel », Gertslé, J. Les effets d’information en politique, Paris, L’Harmattan, 2001. Schmidt, V. and C.M. Radaelli (2004) ‘Policy Change and Discourse in Europe’ West European Politics, 27(2), 183-210, 2004. II- Le rôle des médias : la mise sur agenda des problèmes La construction de l’événement Régulation , légitimité et récit de politique publique 6-1 Exposé : Alice Krieg-Planque, Purification ethnique, Une formule et son histoire.CNRS éditions, 2003. 6-2 Etude de cas : un exemple d’analyse de controverse dans les médias (M. Brugidou, « L’affaire du sang contaminé : la construction de l’événement dans Le Monde (19891992) – Mots 37, pp 29-46). 7ième séance Séance méthode : L’analyse de contenu appliqué aux mercredi 16 Novembre Analyse d’un corpus d’article de presse – cas pratique 2005 8ième séance mercredi 23 Novembre 2005 médias III- Le rôle des experts : les controverses technologiques, les forums « hybrides » La question de la rationnalité 8-1 Exposé sur le texte d’olivier Laügt, Discours d’expert et démocratie, L’harmattan, 2000 8-2 - principe de l’analyse de l’argumentation - Etude de cas : un exemple d’analyse de l’argumentation à travers l’analyse d’une question ouverte sur le nucléaire IV- Les mouvements sociaux et le rôle des citoyens « ordinaires » 9ième séance mercredi 30 Novembre 2005 Les mouvements sociaux et des nouveaux forums 9-1 Exposé sur le chapitre II- « Un programme en débat » Eric Agrikoliansky et Dominique Cardon, in Eric Agrikoliansky et Isabelle Sommier (dir.) Radiographie du mouvements altermondialiste, La dispute, 2005 9-2 Présentation d’outils collaboratifs en ligne par Nicolas Benvegnu (EDF R&D et CSI) Séance méthode : L’analyse de l’argumentation 10ième séance mercredi 7 Décembre 2005 10-1 principe de l’analyse de l’argumentation 10-2 Etude de cas : un exemple d’analyse de l’argumentation à travers l’analyse d’une question ouverte sur le nucléaire La question des « effets » sur l’opinion publique (II) : image et symbole 11ième séance 11-1 Exposé sur le symbole en politique à partir du texte de P. Braud, L’émotion en mercredi 14 Décembre politique, Paris, Presse de la FNSP, 1996. 2005 11-2 Méthode : un exemple d’analyse de l’image : M. Brugidou, « Epitaphes, l’image de F. Mitterrand à travers l’analyse d’une question ouverte posée à sa mort », RFSP, 48, 1998. Le rôle des citoyens « ordinaires » 12ème séance 12-1 Exposé sur le texte de Luc Boltanski (avec Darré Y et Schiltz M.-A 1984, « La mercredi 4 Janvier Dénonciation », Actes de la recherche en sciences sociales, n°51, pp.3-40) 2005 12-2 Aide à la réalisation des rapports 13ième séance Date à définir après les vacances de Printemps Présentation orale des travaux réalisés en groupe (3heures de 17h à 20h) Bilan 78 Bibliographie générale Anspach S., (1995) Bonjour, c'est pour un sondage, Béta/58', documentaire pour Soirée Théma ARTE, sur les sondages. Diffusé en janvier 95, Production : TAXI Production/ARTE. Beaud P. (1989), « Introduction à la 3ème partie : l’opinion publique », Sociologie de la communication, Beaud et al.(dir.), Paris, Cent, p. 315-335. Blais A., (2004), « Y-a-t-il un vote stratégique en France ? », Cautres B., Mayer N., (dir.) Le nouveau désordre électoral, Paris, Presse de Sciences Po. 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