4. ICTÈRE NÉONATAL

Telechargé par Mohammed hakmi
ICTÈRE NÉONATAL
I- INTRODUCTION-DÉFINITION :
- Un nouveau-né ictérique est tout n-né présentant une coloration jaune des téguments et des muqueuses, quelque
soit l’âge de son apparition.
- On distingue l’ictère précoce, lorsqu’il apparaît avant 48h et l’ictère tardif lorsque la date d’apparition est au delà de
10 jours de vie. Il est dit prolongé s’il persiste au delà de 15 j pour le n-né à terme eutrophe et 21j pour le faible
poids de naissance.
- En effet, parmi les fonctions à maturation essentiellement postnatale avec un ajustement dans les premiers jours
de vie, figure le métabolisme de la bilirubine. Les nouveau-nés présentent très souvent une hyperbilirubinémie,
secondaire soit à une hyperproduction de bilirubine, soit en rapport avec un défaut d’élimination.
- Cette pathologie est fréquente puisqu’elle concerne 60 à 80% des nouveau-nés.
II- RAPPELS PHYSIOPATHOLOGIQUES :
1- Production de la bilirubine :
La bilirubine est le principal produit de dégradation de l'hème. La bilirubine est formée principalement dans la rate,
grâce à deux enzymes, l'hème oxygénase (microsomale) et la biliverdine réductase (cytosolique). La source
principale de la bilirubine est la destruction des hématies, dont la durée de vie est de 90 à 150 jours. En outre, 10 à
20 % de la bilirubine proviennent d'autres sources : en premier lieu, le catabolisme de l'hème hépatique
(principalement celui des cytochromes) ; en second lieu, la destruction dans la moelle des précurseurs des
hématies avant leur libération dans le sang périphérique (érythropoïèse inefficace). Un gramme d'hémoglobuline
donne lieu à la formation de 36,2 mg de bili rubine. La production quotidienne de bilirubine est de l'ordre de 250 à
350 mg par jour.
2- Captation par le foie :
La bilirubine ainsi formée est transportée dans le sang liée à l'albumine. Le pigment est ensuite capté par
l'hépatocyte après dissociation avec l'albumine. Dans les hépatocytes, la bilirubine est liée à des protéines
cytosoliques, principalement la ligandine, qui appartient à la famille des glutathion-transférases. Cette liaison rend
compte du stockage d'une certaine quantité de bilirubine dans l'hépatocyte. La bilirubine conjuguée est également
liée à ces protéines et dans une certaine mesure stockée dans l'hépatocyte. En outre, un transfert rapide de la
bilirubine (qui est fortement lipophile) dans les membranes intracellulaires a été mis en évidence.
3- Conjugaison hépatocytaire :
La bilirubine native (ou bilirubine non conjuguée) est
très peu soluble dans l'eau. La conjugaison est donc
une étape obligatoire pour que la bilirubine puisse être
excrétée dans la!bile. La conjugaison se fait
principalement avec l'acide glucuronique grâce à une
enzyme du reticulum endoplasmique, la bilurine-
glucuronyl transférase.
4- Excrétion dans la bile :
La plus grande partie de la bilirubine est excrétée dans
la bile sous forme conjuguée. Le transport de la
bilirubine de l'hépatocyte dans la bile à travers la
membrane canaliculaire se fait grâce à un
transporteur, souvent désigné sous le nom de cMOAT
(c pour canaliculaire, multiple organic anion
transporter).
III- FACTEURS DE RISQUE DE SURVENUE DUN ICTÈRE NÉONATAL :
Certaines situations périnatales entrainent un excès de bilirubine et doivent faire rechercher un ictère en vue d’un
dépistage précoce :
- Ecchymose (céphalohématome, bosse sérosanguine, .....) - Polyglobulie
- Asphyxie périnatale - ATCD familial de déficit en G6PD
- Age gestationnel entre 35 et 38 semaines - Infection
- Diabète maternel - ATCD d’ictère dans la fratrie
- Elimination retardée de méconium
- Difficulté d’alimentation
- Perte de poids >10% poids naissance
IV- DIAGNOSTIC POSITIF :
1- ANAMNÈSE :
- Groupage ABO Rh de la mère
- ATCD d’ictère grave dans la fratrie
- ATCD de transfusion chez la mère
- Résultats du prélèvement au sang du cordon
- Anamnèse infectieuse
- Âge postnatal en heure
- Date exacte de l’apparition de l’ictère
- Coloration des selles
- Mode d’alimentation
2- EXAMEN CLINIQUE :
Devant tout ictère la démarche clinique peut être résumée ainsi : Evaluation initiale à Purement clinique
OBSERVER ET PALPER :
- Rechercher un ictère à la lumière du jour sur le
visage, le tronc et les membres.
- Chez le n-né érythrosique et celui à peau
pigmentée appuyer sur la racine du nez pour
chasser le sang et voir la couleur de la peau au
dessous
SI ICTERE, DEMANDER :
- À quel âge l’ictère est-t-il
apparu ?
- Y a-t-il notion de facteurs de
risque ?
- Les selles sont-elles
décolorées ?
OBSERVER ET PALPER :
- Rechercher un ictère
palmo-plantaire.
d’infection bactérienne
L’ictère est d’évolution céphalo-caudale.
Tout ictère palmo-plantaire est un ictère grave nécessitant une prise en charge urgente.
3- BILAN :
Chez le n-
- Dosage de la bilirubine (totale, directe, indirecte)
- Groupage ABO Rh, et test de coombs direct
- Hémogramme
- Autres bilans : sont à demander en fonction du contexte
Chez la mère si non fait
Groupage ABO Rh avec test de coombs
indirect.
à Au terme de cette évaluation, trois situations :
- Ictère à bilirubine indirecte ou libre ou non conjuguée (taux de bilirubine indirecte > 50% de la bilirubine totale)
- Ictère à bilirubine mixte (taux de bilirubine indirecte = taux de la bilirubine directe)
- Ictère à bilirubine conjuguée ou directe (taux de bilirubine directe > 50% de la bilirubine totale)
V- ÉTIOLOGIES :
1- Ictères à bilirubine non conjuguée :
Par augmentation de
production
ou
ictère précoce < 48h
- Incompatibilité Rh (mère Rh - ,immunisée, bébé Rh +) , ABO (mère de Groupe O, bébé
A, B ou AB) , ou autre sous groupes. (voir les présentations ppt plus détaillées)
- Infections graves.
- Anomalie du GR : déficit en G6PD, thalassémie.....
- Céphalhématome.
Par diminution
d’élimination
ou
ictère retardé > 48h
- Difficulté d’alimentation. - Hypothyroïdie.
- Mucoviscidose. - Atrésie duodénale.
- Déficit de conjugaison : maladie de CRIGGLER NAJAR + maladie de GILBERT.
- Hématomes. - Infections.
- Ictère physiologique. - Ictère au lait de femme
L’ictère au lait de femme, est un diagnostic d’élimination.
Il ne nécessite jamais l’arrêt de l’AM.
Il est transitoire et disparaît spontanément.
2- Ictères à bilirubine conjuguée (cholestatiques) :
-!Ces types d’ictères sont plus rares : moins de 1% des ictères du nouveau-né. Néanmoins ils sont toujours
pathologiques et doivent faire l’objet d’une exploration urgente.
- Leur pronostic dépend de la précocité du diagnostic étiologique .
- La prise en charge est étiologique.
- Les étiologies sont multiples.
- L’urgence est d’éliminer une atrésie des voies biliaires.
- Selon les résultats de léchographie +/- TDM abdominale :
Imagerie normale : Hépatites infectieuses, Galactosémie, Autres maladies métaboliques
Dilatation des voies biliaires : Atrésie ou sténose des voies biliaires
N.B:!Une échographie hépatique normale ne suffit à elle seule pour éliminer une atrésie des VB suspectée
cliniquement.
VI- QUAND ET COMMENT TRANSFÉRER ?
- Au décours de l’évaluation clinique et anamnestique, le nouveau-né doit être classé.
- Cette classification permet de déterminer les nouveau-nés qui méritent juste une surveillance de ceux qui doivent
être transférés vers un niveau supérieur pour bilan et prise en charge.
à
Mise en condition avant le transfert et chaîne de communication :
- Le transfert devrait se faire de préférence dans les bras de la mère pour protéger l’allaitement maternel. C’est
aussi un moyen efficace pour lutter contre l’hypothermie et l’hypoglycémie.
- Tout transfert nécessite une régulation au préalable, seule garante d’une bonne coordination entre service qui
transfert et celui qui reçoit l’enfant.
- La chaîne de communication doit être respectée. Tous les renseignements doivent être notifiés sur la fiche de
transfert dûment remplie.
- Les parents seront informés sur la situation.
- Pour les nouveau-nés présentant un ictère prolongé, un transfert s’impose aussi vers un niveau où le bilan et
l’exploration peuvent être réalisés. Si l’urgence ne s’évalue pas à l’heure comme dans la situation de l’ictère
pathologique précoce, tardif et celui associé à une pathologie grave, il s’agit aussi d’une urgence d’exploration et de
prise en charge. La situation doit être expliquée aux parents et ne doit en aucun cas être banalisée.
CLASSIFICATION
TRAITEMENT
- Ictère précoce (dans les 2 premiers jours
de vie), OU
- Apparition tardive (au-delà du
10ème jour de vie), OU
- Ictère palmo-plantaire, OU
- Ictère associé à l’un des signes
d’infection grave, OU
- Présence d’antécédents d’ictère néonatal
dans la fratrie, OU
- Selles décolorées
ICTERE
PATHOLOGIQUE
- Prévenir l’hypoglycémie.
- Expliquer à la mère comment tenir au
chaud le nouveau- durant le trajet à
l’hôpital.
- Transfert d’urgence, avec respect des
règles de transfert, au service de
pédiatrie.
Ictère prolongé :
- Plus de 15 j n-à terme eutrophe
- Plus de 21 j , n-né prématuré
ICTERE
PATHOLOGIQUE
probable
Transfert avec respect des règles vers un
service où les bilans et les explorations
peuvent être réalisés
Absence de critères en faveur d’un
ictère pathologique.
ICTERE BENIN
PROBABLE
- Revoir après 2 jours.
- Expliquer à la mère comment prendre
soin du nourrisson à domicile.
Absence d’ictère.
PAS D’ICTERE
- Expliquer à la mère comment prendre
soin du nourrisson à domicile.
VII- COMPLICATIONS :
1- Ictère à bilirubine non conjuguée :
S’il n’est pas correctement pris en charge, peut générer des complications, la plus grave est l’encéphalopathie
bilirubinémique appelée aussi ictère nucléaire. Elle se manifeste cliniquement :
- En phase aigüe par :
des troubles majeurs du tonus (hypo puis hypertonie de l'axe corporel),
Des troubles de la conscience (léthargie, irritabilité),
des anomalies du cri
une faible succion.
- A long terme, en l’absence de traitement ou lorsque celui-ci intervient trop tardivement, des séquelles peuvent
apparaitre:
déficits auditifs centraux,
trouble du langage,
troubles de la coordination motrice avec paralysie cérébrale athétosique,
une dysplasie dentaire,
des troubles de l’oculomotricité (verticalité du regard),
une ataxie
Il existe des scores pour en évaluer la sévérité, dont le BIND (dysfonctionnement neurologique induit par la
bilirubine) score.
2- Ictère à bilirubine conjuguée :
- Si non pris en charge précocement, peut générer des complications dont la plus grave est lévolution vers la
cirrhose du foie.
VIII- PRISE EN CHARGE :
1- Traitement curatif des ictéres à bilirubine non conjuguée :
1-1- Mesures générales de prise en charge :
- Assurer une hydratation correcte et le maintien de l’alimentation régulière en favorisant l’allaitement maternel
- Eviter les médicaments qui ont une affinité pour l’albumine : C3G...
- Maintenir une neutralité thermique
- Lutter contre l’hypoxie, l’acidose et la douleur
1-2- Photothérapie :
Le traitement par photothérapie s’impose :
- Devant tout ictère grave d’allure non choléstatique dans l’attente des résultats des bilans .
- Devant des valeurs de bilirubine totale supérieure à la norme pour l’âge du n- selon les courbes d’indications
choisies. Il en existe de nombreuses mais les plus utilisées sont celles de l’AAP 2004.
1-3- L’exsanguino-transfusion :
L’exsanguino-transfusion (EST) est indiquée pour :
- Pour des taux de bilirubine dépassant de 75 à 100 μmoles/l les indications de photothérapie intensive pour l’âge.
- Les hyperbilirubinémies sévères ne répondant pas aux autres thérapeutiques ou Associées à des signes
neurologiques.
N.B: 1mg/dl de bilirubine = 17,1 μmol/l
1-4- Autres moyens thérapeutiques :
L’albumine
- Ce traitement consiste à perfuser de l’albumine
humaine afin d’augmenter la quantité d’albumine
circulante et donc les possibilités de fixation de la
bilirubine libre toxique pour le système nerveux central.
- Son indication est posée lorsque le n-né est
particulièrement vulnérable ( faible poids de naissance ,
hypoalbuminémie documentée...)
- Les doses administrées sont de l’ordre de 1 à 2g/kg/j
L’injection d’immunoglobulines intraveineuse
- L’injection d’immunoglobulines G (IgG) est préconisée
dans les ictères hémolytiques par incompatibilité
foetomaternelle( Rhésus D et système AB0)
- Cette administration d'IgG IV réduirait le nombre du
n-né ayant besoin d’exsanguino- transfusions, ainsi que
la durée du traitement par photothérapie.
- Posologie 0.5 à 1g/kg renouvelable une à deux fois
- Ce produit étant cher, son utilisation devrait être
limitée
2- Traitement curatif des ictères à bilirubine conjuguée (cholestatiques) :
2-1- Mesures génerales :
- Apport de vitamine K1 par voie injectable
- Assurer une hydratation correcte et le maintien de l’alimentation régulière en favorisant l’allaitement maternel sauf
le cas d’une galactosémie congénitale
- Eviter les médicaments qui ont une affinité pour l’albumine : C3G...
- Maintenir une neutralité thermique
- Lutter contre l’hypoxie, l’acidose et la douleur
2-2- Traitement adapté à létiologie :
- Atrésie des voies biliaire : chirurgie
- Pathologie infectieuse ou métabolique : traitement adapté
3- Traitement préventif :
3-1- Avant laccouchement :
- En début de grossesse, à la première consultation prénatale , en l’absence d’un bilan prénuptial, groupage ABO et
Rh du couple.
- Suivi correcte des femmes Rh lors des consultations prénatales.
3-2- Au moment de l’accouchement :
- Réaliser un groupage ABO Rh, chez toute femme non groupée
- Si Femme connue Rh et n’ a pas fait de recherches d’agglutinines irrégulières ( RAI) , la réaliser avant
l’accouchement
- Chez toute femme Rh - , faire un prélèvement au sang du cordon pour un groupage ABO Rh, Coombs direct, NFS,
et dosage de bilirubine.
- Administrer, chez toute femme non immunisée (RAI -), accouchant d’un n-né Rh+, la prophylaxie anti-D, de
préférence adaptée à l’importance de l’hémorragie fœto-maternelle, donc après test de klehauer, dans les 72h
après l’accouchement.
3-3- Après laccouchement :
- Promotion d’un allaitement de bonne qualité
- Respect dans les suites de couche et dans toute unité néonatale des « protocoles ictères » et des indications de
transfert urgent selon la classification de l’ictère.
- L’estimation visuelle de l’ictère est source d’erreur surtout sur les peaux foncées, en cas d’érythrose, d’anémie et
de cyanose
- Interprétation des taux de bilirubine en fonction de l’âge post-natal en heures
- Les enfants nés avant 38 SA en particulier en cas d’allaitement maternel sont à haut risque d’ictère sévère
- Mise en place d’une évaluation rationnelle du risque d’hyperbilirubinémie sévère avant la sortie des structures
d’accouchement
- Organisation d’un suivi adapté en fonction de l’âge de sortie de la structure d’accouchement et de l’évaluation du
risque d’ictère sévère
- Délivrance d’une information orale et écrite (sur le carnet de santé) aux parents
- Instauration d’un traitement adapté de l’ictère dès l’indication posée.
N.B :Tout le personnel des structures d’accouchements et des structures de soins de santé de base doit être
sensibilisé au dépistage précoce de l’ictère et aux recommandations de suivi.
IX- PLACE DES BILIRUBINOMÈTRES TRANSCUTANÉS :
- Apparu dans les années 1980, le bilirubinomètre transcutané ou BTC est un outil de dépistage non invasif de
l’ictère néonatal. Il ne constitue pas un substitut au prélèvement sanguin mais permet de les réduire.
- Seuls le JM103 et le bilicheck sont reconnus par le « Food and Drugs Administration» aux Etats-Unis.
- Il n’existe aucun consensus quant à l’utilisation du BTC entre les équipes médicales.
- Les erreurs d’estimation du taux de bilirubine transcutanée surviennent ainsi principalement lorsque le BTC est
utilisé:
Sur des enfants de peau foncée où l’intensité de l’ictère est fréquemment surestimée par le BTC.
En contrôle après un traitement par photothérapie (corrélation bilirubine sanguine/évaluation transcutanée
est perturbée pendant 12 à 24h par les interactions entre la lumière et la bilirubine présente dans la peau).
- Le BTC est une option importante pour : le dépistage des ictères et le suivi des patients ictériques sous traitement.
- Il ne peut en aucun cas remplacer le prélèvement sanguin.
X- CONCLUSION :
- L’ictère néonatal: pathologie fréquente
- Dans notre contexte :
suivi des grossesses !
durée de séjour en maternité appropriée!
identifier les nouveau-nés à risque avant la sortie de la maternité
bilirubinomètre transcutané en materni
protocoles de décision thérapeutique adaptés à notre contexte
- Consultation systématique par un pédiatre avant sortie de la maternité
- Considérer cette pathologie et raisonner au cas par cas
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