INSUFFISANCE MITRALE - Ariel Cohen, Charles Smadja – Service de Cardiologie CHU Saint-Antoine Paris L’insuffisance mitrale est un reflux anormal de sang du ventricule gauche vers l’oreillette gauche en systole. La perte d’étanchéité de la valve mitrale est consécutive à l’atteinte d’un ou de plusieurs éléments de l’appareil valvulaire mitral. 1. Anatomie valvulaire mitrale L’appareil mitral est constitué de 4 éléments : - le voile mitral (feuillet mitral antérieur et feuillet mitral postérieur), - l’anneau mitral, - les cordages tendineux (naissent des portions apicales des muscles papillaires puis se ramifient et s’insèrent sur le versant ventriculaire des valves) - les muscles papillaires ou piliers (pilier postéro-médial et pilier antéro-latéral). 2. Mécanismes des régurgitations mitrales L’insuffisance mitrale est, sauf pour les perforations valvulaires, secondaire à un défaut de coaptation des 2 feuillets. Plus ce défaut est étendu, plus la régurgitation est importante. Une classification anatomo-chirurgicale en 3 types du mécanisme de régurgitation a été proposée • Le type I correspond aux régurgitations avec mouvements valvulaires normaux, soit par dilatation de l’anneau, soit par perforation valvulaire • Le type II correspond aux insuffisances mitrales par prolapsus valvulaire. Le prolapsus valvulaire est défini par l’excursion au-delà du plan de coaptation normal, du bord libre valvulaire en systole. • Le type III correspond aux insuffisances mitrales par restriction, c’est à dire par limitation du mouvement valvulaire empêchant le retour de la valve sur le plan de coaptation. L’association de plusieurs mécanismes est fréquente 3. Physiopathologie et retentissement Le retentissement de l’insuffisance mitrale dépend de son volume et de son mode d’installation. 3.1.1. Retentissement ventriculaire gauche L’insuffisance mitrale provoque une augmentation du volume d’éjection du ventricule gauche. Cette éjection se fait en partie vers l’oreillette gauche et en partie vers l’aorte. Le débit cardiaque est maintenu par l’augmentation de la fraction d’éjection et de la précharge (volume télédiastolique). La conséquence est une hypertrophie, une augmentation des volumes et de la fraction de raccourcissement du ventricule gauche. 3.1.2. Retentissement sur l’oreillette gauche La dilatation de l’oreillette gauche est en partie la conséquence de l’augmentation du volume sanguin dans oreillette. 1 3.1.3. Retentissement sur le cœur droit L’apparition d’une hypertension artérielle pulmonaire post-capillaire résulte de l’élévation des pressions dans l’oreillette gauche et les veines pulmonaires. Les conséquences de l’hypertension artérielle pulmonaire sont la dilatation et la dysfonction du ventricule droit. 4. Causes des insuffisances mitrales acquises (Tableau 1) Le prolapsus mitral est devenu la première cause de régurgitation mitrale chirurgicale. 4.1. Prolapsus mitral Le prolapsus valvulaire mitral correspond à une constellation d’étiologies. Dans ce groupe étiologique coexistent notamment des formes dites «dystrophiques» avec un excès de tissu valvulaire et des formes dites «dégénératives» sans excès de tissu. 4.1.1. Prolapsus mitral dystrophique ou myxoïde L’origine génétique de ce syndrome est suspectée, mais le gène n’a pas encore été identifié. Sa transmission serait autosomique dominante avec une pénétrance variable. - plus souvent l’homme - la valve mitrale est épaisse et redondante (myxoïdes) - Les cordages sont allongés, amincis - La fréquence des ruptures de cordage est augmentée.. - 4.1.2. Prolapsus mitral par dégénérescence fibro-élastique chez les sujets âgés, plus fréquemment chez l’homme. Les valves sont d’épaisseur normale ou diminuée Les calcifications valvulaires et de l’anneau sont fréquentes Les cordages sont grêles, modérément allongés La rupture de cordage est le principal risque évolutif 4.1.3. Maladie de Marfan La maladie de Marfan est une maladie héréditaire touchant la fibrilline. Le gène FBN 1, siège de la mutation, a été localisé sur le chromosome 15. Sa transmission est autosomique dominante, cependant ¼ des cas sont des néomutations. La fréquence de la maladie est de 2/10.000. Son pronostic est essentiellement lié à l’atteinte cardiovasculaire. Les organes riches en collagène sont les principales cibles de la maladie, en particulier squelettique, ophtalmique, pulmonaire et cardiaques. L’atteinte mitrale est présente dans 62% des cas sous la forme d’un prolapsus valvulaire avec une insuffisance mitrale dans 36% des cas. Le prolapsus valvulaire mitral est dû à un excès de tissu valvulaire avec des valves parfois épaissies et une élongation et des ruptures de cordage. 4.1.4. Syndrome d’Ehlers-Danlos Le syndrome d’Ehlers-Danlos est une dystrophie du collagène d’origine héréditaire à transmission autosomique dominante et à pénétrance variable. 4.1.5. Pseudoxanthome élastique L’atteinte mitrale est rare dans cette affection des tissus élastiques, elle se manifeste par un épaississement et un prolapsus valvulaire. 2 4.1.6. Ostéogenèse imparfaite L’atteinte mitrale est semblable à celle de la maladie de Marfan avec un excès d’étoffe valvulaire et/ou des ruptures de cordages. 4.2. Rhumatisme Articulaire Aigu (RAA) La restriction des mouvements valvulaire est le mécanisme principal de la régurgitation. Elle concerne le plus souvent le feuillet mitral postérieur qui est figé en position d’ouverture. 4.3. Endocardite infectieuse La greffe bactérienne survient dans 65% des cas sur des lésions valvulaires préexistantes (rhumatismales ou dystrophiques). Les lésions valvulaires de l’endocardite sont mutilantes, les végétations sont présentes dans ¾ des cas et s’associent à des ulcérations et des perforations. L’insuffisance mitrale n’est pas uniquement du à l’atteinte des valves mais aussi à des ruptures de. L’atteinte des muscles papillaires (nécrose) présente dans ¼ des cas d’endocardite mitrale autopsiées, peut participer à l’aggravation de la régurgitation mitrale. 4.4. Ischémique L’insuffisance mitrale peut compliquer la cardiopathie ischémique dans 3 situations : 4.4.1. Dysfonction permanente de pilier A la suite d’un infarctus le plus souvent de topographie inférieure, étendu au pilier, la fibrose myocardique provoque une rétraction et une attraction du feuillet. 4.4.2. Dysfonction transitoire de pilier Dans l’insuffisance coronarienne aiguë ou chronique, en l’absence d’infarctus, l’ischémie du pilier entraîne soit son étirement avec prolapsus valvulaire, soit une restriction du mouvement valvulaire. Dans tous les cas, la régurgitation disparaît ou régresse lorsque l’ischémie cède soit sous traitement médical soit après revascularisation. 4.4.3. Rupture de pilier - Cette situation est très rare (< 0.1% des infarctus du myocarde) mais la plus grave. - La rupture de pilier correspond à une rupture cardiaque à la phase aiguë ou dans les suites immédiates de l’infarctus, en particulier de topographie inférieure. En effet, le muscle papillaire antérieur (ou pilier antérieur) dispose d’une double vascularisation par l’interventriculaire antérieure et l’artère circonflexe). - La rupture complète d’un pilier entraîne un décès rapide par insuffisance mitrale massive. - La rupture partielle ou limitée du pilier entraîne un prolapsus valvulaire. L’insuffisance mitrale aiguë qui en résulte est mal tolérée sur le plan hémodynamique. Une correction chirurgicale en urgence, le plus souvent par remplacement valvulaire, est la seule ressource thérapeutique. 4.5. Cardiopathie dilatée Une insuffisance mitrale peut compliquer l’évolution des cardiopathies dilatées quelles soient primitives ou secondaires.. Le mécanisme principal, mais non unique, de la régurgitation mitrale est la dilation de l’anneau mitral 4.6. Calcifications dégénératives de l’anneau mitral Au cours de la vie, l’endocarde s’épaissit et apparaît de fines calcifications de l’anneau mitral. Ces calcifications peuvent devenir exubérantes et entraver le jeu valvulaire. - plus fréquente chez la femme, - rares avant 70 ans en dehors de conditions particulières comme l’hypercalcémie, l’insuffisance rénale ou les affections du squelette fibreux cardiaque (syndrome de Hurler, maladie de Marfan). L’insuffisance mitrale est la conséquence la plus fréquente de ces calcifications. 3 4.7. Traumatique et post commissurotomie Les lésions cardiaques sont des causes fréquentes des décès accidentels. L’atteinte mitrale peut être secondaire à un traumatisme pénétrant et surtout secondaire à un traumatisme fermé direct (traumatisme thoracique) ou indirect (décélération, onde de choc…). En général, l’atteinte de la valve mitrale n’est pas isolée et survient préférentiellement sur des anomalies valvulaires préexistantes. On peut rapprocher de cette forme, les insuffisances mitrales post commissurotomie mitrale percutanée soit par déchirure valvulaire soit par rupture de cordage et exceptionnellement de pilier. 4.8. Radiothérapie L’atteinte valvulaire consiste habituellement en des épaississements fibreux localisés. 4.9. Tumeurs valvulaires cardiaques (fibroélastome) 4.10. Médicamenteuses 4.10.1. Méthysergide 4.10.2. Association fenfluramine-phentermine (retirée du commerce) 4.11. Rhumatismes inflammatoires (RAA exclu) 4.11.1. Lupus érythémateux aigu disséminé et syndrome primitif des antiphospholipides 4.11.2. Sclérodermie 4.11.3. Polyarthrite rhumatoïde 4.12. Cardiomyopathies hypertrophiques 4.13. Tumeurs carcinoïdes (atteinte valvulaire gauche exceptionnelle) 4.14. Fibroses endomyocardiques 4.15. Endocardites marastiques 4.16. Maladies infiltratives du myocarde Infiltration myocardique rencontrée dans la sarcoïdose, l’amylose et l’hémochromatose 5. Histoire naturelle des insuffisances mitrales Il existe une longue période asymptomatique même en cas d’insuffisance mitrale importante, puis peuvent apparaître : - une dyspnée à l’effort - insuffisance ventriculaire gauche. - insuffisance cardiaque globale. L’apparition ou l’augmentation de la symptomatologie est parfois brutale à la faveur d’une modification aiguë de l’importance de la régurgitation (rupture de cordages, endocardite infectieuse avec destruction valvulaire…) ou d’un passage en fibrillation auriculaire. La mortalité de l’insuffisance mitrale sévère atteint 5 à 6% par an, en grande partie par insuffisance cardiaque et dans 5% des cas par mort subite en l’absence d’insuffisance cardiaque. Autres modalités évolutives - Survenue d’une mort subite en cas de prolapsus valvulaire (10 à 100 fois plus que chez le sujet sain). Le mécanisme de ces morts subites n’est pas univoque : des troubles du rythme ventriculaire et des embolies d’origine cardiaque ont été suggérées. - Embolies systémiques (favorisées par la fibrillation auriculaire) - Endocardites (multiplie par 3 à 8 le risque de survenue d’une endocardite) - Trouble du rythme supra ventriculaire 4 6. Diagnostic de l’insuffisance mitrale chronique (Tableaux 2 et 3) 6.1. Examen clinique 6.1.1. Palpation Choc de pointe augmenté d’amplitude, élargi et dévié vers le bas et la gauche. Il est parfois associé à un frémissement systolique. - 6.1.2. Auscultation souffle holosystolique d’intensité maximale à la pointe irradiant à l’aisselle le plus souvent Son timbre est doux, en jet de vapeur Intense. Galop protodiastolique ou B3, IM volumineuse Roulement mésodiastolique Eclat du deuxième bruit au foyer pulmonaire (HTAP). click mésosystolique Prolapsus mitral click mésosystolique + souffle télésystolique - 6.2. Electrocardiogramme souvent dans les limites de la normale HAG HVG systolique (Sokolof > 35mm et ondes T négatives en V5 et V6) HVD (rare). AC/FA (ou autres trouble du rythme supra ventriculaire) - 6.3. Examen radiologique cardiomégalie (constante si IM chronique importante) par dilatation VG et OG saillie de l’arc moyen gauche Dilatation OG un double contour de l’arc inférieur droit redistribution vasculaire vers les sommets insuffisance cardiaque œdèmes interstitiels 6.4. Echocardiographie Doppler L’échocardiographie Doppler est l’examen de référence permettant de déterminer le mécanisme, l’étiologie, l’importance et le retentissement de l’insuffisance mitrale. Il permet aussi un suivi évolutif par la répétition des examens. 6.4.1. Echocardiographie transthoracique 6.4.1.1.Morphologie de l’appareil mitral et description du mécanisme de la régurgitation L’analyser doit comprendre les 4 structures participant à l’étanchéité valvulaire. Pour chaque structure il faut préciser l’anomalie qui contribue à la régurgitation. • Aspect des valves : remaniement, épaississement, aspect d’excès tissulaire, plus rarement tumeur ou abcès • Mobilité valvulaire : normal, restreint ou prolapsus. • Anneau : calcification, dilatation. • Appareil sous valvulaire : rétraction, fusion, élongation, rupture de cordage, aspect de masse valvulaire (végétation infectieuse ou thrombotique). 6.4.1.2.Retentissement sur l’oreillette gauche Taille de l’oreillette gauche 6.4.1.3.Retentissement sur le ventricule gauche Fonction ventriculaire gauche (diamètres et volumes télé diastolique et télé systolique, FR et FE). 5 6.4.1.4.Quantification de la régurgitation La quantification de l’insuffisance mitrale repose sur l’ensemble des renseignements obtenus par les 3 modes doppler (pulsé, continu et couleur). - Cartographie du jet régurgitant - Mesure du diamètre du jet à l’origine - Etude de la zone de convergence ou PISA (Proximal Isovelocity Surface Area) - Rapport ITV mitrale sur ITV aortique 6.4.1.5.Mesure des pressions pulmonaires 6.4.1.6.Etude des autres valves cardiaques L’étude des autres valves cardiaques est indispensable afin de s’assurer de leur intégrité et de l’absence d’une autre valvulopathie. 6.4.2. Echocardiographie transoesophagienne L’échocardiographie transthoracique seule permet souvent de juger de l’importance de l’insuffisance mitrale, il est parfois utile de compléter l’examen par une échocardiographie par voie transoesophagienne lorsqu’un doute persiste sur la quantification ou le mécanisme de la régurgitation - 6.4.2.1.Quantification de la régurgitation Cartographie du jet (extension du jet régurgitant dans l’oreillette gauche) Diamètre du jet à l’origine (reflet de la taille de l’orifice régurgitant) Enregistrement du flux dans les veines pulmonaires (le reflux est très sensible pour détecter les régurgitations volumineuses) 6.4.3. Quantification échocardiographique des insuffisances mitrales En pratique, la quantification de l’insuffisance mitrale repose sur l’ensemble des paramètres qui ont pu être recueilli en échocardiographie transthoracique et transoesophagienne. Aucun des paramètres n’est suffisamment sensible et spécifique pour, à lui seul, quantifier la régurgitation. Une fois l’importance de la régurgitation déterminée, il faut juger de son retentissement sur la clinique, la fonction ventriculaire gauche, la taille de l’oreillette et du ventricule gauche ainsi que sur les pressions artérielles pulmonaires. 6.5. Epreuve d’effort et échocardiographie de stress L’épreuve d’effort, de même que les autres modalités de stress, n’est pas de pratique courante dans la prise en charge de l’insuffisance mitrale. Cependant, l’appréciation de la capacité d’effort et la diminution du pic de consommation en oxygène à l’effort peuvent être intéressants dans la surveillance des patients. 6.6. Explorations hémodynamiques invasives - Mesures hémodynamiques par cathétérisme cardiaque droit (pressions pulmonaires, débit cardiaque, onde V sur l’enregistrement des pressions pulmonaires).Elles ne sont plus indiquées sauf cas particuliers (discordances des résultats de l’échocardiographie Doppler avec l’examen clinique ou poly valvulopathie complexe) - Angiographie ventriculaire gauche avec quantification des volumes ventriculaires gauches et de la fraction d’éjection ventriculaire gauche et de la régurgitation mitrale (en 4 grades selon la précocité de l’opacification de l’oreillette gauche). Elle n’est indiquée qu’en cas de quantification difficile ou discordante par l’échocardiographie Doppler. - Coronarographie (uniquement en pré opératoire) en présence d’antécédents coronaires, de facteurs de risque vasculaire ou de dysfonction ventriculaire gauche. 6 7. Traitement 7.1. Traitement médicamenteux Les vasodilatateurs et en particulier les inhibiteurs de l’enzyme de conversion semblent diminuer la symptomatologie et réduire les volumes et la masse ventriculaire gauche. Au stade de l’insuffisance cardiaque, le traitement associe des diurétiques à un inhibiteur de l’enzyme de conversion. En AC/FA, le risque thrombo-embolique incite au traitement par AV K pour maintenir un INR entre 2 et 3 ; la cadence ventriculaire peut être ralentie par les digitaliques, les bêtabloquants ou les inhibiteurs calciques bradycardisants. Les patients ayant une régurgitation mitrale sont à haut risque d’endocardite infectieuse et doivent recevoir une antibioprophylaxie avant toute intervention, en particulier stomatologique et ORL. 7.2. Traitement chirurgical Deux types d’intervention chirurgicale sont disponibles pour corriger une insuffisance mitrale : - Réparation de la valve mitrale (plastie mitrale) associée de façon presque systématique à la mise en place d’un anneau mitral. C’est l’intervention de référence pour les prolapsus valvulaires et les dilatations annulaires. - Remplacement valvulaire mitral par une prothèse mécanique, biologique ou homogreffe, lorsqu’une intervention conservative n’est pas possible. La plastie mitrale est l’opération de choix lorsque les lésions valvulaires et de l’appareil sous-valvulaire sont accessibles et permet d’éviter un traitement anticoagulant au long cours. 7.3. Indications Le traitement médicamenteux est indiqué dans tous les cas adapté à l’importance de l’IM et à la symptomatologie avec systématiquement prophylaxie de l’endocardite infectieuse. L’indication chirurgicale est retenue si - IM importante et symptomatique - IM importante et asymptomatique avec retentissement ventriculaire gauche L’indication chirurgicale est discutée si - IM importante et asymptomatique sans retentissement VG si la plastie mitrale est faisable. - Traitement médicamenteux Les vasodilatateurs et en particulier les inhibiteurs de l’enzyme de conversion semblent diminuer la symptomatologie et réduire les volumes et la masse ventriculaire gauche. Au stade de l’insuffisance cardiaque, le traitement associe des diurétiques à un inhibiteur de l’enzyme de conversion. En AC/FA, le risque thrombo-embolique incite au traitement par AV K pour maintenir un INR entre 2 et 3 ; la cadence ventriculaire peut être ralentie par les digitaliques, les bêtabloquants ou les inhibiteurs calciques bradycardisants. Les patients ayant une régurgitation mitrale sont à haut risque d’endocardite infectieuse et doivent recevoir une antibioprophylaxie avant toute intervention, en particulier stomatologique et ORL. 7.4. Résultats La mortalité opératoire d’un remplacement valvulaire ou d’une plastie mitrale chez les sujets de moins de 75 ans peu ou asymptomatique (classe fonctionnelle NYHA I et II) est de 1 % alors qu’elle s’élève à 5 % lorsque les patients sont classe en III ou IV. Ces données incitent à une intervention 7 précoce dès l’apparition d’un indice de mauvaise tolérance (diamètre télésystolique supérieur à 45 mm, fraction d’éjection inférieure à 60 %, hypertension artérielle pulmonaire ou fibrillation auriculaire) avant que le patient ne devienne symptomatique. 8 Tableau 1 : Causes des insuffisances mitrales sur valves natives en fonction de le ur mécanisme (les causes d’insuffisance mitrale aiguë sont soulignées) 1- Prolapsus valvulaire - Prolapsus mitral myxoïde (risque de rupture de cordages) - Dégénérescence fibro-élastique (risque de rupture de cordages) - Syndrome de Marfan (association à dilatation de l’aorte ascendante) - Syndrome d’Ehlers-Danlos - Pseudoxanthome élastique - Ostéogenèse imparfaite 2- Rhumatisme articulaire aigu 3- Endocardite infectieuse 4- Ischémique - Dysfonction de pilier - Rupture de pilier - Dilatation de l’anneau 5- Cardiomyopathie dilatée 6- Calcification de l’anneau mitral 7- Traumatique et post-commissurotomie 8- Post radiothérapie 9- Tumeurs valvulaires cardiaques (fibro-élastome, myxome…) 10- Iatrogène (Méthysergide, association Fenfluramine-Phentermine) 11- Insuffisances mitrales des rhumatismes inflammatoires (RAA exclu) - Lupus érythémateux aigu disséminé et syndrome primitif des antiphospholipides - Sclérodermie - Polyarthrite rhumatoïde 12- Insuffisances mitrales des cardiomyopathies hypertrophiques 13- Insuffisances mitrales des tumeurs carcinoïdes (exceptionnelle) 14- Insuffisances mitrales des fibroses endomyocardiques 15- Insuffisances mitrales des endocardites marastiques 16- Insuffisances mitrales des maladies infiltratives du myocarde - Sarcoïdose - Amylose - Hémochromatose 17- Cardiopathies congénitales Valves parachutes Transposition des gros vaisseaux Canal atrio-ventriculaire 9 Tableau 2 : Caractéristiques en fonction de l'importance de la régurgitation mitrale INSUFFISANCE MITRALE CHRONIQUE Modérée-moyenne INSUFFISANCE MITRALE CHRONIQUE Importante (compensée) INSUFFISANCE MITRALE CHRONIQUE Importante (décompensée) 0 Normale + (± HTAP) Elargissement (↑ VG) ± frémissement ++ (± HTAP, IVD) Elargissement, frémissement Auscultation Souffle systolique B1 B2 B3 Crépitants pulmonaires holosystolique (sauf PVM) Normal Normal 0 0 holosystolique ± Austin-Flint Normal Normal (± éclat au foyer pulmonaire) 0 0 holosystolique + Austin-Flint ↓↓ ↑↑ (éclat au foyer pulmonaire) + + Electrocardiogramme HAG, HVG HVD 0 0 + 0 ++ + Echocardiographie Taille OG Taille VG Cavités droites Normale Normale Normales ↑ NI ou ↑ Normales ↑↑ ↑↑ ↑ Doppler cardiaque Flux transmitral PAP Jet régurgitant (couleur) Normal Normale + ↑ (onde E > onde A) ↑ ++ ↑↑ (onde E > > onde A) ↑↑ +++ Normale Normale (↑) ↑ (modérée) ↑ modérée (Nle) Normal (↑) Normale Normal ↑ (Nle) Normale (↑) ↑ ↑ (Normale) ↑ Normale (↓ mais > 50 %) Normal ↑↑ ↑↑ ↑↑ ↑↑ ↑↑ (VTS > 50 ml/m²) ↓ (< 50 %) ↓↓ Clinique Symptômes d'efforts Palpation précordiale Hémodynamique PAP PCAP Onde v PTDVG Volume (VG) FE Débit cardiaque FE : fraction d'éjection. - HAG : hypertrophie auriculaire gauche. - HVG : hypertrophie ventriculaire gauche. - HVD : hypertrophie ventriculaire droite. - HTAP : hypertension artérielle pulmonaire. - IVD : insuffisance ventriculaire droite. - Nl : normal. - OG : oreilllette gauche. - PAP : pression artérielle pulmonaire. - PCAP : pression capillaire pulmonaire. - PTDVG : pression télédiastolique ventriculaire gauche. - PVM : prolapsus valvulaire mitral. - VG : ventricule gauche. - VTS : volume télédiastolique. 10 Tableau 3 : Caractères différentiels entre insuffisances mitrales aiguës et chroniques CAUSES CLINIQUE • Crépitants • B3 • Souffle systolique • Topographie initiale du souffle • Irradiation • Frémissement ECG RADIOGRAPHIE THORACIQUE ECHOCARDIOGRAPHIE-DOPPLER • Bidimensionnelle • TM • Doppler cardiaque • Pressions pulmonaires HEMODYNAMIQUE • VTD • VTS • FE • Compliance OG • POG • Fonction muscle • Volume d'éjection antérograde INSUFFISANCE MITRALE CHRONIQUE VOLUMINEUSE Dégénératives (Barlow, Marfan…) Structurales (rupture de cordages, dysfonction de pilier, dilatation annulaire…) Infectieuses (Endocardites infectieuses…) Inflammatoires (Rhumatisme articulaire aigu, LEAD, SAPL…) Congénitales INSUFFISANCE MITRALE AIGUE Endocardite infectieuse Traumatisme Rupture "spontanée" Dysfonctionnement et rupture de pilier Dysfonctionnement de prothèses IM volumineuse + si IM volumineuse + si rude, holosystolique apex aisselle oui ++ fréquents (œdème pulmonaire) habituel plus doux, decrescendo base cou, dos, nuque, non HAG, HVG normal (dépend de la cause) RCT ↑ Dilatation OG œdème interstitiel lignes B de Kerley RCT normal œdème pulmonaire mécanisme OG, VG dilatés quantification ↑↑ cause de IM (rupture cordages, endocardite) IM chronique compensée ↑↑ ↓ ↑ ↑ Normale ou ↑ Normale Normal IM chronique décompensée ↑↑↑ ↑↑ Normale ou ↓ ↑ ↑↑ ↓↓ Normal ou ↓ OG, VG non dilatés quantification ↑ IM aiguë ↑ ↓ ↑ Normale ↑↑↑ Normale ↓↓ ↑ : augmentation modérée. - ↑↑ : augmentation moyenne. - ↑↑↑ : augmentation importante. - ↓ : diminution. - BD : échocardiographie bidimensionnelle. - FE : fraction d'éjection. - HAG : hypertrophie auriculaire gauche. - HVG : hypertrophie ventriculaire gauche. - IDM : infarctus du myocarde. - IM : insuffisance mitrale. – LEAD : lupus érythémateux disséminé. - Nl : normal. - OG : oreillette gauche. - RCT : rapport cardio-thoracique. – SAPL ; syndrome primitif des antiphospholipides.- TM : échocardiographie en mode M. - VG : ventricule gauche. - VTD : volume télédiastolique. - VTS : volume téléystolique. 11