Les tumeurs du foie (151)

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Corpus Médical – Faculté de Médecine de Grenoble
Les tumeurs du foie (151)
Professeur Jean-Pierre ZARSKI
Avril 2003 (Mise à jour Mars 2005)
Pré-Requis :
Clinique : diagnostic des hépatomégalies PCEM2
Résumé :
La principale tumeur maligne du foie est le carcinome hépato cellulaire développé dans
90% des cas sur une cirrhose, le plus souvent d’origine alcoolique ou virale. Le
diagnostic repose sur le taux d’alpha fœto-protéine supérieur à 250 µg/l et l’échographie
abdominale. Le diagnostic est précisé par le scanner hépatique ou l’IRM. Le traitement
peut être local par résection chirurgicale, ou radiofréquence, ou plus générale par lipiodol
radioactif, voire transplantation hépatique. Les principales tumeurs bénignes du foie sont
les hémangiomes touchant 2 à 5% de la population, n’entraînant aucun symptôme et
dont le diagnostic repose sur l’échographie abdominale complétée éventuellement par
l’IRM. Les deux autres tumeurs bénignes sont l’hyperplasie nodulaire focale dont le
diagnostic repose sur l’échographie abdominale complétée par l’IRM hépatique montrant
le pédicule fibro-vasculaire central suffisant au diagnostic, mais pouvant être
éventuellement complété par une biopsie, et l’adénome hépatocytaire favorisé par un
traitement oestrogénique ou une contraception fortement dosée dont le diagnostic repose
sur l’échographie abdominale complétée éventuellement par l’angio scanner. En cas
d’adénome, l’exérèse chirurgicale est indispensable est indiquée alors que l’hyperplasie
nodulaire focale justifie l’abstention thérapeutique.
Mots-clés :
Carcinome hépatocellulaire, angiomes, hyperplasie nodulaire focale, adénome
hépatocytaire.
Références :
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Chapitre 22 : Les tumeurs malignes du foie (225-44) dans HÉPATOLOGIE Universités Francophones M. Bourel - Ellipses : Aupelf.
Chapitre 17 : Les tumeurs malignes du foie. dans Maladies du foie et des voies
biliaires. J.P. Benhamou, S. Herlinger. 4ème édition med science. Flammarion.
Exercices :
1. Introduction
1.1. Connaissances de base
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Clinique des tumeurs du foie
Anatomopathologie des tumeurs bénignes et malignes du foie
Virus et cancer
Marqueurs tumoraux
Pilule et foie
1.2. Épidémiologie et facteurs de risque
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1.2.1. Cancers primitifs
1.2.1.1. Carcinome hépatocellulaire (CHC)
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Variations géographiques de prévalence
Incidence en France : 1 - 5 / an / 100 000
Variations d'incidence liées à l'infection par les virus VHB et VHC, la
présence d'une cirrhose, des substances toxiques (Aflatoxine B1)
1.2.1.2. carcinome fibrolamellaire : rare, atteint plutôt la
femme
1.2.1.3. hépatoblastome : enfant, hépatocytes foetaux
1.2.1.4. angiosarcome : thorotrast, chlorure de Vinyle,
stéroïdes androgènes
1.2.2. Cancers secondaires
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carcinomes : colon, bronches, sein, prostate, rein
endocrines
1.2.3. Tumeurs bénignes
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hémangiomes : prévalence (1 - 2 %), Homme = Femme
adénome : rare, atteint la femme, contraceptifs oraux ++
hyperplasie nodulaire focale : rare, Homme = Femme
2. Clinique des tumeurs du foie
2.1. Forme type : CHC
2.1.1. Circonstances de découverte
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douleurs de l'hypochondre droit
altération de l'état général avec amaigrissement et asthénie
découverte systématique chez un patient, porteur d'une cirrhose
décompensation d'une cirrhose sous-jacente
2.1.2. Diagnostic positif
2.1.2.1. Examen clinique
hépatomégalie ± irrégulière, volumineuse, nodulaire, sensible, parfois soufflante
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2.1.2.2. Examens biologiques
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l'alpha-foeto-protéine : augmentée dans 60 à 95 % des CHC (> 20 ng/ml).
Taux supérieur ou égal 500 ng/ml spécifiques de CHC
autres marqueurs peu utiles
2.1.2.3. Examens morphologiques
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L'échotomographie abdominale : méthode plus spécifique que sensible : la lésion
est hypoéchogène, hyperéchogène ou mixte, unique ou multiple à contours nets ou mal
définissables. Les formes les plus fréquentes sont la forme infiltrante isoéchogène, la
forme nodulaire de petite taille hypoéchogène et la forme nodulaire de grande taille
hyperéchogène avec en son sein des zones hypoéchogènes. Ces aspects ne sont pas
spécifiques du CHC. Seule en fait la découverte d'un thrombus porta, visualisable
lorsqu'il atteint les grosses bronches portes permet d'évoquer le diagnostic.
Photo : Echographie d’un CHC :
CHC hétérogène, avec des zones nécrotiques hypoéchogènes
(J.P. Zarski)
•
La tomodensitométrie (TDM) réalisée selon le mode hélicoïdal montre avant
injection, une lésion hypodense ou rarement isodense. L'injection met en évidence le
caractère hypervascularisé de la tumeur qui prend rapidement le produit de contraste.
Photo : CHC bifocal en TDM :
A gauche, au temps artériel, important rehaussement de 2 lésions.
A droite, au temps portal, lavage des lésions apparaissant hypodense.
(J.P. Zarski)
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L'artériographie avec injection intra-artérielle hépatique d'une émulsion de
lipiodol suivie 15 jours plus tard d'un examen tomodensitométrique. Le lipiodol
injecté par voie artérielle hépatique a comme particularité de se fixer au niveau du
tissu tumoral et d'y rester plusieurs semaines à haute concentration.
•
L'IRM avec injection de ferrites montre des nodules vides de fer.
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L’IRM avec injection de gadolinium est parfois plus sensible pour dépister des CHC
de petite taille et faire le diagnostic différentiel avec nodule de régénération.
•
La ponction biopsie échoguidée à l'aiguille fine apporte une certitude diagnostique
dans 60 à 90 % des cas. Elle est indiquée dès qu'un doute persiste quant à la nature de
la tumeur.
2.1.2.4. Difficultés diagnostiques
•
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Nodules de régénération, dits "trop visibles" sur foie cirrhotique dont on sait qu'ils font
le lit du cancer.
Formes infiltrantes pour lesquelles l'imagerie peut âtre prise en défaut et qui relèvent
de la biopsie hépatique échoguidée.
Schéma : arbre décisionnel
(J.P. Zarski)
2.2. Diagnostic différentiel
Tumeurs bénignes :
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2.2.1. Adénome
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femme prenant des contraceptifs
absence le plus souvent de symptôme
échographie = lésion hypoéchogène
scanner = hypodense ou isodense, opacification massive après injection
traitement = surveillance et exérèse chirurgicale cytodiagnostique
Photo : Adénome en IRM :
Adénome en IRM en pondération T1 sans injection
(J.P. Zarski)
Photo : Adénome en IRM :
après injection de gadolinium au temps artériel : lésion se rehaussant de façon intense au temps artériel
(J.P. Zarski)
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Photo : Adénome en IRM :
au temps tardif : homogénéisation au temps portal.
(J.P. Zarski)
2.2.2. Hyperplasie nodulaire focale
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absence de symptôme
échographie zone hypo ou hyperéchogène bien limitée
scanner : zone hypo ou isodense
IRM : cicatrice centrale hyperintense en T2+++
traitement : arrêt des contraceptifs, surveillance, exérèse chirurgicale si doute
diagnostique
Photo : hyperplasie nodulaire focale (HNF) en échographie :
la lésion apparaît isoechogène au reste du foie avec une cicatrice centrale avec un signal artériel en
échodoppler.
(J.P. Zarski)
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Photo : hyperplasie nodulaire focale (HNF) en IRM :
La cicatrice centrale est en Hyper T2.
(J.P. Zarski)
Photo : hyperplasie nodulaire focale (HNF) en IRM :
La cicatrice centrale est hypoT1 après gadolinium au temps artériel.
(J.P. Zarski)
Photo : hyperplasie nodulaire focale (HNF) en IRM :
La cicatrice centrale se réhausse tardivement.
(J.P. Zarski)
2.2.3. Angiomes
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Échographie = zone hyperéchogène bien délimitée mais moins nette si de grand
volume
Scanner avec injection : hypodense, opacifications de la périphérie vers le centre
IRM = permet le diagnostic des angiomes atypiques
Photos : Angiome en IRM :
Angiome en IRM apparaissant en HyperT2 franc (image de gauche) et se rehausse en motte de la périphérie
vers le centre après injection de gadolinium en T1 (3 images de droite)
(J.P. Zarski)
2.2.4. Kystes
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•
Absence de symptôme
Anéchogène en échographie
3. Traitement
Il se discute en fonction de l'évaluation pré-thérapeutique ayant comporté le bilan d'extension
et l'appréciation du terrain (classification de Child Pugh et d'Okuda)
3.1. Le traitement médical
•
la chimiothérapie par voie générale ou le traitement hormonal sont très décevants
•
la chimiolipioembolisation. Le lipiodol injecté par voie artérielle hépatique se fixe
pour plus de 75 % au niveau du foie et persiste plusieurs semaines au niveau de la
tumeur. Il peut être associé à différentes substances cytotoxiques comme
l'Adriamycine. Couplée à l'embolisation cette technique permet de réduire le volume
tumoral chez plus de 50 % des patients. La chimiolipioembolisaion peut être
renouvelée tous les deux mois. Elle s'adresse aux patients n'ayant pas d'insuffisance
hépatocellulaire ni de thrombose portale. Elle nécessite une surveillance clinique et
biologique stricte. L'efficacité n'est pas prouvée. L’injection intra-artérielle de lipidiol
radioactif marqué à l’iode 131 (lipiosis) permet de traiter des tumeurs de taille
variable, éventuellement associées à une thrombose portale. Son efficacité est
équivalente à celle de la chimiolipioembolisation et sa morbidité plus faible. Elle peut
être répétée à plusieurs reprises, avec un intervalle de 2 à 3 mois.
•
l'injection intratumorale d'Ethanol répétée plusieurs fois au sein d'un CHC peut
permettre une destruction de la lésion, en particulier lorsque le CHC a une petite taille
inférieure à 5 cm, est visible en échographie, est accessible à la ponction et de
localisation non immédiatement sous-capsulaire. 5 à 10 cc sont injectés et répétés tous
les 2 à 4 jours (ou un gros volume en une fois).
•
le traitement par hyperthermie ou radiofréquence permet de détruire les tumeurs
de taille inférieure à 4 cm, soit par voie radiologique lorsqu’elles sont accessibles sous
échographie, soit par voie chirurgicale. La radiofréquence peut être répété.
•
dans l'avenir, il devrait être possible d'associer ces différentes techniques médicales.
3.2. Le traitement chirurgical
En cas de CHC sur cirrhose, seuls sont opérables les CHC de petite taille et d'extension intrahépatique limitée, non compliqués de thrombose portale, non métastasés et chez un patient
n'ayant pas d'insuffisance hépatocellulaire (Child Pugh A et Okuda I), ce qui représente
actuellement moins de 10 % des CHC. Les principaux facteurs influençant la survie sont le
stade de Pugh, la taille de la tumeur et son caractère encapsulé ou non. Le risque de récidive
est important (+ de 50 % à 3 ans).
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La transplantation hépatique : S’adresse en pratique aux malades ayant une tumeur unique
de taille inférieure à 5 cm soit moins ou égale à trois tumeurs de taille inférieure à 3cm. Les
malades ayant une insuffisance hépatique cellulaire peuvent être transplantées. Il est
important de considérer le délai entre la mise sur liste de transplantation et la pratique de
celle-ci. Dans l’intervalle, une chimioembolisation lipiodolée peut être réalisée.
La place de la transplantation hépatique dans le traitement des CHC reste à définir comptetenu du risque de récidive qui semble important à 3 ans. Les indications de la transplantation
semblent pratiquement les mêmes que celles de la résection.
Les CHC sur foie sain sont rares, permettant de réaliser une large hépatectomie ou une
transplantation.
3.3. Le traitement préventif
Prévention primaire : vaccination contre l'hépatite B des sujets à risque, de l'environnement
familial, identification chez les donneurs de sang des porteurs du VHC, lutte contre
l'alcoolisme et dépistage et traitement de l'hémochromatose génétique.
Prévention secondaire : dépistage précoce du CHC chez les patients porteurs d'une
hépatopathie chronique par le dosage systématique de l'alpha-foeto-protéine et pratique d'une
échographie hépatique tous les 6 mois.
Malgré l'ensemble de ces thérapeutiques et les mesures de prévention, le pronostic du CHC
reste redoutable avec survie rarement supérieure à 12 mois.
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