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Olerê, “je veux voir” : Contradictions - concepts et répresentations 
 
  
 
Préambule  
Le troisième rivage du fleuve  de João Guimarães Rosa: coups de pinceau... 
      ... Notre père ne répondait rien ... Notre père était homme de parole, ordonné, positif... 
Notre  maison,  à  époque,  était  encore  plus  proche  du  fleuve,  quelque  chose  comme 
moins  d'un  quart  de  lieue:  le  fleuve  s'y  étendait  imposant,  profond,  muet  comme 
toujours. Large au point qu'on ne pouvait deviner le contour de l'autre rive... Mais il se 
passa qu'un jour, notre père se fit construire une barque... Et je ne puis oublier le jour où 
la barque a été terminée... Notre mère, on crut qu'elle allait se metre en colère, mais elle 
persita dans la blancheur de sa pâleur, elle se mordilla les lèvres et brama enfin:  — 
"T'en vas, t'y restes, tu ne reviens plus jamais!" ... Notre père suspendit sa réponse. 
 
      ... Et la barque s'en alla — avec son ombre, pareille à un crocodile, longue, longue... 
Seulement il mettait à éxecution l'idée de demeurer dans ces espaces du fleuve, à mi-
chemin, toujours dans la barque, sans la quitter, pour toujours ... On dût s’y faire ... car 
on ne s'en fit vraiment jamais, en fait. ... Notre père passait au large, aperçu ou dilué... 
dans mes vouloirs et non vouloirs ... Il ne touchait aucune des deux rives ... — ce qui 
n'était pas la vérité exacte; mais c'était le faux pour le vrai ... 
 
     ... Notre père ne revint pas. Il n'était parti nulle part. Seulement, il mettait à exécution 
l'idée de demeurer dans ces espaces du fleuve, à mi-chemin, toujours dans la barque, 
sans la quitter, pour toujours. Cette vérité étrange réussit à accabler complèthèment tout 
le monde. Ce qui n'existait pas arrivait... Loin, dans le introuvable? Tout seul dans l'au-
loin, assis au fond de sa barque suspendue sur le fleuve lisse ... Les temps changeaient, 
dans la lenteur rapide des temps... et le fleu-fleu-fleuve, le fleuve — créant le perpétuel 
... Personne n'est fou. Ou bien, tout le monde... Petite barque de rien du tout, dans cette 
eau, aux longues rives, qui ne s'arrête pas: et, moi, fleuve en aval, fleuve  en dérive, 
fleuve en dedans — le fleuve. 
 
 
Des Rivages Exprimables chez  João Guimarães Rosa
 
Sous la forme d’un espace pour les mots: 
Espace des mots qui mettent en péril ce qu’ils nomment, 
 
 ROSA: Premières Histoires. “Le troisième Rivage du Fleuve". Paris. 1982. p. 35-41 
 Ce texte a été composé à partir de ces livres : CAUQUELIN: 2008; RINALDO de F.(organizador). 2006 à partir 
des textes de: JOBIM.; SANT’ANNA; ANDRADE; ACCIOLY; et des compositions musicales de JOBIM, Antonio 
Carlos.