Amundi Discussion Papers Series
DP-09-2015
Février 2015
ALLOUER L’ÉPARGNE À L’INVESTISSEMENT :
LE NOUVEAU RÔLE DES GESTIONNAIRES D’ACTIFS
Yves Perrier, Directeur général dAmundi
Réservé aux investisseurs professionnels
Amundi Discussion Papers Series - DP-09-2015
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Résumé
L
a « Grande Récession » a mis en exergue des changements
importants : des rendements décroissants pour les facteurs de
production, des innovations technologiques et des investissements
productifs insuffisants ou insuffisamment porteurs en termes de croissance
future… Or investir dans l’économie pour la croissance de demain, c’est
investir dans des projets et dans des entreprises souvent de taille morée.
Il faut avant tout pour cela i) que l’épargne soit mieux allouée en termes
de supports, afin de favoriser l’épargne longue et les actifs « risqués ». La
fiscalité et l’éducation seront en ce sens des apports incontournables ; ii)
que les flux d’épargne circulent mieux au niveau européen, afin de mieux
orienter les excédents d’épargne du Nord vers les déficits d’investissement
du Sud.
Les gestionnaires dactifs, qui gèrent lépargne privée et l’épargne institutionnelle,
se trouvent naturellement au carrefour de ces circuits nanciers, et ils jouent
un rôle majeur entre les besoins de rendement des investisseurs (qu’ils soient
domestiques ou internationaux) et les besoins d’investissement des entreprises
(qu’elles soient petites ou grandes). Il est de ce fait crucial de ne pas contraindre
le potentiel des entreprises développant de nouvelles technologies, à cause d’une
mauvaise méconnaissance de leurs activités, de cadres de régulation inadaptés,
mais aussi, en allouant les capitaux de façon inadéquate. C’est en particulier sur
ce dernier point que se trouve l’apport des gestionnaires d’actifs.
Article à paraître dans « Financement de l’économie : de nouveaux canaux pour la
croissance », Banque de France, Revue de la Stabilité Financre - N° 19, avril 2015
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Introduction
Comment favoriser l’investissement productif ? Voilà sans aucun doute une
des questions cruciales dans lenvironnement économique actuel. Le texte qui
suit met en perspective le contexte actuel, et développe des solutions, vues par
un gestionnaire d’actifs en lien avec des investisseurs long terme, nationaux et
internationaux.
1 - Investissement des entreprises :
un double enjeu, la croissance et lemploi
Lexcès de dette et de déficits a conduit le Japon, puis les États-Unis et
l’Europe, dans la mise en place de politiques monétaires très fortement
expansionnistes et de politiques budgétaires et fiscales très fortement
restrictives. Au total, l’austérité budgétaire et les largesses monétaires ont
apaisé la sphère financière mais ont révélé au grand jour les lacunes de la
sphère économique :
•Des moles de croissance non soutenables, avec notamment des excès
de crédit ;
•Des divergences fortes entre les pays dans une zone euro où la
convergence devait être la référence.
Sans le levier apporté par le cdit pendant plus d’une décennie, la réalité
est apparue au grand jour, et elle est peu flatteuse :
•Linvestissement est en panne, à peu près partout en zone euro ;
•La croissance potentielle a partout été révisée à la baisse : aux États-
Unis, au Japon, au Royaume-Uni, en Allemagne, en France, en zone euro
et même en Chine. Elle est désormais : de 1 % en zone euro ou au Japon,
et un peu plus de 2 % aux États-Unis ;
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LE NOUVEAU RÔLE DES GESTIONNAIRES
D’ACTIFS
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•Le taux de chômage reste élevé en Europe, car la croissance économique
est insuffisante ;
•Le taux de chômage a fortement baissé aux États-Unis, mais le taux de
participation est globalement décevant ;
•Lemploi des jeunes est extrêmement déprimé, particulièrement en
Europe.
Plus que jamais, la croissance et l’emploi sont les priorités des autorités
européennes. La Commission Juncker a notamment défini sa priorité n° 1
comme étant « le retour à la croissance en Europe et la création d’emplois sans
avoir recours à de nouvelles dettes »
1.1. Pourquoi en est-on arrivé là ?
Les tenants de la « grande stagnation » ont identifié les « vents de face »
venant peser sur la croissance et sur l’emploi :
•Le vieillissement de la population se traduit par une baisse du taux
d’activité et un déclin des gains de productivité. Les baby-boomers se
retirent graduellement de la vie active, les taux de natalité sont souvent trop
faibles et l’allongement de l’espérance de vie maintient l’effet dépressif sur
l’activité économique. Plus une population vieillit, et plus les fonds de pension
entameront rapidement leur phase de distribution, où la liquidité des actifs
devient cruciale et la prise de risque réduite. En d’autres termes, les classes
d’actifs long terme et réelles sont naturellement graduellement délaissées au
profit des actifs de taux.
•La mondialisation exerce une pression à la baisse sur les salaires des
pays avancés, conséquence de la concurrence des pays émergents et
de la délocalisation industrielle. Légalisation des prix des facteurs s’opère
inévitablement au détriment des pays aux salaires les plus élevés, i.e. les pays
avancés. Cette pression à la baisse des salaires dans les pays avancés gêne la
consommation et donc la croissance et linvestissement.
•La gestion de la crise environnementale réduira graduellement le budget
que les ménages consacrent aux autres postes de dépenses de consommation.
• Le désendettement du secteur privé et la nécessaire stabilisation de la
dette publique réduisent revenu disponible et dépenses de consommation. Le
retour de lendettement public sur une trajectoire soutenable pèsera également sur
le taux de croissance du PIB, car il contraint les politiques économiques, les pays
ayant de moins en moins les moyens de relancer la croissance et l’investissement.
•La mauvaise allocation des dépenses d’éducation : il faut aller vers une
meilleure efficacité, favoriser une orientation vers les secteurs d’avenir… afin de
retrouver le lien entre éducation est croissance, un lien qu’il est parfois difficile
de démontrer.
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•La « Grande Récession » (la récession qui a suivi la crise financière de
2008) a par ailleurs mis en exergue des changements importants : des
rendements décroissants pour les facteurs de production, et des innovations
technologiques insuffisantes, le tout conduisant à une « grande stagnation ».
Les conséquences sont assez claires :
•Des taux d’investissement et de croissance économique faibles ;
•Des taux d’inflation bas ;
•Des taux courts et longs bas ;
•Des prix d’actifs élevés ;
•Une volatilité financière plus élevée.
Il est difficile de trouver actuellement d’où peut provenir la croissance économique.
La période actuelle de faible croissance peut encore durer longtemps si l’on ne
fait rien. « La nouvelle normalité, c’est une situation de taux bas et de prix d’actifs
élevés, et ceux qui croient en une normalisation des taux d’intérêt auront tort,
c’est une quasi-certitude » (P. Krugman, Amundi International Forum, juin 2014).
1.2 - Innovations et mutations technologiques
Quand on parle de « Grande stagnation », on fait donc référence aux
déficits d’innovations, à des investissements productifs insuffisants ou
insuffisamment porteurs en termes de croissance future, à des facteurs
fortement structurels et non pas seulement conjoncturels. Les réponses
doivent donc être structurelles, et non pas seulement conjoncturelles.
Il convient de favoriser les investissements porteurs à terme de croissance. Selon
un rapport rédigé pour la Commission européenne (2010), les technologies les
plus prometteuses en termes d’innovation et de croissance sont :
•Les nouvelles technologies de communication ;
•Le développement d’énergies alternatives ;
•Les biotechnologies ;
•Les nanotechnologies ;
•La robotisation ;
•Le développement de nouveaux matériaux ;
•Les technologies relatives à la santé.
Ajoutons qu’en cette période d’agitation sur les marcs des matières premières,
le développement de technologies de stockage d’énergie revêt un caractère
particulièrement important.
Ces technologies innovantes sont bien souvent développées par des PME,
dont il faut faciliter le financement, et elles sont le support indispensable
du redressement de l’industrie européenne. Rappelons que la nouvelle
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