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Géométrie dans les espaces préhilbertiens
Pour ce chapitre (E, h· | ·i)est un espace préhilbertien et k·k est la norme associée.
13.1 Mesures de l’angle non orienté de deux vecteurs non
nuls
L’inégalité de Cauchy-Schwarz nous dit que pour tous vecteurs xet ynon nuls dans E, on
a :
1hx|yi
kxkkyk1,
ce qui implique qu’il existe un unique réel θdans [0, π]tel que :
hx|yi= cos (θ)kxkkyk.
Le réel θest la mesure dans [0, π]de l’angle géométrique (ou angle non orienté) que font les
vecteurs xet ydans E− {0}.On note [
(x, y)cette mesure. On a donc :
[
(x, y) = arccos µhx|yi
kxkkyk[0, π].
Pour θ∈ {0, π},on a |hx|yi| =kxkkyk,ce qui équivaut à dire que les vecteurs xet ysont
liés (cas d’égalité dans l’inégalité de Cauchy-Schwarz).
Pour θ=π
2,on a hx|yi= 0 et les vecteurs x, y sont orthogonaux.
De manière générale, on a :
kx+yk2=kxk2+ 2 cos (θ)kxkkyk+kyk2
θest la mesure dans [0, π]de l’angle que font les vecteurs non nuls xet y.
On peut remarquer que si λ, µ sont deux réels strictement positifs, alors :
\
(λx, µy) = arccos µhx|yi
kxkkyk=[
(x, y)
ce qui permet de définir la mesure dans [0, π]de l’angle géométrique de deux demi-droites
1=R+x1et 2=R+x2par : \
(∆1,2) = \
(x1, x2)
x1est un vecteur directeur de 1et x2un vecteur directeur de 2.
On dit parfois que \
(∆1,2)est l’angle géométrique ou l’écart angulaire de 1et 2.
On a :
247
248 Géométrie dans les espaces préhilbertiens
\
(∆1,2) = 0 si, et seulement si, 1= ∆2;
\
(∆1,2) = πsi, et seulement si, 1=2(i. e. 1et 2sont opposées) ;
\
(∆1,2) = π
2si, et seulement si, 1et 2sont orthogonales.
13.2 Sphères dans un espace préhilbertien
Le fait de disposer d’une norme sur Epermet de définir les notions de sphère et de boule
ouverte ou fermée dans E.
Définition 13.1 On dit qu’une partie Sde Eest une sphère s’il existe un point ωdans Eet
un réel Rpositif ou nul tels que :
S={xE| kxωk=R}
On dit alors que ωest un centre et Run rayon de cette sphère.
On notera S(ω, R)une telle sphère.
Il semble intuitif que le centre et le rayon d’une sphère sont uniquement déterminés, c’est ce
que nous allons vérifier.
Théorème 13.1 Le centre et le rayon d’une sphère sont uniquement déterminés.
Démonstration. Soit S=S(ω, R)une sphère.
Si R= 0,on a alors S={ω}et il n’y a rien à prouver.
On suppose donc que R > 0.
Pour tous x, y dans S=S(ω, R),on a :
kyxk ≤ kyωk+kωxk= 2R
l’égalité étant réalisée pour (x, y) = (ω+Ru, ω Ru)S2kuk= 1 (pour tout vecteur non
nul vEle vecteur u=1
kvkvest de norme 1). On a donc :
2R= sup
(x,y)S2kyxk
ce qui prouve l’unicité du rayon R.
Si a, b dans S(ω, R)sont tels que kbak= 2R, on a l’égalité :
kbak=kbωk+kωak= 2R
et il existe un réel λ > 0tel que bω=λ(ωa)(cas d’égalité dans l’inégalité de Minkowski).
Avec kbωk=kωak=R > 0,on déduit que λ= 1 et ω=1
2(a+b),ce qui prouve l’unicité
du centre ω.
Définition 13.2 Si S(ω, R)une sphère de centre ωet de rayon R, on appelle diamètre de
S(ω, R)tout segment [a, b]a, b sont deux points de Stels que kbak= 2R.
Définition 13.3 Soient ωun point de Eet Run réel positif ou nul.
La boule fermée [resp. ouverte] de centre ωet de rayon Rest l’ensemble :
B(ω, R) = {xE| kxωk ≤ R}
[resp.
B(ω, r) = {xE| kxωk< R}]
Sphères dans un espace euclidien 249
Remarque 13.1 Pour R= 0,on a S(ω, R) = B(ω, R) = {ω}et
B(ω, R) = .
Dans le cas où ω= 0 et R= 1,on dit que S(0,1) [resp. B(0,1)] est la sphère [resp. boule]
unité.
Si R > 0,le centre ωn’est pas dans S(ω, R)et on a vu dans la démonstration du théorème
précédent que S(ω, R)contient au moins deux points.
Dans le cas où Eest une droite dirigée par e1de norme 1,on a, pour R > 0:
(xS(ω, R)) (|x1ω1|=R)(x1=ω1±R)
c’est-à-dire que S(ω, R)est réduit aux deux points {ω1R, ω1+R}.
Si Eest de dimension 2,une sphère est appelée cercle.
L’utilisation de l’identité polaire pour le produit scalaire nous fournit une autre définition
géométrique d’une sphère.
Théorème 13.2 Soient a, b deux points de E. L’ensemble :
S={xE| hxa|xbi= 0}
est une sphère de centre ω=a+b
2et de rayon R=°
°
°
°
ba
2°
°
°
°(sphère de diamètre [a, b]).
Démonstration. En utilisant l’identité polaire, on a :
hxa|xbi=1
4¡k(xa) + (xb)k2− k(xa)(xb)k2¢
=°
°
°
°xa+b
2°
°
°
°
2
°
°
°
°
ba
2°
°
°
°
2
et :
(xS)µ°
°
°
°xa+b
2°
°
°
°=°
°
°
°
ba
2°
°
°
°
ce qui signifie que Sest la sphère de centre ω=a+b
2et de rayon °
°
°
°
ba
2°
°
°
°.
Cette sphère passe par aet b. Pour R > 0et Ede dimension 2,on retrouve la caractérisation
du cercle de diamètre [a, b]dans le plan euclidien comme l’ensemble des points xtels que le
triangle axb soit rectangle en x(figure 13.1).
13.3 Sphères dans un espace euclidien
Dans le cas où Eest un espace euclidien de dimension n2(le cas n= 1 étant trivial),
l’utilisation d’une base orthonormée permet de donner une définition analytique d’une sphère.
On suppose, a priori, que le rayon Rd’une sphère S(ω, R)est non nul.
Si B= (ei)1inest une base orthonormée de Eeuclidien, on a alors en notant x1,··· , xn
les coordonnées d’un vecteur xEdans cette base :
(xS(ω, R)) Ãn
X
k=1
(xkωk)2=R2!
Ãn
X
k=1
x2
k2
n
X
k=1
ωkxk+
n
X
k=1
ω2
kR2= 0!
250 Géométrie dans les espaces préhilbertiens
x
a+b
2
b
a
Fig. 13.1 – Sphère : hxa, x bi= 0
Réciproquement si ω1,··· , ωnet csont des réels, alors en notant ω=
n
X
k=1
ωkek,l’ensemble
des vecteurs x=
n
X
k=1
xkekde Etels que :
n
X
k=1
x2
k2
n
X
k=1
ωkxk+c= 0
est :
l’ensemble vide si c > kωk2=
n
X
k=1
ω2
k;
réduit à {ω}si c=kωk2;
la sphère de centre ωet de rayon R=qkωk2csi c < kωk2.
Il suffit en effet d’écrire que :
n
X
k=1
x2
k2
n
X
k=1
ωkxk+c=
n
X
k=1
(xkωk)2+c
n
X
k=1
ω2
k.
Dans le cas où Eest un plan euclidien, on peut donner une représentation paramétrique
d’un cercle.
Pour ce faire, on rappelle que si u, v sont deux réels tels que u2+v2= 1,il existe un unique
réel θdans ]π, π]tel que u= cos (θ)et v= sin (θ)(voir la définition de l’argument d’un
nombre complexe non nul).
Désignant par B= (e1, e2)une base orthonormée de E, on en déduit que tout point xdu
cercle S(ω, R)s’écrit de manière unique x=x1e1+x2e2avec :
½x1=ω1+Rcos (θ)
x2=ω2+Rsin (θ)
Sphères dans un espace euclidien 251
avec θ]π, π].
En écrivant (x1, x2) = (ρcos (t), ρ sin (t)) et (ω1, ω2) = (rcos (α), r sin (α)) ρ=kxk,
r=kωket α, t réels, on a aussi :
(xS(ω, R)) ¡ρ22ρr (cos (t) cos (α) + sin (t) sin (α)) + r2R2= 0¢
¡ρ22ρr cos (tα) + r2R2= 0¢
Ce cercle passe par 0si, et seulement si r=kωk=Ret dans ce cas, on a :
(xS(ω, R)) (ρ(ρ2rcos (tα)) = 0)
On en déduit qu’une équation polaire d’un cercle passant par 0est donnée par ρ= 2rcos (tα)
tdécrit Ret ρ=kxk(t=α+π
2donne le point 0du cercle).
Dans le cas où n= 3,on peut aboutir à une représentation paramétrique de S(ω, R)dans
une base orthonormée B= (e1, e2, e3)de Ecomme suit.
Pour xS(ω, R),on a :
x3ω3=hxω|e3i=kxωkke3kcos (θ3) = Rcos (θ3)
avec θ3=\
(xω, e3)[0, π]et de :
(x1ω1)2+ (x2ω2)2=R2(x3ω3)2
=R2¡1cos2(θ3)¢=R2sin2(θ3)
avec sin (θ3)0,on déduit qu’il existe un réel θ2]π, π]tel que :
x1=ω1+Rcos (θ2) sin (θ3)
x2=ω2+Rsin (θ2) sin (θ3)
x3=ω3+Rcos (θ3)
(13.1)
Réciproquement, on vérifie facilement que (13.1) définit la sphère de centre ωet de rayon R.
Pour n= 4,de :
x4ω4=hxω|e4i=kxωkke4kcos (θ4) = Rcos (θ4)
avec θ4[0, π]et :
(x1ω1)2+ (x2ω2)2+ (x3ω3)2=R2sin2(θ4)
on déduit, en remplaçant Rpar Rsin (θ4)0,que :
x1=ω1+Rcos (θ2) sin (θ3) sin (θ4)
x2=ω2+Rsin (θ2) sin (θ3) sin (θ4)
x3=ω3+Rcos (θ3) sin (θ4)
et la paramétrisation :
x1=ω1+Rcos (θ2) sin (θ3) sin (θ4)
x2=ω2+Rsin (θ2) sin (θ3) sin (θ4)
x3=ω3+Rcos (θ3) sin (θ4)
x4=ω4+Rcos (θ4)
avec θ2]π, π]et θ3, θ4dans [0, π].
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