Luc Ferry, La naissance de l`esthétique édition Cercle d`Art

Veille de culture générale _ avril 2008 Page 1
VEILLE DE
CULTURE GENERALE
AVRIL 2008
Veille de culture générale _ avril 2008 Page 2
SOMMAIRE :
PAGES :
-3 Livre de Luc Ferry, La naissance de l’esthétique
-5 Livre de Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
-7 Livre de René Descartes, Méditations métaphysiques
-9 Article Cahier Français : L’identité nationale : quelles
réalités ? Quelle réalité européenne ?
-10 Article Sciences Humaines : La démocratie est-elle en
crise ?
-11 Article Futuribles : Les violences hydrauliques au
Proche-Orient
-13 Article Regards sur l’actualité : La loi relative à la
maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile
-15 Article Philosophie Magazine : Aimer au temps de
l’individualisme
-16 Conférence sur L’hôpital de demain
-18 Conférences à Rennes en Avril 2008
-19 Bouillon de culture : Sortir se cultiver à Rennes en
Avril/Mai
Veille de culture générale _ avril 2008 Page 3
Luc Ferry, La naissance de l’esthétique aux éditions Cercle d’Art
( en complément, Luc Ferry, Le Sens du Beau :
Aux origines de la culture contemporaine)
En guise d’introduction dans La Naissance de l’esthétique, Luc Ferry nous propose de nous interroger
sur ce qui fait que nous percevons certaines choses comme belles et selon quels critères ? « Pourquoi trouvons-
nous qu’une œuvre ou un paysage naturel sont beaux ? Quels sont les critères qui se cachent dans nos jugements
de goût ? Et pourquoi éprouve-t-on le besoin d’en discuter avec d’autres ? » Il s’agit de retracer l’histoire de
l’esthétique, c’est-à-dire « la réflexion moderne sur le beau ».
La vocation essentielle de l’art depuis toujours est sans doute de « mettre en scène dans un matériau
sensible (couleur, son, pierre…) une vérité tenue pour supérieure. Cette mise en scène peut par exemple se
retrouver dans des grottes comme la Grotte de Lascaux datée de 17000 av. J.-C. Ensuite, dans l’Antiquité, l’art
se voulait expression de l’harmonie de l’univers, du cosmos ; c’est pour cela que l’art antique se limité souvent à
l’imitation de la nature. (Platon était favorable à une mimésis). A l’ère des religions monothéistes, l’art exprimait
« la grandeur et la sublimité du divin » et à présent dans les démocraties humanitaires, il peut exprimé la richesse
du génie humain. La légitimité de l’art change, elle n’est désormais plus transcendante et passe à travers « la
volonté, les intérêts et la raison des êtres humains. » L’humanisme esthétique naît et par « la question de la
création va pouvoir se poser » à travers une double révolution de l’esthétique. Ce bouleversement est comparable
à la fin du théologico-politique dans l’ordre de la cité. L’esthétique symbolise au mieux cette naissance car il
possède une signification spécifiquement moderne (le terme n’apparaît que pour la première fois en 1750 dans
l’Aesthetica du philosophe Alexander Baumgarten).
En quoi consiste donc cette double révolution de l’esthétique ?
Tout d’abord, du côté de l’auteur, rien n’est plus pareil. L’art, avant cette révolution avait pour mission
de refléter un ordre cosmique, extérieur aux hommes. Mais, au cours du XVIIème s., l’art devient expression
« pure et simple de l’individualité » c’est-à-dire une création d’un univers imaginaire. Désormais, la vérité de
l’œuvre d’art se trouve à l’intérieur de l’artiste, non plus hors de lui ; le beau s’invente et ne se trouve plus tel
quel dans le cosmos. Ainsi, « la révolution de l’auteur porte en germe le culte du nouveau et de l’original qui
marquera de façon si profonde l’art contemporain ». De plus, le geste de la rupture avec la tradition et de la
création radicale du nouveau, comme l’a suggéré Octavio Paz, a fini par devenir lui-même tradition.
Du côté du spectateur tout change aussi puisque la notion de goût émerge. Le beau ne désigne alors plus
une qualité ou un ensemble de propriétés appartenant de façon intrinsèque aux œuvres d’art qui procure un
certain type de plaisir tout intérieur.
Se développe par conséquent une multitude de mondes particuliers propres à chaque artiste. L’œuvre
devient ainsi un prolongement de soi. « Schönberg, après Nietzsche, y a consacré ses plus belles pages : l’artiste
est un « solitaire », un résistant voué, selon la formule maintes fois répétée par Kandinsky, à se détourner du
monde pour mieux exprimer sa « pure vie intérieure. Une œuvre unique ne saurait donc plus suffire à dire
l’essentiel : c’est seulement dans l’itinéraire de l’artiste, voire à travers des séries, qu’il pourra se dévoiler, par
les hésitations et les ruptures de ton et de styles qui scandent le rythme de sa « vie intérieure ». Cette
multiplication de mondes particuliers pose le problème des critères de l’œuvre d’art. Les critères font défaut par
exemple lorsque nous visitons un grand musée d’art moderne et contemporain. Ainsi apparaît un problème
crucial : « si le beau est subjectif, s’il est, comme on dit, « affaire de goût » et de sensibilité, comment expliquer
l’existence de consensus autour de ce qu’on nomme les « grandes œuvres » ?
Peut-on discuter du beau ?
Comment peut-il y avoir un consensus, ou même un accord un tant soit peu général sur la beauté d’une
œuvre de l’art ? Le relativisme semblerait rentrer en compte dans l’esthétisme. Nous vivons aujourd’hui une
« crise de l’universel » (c’est-à-dire que nous ne regardons plus les choses comme intemporelles et éternelles, on
ne voit plus de vérité absolue). Les œuvres d’art sont subjectives, et comment ainsi fonder l’objectivité sur la
subjectivité ? « Le beau est tout à la fois ce qui nous unit le plus aisément et le plus mystérieusement. » Le
consensus dans le domaine de l’art est aussi large, voire davantage que dans le domaine de la science et pourtant
nous sommes au cœur même de la subjectivité la plus intense et la plus avouée.
A la fin du XVIIIème s., trois grandes réponses sont apportées à la question du critère du beau :
Le rationalisme qui peut s’illustrer par exemple par ces quelques vers de Boileau dans l’Art Poétique ;
le beau apparaissant comme l’illustration d’une idée vraie.
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Rien n’est beau que le vrai
Le vrai seul est aimable
Il doit régner partout
Et même dans la fable.
On peut donc juger de la beauté comme de la vérité et ce pour une raison bien compréhensible : la première n’est
rien d’autre que l’expression sensible de la seconde.(ex : Rameau fondera sa musique sur les mathématiques).
Cependant le « matérialisme » surtout du de l’empirisme anglais s’oppose à cette thèse et au
contraire, celui-ci tend à dire que les hommes étant constitués des mêmes organes, le beau pour ces
mêmes personnes est donc universellement reconnu. (l’art se rapproche ici de l’art culinaire.) La
réponse ici apportée repose sur l’hypothèse d’une structure psychobiologique commune à l’humanité.
Le beau peut être défini comme un intermédiaire entre la nature et l’esprit, entre l’intelligible et le
sensible, comme une réconciliation des deux. C’est la vision kantienne du beau qui ressort de La
Critique de la faculté de juger. L’œuvre devient intelligible.
La naissance de la critique : histoire contre tradition
La critique apparaît bien avant Diderot et Winckelmann, c’est-à-dire lors de la querelle des Anciens et des
Modernes. Les Anciens utilisent non plus des arguments d’autorité (du type « ils sont anciens.») mais
développent des critères de critique comme l’incarnation d’une tradition respectable et digne d’admiration…En
fait, ce qui est mis en valeur dans les œuvres de l’Antiquité, c’est leur capacité à se conformer à une norme, à un
principe qui leur est en quelque façon supérieur et qui peut servir, le cas échéant, à les évaluer. Et c’est ceci qui
constitue la première forme de la critique. Avec les classiques français et leur cartésianisme, la critique repose
sur la raison et l’imitation devient impératif suprême. Ensuite, la critique aura d’autres attentes : le génie se
mesurera par exemple « à l’aune d’une histoire de l’art au sein de laquelle il s’agit d’apporter quelque chose pour
acquérir droit de cité. »
L’irrationalité du beau l’autonomie du sensible comme coupure entre l’homme et dieu
Le beau selon la tradition platonicienne a longtemps été perçu comme une présentation sensible du vrai,
comme la transposition dans l’ordre de la sensibilité matérielle d’une vérité morale ou intellectuelle. Cependant
une mutation s’est opérée et la conquête du sensible (proprement artistique) se combina à diminution du divin
dans l’art puisque Dieu, tout intelligible, n’est pas affecté par cette marque de l’imperfection et de la finitude
humaine qu’est la sensibilité. La conquête de cette autonomie du sensible, cette invention d’un monde où le divin
se retire sans cesse davantage au profit de l’humain, s’opère en plusieurs étapes.
Avec l’Aesthética de Baumgarten et la Phénoménologie de Johann Heinrich Lamert, le beau apparaît
comme le propre de l’homme et la sensibilité humaine est distinguée du point de vue de Dieu. Ensuite avec Kant,
le monde sensible et le monde intelligible sont séparés et c’est avec Nietzsche que le monde intelligible est tout
simplement supprimé. Cette transition laisse place au « proprement humain », la vérité devenant fable, le
philosophe doit laisser place à l’artiste : « incipit aesthetica ». Dans le me temps, l’art bascule du côté du non
rationnel et le beau ne peut donc plus être appréhender par la raison mais par la faculté d’une autre ordre. « C’est
en ce point, que l’esthétique moderne rencontre encore le concept de goût, entendu ici comme le corrélat
subjectif de l’irrationalité de l’objet beau en tant qu’objet sensible. » Il se produit un désenchantement de l’art du
fait que celui-ci est l’émanation d’un être humain et plus l’imitation d’une harmonie cosmique ou d’une vérité
divine.
Pour terminer, Luc Ferry explique que le sentiment de beau résulte, on vient de le voir d’une
subjectivité de l’homme, mais aussi d’une certaine transcendance ; non pas celle de l’intelligible mais une autre
forme explicitée ainsi : « Dans toute présence à la subjectivité et à la conscience humaine il y a aussi une part
d’absence, dans tout visible une part d’invisible, une part de transcendance en quelque façon, et c’est ce que
Heidegger […] nommera l’être. […] Sans doute est-ce aujourd’hui grâce à l’expérience esthétique qu’il nous
reviendra de penser la transcendant comme étant une transcendance dans l’immanence à la subjectivité, et non
pas comme une transcendant imposée du dehors, au nom d’une cosmologie ou d’une église. » La transcendance
deviendrait intérieure.
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AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA
Un livre pour tous et pour personne
de Friedrich Nietzsche
Friedrich Wilhelm Nietzsche est un philosophe et un philologue prussien né en 1844 et mort en 1900 à
Weimar (Allemagne).
L'œuvre de Nietzsche se rattache principalement à la métaphysique dont il fait la critique radicale. Ses écrits
incluent des critiques de la religion, de la moralité, de la culture contemporaine, de l'art et de la
philosophie.L'influence de Nietzsche est considérable dans la philosophie et au-delà, notamment dans des
mouvements qui lui succèderont, par exemple l'existentialisme et le post-modernisme.
Toute la pensée de Nietzsche tourne autour d'une idée essentielle : comment comprendre les conditions
et les moyens de l'ennoblissement et de l'élévation de l'homme? Ainsi, le thème fondamental et constant de la
pensée de Nietzsche, à travers les nombreuses variations de ses écrits, est le problème de la culture ou
« élevage », problème qui comprend la question de la hiérarchie et de la détermination des valeurs propres à
favoriser cette élévation. Ce projet embrasse une partie critique omniprésente dans son œuvre, la destruction des
valeurs de l'idéalisme platonicien et chrétien qui ont gouverné jusqu'ici l'Occident et qui, selon Nietzsche,
menacent de conduire l'humanité à s’éloigner quasi définitivement de la possibilité même de son élévation.
Dans toute son oeuvre, Nietzsche affirme cette volonté d'élévation de l'homme : des termes et des notions
récurrents apparaissent : « Volonté de puissance », « Éternel Retour » et « Surhomme ». Ces thèmes, sans
s'exclure, se succèdent, parfois en s'approfondissant et s'entremêlant les uns aux autres. Sa philosophie de
l'affirmation se présente sous la forme d'une exaltation de la puissance créatrice humaine.
Nietzsche veut éviter d'écrire des traités systématiques, car toute pensée est, pour lui, toujours en
devenir. Ainsi, ainsi parlait Zarathoustra va être suivi par de nombreuses oeuvres qui reprennent sa pensée, la
complètent, s'entremêlent (La volonté de la puissance, l'Antéchrist, le Crépuscule des idoles...). Nietzsche décrit
ses textes comme un labyrinthe dont on doit trouver l'accès qui mènera à travers tous les aphorismes. On peut
toutefois remarquer qu'il a au contraire écrit ses dernières œuvres avec le souci d'être compris.
Ainsi parlait Zarathoustra se compose de discours, de paraboles, de poésies et de chants répartis en
quatre livres : Nietzsche choisit la forme poétique pour transmettre ses premières idées sur la métaphysique du
surhomme. Comment Nietzsche arrive-t-il à son concept de surhomme ? D'emblée, il nous introduit dans un
monde allégorique. Zarathoustra, qui s'était retiré dans une caverne dans la montagne pendant dix ans, revient
parmi les hommes pour leur faire partager sa pensée. Il a pensé, il a médité, et maintenant sa sagesse est mure,
est prête à se déverser, et il veut la partager avec le genre humain. Dans sa descente il rencontre un saint ermite,
quelqu'un qui a vécut dans la forêt au pied de la montagne pendant des années et des années. Le saint ermite
essaie de persuader Zarathoustra de ne pas descendre parmi les hommes. Il dit ce sera une perte de temps, car les
hommes ne sont pas gratifiants, ils sont distraits. Mais Zarathoustra ne se laisse pas dissuader de sa mission. Il
laisse le saint ermite à ses prières dans la forêt, et il continue à descendre la montagne. Et comme il va, il se dit à
lui-même, ce peut-il que ce vieux saint n'ait encore rien entendu de cela, que Dieu est mort. Et cela bien sur, cette
remarque que Dieu est mort, représente, constitue une des visions les plus importantes de Nietzsche. Dieu est
mort.
Les âges chrétiens, qu'ils soient de foi ou de non foi, sont derrière nous. Donc Dieu est mort. Et ce fait, cette
déclaration, nous donne aussi un indice de la pensée de Nietzsche au regard du surhomme. Si Dieu est mort, si la
chrétienté est morte, si le dogme chrétien est mort, si la théologie chrétienne est morte, alors la vue chrétienne, la
conception chrétienne de l'homme est morte aussi. La conception de l'homme comme un être déchu, un être qui
une fois a désobéi, qui a pêché, qui maintenant a besoin de grâce pour se racheter, qui doit croire, qui sera jugé,
qui sera punit peut-être, ce genre de concept, ce genre de dogme à propos de l'homme est mort.
Donc on doit trouver une nouvelle conception de l'homme. L'homme se trouve en quelque sorte dans un univers
sans dieu. Il est seul. Donc l'homme doit essayer de se comprendre lui-même, de nouveau. Il ne peut pas prendre
quelque conception ou quelque idée déjà faites sur lui-même. Il se trouve simplement ici, ici et maintenant, et
doit se demander qui suis-je ? que suis-je ? Maintenant que les vieilles définitions sont caduques, l'homme doit
se définir lui-même, doit se définir lui-même de ro, doit se découvrir, se connaître. Et ceci est en fait ce que
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