La tuberculose à bacilles multirésistants en Algérie Fadila Boulahbal Institut Pasteur d’Algérie INTRODUCTION (1) • La tuberculose : maladie contagieuse • La transmission par un malade TPM+ • Les sujets vivant dans le ménage sont les premiers exposés • La morbidité est aggravée par – La promiscuité – la pauvreté – Marginalisation sociale – L’infection par le VIH INTRODUCTION (2) • La surveillance régulière de la résistance du bacille de la tuberculose aux antibiotiques est un critère d’évaluation des mesures de lutte antituberculeuse • Les tuberculeux déjà traités sont la source de dissémination des bacilles résistants dans la communauté • La prévalence de la résistance est associée à la proportion de malades déjà traités pris en charge dans les services de santé • La résistance chez les nouveaux cas est la conséquence de la résistance chez les cas déjà traités La Résistance de M.tuberculosis aux antibiotiques • Mutation chromosomique – Spontanée – Phénomène rare – Phénomène héréditaire – Stable – Spécifique Génome de M.tuberculosis Souche H37Rv Cole ST, et al. Nature 1998 Émergence de la résistance • Résistance à 1 médicament – Sélection de mutants résistants sous l’effet d’une mauvaise chimiothérapie administrée à un malade porteur initialement d’une souche sensible • Résistance à 2 médicaments – Sélection de mutants résistants sous l’effet d’une mauvaise chimiothérapie administrée à un malade porteur d’une souche déjà résistante à un médicament • Résistance à plus de 2 médicaments – Conséquence d’erreurs successives chez les malades chroniques Principales causes de la résistance aux médicaments • Mono thérapie (?) • Régimes inefficaces ou inadaptés au cas • Addition successive de médicaments • Antibiotiques de mauvaise qualité • Chimiothérapie irrégulière avec interruptions et reprises incontrôlées Régimes de traitement de la tuberculose • Cat. 1: 2HRZE / 4HR ( Nouveau cas) • Cat. 2: 2SHRZE / 1 HRZE/ 5HRE (1er échec-rechute) • Cat 3: 2HRZ / 4HR • Cat 4: 4-6 EthOKZC / 18-20 EthOZ ( TB chronique, rechute Cat 2, TB MDR prouvée) ( PI, TEP) Définition • La résistance acquise – Résultat d ’erreurs commises dans la prescription ou dans le suivi du traitement – Reflet de la mauvaise prise en charge des malades admis au traitement et de l ’anarchie thérapeutique Définition • La résistance primaire – Résultat de la transmission de bacilles résistants à un nouveau cas – Reflet de l ’importance du réservoir de bacilles résistants représenté essentiellement par les tuberculeux chroniques Définition • La multirésistance (MDR): résistance simultanée à au moins isoniazide et rifampicine ( RA ou RP) Définition • L’ultrarésistance (XDR): résistance à l’isoniazide et la rifampicine ainsi qu’aux fluoroquinolones et un des aminosides de réserve: kanamycine, amikacine ou capréomycine ( HROK) Données algériennes sur la résistance de la tuberculose aux médicaments La Résistance acquise 1967 79,9% Taux observés 2007 25,3% La proportion de malades déjà traités parmi tous les patients mis sous traitement dans la même année d’observation était de 61,2% 10% Tendance de la Résistance Acquise ( Région d ’Alger) Années • • • • • • • 65-67 75-80 81-85 86-90 91-95 96-04 05-08 Taux RA% 81,9 61,5 35,7 21,0 20,8 32,3 25,3 MDR% ND 2,4 10,8 11,5 15,6 22,2 21,8 La résistance primaire 1967 17,1% Taux observés 2007 4,9% Tendance de la Résistance primaire ( Région d ’Alger) Années – 67-70 – 71-79 – 1980 – 80-85 – 86-90 – 1997 – 98- 04 – 05- 08 Taux RP (%) 15,0 10,1 8,2 6,3 5,2 4,5 4,3 4,9 Enquête prospective Enquête prospective Données épidémiologiques Multirésistance dans le monde (estimation) • 5% des cas de TB déclarés chaque année • 400 000 cas par an – 200 000 chez des patients non traités (2%) – 200 000 chez des patients déjà traités ( 20%) Tendance de la résistance acquise de 2005 à 2008 NBre % MDR% • 2005 226 27,8 26,5 • 2006 201 22,8 18,9 • 2007 221 28,9 24,8 • 2008 148 19,5 14,1 Total 796 25,3 21,8 Malades déjà traités testés en 2007 Total 220 malades Malades enregistrés pour la première fois: 180 Sensibles: 134 Résistants: 46 RàH 05 R à SM 02 R à H+S 01 MDR 38 25,5% 21,1 Malades déjà enregistrés : 40 Sensibles 23 Résistants 18 R à SM 01 MDR 17 45% 42,5% Tendance de la résistance primaire de 2005 à 2008 NBre % MDR% • 2005 559 4,1 2,5 • 2006 584 5,4 2,0 • 2007 352 5,3 2,5 • 2008 351 5,1 1,9 1846 4,9 2,2 Total Résultats des Enquêtes Nationales Résistance Secondaire 1988 ( 11/52) 21% MDR: 6 2002 Primaire ( 21/243) 8.6% 11,5 MDR: 3 1,2% (4/22) 18% (34/574) 5.9% MDR: 2 13,5 MDR: 8 1,4% Les défis actuels • Insuffisance de structures de santé accessibles, efficaces et contrôlés • Insuffisance et Irrégularité des approvisionnements des laboratoires • Accessibilité limitée aux techniques rapides de diagnostic de la résistance • Fréquence encore élevée des interruptions de traitement • Manque de nouvelles molécules efficaces pour le retraitement des cas de TB MDR et XDR • Manque de médicaments actifs sur les bacilles persistants/dormants ( TB latente) Moyens de prévention et de lutte contre la tuberculose résistante La prévenir • Eviter la monothérapie sous toutes ses formes • Faire un antibiogramme chez tout malade suspect de tuberculose à bacilles résistants d’emblée ( RP méconnue) • Rechercher les facteurs de risque d’abandon du traitement • Prescrire le régime thérapeutique le mieux adapté au cas et préférer les associations à doses fixes • Surveiller la prise régulière des médicaments • Relancer régulièrement la motivation du patient et de son entourage au respect du régime thérapeutique La diagnostiquer •Créer les laboratoires pour le diagnostic: culture en 1er et TS en 2ème •La MDR est fréquente chez les cas chroniques ou échecs •La MDR, élément de mauvais pronostic ( absence de nouvelles molécules aussi efficaces et aussi bien tolérées que H et R) •Diagnostiquer la MDR le plus tôt possible ( cas chronique, contact d’un cas MDR connu) •Appliquer les techniques moléculaires détectant les mutations dans les gènes RpoB (Rif), KatG et inhA ( H) chaque fois que le cas l’exige pour adapter le régime thérapeutique, guérir le patient et réduire les risques de transmission aux sujets contacts La traiter Antibiotiques disponibles pour traiter les tuberculoses multirésistantes • Fluoroquinolones ( ofloxacine, moxifloxacine, Gatifloxacine) • Aminosides (amikacine, kanamycine, capréomycine) • Pyrazinamide • Ethionamide • Ethambutol ( si souche encore sensible) • Cyclosérine ( si bien tolérée) CONCLUSION •Problème de santé publique: risque de transmission •Y penser chaque fois qu’un cas R ou MDR est connu dans l’entourage d’un nouveau cas • Demander un test de sensibilité dès que l’éventualité d’une TB MDR est posée • Pratiquer les techniques moléculaires de diagnostic si disponibles (après évaluation du risque afin d’en limiter le coût) •Adapter le traitement à l’antibiogramme du cas index si disponible Conclusion (1) • Les efforts consentis dans la lutte contre la tuberculose en Algérie depuis plus de 40 ans ont conduit à un recul important de la résistance bacillaire • A Alger comme à l ’échelle nationale, la résistance chez les tuberculeux nouveaux cas, est basse. • Dans ce groupe de malades, la résistance à l ’association INH et Rifampicine ( MDR) est encore faible, mais sa surveillance régulière est nécessaire pour évaluer la qualité de la prise en charge des tuberculeux mis sous traitement. • Les rares cas de résistance primaire à bacilles MDR ont été identifiés dans l ’entourage immédiat de tuberculeux chroniques porteurs de souches MDR. La résistance chez les patients déjà traités est également faible, près de 80% des souches de malades en retraitement après une première cure bien conduite sont encore sensibles aux drogues de la première ligne. La place de la résistance acquise dans le réservoir de germes s’est considérablement réduite: en 1964, elle représentait plus de 80%, elle est légèrement au dessus de 20% actuellement. L’incidence des souches résistantes à l ’isoniazide et à la rifampicine ( MDR) est heureusement faible, (moins de 100 nouveaux cas par an) ce qui explique la rareté de la résistance primaire à ces deux drogues. Pour réduire encore plus le risque de sélection de bacilles résistants, l’attitude la plus rationnelle est de ne plus en créer par une prise en charge rigoureuse des malades admis au traitement. Conclusion (2) • La baisse générale de la résistance est liée à une amélioration considérable de la prise en charge des malades pendant leur traitement, à la meilleure formation et sensibilisation du personnel médical devenu plus concerné par la guérison des malades. • De 1965 à 1995, les taux de la RA et de la RP ont baissé progressivement et parallèlement, reflétant les résultats d’une bonne application des directives nationales de lutte contre la tuberculose • De 1996 à 2007, les taux de la résistance acquise et celui de la MDR évalués sur les souches reçues au laboratoire montrent une tendance à l’augmentation, mais cela est probablement lié à une sélection des malades pour lesquels un antibiogramme est demandé • L’analyse du profil des résistances montre un changement dans les drogues concernées: si le taux de la RA baisse globalement, celui des souches MDR tend à augmenter dans le temps • Cette situation est liée à la pression de sélection exercée par l’utilisation répétée de l’association INH et Rif faute de drogues alternatives aussi efficaces • Il est devenu extrêmement urgent de disposer de nouvelles drogues au moins aussi efficaces que l’a été la Rifampicine en 1969 pour guérir les tuberculeux chroniques porteurs de bacilles MDR