C31 ECN Mononucléose infectieuse (ITEM 334) Définition La mononucléose infectieuse correspond aux évènements cliniques et biologiques reliés à la primo-infection chez l’homme par le virus EBV. Il s’accompagne toujours d’un syndrome mononucléosique. Le virus responsable : le virus d’Epstein-Barr (EBV) L’infection est transmise par voie salivaire. Le virus EBV a un fort tropisme pour les cellules épithéliales et le tissu lymphoïde de la sphère oro-pharyngée (amygdales). Le récepteur membranaire de l’EBV sur les lymphocytes B est la molécule CD21. La primoinfection par le virus EBV est contactée dans la deuxième enfance ou à l’adolescence. Peu d’adultes sont séro-négatifs après 20 ans. L’incubation est de 30-50 jours. La cellule réactionnelle : le lymphocyte T activé Pr. C BERTHOU 2005 2 L’infection des lymphocytes B par l’EBV engendre une réponse cytotoxique des lymphocytes T contre les lymphocytes B infectées. Ce processus est à l’origine d’une transformation immunoblastique des lymphocytes T qui s’exprime dans les tissus lymphoïdes périphériques (hyperplasie lymphoïde diffuse ganglionnaire) et syndrome mononucléosique sanguin. Le syndrome mononucléosique est défini par la présence dans le sang de cellules lymphoïdes transformées semblables à celles observées in vitro par la transformation des lymphocytes sous l’effet d’un mitogène : selon le stade, ces cellules lymphoïdes activées ont une taille augmentée, un noyau rond ou excentré, une chromatine mottée, un ou plusieurs nucléoles visibles. La basophilie du cytoplasme est intense et présente un net renforcement périphérique. Certaines cellules ont un aspect proche de plasmocytes murs. Il existe un franc polymorphisme cellulaire sur un frottis bleu. Le contexte diagnostique Il s’agit d’un adolescent ou d’un adulte jeune. Du lymphocyte T activé au symptôme révélateur Il existe des signes pharyngés associés à un tableau infectieux, une polyadénopathie superficielle et une splénomégalie. A Syndrome pharyngé Dans les cas symptomatiques, les signes pharyngés dominent (pharyngite exsudative souvent d’aspect pseudomembraneux : angine à fausse membranes on diphtérique). Il peut exister un œdème de la luette, quelques pétéchies du voile du palais en l’absence de toute thrombopénie. Pr. C BERTHOU 2005 Mononucléose infectieuse Adénopathie cervicale chez un patient de 19 ans présentant une angine et fièvre. 3 Pr. C BERTHOU 2005 4 Mononucléose infectieuse : du symptôme révélateur au diagnostic positif Symptômes révélateurs Syndrome pharyngé Angine à fausses menbranes Polyadénopathie (cervicale++) Fièvre Démarche diagnostique Eliminer un streptocoque A Hémogramme Hémogramme Asthénie Diagnostic positif ¡ Hémogramme y Syndrome mononucléosique ¡ ¡ ¡ MNI test Paul –Bunnel-Davidson Diagnostic de gravité Sérologie EBV y Présence d’anticoprs anti-VCA y Absence d’anticoprs anti-EBNA Obstruction pharyngée ¡ Cytopénie immunologique ¡ Hépatite cytolytique ¡ Pr. C BERTHOU B 2005 5 Fièvre Des signes généraux sont possibles : fièvre, sueurs, céphalées, toux non productive, myalgies, éruption cutanée morbilliforme, surtout si il existe une prise d’amoxicilline, réaction méningée, pleuropneumopathie. C Polyadénopathie Il existe une polyadénopathie superficielle, surtout cervicale (les creux sus-claviculaires sont libres) associée à une splénomégalie. D Asthénie Les formes asymptomatiques sont les plus fréquentes, marquée seulement par une asthénie. Le diagnostic positif de mononucléose infectieuse Il repose sur : - l’analyse de l’hémogramme ; - la réalisation d’un MNI-test. A Hémogramme Les premiers jours, il existe une formule à prédominance lymphocytaire (parfois sans hyperlymphocytose absolue ou sans neutropénie vraie). Une semaine après le début, il existe une hyperlymphocytose progressive et modérée entre 5 et 15 Giga/l. y Le diagnostic d’un syndrome mononucléosique repose sur l’existence : - d’une hyperlymphocytose > 4 Giga/l ; - constituée de lymphocytes polymorphes dont de grands lymphocytes hyperbasophiles (Figure 1).. Il peut exister des cellules moins typiques pouvant évoquer des lymphoblastes, mais le polymorphisme de la réaction mononucléosique s’oppose au monomorphisme de la réaction leucémique. Pr. C BERTHOU 2005 6 L’hémogramme est par ailleurs normal ou il peut exister une anémie ou une thrombopénie immunologique. La correction de l’hémogramme est observée en 1 mois. Figure 1. Lymphocytes hyperbasophiles dans une mononucléose infectieuse. Noter le polymorphisme cellulaire et l’intense basophilie cytoplasmique avec le renforcement périphérique. Lymphocytes hyperbasophiles du syndrome mononucléosique Pr. C BERTHOU 2005 B Les réactions sérologiques a Le test d’agglutination rapide sur lame : le MNI test 7 Le test consiste à mettre en présence du sérum du malade des hématies de cheval formolées. L’agglutination se produit en une minute dans la mononucléose infectieuse du fait de l’existence d’anticorps hétérophiles. Ce test, si il est positif, suffit au diagnostic chez le sujet immunocompétent. En cas de négativité, il doit être complété par le test de Paul-Bunnell-Davidson et la recherche d’anticorps anti-EBV. b Le test de Paul-Bunnell-Davidson (PBD) Le PBD recherche la présence d’anticorps hétérophiles anti-globules rouges de mouton présents dans la MNI. c Le test spécifique sérologique à la recherche d’anticorps anti-EBV Les anticorps anti-EBV les plus précoces sont dirigés contre les antigènes capsidiques du virus VCA (« viral capside antigen »). Ces anticorps sont de type IgM puis IgG. Les anticorps dirigés contre contre les antigènes nucléaires EBNA (« Epstein-Barr nuclear antigen ») sont plus tardifs et n’apparaissent que quelques semaines plus tard. Une mononucléose en cours ou récente est certaine s’il existe des anticorps anti-VCA en l’absence d’anticorps anti-EBNA. Le diagnostic différentiel de la mononucléose infectieuse A Le diagnostic du syndrome mononucléosique Il faut éliminer une LAL. Une LAL se caractérise par le monomorphisme des cellules blastiques circulantes et la présence habituelle d’un syndrome d’insuffisance médullaire : présence de cytopénie(s). L’examen de la moelle osseuse mettrait en évidence une lymphoblastose médullaire > 20%. Pr. C BERTHOU 2005 8 Figure 2. Leucémie aiguë lymphoblastique Noter le monomorphisme des lymphoblastes B Le diagnostic étiologique du syndrome mononucléosique a La primo-infection par le cytomégalovirus Dans la grande majorité des cas, c’est le diagnostic retenu en cas de syndrome mononucléosique à MNI test négatif. Sa prévalence atteint en moyenne 60% des individus des pays développés et près de 100% des pays en voie de développement. y Les rapports sexuels et la transfusion sont les principaux modes de contamination. Le virus infecte les leucocytes (monocytes-macrophages), les neutrophiles, les lymphocytes et les fibroblastes. La réaction mononucléosique sanguine est liée à la transformation de lymphocytes T contre les cellules infectées. Pr. C BERTHOU 2005 9 Démarche du diagnostic étiologique d’un syndrome mononucléosique Eruption cutanée MNI (ampicilline) allergie Angine MNI Primo-infection VIH Syndrome mononucléosique Adénopathies Fièvre isolée CMV Ictère Hépatite MNI Toxoplasmose Primo-infection à VIH Rubéole y Les signes pharyngés et ganglionnaires sont absents ou très discrets. Il existe une cytoloyse hépatique, une diarhhée par colopathie. Des manifestationsneurologiques peuvent survenir (syndrome de Guillain-Barré). y Les réactions sérologiques recherche des anticorps de type IgM anti-CMV (mutiplication x 4 à 15 jours d’intervalle). La mise en évidence des antigènes viraux dans les leucocytes sanguins est positive (antigénémie pk65 du CMV ou virémie CMV). Dans tous les cas, IgM ou antigènes viraux peuvent être la traduction d’une réactivation virale à l’occasion d’une immunodépression. y La primo-infection par le CMV est bénigne chez le sujet immunocompétent et ne requiert pas de traitement spécifique. Elle peut être grave et doit être traitée (ganciclovir ou foscavir) chez l’immunodéficient. Pr. C BERTHOU 2005 10 Syndrome mononucléosique : diagnostic étiologique Î Mononucléose infectieuse Î Autres causes virales Infection à CMV Primo infection par le VIH Autres étiologies virales : Rubéole, rougeole, oreillons, HSV, VZV, hépatites (notamment A), parvovirus B19. Î Etiologies infectieuses bactériennes et parasitaires Brucellose, rickettsioses, typhoïde Syphilis secondaire (associé à éruption morbilliforme non prurigineuse) Toxoplasmose Paludisme Î Etiologies non infectieuses Allergies médicamenteuses Maladies auto-immunes b Autres causes de syndromes mononucléosiques Il peut s’agir : - d’une primo-infection à Toxoplasma gondii très généralement asymptomatique ou se résumant à une réaction ganglionnaire cervicale postérieure parfois fébricule et asthénie. Pr. C BERTHOU - 2005 11 Une primo-infection VIH où il s’agit plutôt d’une réaction « mononucléosique-like » s’accompagnant d’une discrète ascension des lymphocytes T-CD8 (< 1,5 Giga/l) et une décroissance des lymphocytes T-CD4. - La rubéole souvent plutôt responsable d’une discrète plasmocytose sanguine et médullaire. - Les causes diverses : hépatites virales, maladie sérique, infections brucelliennes, infection à Rickettsia sennetsu au Japon, la dengue en Polynésie, la syphilis secondaire. Le diagnostic de gravité de la mononucléose infectieuse L’évolution est le plus souvent bénigne (asthénie résiduelle longue). Il peut survenir une cytopénie auto-immune (AHAI ou thrombopénie aiguë), une hépatite cytolytique, une péricardite, une pleuropneumopathie, une méningoencéphalite exceptionnelle chez l’immunocompétent. Chez l’immunoincompétent, l’infection peut entraîner un syndrome immunoprolifératif tantôt aiguë (syndrome de Purtillo) tantôt chronique faisant le lit du lymphome non hodgkinien de l’immunodéprimé. Le traitement de la mnonucléose infectieuse y Il se limite le plus souvent à un traitement symptomatique (antipyrétiques, antalgiques). y Une brève corticothérapie est justifiée dans les complications immunologiques (autoimmunes) de la maladie.