Le sous-groupe de Frattini
Agrégation externe
2015-2016
1 – Sous-groupes maximaux
Un groupe G6= 1 finiment engendré possède un sous-groupe maximal.
Proposition 1
Démonstration. Soit Sun système fini et minimal de générateurs de G. Fixons un élément sS
et posons T=S− {s}. Par minimalité de S, le sous-groupe Hengendré par Test strictement
contenu dans G. L’ensemble des sous-groupes de Gcontenant Het pas sétant inductif, le lemme
de Zorn affirme qu’il possède un élément maximal K. Soit L > K un sous-groupe de G. Par
maximalité de K, on a xKet, par conséquent, SK, ce qui amène à K=G. Le sous-groupe
Kest donc maximal.
Exercice. Fournir un exemple de groupe non finiment engendré possédant un sous-groupe maxi-
mal.
Exercice. Montrer que Qne possède pas de sous-groupe maximal (voir théorème 4).
Un sous-groupe distingué Hd’un groupe Gest maximal si et seulement s’il est d’indice
premier.
Proposition 2
Démonstration. On rappelle que la projection canonique de Gsur G/H induit une bijection entre
les sous-groupes de G/H et les sous-groupes de Gcontenant H. En particulier, Hest maximal
si et seulement si G/H ne possède pas de sous-groupes autres que 1et G. Dans ce cas, G/H est
forcément cyclique, engendré par tout élément différent de l’élément neutre. Il est alors d’ordre
premier, sinon il contiendrait un sous-groupe propre différent de 1. La réciproque est immédiate.
Nous terminons ce paragraphe avec quelques supplément dans le cas abélien.
Soit kun corps. Tout k-espace vectoriel Vpossède une base.
Lemme 3
1
Démonstration. L’ensemble des familles libres de Vétant filtrant, le lemme de Zorn affirme qu’il
possède un élément maximal B. Pour tout vV, la famille B∪ {v}n’est donc pas libre ; il existe
des éléments u1, . . . , unBet x0, x1, . . . , xnktels que
x0v+x1u1+· · · +xnun= 0.
Ne pouvant pas avoir x0= 0 (la famille Bétant libre), on en déduit que vest combinaison linéaire
de u1, . . . , un. La famille Bétant génératrice, c’est une base.
Pour tout groupe abélien G(noté additivement) et tout entier n, notons nG l’image de l’ho-
momorphisme g7→ ng. On dit que Gest n-divisible si nG =G. Le groupe Gest divisible s’il est
n-divisible pour tout entier nnon nul.
Exercice. Montrer qu’un groupe abélien est divisible si et seulement s’il est p-divisible pour tout
premier p.
Exercice. Montrer qu’un groupe abélien fini est n-divisible si et seulement si nest premier avec
son ordre.
Exercice. Montrer que si un groupe abélien est divisible, il en est de même pour tous ses quotients.
Un groupe abélien Gest divisible si et seulement s’il ne possède aucun sous-groupe
maximal.
Théorème 4
Démonstration. Supposons d’abord que H < G est maximal. D’après la proposition 2, le quotient
G/H est d’ordre premier et n’est donc pas divisible. Le groupe Gne peut donc pas être divisible
(cf. l’exercice ci-dessus). Réciproquement, si Gn’est pas divisible, il n’est pas p-divisible pour un
premier p. Le quotient G/pG n’est donc pas trivial et possède une structure naturelle de Fp-espace
vectoriel. D’après le lemme 3, il est isomorphe à une somme directe LiIFp. La projection sur
l’un des facteurs directs définit alors un homomorphisme surjectif G/H Fp. En le composant
avec la projection canonique GG/H, on obtient un épimorphisme GFp. Le théorème de
factorisation affirme alors qu’il existe un sous-groupe de Gd’indice pet la proposition 2 affirme
qu’il est maximal.
2 – Le sous-groupe de Frattini
Dans ce paragraphe, nous allons montrer que les sous-groupes maximaux sont étroitement liés
aux éléments générateurs d’un groupe. Le réultat ci-dessous en est une première illustration.
Si un groupe fini Gpossède nsous-groupes maximaux alors il possède une famille géné-
ratrice formée par au plus néléments.
Proposition 5
Démonstration. Notons H1, . . . , Hnles sous-groupes maximaux de Get, pour tout i∈ {1, . . . , n},
choisissons un élément xin’appartenant pas à Hi. Le sous-groupe Hengendré par x1, . . . , xnn’est
contenu dans aucun sous-groupe maximal, ce qui implique qu’il coïncide avec G.
2
Si un groupe fini possède un seul sous-groupe maximal alors il est cyclique.
Corollaire 6
Démonstration. Immédiat.
Un élément gd’un groupe Gest superflu, mou, ou encore un non-générateur si, pour tout
sous-ensemble Sde G, la condition suivante est remplie :
hS, gi=G⇒ hSi=G.
L’ensemble Φ(G)des éléments superflus d’un groupe Gest un sous-groupe caractéris-
tique, appelé sous-groupe de Frattini.
Proposition 7
Démonstration. L’ensembe Φ(G)est clairement non vide, car il contitent l’élément neutre de G.
Afin de montrer que c’est un sous-groupe, il suffit alors de vérifier que, étant donnés x, y Φ(G),
on a xy1Φ(G): supposons d’avoir la relation hS, xy1i=G. On a alors les identités
G=hS, xy1i=hS, xy1, x, yi=hS, x, yi=hS, xi=hSi,
les deux dernières égalités provenant du fait que xet ysont superflus. On en déduit donc ce
l’élément xy1est superflu. Le fait que Φ(G)est caractéristique découle du fait que, pour toute
partie SGet tout automorphisme σde Gon a la relation hSi=Gsi et seulement si hσ(S)i=
G.
Si G6= 1 et Φ(G)est finiment engendré alors on a l’inclusion stricte Φ(G)< G.
Corollaire 8
Démonstration. Soient x1, . . . , xndes générateurs de Φ(G). Si l’on avait Φ(G) = G, on aurait alors
les identités
G=hx1, . . . , xni=hx1, . . . , xn1i=hx1i=h1, x1i=h1i= 1,
ce qui est absurde.
Le sous-groupe de Frattini Φ(G)est l’intersection des sous-groupes maximaux de G.
Théorème 9
Démonstration. Soit d’abord xGsuperflu. Pour tout sous-groupe maximal H < G, si l’on avait
x /H, on aurait alors les relations hH, xi=Gavec H6=G, ce qui est absurde. On en déduit donc
que le sous-groupe de Frattini est contenu dans l’intersection des sou-groupes maximaux de G.
Soit mainetnant xGnon superflu et fixons une partie Sde Gtelle que hS, gi=Gmais hSi 6=G.
L’ensemble des sou-groupes de Gcontenant Set pas xest non vide (car il contient le sous-groupe
engendré par S) et clairement filtrant ; par le lemme de Zorn, il possède donc un élément maximal
H. Montrons que Hest un sous-groupe maximal : tout sous-groupe Kde Gstrictement contenant
Hcontient xet S; il contient alors le sous-groupe qu’ils engendrent et coïncide donc avec G.
On en déduit que xn’appartient pas à l’intersection des sou-groupes maximaux, ce qui achève la
démonstration.
3
Remarques.
Tout d’abord, une convention : si Pest un ensemble de parties d’un ensemble S, notons
i(P)Sl’intersection de ses éléments. On pose alors i() = S. Cette convention, qui
peut sembler déroutante à un premier abord, est justifiée par le raisonnement suivant : on a
clairement la relation i(P)i(Q) = i(P ∪Q). On doit donc avoir l’identité i()i(P) = i(P),
et ce pour tout P, d’où l’assertion. Dans le cas présent, si Gne possède pas de sous-groupes
maximaux, leur intersection est donc Gtout entier.
La proposition 7découle immédiatement du résultat ci-dessus. Nous avons cependant pré-
féré en donner une démonstration directe.
Pour tout groupe G, les conditions suivantes sont équivalentes :
On a l’inclusion stricte Φ(G)< G,
le groupe Gpossède au moins un sous-groupe maximal.
Corollaire 10
Démonstration. Immédiat.
Le résultat suivant est l’analogue de la proposition 1.
Si G6= 1 et Φ(G)est finiment engendré alors Gpossède au moins un sous-groupe
maximal.
Corollaire 11
Démonstration. D’après le corllaire 8, si Φ(G)est finiment engendré alors on a l’inclusion stricte
Φ(G)< G ; le corollaire 10 permet alors de conclure.
3 – Le cas des p-groupes
Dans la suite, par p-groupe nous entendons un groupe fini d’ordre une puissance d’un nombre
premier p. Nous aurons besoin de quelques compléments sur les p-groupes. On rappelle que le
normalisateur d’un sous-groupe Hd’un groupe Gest le sous-groupe
NG(H) = {gG|g1Hg =H}.
Pour tout sous-groupe propre Hd’un p-groupe G, on a l’inclusion stricte H < NG(H).
Proposition 12
Démonstration. Le résultat est clair si Hest distingué. Dans le cas contraire le sous-groupe NG(H)
opère par conjuguaison sur l’ensemble Sdes conjugués de Hdistincts de H. On remarquera que,
pour tout gG, on a la relation
NG(g1Hg) = g1NG(H)g.
Dans le cas présent, la formule des classes se traduit par l’identité
[G:NG(H)] 1 = X
[g1Hg]S/NG(H)
[NG(H) : NG(H)g1NG(H)g].
4
Par hypothèse, le terme de gauche de cette égalité est congru à 1modulo p. Si l’on avait la
relation NG(H) = H, le terme de droite serait alors divisible par p, ce qui est absurde.
Pour tout sous-groupe Hd’un p-groupe G, les conditions suivantes sont équivalentes :
1. Hest maximal,
2. Hest distingué et d’indice p,
3. Hest d’indice p.
Corollaire 13
Démonstration. Seule l’implication (1) (2) n’est pas immédiate. Soit donc Hun sous-groupe
maximal de G. D’après la proposition 12, il est strictlement contenu dans son normalisateur et, par
maximalité, il est donc distingué. Dans ce cas, la rpoposition 2affirme qu’il est d’indice premier,
nécessairement égal à p.
Pour tout p-groupe G, considérons son sous-groupe dérivé G0et notons Gple sous-groupe
engendré par les puissances p-èmes de ses éléments.
Le sous-groupe de Frattini d’un p-groupe Gest engendré par G0et Gp.
Théorème 14
Démonstration. Soit Hle sous-groupe de Gengendré par G0et Gp. D’après le corollaire ci-dessus,
pour tout sous-groupe maximal Kde G, le quotient G/K est cyclique d’ordre p. Il s’en suit que
tout commutateur et toute puissance p-ème appartiennent à K. Le sous-groupe Hest donc contenu
dans Ket, par le théorème 9, on obtient l’inclusion HΦ(G). Pour la réciproque, on commence
par remarquer que le quotient G/H possède une structure canonique de Fp-espace vectoriel. Si
xGn’appartient pas à Halors le théorème de la base incomplète affirme qu’il existe des
éléments y1, . . . , yrGtels que les images des éléments x, y1, . . . , yndans G/H forment une base.
On obtient alors les relations
hH, x, y1, . . . , yni=Get hH, y1, . . . , yni 6=G,
ce qui implique que xn’est pas superflu. On a donc l’inclusion Φ(G)H, ce qui conclut la
démonstration.
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